L’Open Innovation: une nouvelle voie entrepreneuriale en Afrique ?

Le concept d’open innovation date de plus de 10 ans. Il a été vulgarisé par Henry Chesbrough dans son ouvrage fondateur paru en 2003 “Open Innovation”. Mais la mayonnaise a mis du temps à prendre et à traverser l’Atlantique: les premiers à s’être lancés sont les sociétés de logiciels qui avaient une forte culture de plateforme (Sun, Oracle, Microsoft, Google, Apple, Facebook, mais aussi Intel et IBM).

C'est un mode d'innovation fondé sur le partage, la coopération entre entreprises, à la fois compatible avec une économie de marché (via les brevets et licences), ou d'Intelligence économique, mais cette approche permet aussi des démarches fondées sur des alternatives éthiques ou solidaires (économie solidaire) de partage libre des savoirs et savoir-faire modernes ou traditionnels, avec notamment l'utilisation de licences libres dans un esprit dit ODOSOS (qui signifie : Open Data, Open Source, Open Standards).

L'augmentation de la disponibilité et la mobilité des ressources humaines hautement qualifiées dans des endroits différents est l'un des avantages de l'adoption d'un processus de recherche et développement (R & D) sur la base de l'innovation ouverte. Il est aussi le chemin le plus rapide et le plus efficace de trouver le bon modèle d'affaires pour les produits et services de l'entreprise.

Elle peut concerner tous les domaines de la recherche et du développement. De la perspective d'une entreprise pratiquant l'Open Innovation on peut distinguer deux modalités : la modalité outside-in (ou inbound) et la modalité inside-out (ou outbound). Lorsqu'elle pratique l'Open Innovation outside-in, une entreprise cherche à trouver des connaissances, méthodes ou technologies à l'extérieur de l'entreprise pour enrichir ses propres processus d'innovation. Lorsqu'elle pratique l'Open Innovation inside-out, elle cherche à mieux valoriser sa propriété intellectuelle à l'extérieur, la plupart du temps sous forme de licences.

C’est dans cette optique que de nombreuses initiatives favorisent déjà l'Open Innovation dans l'Hexagone occidentale et américaine, mettant en relation les compétences et les idées entre grandes entreprises, laboratoires de R&D, PME et start-up. Les principales start-ups évoluant dans ce domaine sont IdexlabClub Open Innovation , Challenges, Innovation Partagee, Openinnovation-Engie. Ces initiatives, aujourd’hui constituent une banque de données inestimable pour les entreprises conscientes des bénéfices de l’open innovation. Certaines entreprises éveillées développement leur propre start-up d’open innovation en collaboration avec d’autres start-ups de domaine d’activités très diverses. 

Dans un environnement globalisé, compétitif et évoluant à une grande vitesse, « réinventer » l’innovation constitue un levier de performance et un gage de pérennité pour l’Afrique. Inspirés des réussites d’initiatives entrepreneuriales dans le domaine d’open innovation, des projets dans ce sens commencent à jaillir en Afrique. Nous en avons distingué principalement deux à savoir le projet de :

Convaincu qu’une démarche collaborative bénéficiera aux clients, Orange pratique une démarche d’innovation ouverte (« l’open innovation »). Il s‘agit de permettre l’émergence rapide de solutions inédites, pour obtenir des innovations toujours plus simples et intuitives, centrées sur les usages des clients. 
Comment l’open innovation s’incarne-t-elle pour Orange ? Elle se concrétise par le soutien apporté à de nombreux projets issus d’horizons différents. 
L’accélérateur de startups Orange Fab, créé il y a deux ans aux États-Unis est aujourd’hui présent en Côte d’Ivoire. En l’intégrant, les  jeunes entrepreneurs bénéficient de soutien dans les domaines du marketing, de l’élaboration d’un business modèle, du design et de la technologie. Dans certains cas, les start-upers disposent aussi d’espaces de travail partagé ou même d’un soutien financier.

C’est la première Start-Up évoluant dans le domaine de l’open innovation en Afrique. Conscients des enjeux et de l’importance de l’innovation dans les entreprises africaines,  A.O.I est un projet  piloté par 9 jeunes africains venant du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, de l’Algérie et du Cameroun. C’est un projet dont la vision est de faire de l’innovation une ressource capitale pour la croissance des entreprises africaines. Il consiste  en la mise en place d’une plate-forme virtuelle ; lieu de rencontre des entreprises et des experts dans l’objectif de résoudre des problématiques dans tous les domaines d’activités d’une entreprises. La Start-up démarrera ses activités au premier trimestre 2016

L'open innovation, c’est l’humilité de reconnaître qu’on n’est plus capable en interne de produire toute l’innovation nécessaire au développement de l’entreprise. Un nouveau champ d’opportunités entrepreneuriales s’ouvre aujourd’hui en Afrique. Il devrait conduire les entreprises africaines à nouer des partenariats en amont de leurs processus d’innovation. A entrer dans des modèles de collaboration et d’intégration bénéfiques. A considérer aussi la perspective d’une empreinte internationale et globale toujours plus tôt dans leurs efforts de développement et de commercialisation.

Innover toujours PLUS, toujours PLUS vite, voilà le vrai challenge que doivent vivre au quotidien les entreprises africaines.

Mactar SY

TIC et agriculture: l’innovation au service du secteur primaire

Les innovations liées au TIC sont de plus en plus nombreuses et ne cessent d’accroitre l’économie du continent. Aujourd’hui, c’est le secteur de l’agriculture qui semble avoir trouvé son moteur à travers les nouvelles technologies. Des applications mobiles aux plate-formes de vente en ligne, les entrepreneurs africains font preuve de créativité pour allier les TIC et le secteur primaire. On parle, alors « des technologies de l’information et de la communication, au service de l’agriculture » soit l’ICT4Ag.

Une opportunité pour le secteur primaire

Selon une étude de Mc Kinsey, en 2025, un demi-milliard de la population africaine aura accès à Internet et il y aura 360 millions de smartphones sur le continent. Les TIC pourront ainsi accroitre la productivité agricole du continent de trois milliards par an. Les TIC se révèlent être les outils dont le secteur avait besoin. En effet, le secteur agricole représente la première source de revenus, d’emplois et voire même de subsistance pour 64 % de la population africaine. 

Or, il reste l’un des secteurs qui peine à atteindre ses objectifs de rendement. Les infrastructures, le capital, l’évolution technique des outils rendent les agriculteurs moins compétitifs que les acteurs internationaux. Ces derniers avec lesquels ils se retrouvent en concurrence directe sur les marchés locaux. À cela s’ajoute donc le manque de visibilité et de mise en valeur des produits. À l’instar du mobile-banking, qui révolutionne le secteur bancaire, l’équation TIC et Agriculture semble être une solution pour remédier à la stagnation du secteur primaire.

Les Agro-preneurs l’ont bien compris.

De la place de marché à l’application mobile, les agro-preneurs sont plus nombreux à l’Est. Au Kenya, on retrouve de nombreuses applications mobiles orientées vers l’éducation des agriculteurs. Elles tentent ainsi, d’améliorer le rendement de ces derniers. Par exemple, iCow l’application mobile qui permet de suivre chaque vache individuellement et permettre aux agriculteurs de maintenir toutes les informations pertinentes spécifiques à chaque vache. Ou encore Esoko, sa consoeur qui propose un logiciel permettant aux agriculteurs locaux de trouver les informations nécessaires pour améliorer leurs productivités.

À l’ouest l’e-commerce à le vent en poupe.

Avec au Sénégal, la plate-forme Soreetul spécialisée dans la vente en ligne de produits locaux à travers le Sénégal, vient d’être lancé par Awa Caba. Sa volonté : « valoriser et donner une plus grande visibilité aux femmes transformatrices ». Ou encore, Mlouma qui permet aux agriculteurs d’obtenir les informations nécessaires sur le marché pour leurs décisions d’achat ou de vente. Au Nigéria, c’est la plate-forme Agro-Merchant qui permet la vente en ligne de produits agricoles pour les particuliers et les professionnels.

Les entrepreneurs sont de plus en plus nombreux et les organismes l’ont bien compris. On voit apparaître des initiatives telles que les Hakhatons « AgriHack Talent » organisé par ARDYIS, pour accroître l’innovation et renforcer l’entrepreneuriat de jeunes dans le secteur agricole à travers les TIC. Les TIC semble donc aujourd’hui indispensable pour soutenir le développement du secteur primaire.

Moussou DIAKITE

Sources:

http://www.mckinsey.com/insights/high_tech_telecoms_internet/lions_go_digital_the_internets_transformative_potential_in_africa

https://icow.co.ke

https://www.dropbox.com/s/ya0k4zg342g1ntd/Forbes%20Afrique_Esoko%20only.pdf

http://www.mlouma.com/index/quisommesnous

http://agromerchant.com

http://hackathon.ict4ag.org/the-future-google-of-agricultural-land-information/

http://www.inter-reseaux.org/IMG/pdf/GDS58_Valorisation_des_produits_locaux.pdf

http://ardyis.cta.int

http://www.commodafrica.com/02-11-2015-bamboo-finance-et-louis-dreyfus-sunissent-pour-financer-la-chaine-de-valeur-agricole-en

Quelle place pour l’entrepreneuriat à l’université ?

L’entrepreneuriat est l’un des moteurs de l’économie. Son incidence sur l’innovation, l’investissement ainsi que l’insertion professionnelle des jeunes et la création d’emplois n’est plus un secret en Occident. Au Sénégal, avec une population de jeunes en pleine croissance et un taux de chômage important, l’entrepreneuriat offre de nouvelles perspectives.  Quelle est la place de l’entrepreneuriat à l’université ? C’est ce que je vous propose de découvrir à travers mon expérience de « toubab »[1] au Sénégal.

Les défis de l'université publique Sénégalaise

Selon le Plan de Développement de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche au Sénégal[2], le nombre de nouveaux bacheliers devraient devrait doubler entre 2012 et 2017. Pour répondre à cette demande croissante d’inscriptions, réduire les inégalités d’accès et sensibiliser les jeunes aux nouvelles technologies, le gouvernement a créé il y a deux ans  la première université numérique et publique du Sénégal, l’Université Virtuelle du Sénégal. Bien que la mise en place des cours en ligne et le suivi soient encore à revoir selon certains étudiants, cette initiative s’inscrit dans une dynamique de changement numérique prônée par la ville de Dakar[3].  

Aux difficultés internes du système s’ajoutent un problème d’orientation des étudiants. C’est le cas de Youssou, 22 ans et étudiant en philosophie à l’UCAD. Il va certainement devenir professeur de philosophie mais il explique pourtant que le bricolage est sa véritable passion et que « tous ses copains le trouvent doué pour ça ». Il pourrait certainement développer ses prédispositions manuelles et se professionnaliser. Mais jamais, dans son environnement éducatif et universitaire, il n’a été informé du Fab Lab[4] de Dakar,  Ker Thiossane, ou de l’existence d’autres initiatives en dehors de son cursus.

L’offre de formation proposée à l’université est concentrée autour des  sciences humaines et sociales et des lettres au détriment des formations scientifiques[5]. Les programmes ne proposent pas de cursus croisés entre départements et restent inadaptés aux besoins économiques du pays. Ainsi, l’inefficacité du l’enseignement supérieur se répercute à travers un chômage massif des diplômés (31% en 2011 contre 16% en 2005[6]).

Comment faire de la place à l’entrepreneuriat dans l’université

Au Sénégal, certaines écoles privées telle que l’Institut Africain de Management (IAM) encouragent l’entrepreneuriat à travers la création d’un incubateur et du SenseCampus lancé en partenariat avec MakeSense pour 2016. L’objectif de ce programme est de favoriser l’innovation et la création de projets d’entreprises sociales[7] en s’attaquant à des problèmes sociaux non résolus par l'Etat ou le secteur privé. A l’inverse de cette institution privée, aujourd’hui aucune université publique ne propose une formation diplômante en entrepreneuriat au Sénégal.

Ces formations seraient pourtant nécessaires à la population. L’esprit de débrouillardise des Sénégalais est bien connu mais peu d’initiatives deviennent de véritables entreprises. Par exemple, en zone rurale beaucoup de femmes cultivent et transforment manuellement des céréales et font pourtant face à l’insuffisance alimentaire. Rares sont celles qui sont capables de faire passer leur activité à l’échelle supérieure, par manque d'outils et de compétences adaptés. Pour combattre la malnutrition et aider ces femmes à développer une culture d’entreprises, l’entreprise sociale Sen Women Up les accompagne à travers une activité de transformation de fonio[8] à Kédougou. Il s’avère nécessaire de changer profondément les mentalités d’où l’importance de la sensibilisation des étudiants à l’université. Certaines actions peuvent facilement être initiées telles que la visite d’entrepreneurs, la diffusion des réussites…

Ainsi dès janvier 2016, un réseau de Fab labs[9] va être créé au sein de trois écoles d’ingénieurs au Sénégal. Ces laboratoires d’ingéniosité seront mis à la disposition de tous (étudiants, artisans, designer, groupes/startups etc) pour démocratiser l’accès aux outils innovants et débrider la créativité de la population. La BICIS (filiale du groupe BNP) propose de sensibiliser les Dakarois à ce mouvement de « makers[10] » et d’entrepreneurs sociaux avec l’exposition Wave (du 7 au 15 novembre 2015 à l’IFAN).  Afin de diffuser ces courants et initiatives auprès des néophytes, l’université doit devenir un véritable relai de communication.

