Personne n’aime quitter son chez soi pour des terres inconnues. L’émigration s’impose lorsqu’on veut contribuer à un meilleur avenir pour sa famille, sa communauté ou pour son pays. C’est le cas des étudiants à la recherche d’une meilleure formation en occident, ou des travailleurs qui profitent de la globalisation (mobilité du facteur capital). Cette contribution prend plusieurs formes : intellectuelle (les initiatives comme Terrangaweb) ou financière. Cette note se focalise sur la deuxième forme de contribution, qui est l’essence même de la solidarité entre la diaspora et leur pays d’origine. Selon la Banque Africaine de Développement, l’Afrique est la partie du monde qui bénéficie le plus de ces flux financiers. En 2012, on estime à 60 Mds USD le montant total des transferts effectués par la diaspora vers le continent. Ce montant devrait atteindre 64 Mds USD en 2013/2014. Des fonds assez importants dont on peut bien se demander l’utilité. Une chose est certaine ; c’est que ces fonds rentrent sur le continent et donc participent d’une façon ou d’une autre au bien-être de leurs destinataires.
Les transferts de fonds comme second flux de capitaux étrangers en Afrique
Les transferts sont des transactions portant sur des sommes d’argent généralement comprise entre 50 et 1 000 euros. Ils sont de l’épargne des migrants, des salaires envoyés directement par les employeurs et des transferts sociaux versés directement aux migrants ou à leur famille dans leur pays d’accueil (pensions, retraites, allocations familiales, frais de maladie, etc.)[1]. L’Afrique est l’une des régions du monde qui bénéficient de plus en plus de ces flux financiers[2]. Actuellement, les envois de fonds représentent environ plus du tiers du total des flux financiers vers l’Afrique (voir figure).
Selon les données de la Banque Mondiale, les transferts de fonds vers l’Afrique représentent en moyenne sur les 5 dernières années plus de 3 % du PIB de plusieurs Etats africains. Cette proportion va jusqu’à 30% pour le Cap Vert, qui est un pays qui présente la particularité d’avoir plus de ressortissants dans la diaspora que sur son territoire national. Les transferts des migrants constituent le deuxième flux de capitaux étrangers vers l’Afrique après l’investissement direct étranger (IDE) et devant l’aide publique au développement (APD). Selon une l’étude (1) de Flore Gubert, les transferts de fonds vers l’Afrique ont été plus importants que l’aide publique au développement depuis le début des années 1990. Ces fonds présentent au moins l’avantage d’être plus stables que les autres flux de capitaux d’origine privée. En effet, malgré la crise de 2008/2009, la BAD estime que le montant des transferts est resté stable jusqu’en 2011 et devrait amorcer une hausse à partir de 2013.
Toutefois, ces données ne prennent pas en compte les transferts effectués de manière informelle vers l’Afrique, qui tendent à devenir de plus en plus importants. Ces importantes sommes d’argent acheminées par des canaux informels ne sont pas comptabilisables. Des réseaux bien plus flexibles et moins onéreux que les institutions classiques offrent ce genre de services et concurrencent sérieusement les sociétés de transferts de fonds. Au Sénégal par exemple, le système consiste à faire passer de l’argent par l’intermédiaire d’une entreprise d’import-export présent sur le territoire. Le migrant dépose le montant auprès d’un représentant dans son pays d’accueil moyennant une indemnisation moins importante qu’en cas de recourt à un agence spécialisée de transferts de fonds. Le correspondant de ce dernier résident au Sénégal remettra tout simplement le montant équivalent à la famille du migrant sur place. Tout se passe comme si l’on remettait un cadeau à une connaissance, qui une fois de retour, fera la commission à la famille. Tout ceci étant, l’aide « privée » africaine pourrait être en fait le premier flux de capitaux étrangers à destinations de l’Afrique, déduction faite des fonds issus de la cybercriminalité et qui emprunte les mêmes canaux.
Ces transferts créent une activité, tout au moins dans le secteur financier : bon nombre de services sont créés pour les transferts d’argent (W@ri par exemple) même si la concurrence se fait rude. Au-delà ; l’impact des transferts sur le bien-être des ménages devrait être positif car ils augmentent ou procurent un revenu aux familles ou aux communautés. L’investissement faisant appel à l’épargne, ces fonds devraient donc vraisemblablement contribuer à une amélioration de l’activité. Est-ce effectivement le cas ? Nous y reviendront dans l’acte 2 de cette note.
Foly Ananou.