Les migrations dans le cinéma ouest-africain

Dans un entretien exclusif du blog cinéafrique d'Anoumou Amekudji, le réalisateur sénégalais Moussa Touré (à gauche sur la photo, aux côtés d'Anoumou Amekudji) aborde la question des migrations dans le cinéma africain. Il constate que par rapport à l’importance des thèmes de l’émigration et de l’immigration dans la réalité, les films africains n’en parlent pas beaucoup. Moussa Touré évoque aussi les réalités des immigrés dans leurs pays d’accueil, sans perdre de vue les difficultés de tous genres qu’ils rencontrent une fois de retour dans leurs pays d’origine. Le cas des femmes que certains immigrés confient à leurs mères au moment de quitter l’Afrique, le préoccupe aussi. Au cours de cet entretien, le cinéaste Touré a parlé aussi de la genèse de son film La pirogue sélectionné pour le festival de Cannes, qui a pris fin le 27 mai 2012.

De manière générale, dans les films africains, quelle est la place qu’occupe l’émigration vers l’Occident ?

Moussa Touré : Je crois que les films reflètent la vie de tous les jours. Si on compare le phénomène de l’émigration dans la réalité, à sa présence dans les films africains, je pense qu’ils n’en parlent pas beaucoup. Je pense que l’émigration est très légère dans les films. La vraie réalité de l’émigration africaine vers l’Europe n’est pas assez représentée dans le cinéma africain. La majeure partie des films africains a été produite par l’Europe. Pour que votre scenario soit accepte, il faut que vous tombiez d’accord avec les producteurs européens, qui ont décidé de produire votre film. Vous savez, l’Afrique est documentaire, et les gens veulent la fictionner. Quoiqu’il en arrive, ils veulent en faire des fictions. L’Africain aime bien la réalité. Quand il va voir un film, il y recherche la réalité. Comme nous sommes des Africains, nous sommes obligés tout en réalisant des fictions, d’essayer de voir la réalité. Quand nous sommes dans la fiction, on essaie d’y mettre du réel, de la poésie, et bien d’autres choses.

La vraie réalité de l’immigration, si on veut la poser au cinéma, il faut faire des documentaires. D’ici décembre, je vais faire un film qui s’appellera La pirogue. Il m’a fallu deux ans pour convaincre les producteurs, que pour faire un film sur cet aspect de l’immigration, il faut que ce soit mi-documentaire, mi-fiction. Moi je n’ai pas envie de faire un film de fiction pour dire juste qu’il y a cinq ou quinze jeunes qui emprunte une pirogue pour aller en Espagne. En faisant ce film, ce n’est pas freiner l’immigration, mais apporter de nouveaux éclairages sur la question de l’immigration. Vous savez comment les Africains s’intègrent ? Ils s’intègrent de manière horrible, sauf les Maliens. C’est le cas des Maliens qui m’a vraiment intéressé là-bas. Ils s’intègrent d’une autre manière. Ils travaillent dur et envoient de l’argent au pays. Alors que les Sénégalais, les Togolais, et les autres, aiment bien manger, s’habiller, et en même temps ils veulent s’intégrer dans leur société d’accueil. Les deux ne marchent pas souvent ensemble. D’ici peu de temps, vous verrez un long-métrage sur l’immigration, qui s’intitulera La pirogue. Bon nombre de gens ne sont pas encore au courant de sa prochaine sortie.

Quels sont les premiers films africains sur la thématique de l’immigration, et comment ont-ils abordé la thématique ?

Le premier film dans ce domaine, est La noire de… de Sembène Ousmane. Sembène faisant partie des premiers cinéastes africains ayant vécu à l’étranger, ne pouvait qu'ouvrir une porte comme celle-là. Vous savez, l’émigration des Africains vers l’Europe ne date pas d’aujourd’hui. Elle a commencé par les gens qui nous président maintenant. Les présidents Wade et Diouf, ont tous été des immigrés en France. Ils revenaient au pays soit avec des femmes blanches, soit ils épousaient au pays des femmes qui ont également été immigrées à Paris. A l’époque de la sortie de La noire de… les films étaient quand même distribués, ce qui fait que les gens avaient pu voir le film. Mais je crois que les Européens l’ont regardé d’une manière assez paternaliste. Parce que La noire de… est un film très fort. Il y attaquait l’Europe d’une manière ou d’une autre. Mais les Européens l’ont vu d’une autre manière.