Pour passer à l’action, l’analyse des besoins, le prototypage et la gestion des ressources sont des éléments très importants à connaitre. C’est pourquoi, à défaut de les apprendre dans l’enseignement supérieur, des entités privées organisent des workshops. L’entreprise Baobab Entrepreneurship a créé l’incubateur virtuel CONCREE et propose chaque mois deux jours de formation au modèle de création « lean startup ». Des outils sont transmis aux entrepreneurs pour tester leur idée avant sa mise en place. MakeSense[11] organise également de nombreux ateliers de brainstorming gratuits pour résoudre les problématiques rencontrées par les entrepreneurs sociaux. Afin de démocratiser l’accès à ces outils, l’université pourrait s’impliquer en proposant, par exemple, des cours de comptabilité et d’Excel ciblant les problématiques financières des startups.

En conclusion…

Au Sénégal, les TPE opèrent parfois dans des conditions de forte précarité (Abdoul Alpha Dia, 2011). Quant aux grandes entreprises, essentiellement des filiales de groupes étrangers, elles ne peuvent répondre seules aux attentes grandissantes du marché du travail.

Universités et entrepreneurs sénégalais peuvent jouer un rôle de premier plan en matière de développement et de croissance économique. Des mesures comme la mise en place du PSE-J[12] permettant une formation professionnalisante destinée aux jeunes diplômés porteurs de projets ou encore l’allègement des procédures lors de création d’entreprises[13] donnent l’impulsion. Des initiatives, qui si elles se concrétisent et se multiplient, permettront de faire de Dakar une métropole de l’entrepreneuriat. A nous de jouer !

 

Sophie ANDRE

Références

Dia Abdoul Alpha, « L'Université sénégalaise face à la problématique de l'entrepreneuriat », Revue de l'Entrepreneuriat, 2011/1 Vol. 10, p. 9-32.


[1] Toubab : mot wolof signifiant “européen”

 

[2] Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche du Sénégal, 2013, PDESR 2013 – 2017, Sénégal.

 

[3] Dakar nommée ville créative par l’UNESCO. Ville de Dakar (2015), La Ville de Dakar vient d’être désignée membre du Réseau des villes créatives de l’UNESCO dans la catégorie des arts numériques [Online], Disponible : http://bit.ly/1OTxKc3 [21 oct 2015].

 

[4] Fab lab : contraction pour « fabrication laboratory » en anglais, signifiant laboratoire de fabrication

 

[5] 80% des programmes selon le PSE. République du Sénégal, 2014, Plan Sénégal Emergent (PSE), Sénégal.

 

[6] République du Sénégal (2014) Diagnostic sur l'emploi des jeunes au Sénégal, Sénégal

 

[7] L’entrepreneuriat social consiste à créer une activité économique viable pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux (santé, logement, environnement, chômage de longue durée, etc.) – Mouves, Qu’est-ce que l’entrepreneuriat social [Online], Disponible : http://bit.ly/YMVBUH

 

[8] Fonio : céréale d’Afrique de l’Ouest pauvre en gluten

 

[9] Fab lab : contraction pour « fabrication laboratory » en anglais, signifiant laboratoire de fabrication

 

[10] Un « maker » utilise la technologie de manière innovante pour créer des objets.

 

[11] Rejoignez la communauté MakeSense de l’Afrique de l’Ouest sur Facebook : http://on.fb.me/1hV5SHq.

 

[12] Programme Sénégalais pour l’Entreprenariat des Jeunes (PSE-J) http://bit.ly/1LG5gyb

 

[13] Le Sénégal fait un grand bond en avant dans le classement en  passant de la 133ème place en 2014 au 90ème rang en 2015. Groupe de la Banque Mondiale (2015), Doing Business [Online], Disponible : http://bit.ly/1GqwPym

 

 

 

 

VALLESSE, une success-story ivoirienne

Le Fonds Afrique Développement (FADEV | www.fadev.fr), un fonds d’investissement solidaire à destination des PME africaines, compte diffuser des portraits de chefs d’entreprise africains avec lesquels il collabore. Valoriser et faire connaître leur réussite est autant un signe de fierté qu’un message d’encouragement à tous les futurs entrepreneurs du continent ! Aujourd’hui, nous retraçons le parcours de la maison d’édition ivoirienne VALLESSE, que le FADEV et son partenaire technique en Côte d’Ivoire, le CCDE, soutiennent et accompagnent depuis 2014.

 

Valesse

 

 

 

 

 

 

L’histoire de VALLESSE est encore intimement liée au parcours de sa dirigeante, Madame Diomandé. Entrée en 1999 au CEDA (Centre d’Édition et de Diffusion Africaine), première maison d’édition en Côte d’Ivoire, elle passe successivement au service éditorial, au service commercial et distribution (dont communication) puis à la Direction Générale en tant qu’Assistante du Directeur Général Adjoint, chargée de la fabrication jusqu’en février 2005.

Licenciée pour motif économique en février 2005, Madame Diomandé poursuit son aventure dans l’édition en devenant assistante de direction à l’imprimerie Nour pendant 9 mois, avant de ressentir profondément le besoin d’une maison d’édition produisant des ouvrages de meilleure qualité, tant dans le fond que dans la forme.

Ce sentiment s’accompagne d'une vocation pour l’entrepreneuriat qui se concrétisa en 2006 par la création de la société VALLESSE Sarl dont l’objet est l’Edition d’ouvrages de qualité, avec un goût prononcé pour la littérature éducative. En parallèle et afin de compenser les fluctuations de commandes inhérentes au métier d’éditeur, VALLESSE proposait initialement l’Impression et la Prestations de services divers, activités abandonnées avec l’essor des commandes d’édition.

L’aventure a d’abord débuté avec un premier associé détenant 30% du capital. Madame Diomandé  recrute d’anciens membres expérimentés du Centre d’Édition et de Diffusion Africaine (secrétaire d’édition et personnel administratif) pour former son équipe. Ensemble l’équipe s’est mise à la recherche de manuscrits qui, une fois édités pouvaient être soumis à agrément du Ministère de l’Education pour être utilisés comme ouvrages de littérature scolaire conseillés, assurant une commande large des instituts d’enseignements nationaux.

Dans le but de déceler de nouveau talents et de contribuer à la promotion de la lecture et à l’écriture VALLESSE lance dès janvier 2007 un concours littéraire dénommé «  les Manuscrits d’OR » récompensé par l’édition en un ouvrage collectif des manuscrits primés. Soutenu par Côte d’Ivoire Telecom, le concours a pu être organisé 3 années durant avant que les subventions ne cessent.Valesse 2

En 2007, le Chiffre d’Affaires atteint ainsi  101 347 932 FCFA. Et c’est en 2008, avec le premier ouvrage agréé par le Ministère de l’Education Nationale, que l’Edition connait une véritable percée. En parallèle, la cessation d’activité de son distributeur attitré Distrilibre, conduit VALLESSE à la décision d’internaliser cette fonction. L’équipe est alors renforcée par un délégué pédagogique (pour l’adoption effective des ouvrages dans les classes) et une assistante commerciale (qui s’occupe des librairies et de la facturation).

2009 marque un tournant dans la stratégie et dimension de VALLESSE. De nouveaux titres de littérature générale rejoignent les collections dont certains ont été réalisé à compte d’auteurs ou compte à demie. 3 titres figurent désormais au programme des lycées et collège (ouvrages conseillés) et un au programme Parascolaire (réalisé en formant une équipe de pédagogue). Au fur et à mesure l’activité du volet impression et prestations de services décroît pour que l’équipe se consacre entièrement à l’édition.

Les statuts sont ensuite modifiés en trois points :

– Augmentation de capital qui passe de 1 000 000 de FCFA à 3 000 000 FCFA,

– Rachat des parts de l’associé historique qui souhaitait désormais s’orienter vers d’autres projets d’investissements,

– Changement de l’objet social qui est désormais « éditions, distribution, diffusion et représentation ».

Aujourd’hui, VALLESSE figure parmi les éditeurs de référence en Côte d’Ivoire. La Maison d’Edition possède l’expertise et la maitrise de toute la chaîne d’activité. Elle continue de se perfectionner à travers différents séminaires et rencontres professionnelles et de croître grâce à l’apport de mécanismes financiers tels que le Fonds Afrique Développement, entré au capital en 2014, qui apporte un appui technique et financier pour développer les activités (financement de nouvelles collections, participation à des événements internationaux…).

Les résultats et nouveaux défis suivent :

– Lancement de la collection YENIAN

– Attribution de nouveaux manuels scolaires  par le Ministère de l’Education Nationale (le premier manuel « Education Musicale 6ème » a été édité pour la rentrée scolaire 2015-2016)

– Sortie du livre "le charme rompu", 1er titre de la collection « Nouvelle »

– Agrément de deux (02) nouveaux titres pour la rentrée scolaire 2015-2016 (L’Héritier de Mboula pour la classe de 4ème et Yavan et la montre merveilleuse pour  la classe de CM2)

– Nomination de Madame Diomandé Fidèle au poste de trésorière d’AFRILIVRES, association d'éditeurs africains francophones

 

Martin FLEURY
 

Vous souhaitez en savoir encore plus ?

Page facebook : https://www.facebook.com/pages/Vallesse-Editions/548867148501839

Profil sur la plateforme FADEV : http://www.fadev.fr/projet/1-vallesse-edition-jeunesse-litterature-africaine

Ouvrages disponibles sur Afrilivres : http://www.afrilivres.net/fiche_editeur.php?e=10101

1ére édition de l’Africa Code Week dans 17 pays africains

Membre de l’équipe Simplon et responsable communication de la première édition de l’Africa Code Week qui aura lieu dans 17 pays africains du 1er au 10 octobre 2015, Lucie Jagu nous éclaire sur les raisons d’une telle initiative.
 

A.S. : Quels sont les objectifs de l'Africa Code Week?

L.J. : Les organisateurs et partenaires sont partis du constat qu’au cours des vingt prochaines années, il y aura des millions d’emplois disponibles dans l’économie numérique. Parallèlement, sur le continent africain, des millions de jeunes entrent chaque année sur le marché du travail: l'économie digitale peut être pour eux un véritable potentiel d'insertion sociale et professionnelle. Il se trouve, enfin, que tous les partenaires de l’événement sont concernés par les questions d’éducation et d’innovation sociale.

L’objectif de l’Africa Code Week c’est, d’une part, de sensibiliser les pouvoirs publics et les publics à tous les enjeux du numérique et de la littératie digitale, d’autre part, de mettre en valeur les écosystèmes numériques africains déjà très engagés et actifs sur ces questions-là. Simplon a déjà des relations avec les écosystèmes africains à travers ses partenaires, la diaspora, les startups africaines, et c’est pour cela que nous souhaitions promouvoir les activités des acteurs locaux. D’un point de vue stratégique, sur le long terme, nous souhaitons construire des initiatives et des partenariats solides pour pérenniser l’initiative en impliquant les institutions publiques, les acteurs économiques et les organismes panafricains et internationaux.

Concrètement sur le terrain nous souhaitons développer trois axes :

– La formation de  futurs formateurs (train the trainer)
– L’organisation d’ateliers d'initiation au code qui auront lieu en octobre pour les enfants/jeunes de 8 à 24 ans
– La mise en place de cours online et offline, en français et en anglais. Ce dernier volet est géré par openSAP.


A.S. : Les organisateurs de l'événement sont tous Européens. Cela vous semble-t-il cohérent?

L.J. : Je dirais qu’effectivement les organisateurs sont pour la plupart occidentaux, les acteurs clés étant : le groupe SAP, le Galway Education Centre qui est irlandais et Simplon qui est français. Cependant, un autre partenaire très important est le Cape Town Science Centre basé en Afrique du Sud.  Nous comptons également sur le soutien de la Fondation Roi Baudouin de nationalité belge mais qui officie en Afrique. Enfin les bus Ampion apporteront leur contribution.

Ce que nous tentons c’est d’impulser une dynamique mais nous veillons à ce qu’elle se fasse toujours avec les acteurs locaux. C’est pour cette raison que nous avons aujourd’hui une cinquantaine d’ambassadeurs locaux pour les 17 pays. Ces relais sont très actifs  et ce sont eux, dans les faits, qui portent l'Africa Code Week. Leurs retours d'expérience et leurs  connaissances des communautés est primordial. Sans eux, l’initiative n’existerait pas.

Au-delà des ambassadeurs, nous avons des partenaires stratégiques tels que les ministères (Ministère de l’Education au Maroc, Ministère des Postes et de l’Economie Numérique au Togo, Ministère des Postes et des TIC en Côte d’Ivoire), des acteurs privés dans les télécommunications (ATOS au Maroc, Alink Telecom au Bénin et en Côte d’Ivoire). Nous venons par ailleurs de conclure un partenariat avec Google et nous travaillons à la concrétisation d’autres partenariats stratégiques pour les prochaines éditions.


