Quelles sont les principales préoccupations des béninois ? C’est pour apporter des éléments de réponse à ces questions que la fondation Zinsou, présente au Bénin et dédiée à l’art africain, a commandé un sondage réalisé auprès des populations béninoises. Les dix grands thèmes qui ressortent du sondage sont dans le désordre: l’accès à l’éducation, la régularisation de la circulation, l’augmentation des salaires des fonctionnaires, l’aide aux cultivateurs, l’accès à l’eau potable, le renforcement de la sécurité, la réparation des routes, l’accès à l’électricité, l’aide aux éleveurs et l’accès aux soins.
La Fondation Zinsou a rencontré Kifouli Dossou, artiste sculpteur béninois, et lui a demandé de réaliser une représentation artistique de ces grandes questions pour en porter le message. L’artiste a choisi, pour ce faire, de sculpter des masques Guèlèdè, représentant chacun l’une de ces dix préoccupations majeures. Ces masques ont fait l’objet d’une exposition gratuite dans les locaux de la fondation Zinsou basée à Cotonou.
Nous abordons tour à tour ces 10 thèmes dans une série d’articles illustrée par les photographies des masques sculptés par l’artiste – qui ont été gracieusement mises à notre disposition par ladite fondation. Après avoir abordé successivement la revalorisation du salaire des fonctionnaires, la modernisation de l’agriculture, les questions de sécurité (sécurité sur les routes et sécurité des biens), l’accès à l’eau potable et l’amélioration des infrastructures routières, l’accès à l’éducation et à une électricité de qualité, nous terminons la série avec l’élevage et l’accès aux soins de santé.
"Les éleveurs" / Kanlingnitolê
Sculpture de Kifouli Dossou / Peinture de Kifouli Dossou
2010 – 2011
9. Améliorer l’élevage
L’économie béninoise est essentiellement agricole et le secteur primaire emploie environ 2/3 de la population active. L’élevage constitue la seconde activité agricole du pays après la production végétale. Le cheptel comprend diverses espèces animales domestiques (bovins, ovins, caprins, porcins, volaille etc.) mais aussi des espèces moins conventionnelles telles que l’aulacode. La viande est très nettement la première production animale primaire du pays. Elle est suivie du lait et des œufs. La force de travail (charrue) et le fumier sont les productions secondaires principales.
Le Bénin a atteint son autosuffisance alimentaire en ce qui concerne les productions végétales (excepté le riz). Mais beaucoup d’efforts restent à faire pour assurer l’autosuffisance en productions animales. Les systèmes traditionnels de production animale à faible productivité restent dominants. Les élevages de type industriel ou moderne se développent lentement. D’après la direction de l’élevage, des politiques développées ces dernières années ont favorisé l’accroissement des productions locales. Des activités d’animation et d’organisation des éleveurs ont permis de créer des groupements professionnels dans les différentes filières de production animale.
Un accent particulier devrait être mis sur la formation et le recyclage des éleveurs afin que ces derniers évitent les croisements hasardeux qu’ils font dans le but avoué d’augmenter le poids et la productivité de leurs bêtes. Ces tentatives se font au détriment des qualités de résistance aux maladies et menacent plusieurs races locales. Il convient également de rendre plus accessibles les (micro) crédits aux éleveurs, de renforcer le cadre institutionnel de protection des animaux et la coopération sous-régionale en la matière pour une politique commune de développement de l’élevage et de sauvegarde des races animales menacées.
"La maladie" / Azon
Sculpture de Kifouli Dossou / Peinture de Wabi Dossou
2010 – 2011
10. L’accès aux soins de santé
Au Bénin, l’accès aux soins de santé est un droit constitutionnel. Mais pour de nombreux béninois, il n’est pas assuré. Les services de santé du gouvernement atteignent aujourd’hui tout juste la moitié de la population du pays (estimations à partir du taux de fréquentation des services de santé). Malgré les réels progrès enregistrés en matière de réduction des mortalités infantile et maternelle et en termes de mise à disposition des infrastructures sanitaires, bien trop nombreuses sont les localités où le poste de santé le plus proche est à plus de 50 km.
Le système de santé au Bénin souffre non seulement de l’insuffisance des infrastructures nécessaires mais aussi de la mauvaise qualité des soins prodigués. Un récent rapport de la Banque Mondiale indique que « le taux d’absentéisme est élevé parmi les agents de santé. En moyenne, 40% de ces agents sont absents sans raison valable. La qualité des soins est très faible ». Les béninois se plaignent également de la corruption, du cumul des métiers, du manque de réponses aux besoins des patients et de l’absence de service minimum en cas de grève. L’OMS a qualifié l’impunité qui règne autour du système de santé béninois de «marchandisation incontrôlée et déréglée de la santé ». Cette situation ne saurait durer, l’Etat béninois a le devoir d’améliorer la qualité des soins de santé en organisant des missions régulières de contrôle, en sanctionnant la négligence et la corruption et en rémunérant mieux les agents de santé. De nombreuses vies humaines sont en jeu.
Heureusement, il y a des éléments encourageants. D’abord, le budget que le gouvernement alloue au système de santé est en hausse. Le second élément d’espoir réside dans le bon fonctionnement des mutuelles de santé. Elles facilitent le paiement des soins de santé surtout pour les familles pauvres. Des femmes de la commune de Parakou, au Nord Est du Bénin, sont même allées plus loin en décidant à partir de leur mutuelle d’aménager un poste de santé sur place, dans le village de Komiguéa, pour ne plus avoir à marcher une heure pour se rendre à l’hôpital. De profonds changements de mentalité sont constatés. Autrefois, des gens disaient « se prémunir contre la maladie, c’est lui faire signe de venir ». Ces temps sont révolus. Ces changements culturels sont nécessaires pour améliorer l’accès au système de santé et le rendre plus performant.
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belle analyse