En Afrique, les gens à ce moment n’étaient pas très intéressés par l’immigration. Seuls des intellectuels s’intéressaient à cette thématique. Aujourd’hui, ce sont plutôt les analphabètes qui émigrent le plus. Les réalités ont changé. Ce qu’on peut dire, c’est que les intellectuels qui ont émigré, ont fait des films sur eux-mêmes. Parce que l’histoire de La noire de… c’est celle de Sembène docker. Ces intellectuels ou immigrés étaient à la recherche d’eux-mêmes, et le cinéma leur est tombé dessus. La plupart de ceux qui font partie de la génération de Sembène ne sont pas allés en Europe dans le but de faire du cinéma. Ils sont partis pour immigrer, et sont finalement devenus cinéastes. Quand on regarde bien, la plupart de ces cinéastes sont mariés ou ont été mariés avec des blanches. Voilà comment est né le cinéaste africain. Le cinéma africain a débuté par l’immigration il y a plus de cinquante ans… Et aujourd’hui, on voit une autre génération de cinéastes africains, qui a émigré en Europe. C’est la génération des personnes comme Abderrahmane Sissako.

Parlant de cette nouvelle génération de cinéastes africains, quelle est la particularité du traitement du thème de l’immigration chez elle ?

Ils ont immigré avec des cigares. Leurs prédécesseurs étaient un peu rudes. Eux ils sont arrivés, ils ont regardé, ils ont été plus malins. Ils se sont attachés à des gens. Ils se sont rendu compte qu’ils pouvaient se poser la question, afin de faire avancer leur carrière. Leur cas est une nouvelle sorte d’immigration, avec un bagage cinématographique, avec un bagage d’intelligence, et puis de la subtilité. Donc ce sont des immigrés subtils. Et dans leur film, cette subtilité est présente, parce qu’il ne faut pas trop frustrer l’autre. Si on veut vraiment parler de l’immigration, c’est frustrant. En France, quand on y est, il ne faut pas frustrer. Il faut rentrer dans la subtilité. Comme on le dit à propos des films français, “il y a beaucoup de subtilités”. Mais dès lors que tu es direct, on va dire que tu es raciste…

Sur le plan cinématographique, le problème que les cinéastes africains ont par rapport à l’immigration, est que dès qu’ils habitent dans un quartier, on les prend pour des immigrés. Un cinéaste est après tout un cinéaste. Leurs collègues français sont bien considérés, alors qu’eux ils sont toujours classés dans la catégorie des immigrés. Cela se remarque quelque part dans leurs films. Moi qui suis ici au Sénégal, je suis plus reconnu qu’eux. Qui va me prendre dans ma maison pour un immigré? Jamais ! Et cela se reflète même dans nos dires. Et nos dires, ce sont nos films. La nouvelle génération de cinéastes africains, qui est dispersée en France, est en train de retourner en Afrique, parce qu’ils ne se sentent pas très bien en Occident, et ils n’osent pas exprimer exactement ce qu’ils veulent dire. Par conséquent, en général ils parlent du retour dans leurs films. C'est le cas de Mama Keïta dans L’Absence par exemple.

A part L’Absence de Mama Keïta qui aborde la question du retour, y-a-t-il d’autres exemples que vous pourriez nous donner ?

Je peux citer des cinéastes comme Abderrahmane Sissako, Jean-Marie Teno, qui parlent du retour dans leurs films Octobre, et Clando. Même le film Teza de l’Ethiopien Hailé Gerima, dans lequel il fait aussi l’historique de son pays. C’est bien beau d’être quelque part et de parler de son pays d’origine. C’est un aspect intéressant de l’immigration. Etre en Afrique, et faire un film dans lequel on prend des positions politiques, n’est pas la même chose que de le faire depuis New York. Voilà la nouvelle génération !