A.S. : L'initiative est soutenue par le gouvernement français. De quelle manière cette coopération se concrétise-t-elle?
L.J. 
: Il y a plusieurs éléments. Nous avons la chance de bénéficier du patronage de Madame Girardin, Secrétaire d’Etat au Développement et à la Francophonie, ainsi que de celui d’Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique.

Dans le cadre de ces deux soutiens, il est très important de noter qu’ils s’inscrivent dans la continuité des actions mises en place par le gouvernement français : le plan ‘Sud(s) et numérique(s)’ et ‘La France s’engage au Sud’.

Dans la même démarche que nous, ces ministères veulent encourager l’initiative. Concrètement, ils vont relayer l'information et mobiliser les réseaux de la coopération française pour l’opération.


A.S. : Les opérationnels de l'événement (comme vous-même) sont les responsables de la communication. Peut-on considérer cet événement comme une simple opération de communication?

L.J. : La démarche de Simplon est la suivante : on part du principe qu’il s’agit d’une première édition de l’Africa Code Week organisée en 8 mois seulement pour insuffler une dynamique. Nous avons besoin de grands groupes comme SAP pour communiquer massivement et mobiliser les réseaux afin de soutenir les ambassadeurs sur place.

Au-delà de la communication, c’est une opération de visibilité, une vitrine qui doit permettre aux acteurs de l’écosystème numérique africain d’être reconnus à grande échelle. Ce n’est que le début d’un mouvement de fond. Pour les prochaines années, nous espérons approfondir tous les partenariats. Cette première étape est un réel appel aux soutiens et aux partenaires potentiels.

Propos recueillis par Awa SACKO
Ambassadrice de l’Africa Code Week Sénégal
Directrice Générale d’AGRINAFRICA Sarl

Les secrets d’une réussite dans les TIC en Afrique 

ImageLe 11 septembre dernier était organisé à la Gaité Lyrique (Paris) l’AfriqueITNews forum sur le thème « Les secrets d’une réussite dans les TIC en Afrique ». 

Cet évènement, qui a réuni une centaine de professionnels, a permis d’échanger sur les expériences entrepreneuriales et les opportunités offertes à la diaspora africaine en plein cœur de la révolution numérique que nous connaissons. 

Dans cette nouvelle économie, les TIC donnent l'opportunité, avec des ressources limitées, d’avoir des solutions scalables et d'obtenir également, via des méthodes de management de type « lean », des retours  utilisateurs  permettant ainsi d'améliorer le produit. 

Mais qui peut bien nous accompagner dans la formalisation de notre projet ? 

En Afrique francophone, les incubateurs tels que le CTIC Dakar ou le CIPMEN à Niamey sont nés d’un partenariat public/privé et ont pour but d’accompagner les porteurs de projet à développer leur business. Cela se traduit principalement par du mentoring, de la formation et une mise en relation avec des partenaires  (investisseurs, juristes, développeurs). 

En ce qui concerne le modèle économique, une bonne partie est liée à des subventions de partenaires privés. Les autres rentrées financières correspondent à du consulting et à un pourcentage sur le chiffre d’affaire entre l’entrée et la sortie des entreprises incubées. 

On voit également se développer de nouveaux modèles telles que la plateforme collaborative en ligne CONCREE développée par Baobab Entrepreneurship ou Ampion qui permettent, au travers d’un voyage en bus de 5 jours, de s’imprégner des problèmes rencontrés sur le continent et monter sa startup aussitôt ! 

En fonction de la localisation géographique, le business model de ces incubateurs version Africaine est en constante réadaptation avec une nouvelle mouvance associant numérique et culture.  

De plus, pour tout nouveau projet, il y a un impact indéniable du numérique. C’est pourquoi on voit se développer de nouvelles initiatives sur le continent Africain dont le but est d’apprendre les bases de programmation (Dev academie, Objis, Tech Republic Africa, Africa code week). L’un des buts intrinsèques étant de démystifier les concepts du coding.  

Quel modèle d’investissement est le plus adapté aux startups ? 

Au démarrage, le financement sur fonds propres ou toutes autres ressources externes (crowfunding, prix, subventions) sont les meilleures options. 

Pour les PME/TPE qui ont des besoins inférieurs à 300 K € et ayant dépassées le stade de proof-of-concept, il existe un gap de financement des banques africaines en raison d’un risque trop important. Afin de combler ce gap, des fonds de capital-risque tel que TERANGA CAPITAL ont été mis en place. Ces venture capitalist (VC) accompagnent les startups en rentrant dans leur capital, s’indexent à leur performance et par conséquent partagent le leadership.  

Ces VC étant très sélectifs sur les dossiers, la transparence des projections financières réalistes et la connaissance du marché sont les clés pour les convaincre. 

Comment se prémunir des risques juridiques ? 

L’impact du numérique force les pays africains francophones à innover en termes de droit des affaires. OHADA regroupant 17 états membres a donc été mis en place afin d’harmoniser le système juridique et judiciaire. En parallèle avec cela, des associations tels que l’African Business Lawyers' Club ou le cabinet d’avocats VAUGHAN peuvent servir de relais pour formaliser la structure juridique de votre entreprise. 

Entreprendre en Afrique depuis l’Europe 

Pour la diaspora africaine la meilleure solution est l’innovation frugale. Etant donné l’impossibilité d’être constamment en Afrique, les solutions à mettre en œuvre doivent tirer maximum avantage du numérique. 

Cela peut se faire de plusieurs manières : en proposant une banque d’images sur l’Afrique (Yeelenpix), en créant un label (L'Afrique c'est chic) ou encore via des solutions de e-commerce à partir d’Europe pour l’Afrique (Ouicarry, PassCourses, LAfricaMobile). 

Mis à part les contraintes personnelles, être en Europe offre une proximité par rapport aux partenaires et à la clientèle visés. Il est ainsi plus facile de nouer une confiance avec un cadre juridique clairement défini. 

Entreprendre en Afrique depuis l’Afrique 

Pour les entrepreneurs proposant des services à forte composante digitale (By Filling, Kouaba), le retour en Afrique est plus aisé. En général, il est plus simple de débuter par du B2B du simple fait de la facturation et de l’adresse physique. 

Toutefois réussir son projet entrepreneurial nécessite beaucoup de sacrifices. Il faut donc savoir gérer le risque, responsabiliser, fidéliser ses équipes et adopter un style de management favorisant l’esprit d’équipe pour la défense d’une cause commune. 

L’imprégnation de la culture africaine doit être le fer lance pour garantir la réussite de votre projet. Alors n’attendez plus et lancez vous ! 

 

Omar SIDIKOU 

 

Pourquoi n’avons-nous pas (encore) une Silicon Valley Africaine ?

La Silicon Valley n’a plus le monopole de l’entrepreneuriat. C’est en tout cas ce que révèle l’émergence de nouveaux pôles de plus en plus attractifs pour les startups comme New York, Boston, Singapour, mais aussi Sao Paulo ou Bangalore (d’ailleurs surnommée la « Silicon Valley Indienne). Ces villes figurent désormais en bonne place dans les classements internationaux de référence, et progressent chaque année.  

Aucune ville ou région africaine ne peut aujourd’hui raisonnablement revendiquer une telle place sur le podium et mettre en avant un écosystème d’envergure mondiale, malgré les déclinaisons souvent symboliques de plans et concepts « importés », dont la réalisation est imparfaite ou incomplète. Dans quelles conditions peut-on voir émerger des startups nées en Afrique et mondialement compétitives, qui pourront tirer des écosystèmes pour intégrer et progresser dans les classements les plus sélectifs? 

L’enjeu est de taille. Avec la transition des économies vers les services et la place prise par « l’économie du savoir » dans les prochaines décennies, les pays qui auront les meilleurs écosystèmes entrepreneuriaux auront de bonnes chances d’être les plus prospères du monde, constituant ainsi des moteurs de croissance et de création d’emploi.  

Les startups les plus brillantes de ces dernières décennies, celles en tout cas qui ont connus un développement mondial et ont révolutionné nos usages (Google, Facebook, Amazon…) jouent désormais dans la cours des (très) grands, avec des chiffres d’affaires et une capitalisation boursière ayant progressé de façon exponentielle et détrônant des conglomérats mondiaux bien établies.  

Cette « révolution économique » a de bonnes chances de perdurer et de s’accentuer : il est ainsi très probable que l’économie mondiale de 2030 soit dominée par des entreprises dont nous ne connaissons pas encore le nom ou qui n’ont même pas encore été créées. La nouveauté est que ces startups promises à un destin mondial ne sortiront plus uniquement de la Silicon Valley, mais de plus en plus de nouveaux écosystèmes en pleine émergence. Aujourd'hui d'Inde et du Brésil, demain de pays Africains.  

L’environnement type des startups au XXIème siècle : plus d’espace, moins de temps… 

Une startup est généralement le résultat d’une combinaison de plusieurs facteurs complémentaires : un capital (de plus en plus limité), des cofondateurs talentueux, une technologie innovante (et pas forcément numérique…), baignant dans un environnement porteur.  

L’environnement des affaires évolue, et les recettes du passé ne fonctionnent plus pour ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas s’adapter. Au XXème siècle, le principal défi des entreprises était de se développer sur un espace géographique de plus en plus vaste, en étendant la gamme de services sans nuire à la qualité ou à la visibilité de la marque.  

Le XXIème est résolument diffèrent. Le défi n’est plus tellement de maitriser l’espace, mais plutôt le temps (qui semble de plus en plus accéléré). La distance d’accès au client a diminué, de nombreuses barrières ont sauté : le contact entre une offre et une demande de service peut désormais être quasi-instantané peu importe la distance géographique, vu le degré de connexion permis par les nouvelles technologies.   

Si les consommateurs sont de plus en plus accessibles, le cout d’accès au marché pour les entrepreneurs diminue de façon spectaculaire. Mais cet avantage a aussi une conséquence majeure : la compétition est beaucoup plus rude et peut provenir des acteurs les plus inattendus.  

Une concurrence de plus en plus intense 

Les secteurs ayant connu d'importantes transformations à traves le digital ne sont plus à présenter: médias, éducation, santé, loisirs, transport, commerce de détail… Certains startups ont entièrement bouleversé des secteurs d'activité et créés de nouvelles possibilités, à l'instar d'Airbnb ou d'Uber. L'innovation n'est donc plus le domaine réservé des grands groupes et des Etats, mais provient de nouveaux acteurs plus jeunes, plus ambitieux, et qui cherchent délibérément à remettre en cause le statu quo en permanence. 

Durant des décennies, la plupart des entreprises ont bénéficiés de rentes plus ou moins importantes et plus ou moins durables. Elles évoluaient dans un environnement cloisonné, avec un faible niveau de compétition réelle, une asymétrie d'information par rapport aux clients, et une consommation constamment en hausse.  

L'arrivée de nouvelles tendances et de nouveaux acteurs ont brisés ces protections et ont révélé l'obsolescence des pratique établis. Des organisations leaders dans leur secteur pendant des décennies et en situation de quasi-monopole ont en fait les frais, à l'instar de Kodak dans la photographie. 

Création plus simple, mais survie plus rude  

Il est aujourd'hui beaucoup plus aisé de lancer une entreprise (au delà des difficultés administratives qui persistent…). Grace aux technologies disponibles (parfois en libre accés), aux services offerts par le cloud, à l'exposition assurée par les réseaux sociaux ou aux compétences mobilisables par des free lance, il est possible de lancer son affaire rapidement et avec peu de moyens (notamment en s'appuyant sur le crowdfunding). Et beaucoup de personnes l'ont fait, ce qui augmente constamment la concurrence à travers de nouveaux entrants qui peuvent accéder aux mêmes marchés… 

Les flux d'information sont plus fluides, ce qui permet des ajustements en temps réels et une personnalisation des produits. Les moteurs de recherche et les comparateurs de prix permettent de se rapprocher d'une totale transparence sur l'information qui intéresse le client, et de maintenir une tension permanente sur les prix. 

Il n'y a donc aucune raison qui empêche structurellement l'émergence en Afrique d'écosystèmes compétitifs à l'échelle mondiale sur le modèle de la Silicon Valley, d'autant plus que l'innovation y progresse parfois plus vite qu'ailleurs. Si nous ne devions d'ailleurs retenir qu'un seul principe qui a fait le succès des startups de la Silicon Valley, ca serait qu'il faut être prêt à évoluer et à adapter son activité en permanence afin de ne pas être dépassé par d'autres. L'innovation n'évolue pas en progression linéaire, mais avance par tâtonnement à des rythmes variables, et souvent par des chemins inattendus..

