2014 ne débute pas sous les meilleurs auspices pour l’Afrique. Pour ne reprendre que les titres qui font l’actualité : début de guerre civile au Sud-Soudan ; guerre civile en République Centrafricaine ; tentative de coup d’Etat en RDC ; situation institutionnelle bloquée en Tunisie ; situation politique délétère en Egypte… Et il faudrait encore citer des réalités moins visibles mais non moins réelles, comme le climat de défiance entre les citoyens et leurs représentants politiques dans nombre de pays africains, au premier rang desquels le géant Sud-africain ; la proportion quasi industrielle et systématique des détournements de biens publics dans certains pays, comme l’a illustré en fin d’année 2013 le scandale au Malawi ayant occasionné la révocation du gouvernement ; un marché de l’emploi qui reste encore trop faible et trop fermé face aux arrivées toujours plus nombreuses de jeunes diplômés.
Mais le plus pernicieux des maux qui guettent l’Afrique est peut-être le manque de créativité et d’innovation. La créativité et l’innovation ne peuvent être l’apanage de l’art et de la fiction ; ils doivent aussi être le ciment de l’action dans notre réalité, sociale, économique et politique. Il y a tellement de choses qui pourraient marcher mieux que l’on ne peut pas se permettre de subir le présent et de l’accepter tel quel ; il faut non seulement inventer des alternatives à ce qui se fait et se pense aujourd’hui, mais se donner les moyens de mobiliser les ressources pour donner vie à ces alternatives.
Les membres de ma génération, qui ont aujourd’hui entre 20 et 40 ans, regardent en spectateur plus ou moins concernés l’éventail des problèmes qui se succèdent sur le continent. Nous avons peu prise sur le temps court de l’Afrique, celui des grands évènements qui feront l’actualité de 2014. Mais nous sommes les premiers acteurs du temps moyen de l’Afrique, celui qui définira les décennies à venir d’ici au milieu du siècle, en 2050. A ce titre, nous pouvons faire de 2014 une année charnière où seront posés des jalons qui un jour feront date.
C’est une résolution que nous nous appliquons à nous-mêmes à Terangaweb – l’Afrique des idées. Notre principal objectif sera, pour l’année 2014, de rendre enfin opérationnel le think-tank que nous imaginons depuis plusieurs années et que nous pensons nécessaire au débat public et à la vie de société dans nos pays africains. Pour rappel, lorsque nous avions créé le site terangaweb.com il y a quatre ans, nous voulions créer un espace gratuit de dialogue, d’échanges d’idées et d’analyses rigoureuses sur l’Afrique, parce que nous considérions que cela manquait sur le web, la plupart des sites étant surtout orientés actualité.
Nous identifions un même manque dans l’offre actuelle de laboratoire d’idées. Le terme think-tank, ou laboratoire d’idées, désigne une structure indépendante à but non lucratif regroupant des experts produisant des études et des propositions dans le domaine des politiques publiques, afin d’enrichir le débat public et influencer la prise de décision.
L’espace Afrique subsaharienne francophone se caractérise par un faible nombre de laboratoire d’idées, alors même que le besoin d’expertise manque considérablement à l’animation du débat public et à l’orientation des politiques publiques. Les deux principaux think-tank de l’espace Afrique subsaharienne francophone sont le CODESRIA (basé à Dakar) et le CEDRES au Burkina Faso. Il s’agit de laboratoires d’idées en sciences sociales, très académiques, qui s’inscrivent dans un mode de fonctionnement de l’ancienne génération de laboratoires d’idées, qui vise plus un public expert et académique que le grand public via la diffusion dans les médias et auprès des décideurs de notes d’analyses.
Tout en continuant à améliorer notre site internet terangaweb.com, nous comptons mobiliser notre temps et notre énergie en 2014 pour réaliser l’ambition d’un think-tank, L’Afrique des idées, qui répondrait à ce besoin d’un acteur indépendant créateur, innovant et rigoureux, qui propose des solutions et se mobilise pour leur mise en œuvre, sur des sujets comme l’emploi des jeunes, la protection sociale, la rénovation des fonctions publiques africaines, la préservation et la valorisation durable de l’environnement et du patrimoine écologique, l’inclusivité de la croissance et la réduction des inégalités sociales, la politique monétaire des zones franc CFA, entre autres sujets importants…
Telle est donc la bonne résolution collective de l’association l’Afrique des idées. Meilleurs vœux de réussite à tous pour 2014 !
Emmanuel Leroueil
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