Bonjour Martin, peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Bonjour, je m’appelle Martin Diatta, je suis sénégalais et je vis actuellement en France à Lille. Au début de mes études, j’ai suivi une formation d'expertise comptable (DPECF, DECF) avant de me consacrer à l’économie et la gestion à l’université des sciences et technologies de Lille I, option Global e-business, où j’ai obtenu un Master II en 2009. Après mes études, j’ai pensé à monter un projet entrepreneurial qui consiste à mettre en place un annuaire d’entreprises, une plateforme d’échanges entre entrepreneurs et particuliers, à destination de l’Afrique, connu sous le nom de Bumbou. Le nom se lit « bambou » (en référence à la plante elle même) et je l’ai choisi pour des raisons de disponibilité de nom de domaine sur internet. De plus je trouve que ce nom "Bumbou" a une consonance africaine. Paralellement à ce projet, j'ai enchaîné quelques missions courtes en entreprise souvent à temps partiel pour me financer. J'ai occupé des postes de comptabilité, management de projet, de webmaster et de référenceur Web. Je donne aussi des cours de soutien en soirée et pendant le weekend. C'est en grande parti, grâce à ces emplois que j'ai pu subvenir aux premiers coûts liés au développement de Bumbou.com.
Peux-tu nous parler plus en détail de la plateforme Bumbou et nous expliquer comment t'es venue l'idée de la mettre en place ?
La plateforme Bumbou est d’abord un annuaire d’entreprises, c’est-à-dire que des entreprises peuvent s’y inscrire , créer leur page et leur fiche de présentation suivant leurs secteurs d’activités et poster des annonces, des appels d’offres, d’achats, de vente de produits mais aussi faire de la prospection. Ensuite, le site présente une autre rubrique d’offres d’emplois et de stages à destination du continent africain pour les entreprises qui recrutent ainsi que les chercheurs d’emploi ou de stage. Le but est donc pour tout membre, de créer son identité à travers la plateforme pour être aussi bien visible en Afrique que dans le monde entier. En ce sens Bumbou, est aussi un site de partage d’expérience et de correspondance entre les différentes entreprises qui s’y inscrivent.
J’ai décidé de créer cet annuaire parce que je voulais faire quelque chose pour l’Afrique. L’ambition était de taille et je cherchais dans quel domaine créer quelque chose qui pourrait être utile au continent. Je me suis donc dit que faisant un Master en Global e-business, j’avais le bagage nécessaire pour ce qui concerne la gestion des nouvelles technologies et qu’il fallait œuvrer en ce sens et trouver un outil intéressant au profit du continent. J’ai aussi remarqué qu'internet est un outil qui a été pris et maîtrisé à temps par l’Afrique pour des raisons d’ouverture au monde, d’échange d’informations et de partage de savoirs. J'avais aussi constaté une grande présence des cadres africains sur les réseaux sociaux professionnels. Donc le besoin de chercher l'information en ligne est bien réel en Afrique. L’idée m’est donc venue de mettre en ligne cette plateforme pour faciliter le travaille des entreprises africaines et des entreprises qui s’intéressent à notre continent. La plateforme Bumbou est aussi, pour moi, une autre façon de participer à l’amélioration des offres de service en direction de l’Afrique sur internet en répertoriant des offres adaptées ciblées essentiellement sur le continent dans des secteurs d’activité dynamiques et bien précis.
Concrètement, comment se passe le fonctionnement interne de Bumbou ?
Pour la partie annuaire, le fonctionnement consiste d’abord en une inscription de base qui reste gratuite et ouverte à tout un chacun pour avoir accès aux informations disponibles sur le site. Tout le monde peut consulter les fiches détaillées des autres membres, des annonces, des appels d’offres ou entrer en contact avec une entreprise ou un particulier. Toutefois, après l’inscription de base qui confère la statut de membre ordinaire, les entreprises ont la possibilité de mettre à jour leur statut et devenir membre premium (payant) pour être plus visible au niveau des annonces et autres services proposés en étant en tête de liste, suivant les critères de recherches, par exemple dans leurs pays et leur domaine d’activité.
Ensuite la section "offres d’emplois/stages" permet à tout inscrit de pouvoir consulter les offres disponibles sur le site et d’avoir la possibilité de postuler directement à partir de la plateforme Bumbou. Ces candidats peuvent aussi mettre en ligne leur CV avec un minimum de leur profil qui ne sera accessible qu’aux inscrits dans les détails. Il y a aussi une section d’information sur Bumbou qui fournit des données concernant l’activité économique et les facilités d’investissement pour les entreprises, suivant leurs domaines et les zones cibles. Ces informations sont de deux types particulièrement. A travers la plateforme, je relaie certaines activités comme les foires, les salons qui se tiennent sur le continent africain. Je fais un focus particulier sur tout ce qui qui touche aux enjeux énergétiques notamment aux énergies renouvelables, parce que c’est un secteur d’activité qui peut et doit être une priorité pour toute entreprise qui veut élargir son activité en Afrique.