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Nacim KAID SLIMANE 

Les compétitions pour faire décoller votre projet entrepreneurial

En Afrique de l’Ouest, entreprendre de manière ambitieuse n’est pas toujours aisé.  L’écosystème permettant aux entrepreneurs de mettre en place leurs projets dans de bonnes conditions n’est pas toujours bien structuré et les porteurs de projet peuvent se sentir seuls et désœuvrés. Et pourtant, il existe bon nombre d’organisations dont la mission est de soutenir les entrepreneurs et favoriser la mise en place de leurs projets. Comment identifient-ils les entrepreneurs ? Grâce à des compétitions ou des appels à projets. Voilà pourquoi ces concours sont bel et bien des opportunités pour les entrepreneurs que vous êtes !

L’exercice peut sembler long et fastidieux : certains concours demandent un lourd travail. Formulaires à remplir, vidéos à faire, business plan à rédiger, lettres de motivation à écrire… Les exigences sont diverses et peuvent être chronophages. Et pourtant, elles représentent un réel intérêt pour les entrepreneurs. Dans le pire des cas, elles les obligent seulement à structurer et formaliser leurs idées. Dans le meilleur des cas, elles leur donnent accès à un large réseau de partenaires et à des financements. Elles sont également l’occasion de rencontrer une myriade d’entrepreneurs auxquels confronter ses idées, ses ambitions et ses difficultés. Un entrepreneur qui souffrait de solitude se retrouve désormais entouré d’une quantité impressionnante d’acteurs !

Pour connaitre ces compétitions, il faut être bien connecté à l’actualité entrepreneuriale de votre pays, mais également au-delà de vos frontières. Pour cela, rejoignez les réseaux de professionnels : les chambres de commerce, les incubateurs, les couveuses d’entreprises… Toutes ces organisations existent pour diffuser ce genre d’informations et vous faciliter l’accès à ces opportunités.

Qu’en pensent les entrepreneurs ? Retrouvons 4 entrepreneurs, accompagnés par La Fabrique à Ouagadougou.

 

Gérard NIYONDIKO – FASO SOAP – GIST Global Innovation Through Science & Technology

Gérard 2Quelles ont été les différentes étapes ?

Pour participer dans cette compétition il a fallu d'abord soumettre un « executive summary »  du projet en remplissant un formulaire en ligne.

Puis les projets ont été sélectionnés pour la demi-finale, et ont été remis en ligne pour être soumis aux votes des internautes. Les trente projets avec le plus de votes ont été retenus pour la finale et ont été invités à soumettre leurs plans d'affaires complets.

Enfin, les projets finalistes ont été invités à participer à un atelier sur d'entrepreneuriat et un coaching sur la présentation orale des projets, avant de présenter leur projet devant un jury international, à Kuala Lumpur en Malaisie.

Qu’as-tu tiré de cette compétition ?

Je dirai beaucoup de chose mais en quelques mots j'ai eu une formation sur différentes facettes de l'entrepreneuriat lors de l’atelier de deux jours. La qualité de certains formateurs m'a beaucoup inspiré. J'ai également rencontré d'autres entrepreneurs et ai élargi mon réseau.

Enfin, le fait d'arriver en finale dans cette compétition a renforcé ma confiance en moi par rapport à mon projet.

Une anecdote à nous raconter ? Un bon souvenir ?

Oui, certainement ! Lors de l'ouverture du sommet international de l'entrepreneuriat, dans la salle de conférence, sur l'écran géant, il y avait un mot qui apparaissait avec un son qui raisonnait derrière " We are entrepreneurs!", répété plusieurs fois ! Ce mot continue à raisonner toujours en moi ! Ça me donne de l'énergie d'avancer au lieu de lâcher même si c'est difficile !

 

Gildas Zodomé – BioPhytoCollines – Concours de BP de la Banque Islamique de Développement

Quelles ont été les différentes étapes ?

Le concours de BP de la BID est effectué en deux étapes : après soumission, une pré-sélection des 10 meilleurs BP dans la catégorie « idée » et également 10 autres dans la catégorie « croissance ». La deuxième étape est la présentation et défense des BP devant un groupe de jury. Cette étape a lieu à Casablanca où les trois meilleurs de chaque catégorie ont été primés.

Qu’as-tu tiré de cette compétition ?

Cette compétition a donné de la valeur à mon entreprise. La BID est un organisme connu de tous. Le trophée reçu de cette structure de renommée montre la qualité de notre projet. Partout où nous présentons ce trophée, nous sommes respectés et bien écoutés. Après plusieurs tentatives, il a fallu que j’annonce que je suis le vainqueur de ce prestigieux trophée pour que certaines autorités de mon pays me reçoivent en audience. Il est devenu mon ‘‘passeport’’.

En plus, les 25 000 dollars reçus ont changé l’image de mon entreprise. Elle est devenue plus visible et plus convaincante. Mon personnel est plus rassuré !!!

De manière générale, les compétitions de création d’entreprise ont d’importants intérêts pour nous, promoteurs, surtout nous qui sommes des débutants. En Afrique particulièrement au Bénin, il est très difficile à une entreprise Start Up de bénéficier d’un financement d’une structure de crédit, d’un investisseur ou même d’un parent.

Le moyen le plus simple et le plus rapide qui permet  aujourd’hui de financer les  entreprises Start Up c’est la compétition de création d’entreprise. On y gagne beaucoup, non seulement des moyens financiers gratuits, mais aussi des connaissances techniques utiles pour développer son entreprise à zéro franc.

Personnellement, les compétions m’ont apportées beaucoup : un encadrement de qualité qui m’a permis d’avoir mon business plan, d’avoir des notions pratiques pour mieux gérer mon entreprise, j’ai eu beaucoup de relations d’affaire, j’ai fait des découvertes, j’ai eu des opportunités d’affaire.   

Une anecdote à nous raconter ? Un bon souvenir ?

Cette compétition m’a laissé de très beaux souvenirs ! L’ambiance qui y avait, le grand suspens… Dans les discussions entre promoteurs, j’ai trouvé la solution à certains de mes  problèmes.

 

Claude Tayo – Eco Co – Global Social Venture Competition

ClaudeQuelles ont été les différentes étapes ?

La compétition a commencé pour nous à la fin du mois d'octobre 2014. Il était question de fournir une candidature qui tienne la route avant le 1er décembre. Nous nous sommes alors lancés dans la rédaction de notre business plan avec toutes ses composantes. Nous ne l’avions jamais fait jusque-là !

Le plus difficile lors de cette préparation aura été de fournir les différents interviews des parties prenantes que la compétition demande (jusqu’à 30 interviews) mais finalement, on y est arrivé. Et c'est avec plaisir qu'on a appris la bonne nouvelle : le projet Eco-Co est en finale francophone de la GSVC.

Nous avons fait un véritable marathon pour pouvoir affiner tous les résultats, préparer la présentation et autres afin d'être prêts pour la finale régionale à Paris. Nous y sommes allés et la finale s'est bien passée nous permettant ainsi d'avoir une place pour la finale mondiale à Berkeley. Le voyage aux Etats Unis a été une très grande expérience pour nous, même si nous n’avons pas décroché de prix. Nous avons eu de nombreuses tables rondes, des mini-séminaires présentés par des entrepreneurs à succès.

Qu’as-tu tiré de cette compétition ?

Sans aucune hésitation je dirais UN CARNET D'ADRESSE. Pour tout entrepreneur, c'est sans doute la chose la plus importante : avoir des contacts de divers horizons et de divers domaines.Ensuite, participer à une telle compétition vous met en face de personnes de grand talent : que ce soit les autres participants qui vous feront voir votre projet sous un autre angle ou encore réaliser à quel point les personnes de génie sont légion dans ce monde mais c'est aussi tous ceux qui constituent l'organisation de ces compétitions, des personnes vraiment dévouées qui vous poussent vers l’excellence en vous demandant de donner toujours plus, d’améliorer toujours plus, pour qu'à la fin on ait l'impression de s'être rapprochés au maximum de la perfection.

Une anecdote à nous raconter ? Un bon souvenir ?

Mon meilleur souvenir reste la phrase de Laura D'Andrea Tyson : « la GSVC n'est qu'une compétition, la gagner ne garantit pas que vous allez être un entrepreneur à succès. La GSVC est un processus et être en finale de cette compétition vous garantit que vous avez accompli ce processus avec succès, que vous avez franchi une autre étape dans votre accomplissement personnel et dans celui de votre entreprise. »

 

Kahitouo Hien – FasoPro – Grand Challenge Canada

KahitouoQuelles ont été les différentes étapes ?

(1) J'ai dû soumettre un dossier de candidature en ligne suivant le canevas proposée par Grand Challenge Canada. Une des conditions dans mon cas était qu'une institution de recherche connue accepte d’héberger FasoPro et se porter garant pour une bonne gestion du financement : ce fut 2iE où le projet était déjà en incubation

(2) Il y a eu une phase de présélection,

(3) Il y a eu des entretiens avec les personnes référencées dans le dossier pour vérifier les informations fournies dans le dossier

(4) Sélection définitive avec la signature d'une convention d'accord de subvention entre Grand Challenge et 2iE

Qu’as-tu tiré de cette compétition ?

Un financement pour développer certains aspects du projet liés à la recherche donc pas évidents à financer directement par FasoPro. Après, on gagne toujours un plus en participant à une compétition : les exigences sont différentes et même quand ça ne marche pas, on gagne toujours en maturité dans la rigueur qu'impose ce genre de compétitions.

Une anecdote à nous raconter ? Un bon souvenir ?

Pour être honnête à chaque fois que je remporte une compétition, le sentiment de joie fait aussitôt place à une pression énorme car ça sonne pour moi  le top départ pour relever les défis, et c'est stressant ! Heureusement que j'aime ça : relever les défis !

Lisa Barutel

Comment réussir une campagne de crowdfunding ?

Le crowdfunding est une des solutions à la disposition des entrepreneurs pour lancer leur projet, et nombre d’entre eux s’essayent à cet exercice pour lever leurs premiers millions de CFA. A priori, le principe est simple : on choisit une plateforme de crowdfunding, on y décrit son projet, on fixe un montant à collecter et la durée de la campagne, on choisit les contreparties à proposer aux donateurs et on lance la campagne !

Mais tous les entrepreneurs qui ont mené une campagne de crowdfunding vous le diront : en réalité, c’est beaucoup plus compliqué qu’on ne l’aurait cru. En effet, animer une campagne de financement ne s’improvise pas et peut être très chronophage. Voici donc un certain nombre de conseils qui peuvent vous aider à mieux gérer votre campagne.

 

1. BIEN CHOISIR SA PLATEFORME

Il existe de très nombreuses plateformes de crowdfunding. Pour choisir la bonne, il faut tout d’abord trouver celle qui VOUS ressemble. Certaines plateformes sont spécialisées dans les projets innovants, d’autres sur les projets sociaux, d’autres encore sur les projets dans les pays en développement … 

Ensuite, il est important de connaitre la cible de la plateforme : qui navigue sur cette plateforme ? Qui a l’habitude d’y donner des fonds ? Ce sera notamment l’occasion de sélectionner une plateforme anglophone ou francophone. Pour se faire une idée, naviguez sur la plateforme pour connaitre les projets proposés, suivez leur page Facebook et le compte Twitter, vérifiez les moyens de paiement proposés …

Enfin, certaines plateformes sont spécialisées dans les campagnes de prêt, d’autres de dons et d’autres plus récemment d’equity. Les montants demandés sont différents, les cibles le sont également ainsi que les messages à transmettre et la manière de communiquer.

EXEMPLE: LES PLATEFORMES FRANCAISES

 

2. BIEN DEFINIR LE MONTANT RECHERCHE, LA DUREE DE LA CAMPAGNE ET LES CONTREPARTIES

Une campagne de crowdfunding doit être ambitieuse mais réaliste. Tout d’abord le montant : choisissez un montant qui ne soit pas trop élevé et surtout, qui corresponde à un besoin concret. Lorsque vous demandez de l’argent à des prêteurs ou des donateurs, il est plus facile de communiquer sur l’achat d’une machine ou d’un outil plutôt que sur des « frais de fonctionnement ». Si vous voulez que vos donateurs se sentent impliqués dans votre aventure, permettez-leur de voir concrètement à quoi servira leur don.

Ensuite, ne vous trompez pas sur la durée de la campagne. Une campagne trop longue ennuiera les gens autour de vous (et vous fatiguera). Gardez à l’esprit que les dons ont principalement lieu au début et à la fin de la campagne : étaler une campagne n’a donc pas forcément de grand impact sur le résultat final. Cependant, laissez-vous suffisamment de temps pour réussir votre campagne. N’hésitez pas à vous inspirer des autres projets postés sur la plateforme de crowdfunding.

Enfin, dernier point : les contreparties. Chaque donateur a droit à une contrepartie, en fonction du montant donné. Choisissez des contreparties qui ne vous couteront pas trop cher (les résultats de la campagne ne doivent pas être annulés par le cout de production et d’envoi des contreparties !) et qui ont un rapport avec votre projet. En contribuant à votre campagne, les donateurs intègrent votre communauté : votre contrepartie en est la preuve.

