Quelles sont les attentes des jeunes africains de la diaspora et comment les attirer sur le continent ?

carriere2L’Afrique a enregistré une croissance économique soutenue au cours des dix dernières années. En 2014, 17 pays africains (soit un tiers du continent) devraient enregistrer une croissance du PIB supérieur à 6,5%. De par ses performances économiques et de par sa stabilité politique qui se renforce, l’Afrique devient de plus en plus attractive, non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les jeunes africains de la diaspora.

Dans ce contexte, le Think-Tank L’Afrique des Idées a conduit une Rapport[1] auprès des jeunes africains ayant effectué une partie de leur formation à l’extérieur du continent (94% en Europe). Les résultats issus de cette enquête apportent des éclairages sur les sources de motivation des jeunes de la diaspora qui vont travailler en Afrique, les difficultés qu’ils rencontrent dans le cadre de  leur retour et les domaines dans lesquels leurs attentes vis-à-vis des entreprises sont les plus fortes.

Principaux enseignements

Le 1er enseignement concerne la perception des jeunes africains de la diaspora sur les raisons de leur recrutement en Afrique. L’enquête a pris comme postulat l’expérience internationale et la connaissance régionale de l’Afrique comme facteurs déterminants dans les choix de recrutement des entreprises installées en Afrique. 65% des jeunes africains de la diaspora interrogés considèrent l’expérience internationale comme le principal facteur déterminant pour être recruté en Afrique, contre 22% pour la connaissance régionale.

carriere3Le 2ème enseignement porte sur les principaux facteurs qui motivent les jeunes africains de la diaspora à retourner travailler en Afrique. 75% des répondants considèrent la volonté de s’impliquer dans l’essor du continent comme leur principale motivation à rentrer travailler sur le continent. L’attache familiale en Afrique est mentionnée par respectivement 43% des répondants.  Il est intéressant de noter que les facteurs en lien direct avec la vie professionnelle sont considérés comme principales sources de motivation par moins de 25% des répondants. Il en va ainsi de la possibilité d’un plan de carrière plus rapide en Afrique qu’ailleurs (25%), de l’absence d’opportunités dans le pays où le répondant a fait une partie de ses études (14%), et plus frappant, de l’intérêt pour l’entreprise qui recrute (4%). Autrement dit, que ce soit Total au Gabon, la Société Générale au Sénégal ou Deloitte en Côte d’Ivoire, dans leur démarche de retour en Afrique, les jeunes africains de la diaspora attachent très peu d’importance à l’entreprise qui les recrute.

Le 3ème enseignement est relatif aux difficultés rencontrées dans le cadre du retour en Afrique. D’après les données collectées, la difficulté majeure à laquelle les jeunes africains de la diaspora sont confrontés concerne le manque d’informations sur les opportunités existantes en Afrique. Celle-ci est mentionnée par sept répondants sur dix. Le caractère peu attrayant des rémunérations est quant à lui cité par 31% des répondants. Les délais des processus de recrutement et les réticences de la part de l’entourage  sont considérés comme faisant partie des obstacles majeurs dans la recherche d’emploi par respectivement 21% et 20% des répondants.

Quant aux attentes vis-à-vis des entreprises, 67% des jeunes ayant répondu à l’enquête estiment que l’amélioration des rémunérations et avantages sociaux constitue un principal élément sur lequel les entreprises qui recrutent en Afrique devraient s’améliorer. La rémunération est suivie par « la formation et le renforcement du capital humain » (55%) et « la responsabilisation » au sein de l’entreprise (35%).

Ces enseignements laissent transparaitre deux points majeurs : les jeunes africains de la diaspora considèrent leur expérience internationale comme leur principale valeur ajoutée pour les entreprises opérant en Afrique ; le retour en Afrique de ces jeunes est essentiellement mû par des considérations qui ne sont pas en lien direct avec les entreprises. Dans ce cadre, les entreprises qui souhaitent se développer en Afrique font face à un double défi : d’une part attirer des talents qui ont à la fois une expérience internationale et une bonne connaissance régionale de l’Afrique, et d’autre part développer une attractivité plus forte pour attirer et surtout conserver les jeunes issus de la diaspora.

carriere13 leviers majeurs pour attirer et conserver des jeunes talents issus de la diaspora

Les entreprises devraient « donner du sens » aux carrières qu’elles proposent de façon à construire une plus forte identification entre elles-mêmes et « la volonté de s’impliquer dans l’essor du continent », qui est la principale source de motivation des jeunes de la diaspora. Les nouvelles stratégies de marque devraient s’appuyer sur une communication revisitée et des canaux de diffusion plus adaptés aux attentes des jeunes africains de la diaspora, d’autant plus que l’accès à l’information sur les opportunités de carrière en Afrique demeure leur principale difficulté.

Vu les fortes attentes des jeunes de la diaspora en termes de rémunération, les entreprises devraient mieux prendre en charge les préoccupations de jeunes professionnels déjà habitués aux standards internationaux. Cela pourrait passer par des avantages sociaux et des bénéfices en nature plus substantiels.

Enfin, la formation et le capital humain étant deux dimensions clés auxquelles les jeunes Africains de la diaspora sont très attachées, les entreprises devraient les inscrire dans une perspective internationale, en proposant aux jeunes qui les rejoignent en Afrique :

  • des possibilités de formation à l’étranger
  • une mobilité aussi bien fonctionnelle et géographique (notamment en offrant la possibilité aux jeunes de travailler dans plusieurs pays du continent).

Nicolas Simel Ndiaye et Georges Vivien Houngbonon


[1] Les données ont été collectées entre le 1er et le 8 avril 2014 par le biais d’un questionnaire électronique sur un échantillon de 109 jeunes africains de la diaspora âgés entre 20 et 35 ans.