De manière générale, pour le Sénégalais moyen dans la société où vous vivez, qu’est-ce qui symbolise à ses yeux la réussite de l’immigré aujourd’hui ?

De nos jours, ce qui symbolise la réussite c’est d’avoir une belle voiture, une belle villa et puis avoir deux femmes. L’autre symbole de la réussite de l’immigré est de porter des choses qui brillent. Il n’y a pas autre chose. Je fais un film sur la folie. Je suis en train de le monter. Le film, je l’ai tourné à l’hôpital Fann spécialisé dans le traitement des troubles mentaux, à Dakar. Le tournage m’a pris cinq ans. Tous les mercredis, j’étais sous l’arbre à palabres avec les malades. Dans ce film, tous les jours que Dieu fait il y a une femme dont le mari est immigré, qui devient folle et est emmenée à l’hôpital pour les soins. Ces femmes viennent souvent de la banlieue, tandis que les maris sont originaires la plupart du temps de Touba. Les femmes dont je parle dans le film logent souvent dans une grande maison avec les belles-mères, qui deviennent finalement les maris. Ces épouses d’immigrés sont donc traumatisées par les attitudes des belles-mères. Ce qui reflète la réussite d’un bon immigré, c’est d’avoir une femme traumatisée. Le retour que vous évoquez sera fait de retours catastrophiques. Catastrophiques ! Catastrophiques ! Que font les immigrés en Occident ? Ils font du commerce. Qui achète maintenant ? J’étais à Barcelone récemment. Dans les magasins il y a deux personnes. Dans les restaurants il n’y a personne. Les immigrés vendent des choses à la sauvette. Personne n’achète plus rien. Tout le monde le sait. Préparons-nous à des retours catastrophiques de ces immigrés, car il n’y a plus d’argent.

Selon vous, malgré les problèmes que vous évoquez, les immigrés vont rentrer ou vont rester en Occident ?

Je pense qu’ils vont préférer mourir là-bas, que de rentrer au pays. Nous qui sommes ici, nous n’allons pas accepter de prendre en charge des immigrés. Nous avons déjà d’autres personnes sur place ici qu’il faut prendre en charge. Ils vont se débrouiller. Je ne pense qu’ils aient le courage de rentrer. Ils ont fait du mal à plein de femmes ici. Ils sont venus arracher des femmes à la vie tranquille qu’elles menaient au pays. Nous leur en voulons pour tout cela.

 

Propos recueillis par Anoumou Amekudji, l'intégralité de l'interview est disponible sur son blog, cinéafrique.org

Les pieds sales : recherche de la dignité et du sens de l’existence

 

Passionné par les romans traitant de l’exil, de l’immigration, de la quête de l’identité, l’occasion m’a été donnée de lire Les pieds sales, roman publié en 2009 par l’écrivain togolais, Edem Awumey. En juin 2010, Cinéafrique a publié un entretien réalisé avec l’auteur, en marge de la douzième édition du festival littéraire Metropolis Bleu, à Montréal. Aujourd’hui, je voudrais partager avec vous, l’essentiel despieds sales, un roman lu il y a un bon moment, mais qui continue à me parler, à me questionner, en raison de l’actualité des thèmes qu’il évoque : la figure du père absent, l’exil, l’immigration, la recherche d’identité, la quête d’un sens à la vie.