Ayez à l’esprit qu’un donateur ne donne pas dans l’objectif de recevoir une belle contrepartie mais plutôt pour participer à un projet qui lui plait. Les contreparties les plus simples sont des exemples des produits que vous vendez, ou un accès privilégié aux services que vous proposez. Mais vous pouvez être plus originaux en organisant des évènements spécifiquement pour les donateurs, ou en les mettant en valeur sur divers supports. 

Identifier ses cercles de donateurs

On peut classer les donateurs autour de vous en 3 cercles, dont vous êtes le centre. Plus votre campagne est ambitieuse, plus vous devez aller toucher les cercles éloignés.

1er cercle : il s’agit de vos amis et familles. Ils seront vos premiers donateurs.

2ème cercle : il s’agit des amis de vos amis et de votre famille.

3ème cercle : ce sont les personnes au-delà des deux premiers cercles.

 

3. S'ORGANISER EN AMONT

Avant de lancer votre campagne, il vous faudra préparer un certain nombre de choses pour ne pas être pris au dépourvu le jour venu :

  • Les textes de présentation de votre projet, et de ce que vous voulez financer grâce à cette campagne.
  • La vidéo de promotion, indispensable pour introduire la page de votre campagne. Elle peut présenter votre projet ou la raison de votre campagne de financement
  • La liste mail des personnes auprès de qui vous diffuserez l’information. Cette liste est précieuse et vous permettra de diffuser des mails à intervalles réguliers pour solliciter les donateurs. Vous pouvez faire des « catégories de donateurs », à qui vous envoyez ds messages spécifiques ( « amis / famille », « relations professionnelles 1 », « relations professionnelles 2 » etc.)
  • Les mails à envoyer aux différents groupes de donateurs que vous ciblerez. Cela parait peu mais … préparer les mails à envoyer en amont vous fera gagner un temps précieux.
  • Les visuels que vous publierez sur les réseaux sociaux au moment des « paliers symboliques » franchis pour animer la campagne
  • Le communiqué de presse à diffuser aux journalistes
  • La liste des blogs et sites web qui pourraient relayer votre campagne (en lien avec votre activité donc)
  • Le calendrier précis des différentes choses à faire

 

4. COMMUNIQUER DE MANIERE METHODIQUE

Ca y est ! La campagne est lancée ! Vous avez 20, 30 ou 40 jours pour récolter votre argent ou tout sera perdu. Pour atteindre votre objectif, soyez organisé :

  • Le temps : Comptez au moins 2h par jour à consacrer à l’avancement de votre cagnotte.
  • Les réseaux sociaux : ils sont utiles pour diffuser l’information, mais ils génèrent finalement peu de dons. Les mails et approches personnalisés sont plus efficaces car plus ciblés. 
  • Les ambassadeurs : vous pouvez vous entourer de personnes de confiance ! Identifiez 10 ou 15 personnes très proches du projet et proposez-leur une mission : trouver chacun 15 donateurs pour la campagne. N’oubliez pas de mettre en valeur ces « ambassadeurs » dans vos éléments de communication.
  • La presse : elle est essentielle, surtout si votre objectif chiffré est important. C’est elle qui vous permettra de toucher le 3ème cercle et donc de dépasser vos proches. Comment toucher la presse ? Faites une liste de contacts journalistiques et envoyez leur le communiqué de presse annonçant le lancement de la campagne. Vous pouvez également contacter un certain nombre de journalistes via les  réseaux sociaux.

Il n’y a pas de recette miracle bien sur. Mais ces points sont les fondamentaux pour mener à bien votre campagne. Une fois que vous avez atteint votre cagnotte et que la campagne est terminée, il ne vous reste plus qu’à remercier vos donateurs et à préparer leurs contreparties. Vous disposez désormais d’une communauté de sympathisants qui ont contribué au lancement de votre projet !

Pensez à informer régulièrement cette communauté de vos avancées, notamment lors de l’utilisation précise de leurs fonds. Vous vous rendrez rapidement compte que cette communauté est certainement plus précieuse que la cagnotte elle-même. C’est bien là la plus value des plateformes de crowdfunding qui créent plus de liens qu’aucune banque ne pourra le faire !

 

Lisa Barutel

Le crowdfunding: un moyen innovant pour financer ses projets

Les difficultés d’accès au financement, tous les entrepreneurs les expérimentent au moment de lancer leur projet. Les investisseurs vous demandent de leur montrer des résultats d’activité (que vous n’avez pas puisque vous commencez). Les banques vous proposent des taux d’intérêt beaucoup trop lourds pour la nouvelle startup que vous êtes, les prêts d’honneur sont trop rares pour être des sources sures d’investissement et il est difficile de trop se tourner vers vos amis et familles … 

Depuis quelques années, les entrepreneurs utilisent un outil qui avait été originellement pensé pour financer les artistes qui ne trouvaient plus de fonds pour enregistrer et commercialiser leur musique : le crowdfunding. L’expérience dans l’univers musical a été tellement concluante que le concept a rapidement été détourné. Aujourd’hui, le crowdfunding est considéré par beaucoup d’entrepreneurs comme un moyen efficace de lever leurs premiers fonds.

Qu'est ce que le crowdfunding?

Le « crowdfunding » est un terme anglo-saxon qui désigne le « financement par la foule », ou « financement participatif ». Lancer une campagne de crowdfunding consiste à inscrire son projet sur un site dédié, à fixer des objectifs de campagne (un montant à lever dans un temps déterminé), à proposer des contreparties aux futurs donateurs et à diffuser la campagne pour que tous puissent y contribuer. Si le projet plait aux internautes, ils contribuent simplement à la campagne. Si à la fin du temps défini le montant fixé n’est pas atteint, l’entrepreneur perd l’ensemble de la somme et les donateurs récupèrent leurs dons. Dans le cas contraire, l’entrepreneur peut toucher l’argent collecté et envoyer les contreparties qu’il avait proposées aux donateurs !

En Europe, les chiffres sont particuliérement encourageants : 300 plateformes de crowdfunding, 350 000 entreprises financées, pour 3 milliards euros levés en 2014, chiffre qui pourrait doubler en 2015 selon le cabinet Ernst & Young. Pourquoi ce succès ? Parce que les plateformes de crowdfunding offrent aux donateurs l’occasion de donner directement à un entrepreneur, pour un projet précis. Le crowdfunding est également un moyen de redynamiser les logiques de don en rapprochant les donateurs de la finalité de leur don. Du côté des entrepreneurs, ces plateformes offrent une grande liberté et simplicité d’une part et vont au-delà des services offerts par les sites spécialisés en micro-finance. Une autre clef du succès est la reconnaissance juridique de ce type de financement : que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, le crowdfunding est encadré par des textes spécifiques,en favorisant ainsi le développement. 

Les débuts du crowdfunding en Afrique

Et en Afrique ?  Pour l’instant, le crowdfunding ne touche que très peu de promoteurs, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les plateformes de crowdfunding africaines étaient jusqu’à récemment inexistantes. Les seuls entrepreneurs africains qui y avaient recours passaient par des plateformes étrangères dont ils avaient connaissance. Par ailleurs, cet outil essentiellement en ligne reste peu adapté pour une large partie des entrepreneurs africains, en mal de bonne connexion internet. Notons également que les donateurs sont souvent réticents à opérer des dons en ligne en raison des faibles garanties de sécurité de paiement sur leurs réseaux. Enfin, et frein de taille, jusqu’à présent la quasi-totalité des plateformes de crowdfunding se heurtent au problème de la faible bancarisation du continent africain : sans carte bancaire, impossible de contribuer  à la plupart des collectes. L’outil se trouve vite limité sur le continent.

Et pourtant, créer un pot commun pour que les proches et les proches de proches contribuent au projet d’une personne ou d’un groupe ne devrait pas poser de problèmes dans nos régions. Finalement, la mutualisation des ressources est aussi anciennement ancrée dans les habitudes que les tontines. Par ailleurs, l’idée de financer les projets « par la foule » grâce à de simples outils comme les plateformes de crowdfunding permettrait aux projets africains d’être financés par des africains, donnant ainsi une autre dimension aux questions de développement. 

Les premières plateformes africaines de crowdfunding

Alors, comment adapter ces outils au contexte africain ? Certains s’y sont essayés et des initiatives (essentiellement anglophones) voient peu à peu le jour aux 4 coins du continent :

  • Zoomaal (Afrique du Nord) est une plateforme spécialisée pour les projets maghrébins. La plateforme donne la possibilité de réaliser les dons hors ligne (en chèque, liquide ou transfert) pour  permettre aux personnes ne disposant pas de carte bancaire d’effectuer des dons. 

  • Cofundy (Tunisie) dédiée aux projets d’Afrique du Nord et qui oriente sa communication vers les africains de la diaspora, en leur donnant un outil pour soutenir le développement de projets dans leur pays d’origine. 

  • Smalaandco (Maroc) qui est dédiée aux projets d’intérêt général et d’entrepreneuriat social au Maroc, et qui propose également de régler les dons hors ligne. 

  • Atadamone (Maroc) qui est plutôt orienté vers les projets qui comportent une forte composante d’innovation.   

  • JumpStart Africa (Maroc) est une toute jeune plateforme panafricaine et ouverte à tout type de projets innovants et créatifs. 

  • Fundfind (Afrique du Sud)  pour tous les projets sud-africains, sans critère particulier de sélection.  

  • Startme (Afrique du Sud) pour tout projet entrepreneurial ou créatif.

  • ThundaFund (Afrique du Sud) pour les projets sud-africains, dont l’impact social et économique est significatif.  

  • M-Changa (Kenya) qui est ouverte aux porteurs de toutes les nationalités. Cette plateforme a trouvé un moyen de dépasser la barrière que représente la carte bancaire : les dons peuvent s’y faire par Mobile Money !  

  • Fadev (première plateforme francophone en Afrique) qui propose de l’equity : les donateurs investissent dans une société qui investit elle-même dans le projet soutenu. Les projets sont préalablement sélectionnés avant d’être soumis au public et les livrables sont plus complexes que dans des plateformes classiques. Les projets sélectionnés doivent participer à un développement du pays et valoriser les savoir faire locaux. 

  • DevHope (Cameroun) qui est une plateforme ouverte à tous les projets africains d’intérêt général.   

  • SlizeBiz (Ghana) qui démarrera prochainement. 

 

Lisa Barutel

Les évolutions de l’écosystème entrepreneurial en Algérie

Les start-up sont devenues une source indispensable de croissance pour transformer l’économie des pays Africains. Celles-ci créent de nouvelles capacités de production, de nouveaux emplois et introduisent des solutions innovantes pour redynamiser l’activité d’un pays.

Pourtant, la performance d’une entreprise n’est pas uniquement due à ses atouts internes (comme son organisation, sa productivité, ou sa maitrise technologique). Elle dépend surtout de l’écosystème dans lequel elle se développe (fournisseurs, fonds d’investissement, universités, partenaires commerciaux…), qui constituent autant d’atouts pour faire décoller un projet. La Silicon Valley, en Californie, est le modèle emblématique de cette importance vitale de l’écosystème dans la réussite d’une start-up, et a vu germer les projets entrepreneuriaux les plus réussis de ces dernières décennies.

LA CREATION D’ENTREPRISES EN FORTE CROISSANCE

L’Algérie est encore loin du modèle d’économie de la connaissance basée sur l’innovation. Comme de nombreux pays de la région, son économie reste basée sur les hydrocarbures, qui représentent un tiers du PIB et 95% des exportations. Cette situation que beaucoup lui envient la rend particulièrement vulnérable aux fluctuations du cours de pétrole et ralentit le développement d’autres secteurs. La diversification de l’économie constitue ainsi le principal défi pour l’Algérie au cours des prochaines années, afin de générer de nouveaux relais de croissance et de faire face à une demande interne de plus en plus forte.

Depuis le passage d’une économie dirigée à une économie de marché (enclenchée à la fin des années 1980), l’Algérie a misé sur le développement d’un tissu de Petites et Moyennes Entreprises (PME), en mettant en place des dispositifs juridiques et financiers particulièrement incitatifs.

Grâce aux réformes structurelles entreprises par les pouvoirs publics, la création d’entreprise a fortement augmenté : plus de 80% des entreprises actuellement recensées en Algérie ont moins de dix ans. De plus, le rythme annuel de création reste très soutenu, avec un taux de croissance à deux chiffres sur la période 2005-2014. Sur ces entreprises nouvellement créées, 90% sont actives sur le secteur tertiaire (dont la moitié pour des activités de commerce). Malgré une forte volonté de développer l’industrie et de favoriser la production nationale, le secteur industriel ne représente que 10% des créations d’entreprise, et reste relativement délaissée et peu compétitif face aux produits d’importation.

Après ces quelques années de croissance soutenue, les PME représentent aujourd’hui plus de 95% du tissu d’entreprises à l’échelle nationale, et sont à l’origine de la moitié des richesses générées par le secteur privé (hors hydrocarbures). La marge de progression reste pourtant très importante, puisque l’Algérie compte une moyenne de 30 PME pour 1000 habitants (contre 50 à 100 PME pour 1000 habitants dans les pays de l’OCDE). Selon le recensement économique de 2012, il existe plus d’un million de PME en Algérie, dont 98% sont des structures privées.

