L’entrepreneuriat : modèle de développement pour l’Afrique?

Lors d'un échange passionnant avec Mr Bonaventure MVE ONDO, philosophe, ancien recteur de la Francophonie et de l'université Omar Bongo, nous nous sommes arrêtés sur des chiffres alarmants : plus de 120 millions de jeunes sortiront des systèmes éducatifs d'ici 2020 en Afrique subsaharienne et les 3/4 de ces jeunes ne trouveront pas d'emploi. Si le marché de l’emploi se raréfie en Europe par exemple, a t-il jamais existé en Afrique ? Quelles y ont les réelles perspectives d'emploi ? Les entreprises internationales joueront-elles le jeu en créant des emplois dans la sous région ? Les autorités africaines et internationales ont-elles prévu des plans d'actions opérationnels ? Est-ce que l'entreprenariat ne serait pas une solution efficace pour permettre à un plus grand nombre d'occuper une place d'acteur économique dans une Afrique en pleine croissance ?

Je crois personnellement que l'entrepreneuriat est une conséquence logique de la mutation de notre société. En quittant l'ère industrielle pour passer à l'ère de l'information, le nord et le sud se retrouvent dans une situation presque similaire : la nécessité de revoir leurs fondamentaux socio-économiques et l'obligation de concevoir de nouvelles approches dans le domaine du travail.  J’imagine parfois que dans un futur proche où nos petits-enfants et arrière-petits-enfants découvriront le « salariat » en allant visiter les musées ! En effet notre économie, fondée sur l’industrialisation et la consommation date du début du 19ème siècle, soit plus de 200 ans ce qui est infiniment petit à l’échelle de l’histoire de l’humanité. Il y a eu d’autres modèles avant et il y a aujourd’hui l’opportunité de créer de nouveaux modèles durables. Ceci est un enjeu majeur pour l’Afrique et une grande responsabilité. Mais c’est surtout une grande chance car contrairement à l’époque industrielle qui nécessitait de gros investissements et des équipements lourds, on peut aujourd’hui créer son entreprise seul chez soi avec un téléphone, un ordinateur, une connexion internet et surtout de la matière grise ! C’est sans précédent. Et pendant que les monopoles perdus nous parlent de « la crise », il n’y a jamais eu autant d’initiatives et de success stories. Même si créer son entreprise nécessite certaines aptitudes et compétences, notamment la gestion, nous serons de plus en plus nombreux à tenter notre chance en « Terre entrepreneuriale ». De la révolution industrielle à la révolution individuelle, quelle sera le modèle de développement de l’Afrique à l’aube du 22ème siècle ?

C'est pour faire un tour d'horizon de la situation globale et des spécificités de chaque pays que je me suis tournée vers des opérateurs économiques confirmés ou débutants pour prendre le pouls de cette économie africaine qui fait l'objet de toutes les convoitises.

 

Episode 1 : Au Bénin les jeunes diplômés créent leur job !

 

Lors d'un séjour à Cotonou, j'ai eu le plaisir de rencontrer une équipe de jeunes diplômés qui a décidé de prendre son avenir en main en créant sa propre structure. Ils partagent leur expérience et leur vision du futur. Une génération ambitieuse qui est à l'écoute d'un monde qui bouge mais qui doit composer avec ses réalités et les usages locaux.

Entretien avec Steve Hoda, Directeur des opérations et Vianio Kougblenou Directeur Général du cabinet Intellect Consulting 

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Présentez-nous votre structure 

Intellect Consulting est le seul cabinet-conseil pluridisciplinaire du Bénin géré par de jeunes Béninois. Fondé en Janvier 2012, le cabinet propose ses expertises en vue de favoriser le développement économique des pays africains. Les activités du cabinet tournent autour de 7 départements (Recherche-Formation et Développement – Informatique – Communication et Stratégie – Ingénierie solaire – Management des Projets – Juridique – Évènementiel & Création) et repose sur les valeurs telles que la responsabilité, la réactivité, l’éthique et la qualité. Le cabinet, à ce jour, travaille en partenariat avec plus d’une dizaine de partenaires à travers le monde. (Consulter www.intellect-consulting.com pour plus d’informations)

 

Quelle est globalement la situation des jeunes diplômés au Bénin ?

La question de l’emploi est un véritable problème dans notre pays le Bénin. Il suffit simplement de voir le nombre de candidats lors des concours de la fonction publique pour s’en rendre compte.

 

Quels sont les dispositifs mis en place pour favoriser l'emploi ? Sont-ils opérationnels ?

Pour favoriser l’emploi, l’État a mis en place des Business Promotion Center (BPC) qui sont des cadres qui incitent les jeunes à la création de leur emploi. Ces BPC accompagnent les micro-entrepreneurs dans leur idée d’entreprise.

En dehors de cela, l’État a mis en place l’Agence Nationale pour le Promotion de l’Emploi qui accompagne également les jeunes dans la mise en œuvre de leur propre entreprise et aussi pour l’employabilité dans une entreprise qu’elle soit privée ou publique. Mais il faut noter que ces structures ne sont pas tellement opérationnelles.

 

Comment vous est venue l'idée de créer votre entreprise ?