La figure du père constitue une des caractéristiques de la littérature francophone. Dans le roman Les pieds sales du Togolais Edem Awumey, un jeune homme prénommé Askia, quitte l’Afrique pour la France, à la recherche de son père. Devenu chauffeur de taxi à Paris, Askia fait la connaissance d’Olia, une photographe d’origine bulgare. Askia lui parle de son père, Sidi Ben Sylla, qui a quitté le continent africain des décennies auparavant, pour chercher une meilleure vie, à l’instar de tout immigré. La description qu’il en fait, exhume chez Olia des souvenirs de photographies qu’elle a prises d’un homme toujours enturbanné, qui serait probablement le père d’Askia. «Tu ressembles vraiment à l’homme au turban que j’ai pris en photo il y a quelques années», lui confie Olia, avec qui il développa peu après, une grande amitié. L’image du père enturbanné est tellement forte dans la tête de la mère d’Askia restée en Afrique, qu’elle voit son mari à travers son fils. « Tu lui ressembles, Askia. Si tu portais un turban toi aussi, ce serait parfait. J’aurais l’impression que c’est lui qui est revenu. Juste l’impression. Car il ne reviendra pas », dit la mère à son fils. La mère sait-elle vraiment ce qui est arrivé à son mari, ou elle s’exprime ainsi, pour faire le deuil de plusieurs années de vie commune, qu’elle est incapable de reconstituer? Difficile de répondre à cette question, mais ses propos montrent qu’elle veut oublier ce passé qui ne lui apporte que des tourments, au moment où Askia cherche à clarifier le mystère que constitue la disparition de son père. Dans cette quête de la vérité sur son père, Askia rencontre une femme, qui lui dit qu’il ressemble à un homme qu’elle a rencontré à Onitsha au Nigéria. Un homme dont la photo est affichée un peu partout au Nigéria, avec la légende suivante «Ne montez dans un taxi conduit par cet homme». Pourquoi une telle inscription en bas de la photo, peut-on légitimement se demander? A en croire la même femme, cet homme serait une ombre «qui vous embarquait pour vous tuer dans les quartiers mal famés de la périphérie d’Onitsha.»

 

Ces précisions apportées par la cliente, rappellent le passé d’Askia, quand il opérait en Afrique, comme membre d’une cellule, dont la mission principale était d’empêcher les populations de critiquer les actions des autorités en place. En tant que chauffeurs de taxi, la véritable tâche d’Askia et de ses collègues consistait à poser des questions aux clients, pour détecter les «âmes rebelles critiquant à outrance le gouvernement.»Une fois que les opposants sont repérés, l’autre étape de la mission était de «réduire au silence ces bouches puantes dont les paroles pourrissaient l’atmosphère…conduire ces rebelles très loin, à l’écart de la cité, là où on ne voyait plus les lumières du centre, là où on devait pas les voir, leur mettre la ceinture explosive et appuyer sur un bouton depuis son taxi.» Les pieds sales est un roman, qui place ses personnages dans une situation insoutenable. Poussés loin des siens et de leurs environnements immédiats, ils essaient de mener une nouvelle vie, mais leur passé finit par les rattraper, pour leur rappeler les moments sombres de leur vie. C’est particulièrement le cas d’Askia qui croyait avoir complètement fermé la page de son passé de milicien, prêt à tuer pour le compte du régime dictatorial, jusqu’au jour où il rencontra Zak, un ancien membre de la Cellule qui prenait plaisir à éliminer de pauvres citoyens. «Et je te retrouve ici, dans cette ville étrangère à ce que nous étions. Je me dis que t’es parti, t’as déserté parce que t’as cru que cette ville et sa nuit qui ne savent rien de ton passé, pouvaient te protéger. Mais, tu le sais bien, le passé, c’est comme une femme amoureuse qui ne vous lâche pas. Désolé, l’ami. Crois-moi, j’aurais voulu te retrouver dans d’autres circonstances, pour célébrer une messe autre que celle-ci», lance Zak à l’endroit d’Askia. La rencontre entre les deux ex-miliciens, est une occasion pour Zak d’expliquer à Askia, qu’après son départ, certains de leurs amis qui travaillaient avec eux, ont commencé à disparaître mystérieusement. Pour éviter d’être également éliminé physiquement, Zak raconte avoir traversé la frontière, déguisé en femme, avant de suivre plus tard le périple Bobo-Dioulasso, Bamako, Niamey, Tripoli, Tunis, Malte, Athènes, pour se retrouver finalement en France.