PORTRAIT ROBOT DE L’ENTREPRISE ALGERIENNE TYPE

La très grande majorité des entreprises algériennes (95%) sont des  des Très Petites Entreprises (TPE), sous la forme de SARL ou EURL. Elles emploient 2 millions de salariés, soit un tiers des 7 millions de salariés que compte le pays. Comme en Italie ou en Allemagne, la plupart de ces entités sont gérées par un cercle familial qui unit le propriétaire unique et ses principaux collaborateurs sur lesquels reposent le pouvoir de décision et les responsabilités. Les PME algériennes sont très majoritairement orientées vers le marché local : seule une centaine sont considérées comme exportatrices.

Les caractéristiques intrinsèques de ces entreprises (structure, activités, taille) expliquent en grande partie leurs difficultés en termes de compétitivité à l’international et de maturité technologique. Même si l’innovation n’est pas inexistante, elle reste limitée à des secteurs très concurrentiels (comme l’agroalimentaire ou l’industrie), ou dans les activités fortement soutenus par les pouvoirs publics, qui prennent en charge les dépenses d’investissement.

LES SECTEURS PORTEURS

L’agriculture est sans doute le secteur qui a le plus grand potentiel en Algérie, qui est le premier importateur africain de denrées alimentaires (près des deux tiers de ses besoins sont assurés par l’importation, en particulier pour le blé et le lait). Elle est parfois surnomée le « pétrole vert » de l’Algérie.

Des millions d’hectares sont en effet sous-exploités (voire inexploités), alors que la « facture alimentaire » n’a cessé de croitre. Afin de contrer cette situation, l’Etat Algérien a mis en place un dispositif en ouvrant notamment le secteur aux investissements étranger et en mettant en place des dispositifs de financement pour les agriculteurs locaux.

En ce qui concerne l’industrie, les PME sont principalement réparties dans le domaine pharmaceutique, la métallurgie et le textile. L’industrie algérienne ne répond qu’à environ 20% des besoins du marché pharmaceutique (qui est l’un des plus importants d’Afrique et du Monde Arabe), les investissements dans ce secteur sont aujourd’hui importants afin de favoriser la production sur l’importation, à la faveur de dispositifs incitatifs et de réglementations avantageuses pour les acteurs nationaux.

DES OBSTACLES A SURMONTER

En premier lieu, le financement des entreprises est une problématique majeure, en raison des retards du système financier Algérien, notamment le manque de fonds d’investissement privés. L’accès au financement bancaire reste globalement plus compliqué qu’ailleurs.Face à cette situation, des dispositifs publics ont été mis en place pour accélérer les procédures, en particulier pour les jeunes porteurs de projets. Ainsi, une Agence Nationale de Soutien à l’Emploi des Jeunes a été créée, et est sans aucun doute le dispositif d’accompagnement le plus avantageux et le plus connu en Algérie. L’ANSEJ accorde des prêts sans intérêts pouvant aller jusqu’à 100.000 euros, et une exonération d’impôts pendant plusieurs années.

L’accès au foncier est également un challenge pour les entreprises, et constitue une problématique ancienne. La solution proposée passe par la création de zones d’activités et de villes nouvelles spécialisés dans certaines activités, à l’image de Sidi Abdellah (banlieue d’Alger), qui constitue un pôle d’excellence pour les nouvelles technologies et abrite l’incubateur d’entreprises le plus important du pays. S’il existe évidemment certains freins à l’entrepreneuriat en Algérie, aucun ne semble insurmontable, preuve en est le nombre impressionnant de start-up créées chaque année depuis le début des années 2000.

Avec ses infrastructures (réseaux d’énergie et de transports parmi les plus développées d’Afrique), son potentiel humain, et sa position géographique privilégiée, l’Algérie constitue un écosystème entrepreneurial qui connait d’importantes évolutions et a un immense potentiel. Il devra  savoir s’intégrer aux écosystèmes régionaux et mondiaux pour bénéficier des opportunités qui lui font aujourd’hui défaut et qui le feront passer à la vitesse supérieure.

Nacim KAID SLIMANE

Map Kibera: Un premier pas vers l’amélioration ascendante de la vie dans les bidonvilles

security-mapDans mes articles sur l'amélioration de la vie dans les bidonvilles, j’avais dit que je rêvais d'un processus participatif dans lequel chaque habitant pourrait exprimer ses besoins et ses ambitions pour le bidonville. Grâce à ce processus, ces personnes pourraient proposer  un plan directeur qui permettrait aux ONG et aux organismes publics de travailler ensemble pour une amélioration coordonnée de Kibera. Un tel processus n’existe pas encore. Toutefois, il existe une organisation qui recueille et synthétise des données sur Kibera, en utilisant des processus participatifs et améliore le travail de dizaines d'organisations de la société civile. Cette organisation s'appelle Map Kibera, c'est l'une de mes organisations préférées qui travaille dans le bidonville.


La création de Map Kibera 
Map Kibera a été créé en 2010 pour combler «le manque d'information» dans Kibera. Ses fondateurs ont remarqué que le Conseil municipal de Nairobi avait  cartographié le bidonville comme une forêt et que ce lieu n’existait pas sur  les ressources de  cartographie en ligne telles que Google Maps et Open Street Map. En outre, même si de nombreuses ONG et institutions publiques sont impliquées dans la collecte de données sur place, aucune n’est disponible au niveau  local. En introduisant la cartographie participative dans le bidonville, Map Kibera vise à combler cette lacune.
Au-delà de l'envie d'améliorer l'information sur le  terrain, l'organisation vise à promouvoir l'autonomie des citoyens en leur donner le pouvoir de s’exprimer sur le processus de gouvernance et en leur apprenant à faire des rapports sur leur propre environnement. Dans les zones informelles, les ressources de rapports et d’études n’impliquent pas forcément la communauté dans la collecte de données. Enseigner aux gens de la communauté comment recueillir des données est aussi une façon de leur apprendre à utiliser l’information pour rendre compte des difficultés auxquelles  ils  font face. Cela permet une plus grande participation des populations locales dans le processus démocratique.


L'émancipation par la cartographie
L'association a décidé de former 13 jeunes de 13 villages  différents de Kibera à l'utilisation de Open Street Map. Pendant trois semaines, et avec l'aide de professionnels de SIG locaux, Map Kibera a recueilli des données grâce à l'utilisation du GPS en utilisant un logiciel open source.
Le projet a commencé par une étude de faisabilité permettant aux jeunes de l'organisation d’identifier  les lieux et les partenaires appropriés. Les partenaires entrants ont reçu une formation et sont allés dans des zones non cartographiées pour recueillir des données. Ils ont ensuite téléchargé ces données sur Open Street Map. Puis, les partenaires ont imprimé la carte et l'ont présentée  à la population locale. Ces réunions visaient  à sensibiliser et à permettre une meilleure cohésion entre les différents villages. En outre, Map Kibera a mis sur pied  un blog  avec un espace wiki permettant aux parties prenantes de discuter de la planification du projet.
Un an après sa création, Map Kibera a mis en œuvre une stratégie pour permettre aux gens d'accéder à l'information en affichant des cartes pour la communauté. Les cartes furent peintes sur les murs pour montrer aux gens les accès aux services publics. La collecte des données a aidé à la réunification  des membres de la communauté avec les dirigeants locaux et les différents travailleurs sociaux dans le bidonville. Grâce à cela, ils ont créé un vaste réseau de distribution de cartes d’une plus grande  précision. Ils ont permis également d’identifier  plus de personnes qui pouvaient aider à la collecte de données plus précises.


Impacts
Map Kibera a créé une carte se référant à la sécurité. Cette carte est extrêmement utile pour la communauté car elle indique les taches noires – les zones où il est dangereux de marcher jour et nuit. Grâce  au soutien  de jeunes autochtones, les cartographes ont été en mesure de localiser les endroits où d'autres jeunes chômeurs errent. Le manque de revenus et des opportunités à Kibera les ont poussés au crime. Ils se droguent et attaquent des personnes causant des blessures graves ou la mort. Cette carte sert l'intérêt général car elle permet aux habitants de Kibera qui viennent d'un village différent d'être informés  des endroits dangereux.
Si les cartes aident la communauté, elles ont également eu un impact sur l'amélioration de l'environnement urbain. Les cartes ont un impact indirect sur l'espace urbain. En 2010, l'UNICEF a financé une autre carte sur l'eau et l'assainissement à Kibera. Certains des villages ne disposaient pas d'eau. Map Kibera a été en mesure de travailler en partenariat avec l'ONG WASUP afin de localiser les lieux mal équipés en matière d’assainissement. Grâce à ces informations, WASUP a été en mesure de construire des réservoirs d'eau dans ces zones.


Le développement durable au cœur du projet
Le projet est économiquement, socialement et écologiquement durable. Economiquement, la Fiducie  travaille comme une entreprise, elle vend des cartes à différentes parties prenantes et paient  les jeunes cartographes – leur offrant ainsi  un emploi. Ces derniers parviennent également à gagner de l'argent lorsque les fonds sont disponibles. 
La durabilité du projet est également assurée par sa capacité à améliorer la situation  des jeunes (dans une moindre mesure car seulement quelques personnes sont sollicitées pour recueillir des données pour chaque carte) et à faire de chaque cartographe un acteur dans le développement du bidonville. Au niveau communautaire, l'information est utile pour les habitants du bidonville. Ils sont informés  des endroits dangereux  et de l’emplacement  des services d'assainissement adéquats. Indirectement, l'accès à ces informations par d’autres organisations a permis la planification des services plus adéquats à travers un règlement informel.
De la coordination des services à la remise à niveau du bidonville.
En développant un réseau d'acteurs locaux, Map Kibera a réussi à devenir un acteur incontournable dans le domaine. Ils rassemblent toutes les informations nécessaires pour les ONG afin de leur permettre de travailler efficacement. Ils disposent de l'information nécessaire pour maximiser leur impact sur le bidonville et leur permettre de  travailler  d'une manière coordonnée. À cet égard, Map Kibera a prouvé  que la gestion de l'information peut être réellement utile pour influencer la communauté et son environnement urbain.


                                                                                                                                                      Traduit par Koriangbè Camara


Article originellement paru sur le blog de l'auteur:
http: //carolineguillet.com/2014/05/18/map-kibera-first-step-towards-bottom-up-slum-upgrading/
Map Kibera Site Web: www.mapkibera.org

 

Immersion au CTIC Dakar: le point de vue des entrepreneurs

Au cours d’un cours séjour au Sénégal, j’ai eu la chance de pouvoir plonger au cœur de CTIC Dakar, le premier incubateur TIC en Afrique Francophone. Aussi, je vous propose une série d’articles pour découvrir CTIC Dakar, ses facteurs clés de succès, ses défis et enfin ses entrepreneurs. Cet article est le dernier de la série sur CTIC Dakar. Il s’agit d’un recueil de témoignages de quelques entrepreneurs qui, tous les jours, font vivre CTIC Dakar et contribuent à sa renommée. 

 

LogoLAM Malick Diouf – LAFRICAMOBILE 

Avant de nous installer au CTIC, nous nous sommes renseignés sur l’environnement entrepreneurial et TIC au Sénégal. Tout nous renvoyait vers deux endroits : CTIC et Jokkolabs. Jokkolabs est un espace de co-working.

CTIC, en plus d’offrir l’espace et l’environnement, met à disposition des personnes pour nous aider sur des problématiques spécifiques, d’autant plus que d’autres entrepreneurs sont passés avant nous et que donc, l’équipe CTIC a accumulé beaucoup d’expérience. Ainsi, elle peut nous faire avancer plus vite dans la mise en place et le développement.

La grande difficulté que nous rencontrons aujourd’hui est le fait de vouloir être présent à la fois au Sénégal et en France alors que nous avons une équipe réduite. Lorsque les leaders de l’entreprise sont absents, c’est là que le CTIC nous apporte un vrai soutien en aidant l’équipe à bien aborder les questions.

Par ailleurs, l’environnement au CTIC est pour nous très propice à notre développement, étant donné que nous créons des outils de communication web et mobile pour la diaspora africaine. Actuellement, nous bénéficions de l’espace de co-working et entrons dans la phase de pré-incubation. Nous passerons prochainement devant la commission pour intégrer le programme d’incubation ; cela dépendra de la viabilité économique de notre business. 

NDLR : J'ai appris aprés avoir réalisé cette interview que LAFRICAMOBILE a finalement intégré le programme d'incubation.

Camille Kramer-Courbariaux BAOBAB ENTREPRENEURSHIP 

Les vrais bénéfices de pouvoir travailler dans un endroit comme le CTIC, c’est avant tout la communauté que l’on y trouve, le réseau et les personnes qui y transitent. La notoriété du CTIC fait que des personnes et des entreprises qui évoluent dans notre écosystème viennent ici et la mise en relation se fait de manière très naturelle. Le CTIC est également très généreux dans la communication et fait entrer les porteurs de projet dans son réseau. L’avantage principal est qu’en étant ici, nous obtenons les informations avant qu’elles ne soient dévoilées, ce qui permet de bien se positionner et d’adapter sa stratégie, d’avoir une porte d’entrée sur des partenariats, des apporteurs d’affaire ou des prestataires de service qu’on aurait peut-être pas trouvé si l’on avait été tout seul.

