L’OHADA, succes story d’un outil juridique d’intégration en Afrique

UntitledL'Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires OHADA a fait le bilan et les perspectives des ses activités à l'occasion de ses vingt ans d’existence en octobre 2013. Première expérience réussie sur le plan mondial d’uniformisation de règles juridiques interétatique, elle suscite un intérêt toujours croissant d’autres pays sur le continent. Mais malgré ce succès, l’OHADA peut-elle se feliciter dans un contexte d’internationalisation, d’ouverture croissante des marchés africains, et de normalisation rapide des règles comptables & financieres ?

L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du droit des Affaires (OHADA)[1] a été créée par le traité du même nom le 17 Octobre 1993 à Port Louis (Ile Maurice) et révisé le 17 octobre 2008 au Québec. Son objectif est de remédier à l’insécurité juridique et judiciaire[2] dans ses états membres afin de restaurer la confiance des investisseurs mais aussi de faciliter les échanges socio-économiques entre les États Parties. Elle vise également à promouvoir l’arbitrage et les autres modes alternatifs comme instrument  de règlement des différends commerciaux. Elle compte actuellement 17 membres dont l’essentiel fait partie de la Zone Franc et est ouverte à tous les Etats de l’Union Africaine, qui souhaiteraient y adhérer. Son fonctionnement repose sur quatre institutions dont :

  • le Conseil des ministres de la Justice et des Finances, qui se réunit une fois par an pour adopter "les actes uniformes" applicables dans chacun des droits internes des Etats-parties ;
  • le Secrétariat permanent, rattaché au conseil des ministres et chargé de la préparation de tous les actes et du programme annuel d'harmonisation du droit des affaires.
  • l'École Régionale supérieure de la Magistrature (ERSUMA) à Porto-Novo au BENIN, assure la formation et le recyclage des magistrats et auxiliaires de justice des Etats-parties ;
  • la Cour commune de justice et d'arbitrage (CCJA) composée de sept juges élus pour un mandat de sept ans renouvelable une fois.

UntitleLes actes uniformes adoptés par l’organisation depuis sa création, ont profondément changé l’environnement juridique et socio-économique. Ils ont contribué au développement économique de la région au point où beaucoup la considère comme la première expérience réussie sur le plan mondial d’uniformisation de règles interétatiques. Ses actes divers et variés, vont du droit commercial général à l’organisation et l'harmonisation des comptabilités des entreprises en passant par le droit des suretés, le droit des sociétés commerciales, le droit de l’arbitrage, les procédures collectif d’apurement du passif, les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution, etc.

On peut citer en exemple : l’acte portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises, d’où est issu le plan comptable OHADA. Il a non seulement constitué une vraie rupture avec la règlementation OCAM alors en vigueur depuis les années 1970, mais a aussi permis d’harmoniser le droit comptable dans 16 pays Africain (aujourd’hui 17), permettant ainsi une bonne comparabilité des états financiers d’un pays à l’autre, d’un secteur à l’autre et facilitant ainsi l’accès au marché des capitaux (embryonnaire au début, mais qui ne cesse de se développer) : BRVM à Abidjan, BVMAC à Libreville, Douala stock exchange au Cameroun, etc.

Ce succès et cette reconnaissance internationale est tel qu’un projet similaire est en construction dans la caraïbes depuis le 15 mai 2007, par les autres pays[3] de l’ACP et d’autres pays de l’Amérique Latine, afin de favoriser les échanges commerciaux et le développement économique intégré de ces états dotés de réalités juridiques différentes (Organisation pour l’Harmonisation du Droit des affaires dans la Caraïbe OHADAC); De nouveaux diplômes de « Juriste OHADA » sont aussi annoncés pour la rentrée 2014 au sein des universités Panthéon Assas et Paris 13. Enfin le récent rapport VEDRINE-ZINSOU le considère comme un outil d’intégration sur lequel la France pourrait s’appuyer pour renforcer sa coopération avec l’Afrique.

Au regard de ces performances, on peut, en réponse à un article sur le même sujet de Thierry Lucas Diouf publié sur l'Afrique des Idées, aisément conclure que l’organisation a réussi sa mission. Mais, peut-on dire pour autant que tout est fait, que tout est parfait et que l’OHADA peut déjà se féliciter dans un contexte d’évolution croissante des marchés africains et d’évolution rapide de la normalisation au niveau international ?

Il faut reconnaitre qu’en dépit de ce bilan positif, l’OHADA, afin de demeurer le garant du droit des affaires de la zone, doit faire face à beaucoup de défis, qui feront l’objet d’un prochain article.

                                                                                                                                        Arnold Peyrol S. ANGLO

 Sources:

http://www.ohada.org


[1] Pour des informations plus détaillées sur le fonctionnement et les institutions de l’OHADA se référer à : www.ohada.com

 

 

 

 

 

[2] L’insécurité juridique et judiciaire étant caractérisé par la vétusté des textes juridiques en vigueur, la plus part datant de l’époque coloniale, la coexistence de texte contradictoire, la lenteur des procédures, l’imprévisibilité des tribunaux, la corruption des systèmes judiciaire et les difficultés d’exécutions des décisions ;

 

 

 

 

 

[3] La Martinique, la Guadeloupe, Haïti, le Cuba, le Bahamas, le Mexique, la Colombie, la république dominicaine, le Venezuela, le Honduras etc…