Les pieds sales, est l’histoire de toutes ces personnes qui ont quitté leurs pays, peu importe les continents dont elles sont originaires, pour fuir les régimes totalitaires et autres formes de dictatures. C’est aussi l’histoire de millions de personnes forcées par les situations économiques difficiles de leurs pays, à quitter pour parcourir le monde, à la recherche d’un certain bien-être. A force de parcourir les routes du monde, toutes ces personnes, sont appelées les pieds sales, parce qu’elles «…avaient les pieds crottés et blanchis par la boue et la poussière de toutes les routes qu’ils avaient courues depuis là-bas.» L’expression «pieds sales», est également utilisée par Edem Awumey, pour montrer que ces personnes endurent beaucoup de choses sur leur parcours vers le bonheur, ou la liberté. Ce sont des personnes qui emmagasinent en elles toutes les frustrations du monde. Elles acceptent malgré elles toutes les souffrances qu’elles refuseraient d’endosser dans leur pays natal. Les pieds sales, c’est le portrait de tous les immigrés qui se battent chaque jour, pour espérer mener une vie décente, qu’ils ne parviennent pas assez souvent à avoir. Ceux d’entre eux qui en ont marre de vivre cette vie, décident finalement de faire le voyage retour. Après dix ans d’exil en France, Olia décide de retourner en Bulgarie, pour revoir ses parents qui lui manquaient énormément, et prendre le plaisir de redécouvrir les lieux remplis de souvenirs. «Maintenant, elle avait juste envie de retrouver sa ville, les siens et les lieux de son enfance. Parcourir les allées du Borisova, s’asseoir, le temps d’une pause, sur les marches de Sainte-Petka-Samardshijska, l’église. Des lieux qu’elle portrait en elle mais dont elle craignait de perdre les contours avec le temps», écrit Edem Awumey, au sujet de la jeune bulgare qui a compris que le retour aux sources, participe à la santé mentale de l’immigré. A l’opposé d’Olia qui arrive à la fin de son exil occidental, son ami Askia, «lui n’avait aucune envie de revoir sa ville du Golfe avec le jardin Fréau où avaient brûlé les chiens et les hommes, le bord de mer et la tristesse des rameurs, la place de l’indépendance où la liberté avait fini de se consumer dans la flamme portée par la statue qui s’y trouvait, les trois lagunes aux eaux glauques qui puaient la mort, les lagunes dans lesquelles son père s’était peut-être noyé…» Deux destins se dressent ainsi devant nous, et nous interpellent. Le premier est celui de la personne qui décide de mettre fin à son errance, pour aller savourer la joie de vive de son pays natal, et renouer avec un pays, qu’elle n’avait en fait jamais abandonné. Le second destin est celui de la personne qui n’arrive plus à retourner sur ses pas, de peur d’y faire face, et de retrouver une situation peut-être difficile à supporter. Les pieds sales, est en définitive un roman à portée universelle, une œuvre qui parle de toutes les personnes qui sont à la quête d’un sens à leur vie, ou qui ont envie de se débarrasser de certains traumatismes qui les empêchent de s’épanouir. A la quatrième de couverture du deuxième roman d’Edem Awumey, l’écrivain marocain, Tahar Ben Jelloun, fait une analyse pertinente :«Edem a su recréer un univers où au-delà du fait lui-même, au-delà de l’histoire récente de son pays, le Togo, nous retrouvons des personnages appartenant à la douleur du monde. Que ce soit en Afrique ou en Europe, des damnés de la terre errent sous l’œil complice du romancier. Ce roman nous concerne tous parce qu’il a une portée universelle.»

Les pieds sales, paru tout d’abord aux éditions du Seuil en août 2009, et réédité la même année aux éditions du Boréal, reste d’actualité deux ans après sa publication, tout simplement parce que «les pieds sales» ne cesseront d’arpenter les routes du monde, à la recherche d’un mieux-être. Etant donné que le monde continue malheureusement à entretenir les inégalités, «les pieds sales» dont parle Awumey dans son roman, chercheront toujours à fuir leurs pays qui ne leur offrent pas le bien-être dont ils rêvent pour eux-mêmes, et leurs progénitures. Sur les routes du monde, on verra toujours défiler des personnes qui ne se sentent pas à l’aise là où elles sont. Les pieds sales, est une œuvre à lire, à relire, et à partager avec toutes les personnes qui sont taraudées par l’idée de l’exil, ou qui se posent en permanence des questions sur le sens réel de leur existence.

Anoumou Amekudji

Article initiallement paru dans CinéAfrique