Ensuite, pour nous qui travaillons dans l’espace Buntu Tekki, nous bénéficions aussi de la communauté d’entrepreneurs qui travaille à côté de nous, avec qui on peut échanger en direct et, de là, beaucoup de synergies se créent et des partenariats se nouent. Pour résumer, je dirais que c’est cette proximité avec l’écosystème TIC qui est la grosse valeur ajoutée du CTIC. L’équipe du CTIC est entièrement à notre disposition et nous en profitons au maximum. D’un point de vue humain et d’un point de vue networking, le CTIC est formidable. 

 

logo REALCLICTalla Diop – REALCLIC 

Je suis pré-incubé au niveau de CTIC Dakar depuis plus d’un an. Je fais partie de la deuxième phase de présélection d’entrepreneurs. Je développe divers services SMS et mobiles pour tout type d’activités et tous les secteurs : campagnes de communication SMS, sondages SMS, SMS Food pour la restauration et autres. Je remercie CTIC Dakar pour ces locaux et infrastructures mises à ma disposition. Pour l’instant, tout ce que j’ai réalisé côté commercial, j’y suis arrivé par moi-même. Ce que j’attends de CTIC Dakar c’est un accompagnement dans le développement commercial et la gestion car je suis un pur technicien. Pour le moment, un certain nombre de clients semble être intéressé par mes services, je les ai démarchés en allant les rencontrer directement sur le terrain. 

 

LOGO-DUGLANTE FullAbdoulaye Seck – SF TECHNOLOGIE 

Je suis le fondateur de SF Technologie, une entreprise qui fournit des solutions innovantes et la première que nous avons créée s’appelle DUGLANTE qui signifie « interactif » en wolof. C’est après la création de DUGLANTE que je me suis rapproché de CTIC Dakar. C’est l’équipe du CTIC qui m’a aidé à la mise en place du projet et sur l’aspect commercial. Cela fait maintenant six mois que je suis accompagné par l’incubateur et je ne le regrette pas, car grâce à leur encadrement et à leur accompagnement, je commence à vendre la solution et donc à gagner ma vie.

DUGLANTE est une solution qui permet au public d’envoyer des SMS et des tweets lors d’évènements, concerts, conférences, forums, lancements de produits, etc. Cette solution facilite l’interactivité entre le public et l’organisateur. Après l’évènement, nous envoyons un rapport avec les statistiques à l’organisateur afin qu’il puisse connaître le nombre de participants, leur intérêt et leur satisfaction. C’est là tout l’intérêt de notre solution. 

 

Sadibou SowINAOTA 

Sow3Je suis incubé au CTIC depuis un peu plus d’un an, mais j’y étais présent dès les débuts en partenariat avec une autre entreprise. Selon moi CTIC Dakar est un projet très intéressant, voire indispensable, pour plusieurs types d’entrepreneurs. Des personnes qui ont des idées potentiellement fort intéressantes mais qui n’ont pas d’investissement ou pas d’expérience dans la gestion d’entreprise se verront offrir une grande valeur ajoutée dans un incubateur de ce genre.

C’est le profil le plus fréquent que je rencontre au CTIC : des personnes formées dans un domaine spécifique (développeurs notamment) et qui ont besoin d’entrer dans d’autres domaines. Moi, par exemple, je suis programmeur de formation et j’avais besoin d’aide au niveau de la gestion, des finances, du relationnel, du réseautage. Pour tout cela,  le CTIC m’a beaucoup apporté. 

 

Stéphane NdourSAMA EVENT 

NDour3J’ai lancé SAMA EVENT qui n’était au départ qu’un projet. Arrivés au CTIC, on nous a appris à voir les choses différemment pour pouvoir vendre l’application et construire notre modèle économique. L’autre chose importante que CTIC Dakar nous a apporté, ce sont les opportunités de partenariat qu’on pouvait nouer dans le domaine de la technologie, obtenir les possibilités de se connecter à des systèmes autres que les nôtres, avec des API (interface de programmation), etc., ce qui est intéressant lorsqu’on veut fournir un service informatique de qualité. Il faut avoir un certain nombre de services connexes pour pouvoir vendre toute une palette de services. Voilà ce que CTIC nous a apporté pendant deux ans (soit deux sessions d’accélération). Aujourd’hui nous continuons seuls à déployer le modèle développé au départ avec le CTIC.

 

Babacar BiraneBAOBAB ENTREPRENEURSHIP 

Birane3Co-fondateur et Manager Général de BAOBAB ENTREPRENEURSHIP, je suis au CTIC depuis novembre 2013. J’y suis arrivé un peu par hasard car à mon retour de Grenoble je souhaitais démarrer administrativement et opérationnellement la start-up mais je n’avais nulle part où m’installer pour travailler. Un de mes associés, employé dans une startup incubée au CTIC m’a introduit à l’administration de l’incubateur à l’occasion d’un de leur évènement, « le Connectic », et puis je connaissais déjà le Catalyst, Yann Le Beux.

A partir de là, j’ai été accepté dans l’espace de travail type coworking space, Buntu Tekki. C’est très pratique lorsqu’on a un petit budget de bénéficier d’un tel espace en centre-ville. Bien que je ne sois pas incubé au CTIC, cela me permet d’accéder à un vaste réseau, de rencontrer beaucoup d’entrepreneurs, y compris de l’extérieur car le CTIC a une visibilité internationale. C’est ainsi, entre autres, que BAOBAB ENTREPRENEURSHIP a noué un large réseau de partenaires. Aujourd’hui, ce qui nous lie au CTIC, ce n’est pas une relation d’incubation, c’est une relation partenariale car le CTIC est positionné dans la chaîne d’accompagnement un peu plus en aval que BAOBAB ENTREPRENEURSHIP.

Le CTIC accompagne des start-up qui existent déjà et qui sont à la recherche de leur croissance. BAOBAB ENTREPRENEURSHIP est positionné plus en amont et tous les projets qui ne sont pas retenus au CTIC sont orientés vers nous. Nous nous assurons de la validité de leur business model et de leur degré d’aptitude à la croissance. Une fois que ces objectifs sont atteints, nous les mettons, entre autres, en relation avec le CTIC pour un programme d’incubation. 

Propos recueillis par Awa SACKO 

 

Everjobs, première plateforme panafricaine pour l’emploi

Après son lancement réussi dans plusieurs pays d’Asie, la plateforme de recrutement Everjobs se lance sur le continent Africain avec l’objectif assumé de devenir « la plateforme de recrutement panafricaine de référence ». Entièrement gratuit pour les candidats, Everjobs entend ainsi révolutionner le marché de l’emploi en apportant plus de transparence dans les recrutements et en assurant une mise en relation directe avec les employeurs.

Nous avons interviewé Eric Lauer, co-fondateur et Directeur Afrique d’Everjobs, qui nous explique comment les innovations apportées par la plateforme peuvent apporter des solutions aux insuffisances du marché de l’emploi en Afrique, notamment la discrimination à l’embauche et la faiblesse du nombre d’emplois formels.  

Everjobs a lancé ses activités au Cameroun il y a quelques semaines. Comment se passe votre implantation?

EricLauerNous nous sommes lancés au Cameroun  avec 200 offres de recruteurs et une base importante de candidats qui croît de plusieurs centaines de CVs par jour. Nous avons reçu un accueil très favorable des différents acteurs du marché, tant du côté des Directeurs des Ressources Humaines que des chercheurs d’emploi et jeunes diplômés que nous sommes allés rencontrer. Nous sentons vraiment que nous répondons à un besoin important des deux côtés du marché de l’emploi.

Pourquoi avoir choisi le Cameroun?

Selon les statistiques officielles, le taux de chômage avoisine les 15%, en constante augmentation depuis cinq ans. Une partie de ce chômage s’explique par un manque de canaux qui permettent à l’offre de travail des entreprises et à la demande de travail des chercheurs d’emploi de se rencontrer. Notre plateforme répond à ce besoin en garantissant le contact direct avec les recruteurs.

De plus, le Cameroun peut se targuer d’une large population qui compte des diplômés d’universités reconnues et de grandes entreprises nationales ou grandes sociétés internationales qui s’implantent de plus en plus sur le territoire. Nous jouons donc pleinement notre rôle en permettant la rencontre de ces acteurs. Aussi, nous constatons une certaine opacité sur le marché du travail camerounais se traduisant par de nombreuses offres non-publiques qui sont en quelque sorte “hors du marché de l’emploi”. Les camerounais n’ont donc pas tous les mêmes chances à l’embauche. Everjobs entend diminuer ces discriminations en mettant les Camerounais sur un pied d’égalité.

Quels sont vos prochains objectifs?

Notre objectif est d’étendre notre présence dans une vingtaine de pays Africains. L’ambition d’Everjobs est de devenir la plateforme de recrutement panafricaine de référence. Nous voulons activement contribuer à apporter plus de transparence dans les recrutements et permettre aux diplômés d’accéder aux meilleurs emplois des grands groupes et des grandes institutions. Du côté des employeurs, nous voulons fournir une solution de qualité qui réponde à leur préoccupation : trouver les talents du continent, en s’appuyant sur la mobilité croissante des candidats.

A quel degré le marché de l’emploi est-il intégré à l’échelle continentale?

L’intégration est très forte selon un axe lié à la langue. Ce que nous constatons aujourd’hui sur le terrain en Afrique francophone c’est que les diplômés qualifiés sont très mobiles entre les pays francophones d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Ainsi, une offre pour un grand groupe international au Cameroun pourra grâce à notre plateforme recueillir les candidatures de professionnels basés au Sénégal ou en Côte d’Ivoire prêts à s’expatrier et disposant des compétences le justifiant. De la même façon en Afrique de l’Est, nous avons constaté une forte intégration, notamment des marchés de l’emploi entre l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie. Notre plateforme favorise la mobilité sur le continent africain.  

Quels sont les obstacles auxquels sont confrontés les candidats?

Les candidats font face à des obstacles de natures différentes. Les offres n’étant pas toutes rendues publiques, une certaine opacité règne sur le marché du travail africain. Tous les candidats ne sont pas au courant des mêmes ouvertures de postes, en termes de quantité et de qualité. Ceux qui appartiennent aux bons réseaux ou sont nés dans les bonnes familles sont donc avantagés. De ce fait, la compétition est très forte : de très nombreux candidats se battent pour un nombre très limité d’offres publiques.  Enfin, des discriminations à l’embauche existent, qu’elles soient liées à l’ethnie ou au genre. Nous avons constaté une forte disparité entre les pays africains à ce sujet.

Pourquoi les jeunes diplômés éprouvent ils plus de difficultés à trouver un emploi qu’ailleurs dans le monde?

D’un point de vue macro-économique, cela s’explique par une inadéquation très forte entre l’offre et la demande : d’un côté vous avez une offre d’emplois formels de la part des entreprises nationales et internationales en nombre limité et de l’autre côté vous avez des jeunes diplômés des meilleurs universités du pays en très grand nombre. Ce « mismatch » crée une compétition des plus fortes pour les quelques emplois du secteur formel, qui font rêver les jeunes diplômés.

D’un point de vue plus micro-économique, les jeunes africains n’ont pas tous les mêmes chances à l’embauche. Le recrutement par réseau personnel est omniprésent, c’est-à-dire que le capital social au sens de Bourdieu produit de grandes disparités entre candidats. Paradoxalement, cette situation est aussi la conséquence de pressions sur les employeurs. Il n’est pas rare que les Directions des Ressources Humaines refusent de publier leurs offres pour ne pas avoir à gérer les demandes des plus hauts placés de choisir tel ou telle candidat pour le poste.

 Everjobs apporte-il des nouveautés par rapport à d’autres plateformes?

Tout d’abord, nous garantissons un lien direct avec les Directeurs des Ressources Humaines des sociétés qui sont sur note site, contrairement à certains sites qui se contentent d’agréger des offres existantes sur d’autres sites d’entreprises. Par ailleurs, nous offrons des outils aux utilisateurs de la plateforme et les conseillons tout au long du processus de recherche d’emploi pour ainsi leur donner les mêmes chances de réussite. Et contrairement à d’autres sites présentant des coûts cachés pour les candidats, nous sommes entièrement gratuits et le resterons toujours !

Comment se fait le matching des profils sur le site?

La mission d’Everjobs est de simplifier la recherche d’emploi et les processus de recrutement en mettant en relation les chercheurs d’emploi et les employeurs en quelques clics.  Pour commencer il est important de préciser que notre plateforme est entièrement gratuite pour les candidats. Le processus est très simple : il suffit de créer un compte en quelques minutes puis de postuler aux offres présentes sur notre plateforme www.everjobs.cm.