Quelles sont les difficultés que tu as pu rencontrer dans ton projet entrepreneurial ?
Comme j’aime le dire et le répéter très souvent, une idée ne se crée pas toute seule. La première chose qu’il faut se dire et accepter c’est que tout projet suit un long processus, connaît des soubresauts avant d’être une réalité utile et tangible. J’ai eu des problèmes d’ordre logistique et financière. En effet, j’ai commencé à concevoir et à développer la plateforme dans ma propre chambre n’ayant pas un bureau ou un espace de travail adéquat. Il fallait aussi trouver les moyens financiers pour le développement technique avancé du site. J’ai donc sollicité un emprunt à la banque pour faire face à la difficulté financière et continuer d’améliorer la plateforme Bumbou. Toutefois, j’ai eu la chance d’avoir des opportunités qui m’ont permis de ne pas baisser les bras. L’université de Lille I à travers son pré-incubateur(Cré'innove) que j’ai intégré, m’a aidé à surmonter les soucis d’ordre logistique en me fournissant un espace de travail avec bureau, connexion et tout ce qu’il me fallait pour bien me concentrer sur le développement de Bumbou.
Une autre structure visant à promouvoir les jeunes créateurs et entrepreneurs, connue sous le nom des Ruches du Nord qui est une pépinière d’entreprises, m’a permis de louer un bureau à moindre coût maintenant, avec un accompagnement régulier du Directeur de l'établissment de Tourcoing. Pour le business plan, le montage et le soutien financier, j'ai été soutenu par d'autres organismes tels que la Boutique de Gestion Espace (BGE), le CLAP, VNEI, Nord Actifs, l'Agefiph et Oseo. Ces organismes ont su m’accompagner et me permettre de surpasser ces difficultés que j’ai pu rencontrer dans mon projet entrepreneurial. Une autre chose qui est un obstacle auquel je fais face est la difficulté d’entrer en contact avec les chambres de commerce de certains pays africains pour avoir des données officielles sur l’état de l’activité économique dans ces pays là. J’essaie tant bien que mal de collaborer avec ces entités mais avec beaucoup de difficultés.
Qu’est ce que tu conseillerais aux jeunes qui voudraient entreprendre comme toi ?
Le premier conseil que je donnerais aux jeunes qui veulent entreprendre, c’est d’être déterminé ; de porter très haut son idée, son projet entrepreneurial pour en faire une réalité concrète et utile à l’Afrique et au monde. Il faut savoir aussi que l’entreprenariat n’a pas de visibilité et qu’il faut œuvrer chaque instant pour le succès de son projet. Pour cela, il faut donc savoir porter son idée, y croire et le vivre au quotidien c’est-à-dire se donner les moyens pour sa réalisation. Toutefois, il faut aussi, pour tout jeune entrepreneur, savoir aller vers les gens, les potentiels bailleurs de fonds pour exposer et soutenir son projet afin de décrocher une aide financière ou logistique. C’est important parce que le soutien est toujours un manque pour les jeunes entrepreneurs africains. Le dernier conseil de marketing est de ne point attendre d’avoir un produit optimal pour le mettre sur le marché. Il faut donc partir d’une base perfectible et se mettre au défi du quotidien pour faire évoluer son entreprise afin d’offrir un service de qualité. Par ailleurs, je voudrais aussi lancer un appel aux autorités africaines. Il faudrait qu’on ait plus de structures d’accompagnement des jeunes entrepreneurs dans nos pays d’Afrique. L’esprit d’entreprise est présent sur le sol africain, il devrait donc être valorisé par nos politiques publiques.
Quelles perspectives de développement envisages-tu pour cet annuaire d’entreprises ?
Mon objectif est de devenir une référence en ce qui concerne les entreprises africaines et même toutes les entreprises qui offrent des services à destination de notre continent. Je veux avoir plus de notoriété sur internet et plus de collaboration avec les entités économiques des pays d’Afrique notamment les chambres de commerce. Je veux aussi être un interlocuteur direct dans les foires et salon sur l’activité économique africaine. Par ailleurs, je veux aussi m’engager auprès de ces jeunes entrepreneurs africains pour faire de l’internet un outil d’échange et de partage pour plus d’intégration des pays et des entreprises du continent africain. Je n’exclus pas non plus l’association avec un organisme pour travailler ensemble pour l’Afrique plus particulièrement. Mon dernier mot consiste à dire que Bumbou est un outil ouvert à tous. J’encourage tout porteur de projet à y faire un tour pour consulter les offres de service, ou faire connaître son entreprise. Cette plateforme est dès lors la vôtre, c’est votre business, c’est votre continent. Je remercie par ailleurs Terangaweb et ses lecteurs de m’avoir permis de m’exprimer sur mon projet.
Entretien réalisé par Papa Modou Diouf