La Cour Pénale internationale (CPI) a suscité beaucoup d’espoir parmi les défenseurs des Droits humains[1]. Nécessaire pour certaines voix car nous n’avons pas trouvé mieux pour juger les auteurs de certains crimes à caractère international face à l’impunité de certains Etats. Détestée, illégitime pour d’autres, car elle est impartiale et viole la Souveraineté des Etats.
Qu’on l’aime ou qu’on la déteste, la CPI est une réalité politique, juridique au niveau national et international. Mise en place par le Traité de Rome du 17 juillet 1998 et entrée en vigueur le 1er juillet 2002, à ce jour 120 Etats ont ratifié le Traité de Rome. Nous pouvons regretter que parmi les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, la Chine, la Russie, les Etats-Unis d’Amérique ne soient pas signataires du Traité.[2]
Sa compétence conformément à l’article 5 du Traité est limitée aux crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale. En vertu du présent Statut, la Cour a compétence à l'égard des crimes suivants :
– Le crime de génocide ;
– Les crimes contre l'humanité ;
– Les crimes de guerre ;
– Le crime d'agression.
Sa seconde mission était de remplacer les juridictions internationales spéciales créées suite aux crimes commis dans les années 90 au Rwanda et dans l’ex Yougoslavie.
C’est dans le cadre de cette internationalisation de la justice pénale que Mme Fatou Bensouda a commencé sa première expérience de procureur spécialisé dans les crimes prohibés par la Convention de Genève du 12 août 1949. Occupant les postes de conseiller juridique et de substitut du Procureur au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha (Tanzanie), elle a été promue au rang de conseillère juridique principale et de chef du Groupe des avis juridiques.
Gambienne, elle est titulaire d’une maîtrise en droit maritime international et en droit de la Mer. Devenant la première experte dans son pays en droit maritime international, elle s’est orientée vers le droit pénal international.
Après sa mission au TPIR, le 8 septembre 2004 l’Assemblée des États parties l’a élue au poste de procureur adjoint de la CPI. A ce titre, elle supervise la Division des poursuites du Bureau du Procureur Luis Moreno-Ocampo qui a pris ses fonctions le 16 juin 2003. Non rééligible conformément à l’article 42 alinéa 4 du Traité de Rome du 17 juillet 1998, son successeur sera son adjointe, Mme Bensouda, élue par consensus[3] le 12 décembre 2011 à la dixième session de l'Assemblée des États Parties à New York. Elle devrait entrer en fonction en juin 2012.
Malgré les nombreuses critiques à son égard, le Procureur argentin de la CPI a contribué tout de même à faire sortir de l’ombre cette juridiction internationale qui était peu connue du grand public. Comme toute médiatisation, cela suscite des débats animés autour de la légitimité de cette juridiction et des personnes qui la composent.
Espérons que Fatou Bensouda, la probable future Procureure de la CPI, parvienne à faire oublier qu’elle n’est pas la représentante d’un pays, d’un continent, ou d’une sphère d’influence mais d’une justice pénale internationale garante de la protection des droits fondamentaux de tous les humains. Aussi que sa compétence sera réellement universelle et impartiale[4] qui sont les clés de voute d’une justice inspirant confiance des citoyens en retrouvant sa mission première qui est de trancher un différend dans la raison et non dans la passion humaine, porte ouverte à tous les excès.
Joanes Louis
[1] Expression plus conforme à l’idée d’égalité entre les femmes et les hommes.
[2] Il est surprenant d’entendre de la part de certaines autorités américaines une demande de saisine de la CPI pour certains actes qualifiés de crimes contre l’humanité à l’égard de certains chefs d’Etat, alors que cet Etat ne reconnaît pas cette juridiction dans son ordre interne…
[3] Le Procureur est désigné selon une procédure complexe. Les Statuts privilégient le Consensus, c’est en cas d’échec que celui-ci est élu par les Etats parties. En ce qui concerne Mme Bensouda, ce consensus a été construit autour de 60 Etats. Donc nous ne pouvons pas dire que c’est la candidate d’un continent. Par contre un consensus s’est dégagé par les Etats parties au Traité pour que le futur Procureur soit issu du continent africain.
[4] Le Bureau du Procureur mène en ce moment des enquêtes à propos de quatre situations : Nord de l’Ouganda (l’affaire Le Procureur c/Joseph Kony, Vincent Otti, Okot Odhiambo et Dominic Ongwen) ; République démocratique du Congo (les trois affaires Le Procureur c/Thomas Lubanga Dyilo ; Le Procureur c/Bosco Ntaganda ; et Le Procureur c/Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui); Darfour, Soudan (les trois affaires Le Procureur c/Ahmad Muhammad Harun "Ahmad Harun" et Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman "Ali Kushayb"; Le Procureur c/ Omar Hassan Ahmad Al Bashir; et Le Procureur c/ Bahr Idriss Abu Garda); République centrafricaine (l'affaire Le Procurer c/Jean-Pierre Bemba Gombo), le Kenya et Libye.
Le Bureau du Procureur effectue actuellement examen préliminaire dans un certain nombre de pays dont l’Afghanistan, la Géorgie, la Guinée , la Côte d’Ivoire, Palestine, la Colombie, le Honduras, la Corée et le Nigeria.
Nous pouvons constater qu’une partie des actions en justice sont menées contre des Etats à Souveraineté limitée.
Leave a comment
Your e-mail address will not be published. Required fields are marked with *