Ensuite, les directeurs des Ressources Humaines partenaires d’Everjobs reçoivent en temps réel les candidatures et peuvent choisir les candidats qu’ils souhaitent recevoir en entretien en les contactant directement via la plateforme. En créant leur compte, les candidats sont ajoutés à notre base de CVs qui est consultée fréquemment par les directeurs des Ressources Humaines. Nous encourageons donc un maximum de personnes à créer leur profil sur Everjobs, même s’ils sont en poste car cela peut leur ouvrir de nouvelles opportunités.

 

Everjobs a déjà été lancé en Asie, avec succès. Constatez-vous des différences importantes par rapport à l’environnement Africain?

Everjobs était déjà présent en Asie, notamment au Myanmar depuis un an, avant notre lancement en Afrique puis au Sri Lanka et au Cambodge. La différence la plus notable : l’offre et la demande sont très différents entre l’Afrique et l’Asie. La pression du côté de la demande est beaucoup plus forte en Afrique où nous enregistrons un nombre de visiteurs et une croissance de CVs enregistrés bien supérieure à l’Asie pour des pays de taille comparable, bien que les taux de pénétration d’internet soient encore très supérieurs en Asie.

Du côté de l’offre, le nombre d’emplois formels est bien inférieur en Afrique qu’en Asie pour des pays de taille comparable, avec presqu’un rapport de 1 à 10. Cette remarque rejoint ma précédente remarque sur le nombre limité d’offres d’emplois formels en Afrique et la prédominance du secteur informel.

 Quelles leçons en avez-vous tiré pour votre lancement en Afrique?

Nous avons surtout tiré des enseignements d’un point de vue méthodologique, notamment sur les différentes étapes de développement de l’activité en générale. La stratégie mise en place pour chacune des étapes est très différente en Afrique! Par exemple, la façon de nouer des relations professionnelles est très différente en Afrique par rapport à l’Asie. Pour convaincre un Directeur des Ressources Humaines d’utiliser notre plateforme et bâtir une relation de confiance, il faut typiquement plusieurs réunions en Afrique alors que la relation commerciale se construit presque directement au téléphone en Asie. La relation de confiance, plus précisément son ancienneté, est une variable très importante dans la conduite des affaires en Afrique. 

Au début, comment avez-vous convaincu des entreprises de vous faire confiance?

Tout d’abord je pense que nous répondons à un besoin profond des entreprises : avoir accès à un pool de talents important et international d’une part, et notamment de talents techniques qui font défaut dans certains secteurs comme la construction ou le secteur pétrolier. Ensuite nous offrons aussi des possibilités très fines et granulaires de trier les candidats ce qui permet au Directeur des Ressources Humaines d’affiner leur sélection, notamment dans des pays où la demande est abondante. Et nous offrons une période d’essai gratuite de 3 mois aux entreprises pour notre lancement !

Quelle place pour les PME sur votre plateforme?

Notre plateforme a l’ambition de devenir la référence panafricaine en matière d’emploi. Nous nous efforçons de couvrir le plus de secteurs possibles et de proposer un maximum d’offres pour répondre aux attentes des entreprises et de chaque profil enregistré sur la plateforme. Dans un premier temps, nous nous sommes focalisés sur les entreprises nationales et internationales de grande taille puis nous offrirons nos services aux PME, qui trouveront un intérêt à notre service pour faciliter et diminuer le coût de leurs recrutements.

Pouvez-vous nous présenter vos équipes sur place?

Nos équipes sont généralement dirigées par un binôme : un Directeur pays national et un expatrié. Nous sommes convaincus que ce mode de fonctionnement est très riche et que ces deux profiles ont énormément de choses à s’apporter. Les équipes sont locales, ce qui contribue sans aucun doute à la réussite d’Everjobs localement. Nous sommes caractérisés par un esprit entrepreneurial fort et une très large place laissée à l’initiative personnelle.

Pourquoi ce projet vous tient il personnellement à cœur?

Je suis un entrepreneur très cosmopolite : né en France, ayant grandi en Chine, j’ai étudié en France puis travaillé à l’international. Je suis depuis un certain nombre d’années passionné par l’Afrique et les questions publiques, ce qui explique en grande partie pourquoi ce projet de portail de recrutement panafricain qu’est Everjobs me tient autant à cœur. L’idée de mettre la technologie au service d’un objectif louable me plaît, tout simplement.

Pourquoi avoir choisi l’Afrique pour vous lancer dans ce projet ?

Tout simplement parce que c’est en Afrique que le besoin est le plus fort. Nous constatons aujourd’hui de nombreux points communs à travers le continent: des économies très dynamiques avec des jeunes africains surdiplômés qui font face à trop peu d’offres d’emplois formels et un manque de passerelles pour leur permettre de se rencontrer. Aujourd’hui, Everjobs a l’ambition de donner de la transparence au marché du travail africain.

Comment voyez-vous Everjobs dans cinq ans?

Dans 5 ans, Everjobs sera la première plateforme panafricaine pour l’emploi et nous serons présents dans la totalité des pays du continent. Nous servirons toutes les entreprises internationales et les institutions internationales présentes sur le continent et nous accompagneront toujours les Directeurs des Ressources Humaines avec le même souci de répondre au plus près à leurs attentes. Notre produit aura également beaucoup évolué: algorithme de « matching » offre – demande très performant et fonctionnalités sociales entre les utilisateurs notamment.

Et votre rôle dans Everjobs dans cinq ans?

Bonne question. Ce qui est sûr c’est que je serai fier d’avoir contribué à construire l’acteur de référence du marché de l’emploi en Afrique, d’avoir donné un emploi ou au moins des opportunités d’emploi à des personnes que ne croyaient pas forcément en avoir. Je suis déjà très heureux de faire partie de l’aventure de la belle PME qu’est appelée à devenir Everjobs.

Quels conseils donneriez-vous à un entrepreneur qui se lance en Afrique?

Je dirais en premier lieu qu’il faut se défaire de ses préjugés occidentaux, pour ceux qui viennent d’Europe. Il faut définitivement apprendre à réaliser des choses dans la durée, sans forcément attendre un résultat immédiat. J’ai connu beaucoup de frustrations à mes débuts. Avec plusieurs mois de recul, les résultats sont là !

Aussi, je suis aussi convaincu de la très grande place du relationnel dans la réussite d’un business en Afrique. J’ai l’impression que 80% du succès d’une démarche commerciale tient aux relations personnelles. La construction de relations fortes et dans la durée est un atout essentiel. Enfin, il faut avoir un esprit aventurier, voir téméraire, assorti de pas mal de débrouillardise!

 

La télé-irrigation : une solution innovante au potentiel important

Nous avons rencontré Philippe Mingotaud1 , directeur de MTP-Editions, une société française d'informatique qui a contribué au développement d'un procédé de télé-irrigation innovant et adapté aux pays africains.

PhilippeMingotaud-TBADI : Vous avez développé un procédé de télé-irrigation. De quoi s'agit-il ?

Philippe Mingotaud: Le principe est simple. Un agriculteur peut, à l'aide de son seul téléphone fixe ou GSM, activer à distance les pompes à eau qui lui servent à irriguer ses champs et récupèrer les paramètres dont il a besoin pour déterminer les temps d'irrigation nécessaires à chacune de ses parcelles. Nous avons développé un système vocal interactif multivoix, multilingue et multimédia qui s’adapte à de nombreux contextes.

Au Niger, notre partenaire Tech-Innov2 utilise notre technologie pour proposer un système vocal mutualisé permettant de contourner l'analphabétisme encore présent dans les campagnes. Le système répond de la façon la plus simple au multilinguisme du pays et  permet de déclencher des pompes à eau sur tout le territoire en utilisant le réseau GSM en priorité mais aussi les ondes radio lorsque la couverture GSM fait défaut.

Dans d’autres contextes, le système peut également être déclenché par des emails ou SMS entrants en privilégieant l'écrit à la voix.

ADI : Comment le système fonctionne-t-il concrètement ?

Philippe Mingotaud: L'agriculteur se connecte à un serveur qui le détecte, l'identifie puis lui renvoie une information personnalisée ou déclenche une action appropriée.
Le système calcule automatiquement le temps d'irrigation nécessaire à chaque parcelle, en fonction du débit de la pompe à eau, du type de culture, des engrais utilisés et des nombreux relevés effectués par différents capteurs, comme le degré d'hygrométrie, l'indice UV, la nature et la porosité des sols, etc. En fonction de ces critères, il active la ou les pompes à eau concernées pour la durée déterminée par le demandeur ou par lui-même.

Tele-Irrigation-03ADI : Pourquoi est-il important d’améliorer l’irrigation ?

Philippe Mingotaud: Il y a urgence à agir. Les chiffres avancés par les experts qui travaillent sur le devenir de l'agriculture de part le monde devraient alerter. 40 % des terres émergées sont menacés de désertification dont 66 % sont déjà affectés. 37 % des terres arides sont en Afrique.3

La productivité des terres cultivées baisse continuellement. Le dépeuplement des campagnes en direction des villes et les flux migratoires de l'Afrique vers l'Europe ne cessent d'augmenter. Il faut se mobiliser sans attendre de nouvelles catastrophes. Il y va de l'intérêt de tous que les agriculteurs puissent rester dans les campagnes pour continuer à produire et à fournir aux populations des villes, les aliments dont elles ont besoin.

ADI : Que peut apporter la télé-irrigation aux économies africaines ?

Philippe Mingotaud: Le premier apport est une augmentation significative en terme de qualité et de quantité des productions obtenues qui varient selon les cultures, les régions et la conformité des installations d'irrigation.

La télé-irrigation ne se résume pas à installer une configuration informatique permettant à une pompe à eau de se déclencher à distance, pour une durée déterminée. Cela va beaucoup plus loin. A la composante informatique s'ajoutent des panneaux solaires, une mise en conformité du réseau d'irrigation, une meilleure gestion des ressources en eau disponibles et surtout une modification en profondeur des méthodes de travail.

En proposant un serveur de télé-irrigation mutualisé, capable de répondre simultanément à plusieurs demandeurs, on met en place une nouvelle organisation du travail qui incite les agriculteurs à se regrouper et à partager au delà de leurs matériels informatiques, leurs matériels agricoles, leurs expériences professionnelles, leurs infrastrucutures, bref tout ce qui peut contribuer à simplifier leurs conditions de travail et à optimiser leurs productions agricoles.

tele-irrigation-01ADI : Y a-t-il des avantages indirects à utiliser ce type de technologie?

Philippe Mingotaud: Indirectement, on s'aperçoit que mettre en place des solutions de télé-irrigation contribue à lutter non seulement contre la précarité économique mais aussi éducative. Nous avons pu constater à plusieurs reprises que la télé-irrigation permet une meilleure scolarisation des enfants là où elle est présente, du fait que ce sont souvent les enfants qui sont chargés d'aller dans les champs activer les pompes à eau et qu'ils le font au lieu de se rendre à l'école.

En s'appropriant les nouvelles technologies, les habitants des campagnes améliorent leur quotidien. En permettant une bien meilleure gestion de l'eau et une lutte efficace contre les déperditions, la télé-irrigation est un atout des plus précieux, là où l'eau se fait rare. La production d'énergie solaire qui se fait en même temps ne sert évidemment pas qu'à alimenter les pompes à eau dans les champs. Les serveurs d'information à la demande peuvent également servir à prévenir les risques,  à développer la sécurité sanitaire, à lutter contre l'isolement de certaines populations et à mieux organiser la vie en société.

Tele-Irrigation-02ADI : Quels sont les obstacles à la généralisation de la télé-irrigation ?

Philippe Mingotaud: Le principal obstacle est la pauvreté des populations auxquelles nous nous adressons. Ce n'est pas tant l'équipement informatique qui est un frein puisque le coût des matériels est mutualisable. Mais il ne sert à rien de vouloir améliorer le rendement des terres agricoles, sans chercher préalablement à mettre aux normes le réseau d'irrigation de l'agriculteur qui souhaite y parvenir. Cette mise en conformité peut, notamment dans un environnement difficile, revenir chère à des professions dont le pouvoir d'achat est faible.
Les petits agriculteurs se retrouvent trop souvent seuls face à des difficultés économiques et environnementales devenues insurmontables. Ils gagneraient à être accompagnés davantage par les Etats et les ONG. Tout le monde y gagnerait.

Propos recueillis par Tite Yokossi

1 Philippe Mingotaud dirige MTP-Editions, une société française d'informatique spécialisée dans des serveurs et projets innovants. La société recherche des partenaires locaux en Afrique pour diffuser ses solutions dont la télé-irrigation fait partie.

M.T.P. Editions  –  Tél. : (+33).1.39.60.82.82
Sites : www.servocall.com  www.servisual.com et www.serworker.com (exemples de pilotage interactif distant en temps réel)

2 Tech-Innov, le partenaire nigérien de MTP Editions, a reçu une belle distinction au salon mondial de l'eau qui s'est tenu du 12 au 19 Avril 2015 à Daegu en Corée du Sud récompensant son travail dans la conception, la réalisation et la mise en place de ce procédé de Télé-irrigation.
Site :  www.tele-irrigation.net

3 http://www.csf-desertification.org/combattre-la-desertification/item/desertification-degradation-des-terres