Seul pays du continent à ne pas avoir été colonisé par les Européens et héritière d’une des plus anciennes civilisations africaines (avec le Royaume d’Aksoum), l'Ethiopie a joué un rôle important dans la décolonisation et dans l’établissement de l’Organisation de l’Unité Africaine, alors que l’Union Africaine y a établi son siège, à Addis Abeba. Longtemps considérée comme un symbole de liberté et d’authenticité à l’échelle du continent, dont elle est aujourd’hui, avec 85 millions d’habitants, le pays le plus peuplé après le Nigeria, l’Ethiopie reste pourtant menacée par la spirale du sous-développement.
Avec un indice de développement humain de 0.363 (171ème sur 182 pays…), l’Ethiopie est en effet confrontée à la sous-alimentation, à de services médicaux insuffisants et à des opportunités éducatives limitées (en particulier pour les femmes, puisqu’on estime que près de la moitié des Ethiopiennes de moins de 20 ans restent toujours analphabètes). La sécheresse et les famines qui ont gravement affecté le pays durant le XXème siècle restent également une menace particulièrement grave, même si la stabilité dont bénéficie le pays lui épargne sans doute des effets plus ravageurs induits par de tels phénomènes.
La stabilité dont bénéficie l’Ethiopie, accentuée par la victoire écrasante du Front Démocratique Révolutionnaire du Peuple Ethiopien (EPRDF) aux élections législatives de mai 2010, contraste ainsi avec celle de ses voisins (en particulier la Somalie, le Soudan, et le Soudan du Sud), qui connaissent des violences chroniques depuis plusieurs décennies. L’Ethiopie a tout de même connu un grave conflit avec l’Erythrée (ancienne province devenue indépendante en 1993) jusqu’en décembre 2000, et les tensions restent toujours vives entre les deux pays. La Somalie voisine constitue l’autre foyer de tension régional, d’autant plus que l’Ethiopie y est intervenue militairement entre 2006 et 2009. Enfin, la région de l’Ogaden, au sud-est de l’Ethiopie et majoritairement peuplé de Somalis, a été l’objet de conflits avec la Somalie dans les années 1960 et 1970, et des mouvements sécessionnistes s'y activent encore sporadiquement.
Avec ses hauts plateaux, l'Ethiopie est un pays agricole dont près de 85% de la population est rurale. Le pays bénéficie actuellement des cours favorables du café pour lequel il est le 3ème producteur mondial. Il exporte également du thé, des fleurs et des céréales afin de réduire sa dépendance par rapport aux seuls cours du café. En vue d’attirer les investisseurs étrangers dans ce secteur, l’Etat favorise la location des terres agricoles à bas prix (moins de 5 euros par hectare et par an), ce qui occasionne néanmoins des déplacements importants de population. Parmi les investisseurs étrangers, la Chine est, à l’instar de la tendance continentale, un partenaire de premier plan (avec des échanges commerciaux d’environ un milliard de dollars par an). L’inauguration récente du nouveau siège de l’Union Africaine, construit par les Chinois, est d’ailleurs un symbole particulièrement frappant de cette relation.
Malgré sa faible diversification et sa dépendance vis-à-vis de l’agriculture (le secteur primaire représente plus de la moitié du PIB) l’économie éthiopienne connait une croissance plus rapide que la moyenne d’Afrique de l’Est, avec un taux de croissance de 7.5% en 2011 et 8% en 2010 (FMI).
Alors que les Chefs d’Etats Africains se sont réunis récemment à Addis Abeba pour le 19éme sommet de l’Union Africaine, et que la capitale éthiopienne sert de plateforme centrale à l’échelle du continent sur le plan politique, les avancées socio-économiques qu’enregistre le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique ne manqueront pas d'avoir un impact sur le développement global de la région et sur le poids du continent dans les échanges internationaux. Seul pays enclavée de la région, l’Ethiopie est certainement l’un des pays qui a le plus a gagner à une intégration économique effective en Afrique.
Nacim K. Slimane