Nous sommes pour la plupart membres de l’Association des Volontaires du développement Durable (AVD-Bénin) qui est une organisation non gouvernementale que nous avons créée en 2011. Vu qu’il était difficile d’avoir des financements et que la plupart d’entre nous étaient diplômés dans divers domaines, nous nous sommes dit « pourquoi ne pas mettre en place un cabinet-conseil pour financer nos activités ? » C’est ainsi que nous avons crée Intellect Consulting.

 

Comment ont réagi vos familles ?

La génération de nos parents ne sait rien de ce qu’on appelle « entrepreneuriat ». Ils préfèrent voir leurs enfants au sein d’une grande entreprise, signe de réussite pour eux. C’est donc normal qu’ils soient restés sceptiques au départ. Maintenant, ils nous apportent leurs bénédictions puisqu’ils sont conscients qu’il n’est plus facile de trouver un emploi.

 

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

Nous avons deux grandes difficultés. La première est qu’il est difficile pour les banques de nos pays d’accompagner les start-up. Vous êtes donc bien conscients qu’une jeune entreprise qui se bat seule risque de disparaitre. Ce qui fait que le taux de « mortalité » des entreprises est très élevé. À côté de cela, il faut dire que la fiscalité dans notre pays n’est pas une fiscalité de développement. Elle tue plutôt les entreprises.  

Deuxième difficulté : Nous sommes très jeunes et la génération des personnes aux affaires ne fait pas confiance à la jeunesse qu’elle estime immature et incompétente.

 

Comment a été accueillie votre initiative ? Que pensent vos camarades de promotion de votre projet ?

C’est une initiative qui a été bien accueillie et qui force l’admiration autour de nous. Nos amis de promotion sont fiers de nous même s’ils trouvent le pari trop risqué.

 

Quels sont vos atouts ?

Nos atouts : Nous sommes jeunes diplômés dans plusieurs domaines (droit, informatique, journalisme, économie, gestion, finance, ingénierie solaire, e-marketing…). Nous avons fait pour la plupart des expériences dans de grandes entreprises de la place.

Intellect-Consulting s’est également entouré de personnes qui ont du succès dans leur domaine d’expertise, afin de bénéficier d’une formation continue pour notre équipe car nous souhaitons apporter un service de haute qualité sur le marché africain. Nous avons noué des partenariats avec des entrepreneurs & des experts en France, en Suisse, au Sénégal, au Togo, au Canada et en Inde. Ils nous apportent leur concours sur le plan méthodologique et sur le plan des idées.

Pour nous faire connaître et vulgariser le métier de consultant et plus largement la prestation de service intellectuel, nous avons également un magazine économique en ligne « LeConsultant ».

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Qu'apportez-vous à vos clients ?

Nous accompagnons nos clients pour développer leur chiffre d’affaires tout en adoptant une attitude éco-responsables. Tout le monde fait du business au Bénin, mais combien d’entreprises sont vraiment rentables ? Nous les aidons à préparer l’avenir en étant plus performantes.

 

Quels objectifs souhaitez-vous atteindre ?

Notre objectif : Nous souhaitons accompagner sur les trois prochaines années plus de 100 entreprises à développer leurs activités et leur chiffre d’affaires dans la sous-région.

 

Vous êtes-vous déjà imaginé ce que vous deviendrez dans 10 ans ?

Dans 10 ans, nous envisageons devenir un grand groupe qui accompagne les chefs d’États africains dans les processus de développement économique. C’est pourquoi, nous avons travaillé sur la vision de l’Afrique à l’orée 2050 que vous pouvez lire en allant sur ce lien : http://stevehoda.over-blog.com/2014/04/quand-intellect-consulting-vous-plonge-dans-l-afrique-de-2050.html

 

Quelles sont les aptitudes indispensables pour réussir ?

Pour réussir, il faut avoir une vision, des objectifs clairs et mettre les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs. Cela demande beaucoup de discipline, de rigueur et surtout de persévérance.

 

Quels conseils donneriez-vous à des jeunes qui veulent se lancer ?

Pour les jeunes qui veulent se lancer, nous les encourageons et nous leur disons qu’ils ont fait le meilleur choix. Maintenant, il leur revient de bien mûrir leur idée de projet, de s’entourer de personnes qui partagent la même vision qu’eux et de maintenir l’esprit d’équipe.

Ils rencontreront certainement des difficultés qui sont des marches vers le succès. Ils ont donc besoin d’un esprit guerrier pour avancer.

 

Quels sont vos prochains défis ?

  • Mettre en place différentes micro-entreprises à travers le projet CAFE (Conférence/Plan d’Action Africain sur l’Entrepreneuriat). À cet effet, nous travaillons avec Lawson Investissements pour la mise en place d’une ferme agricole à Zinvié au Bénin.
  • Servir de foyer d’opérationnalisation pour aider la diaspora à investir au Bénin.
  • Amener tous les professionnels, élèves et étudiants à maitriser les logiciels de leur domaine respectif.
  • Installer l’énergie solaire dans bon nombre de foyers béninois.

 

Article de Jenny-Jo Delblond : Coach financière et passionnée d’entrepreneuriat elle est spécialiste de l’éducation financière. Elle intervient en France, aux Antilles et en Afrique pour accompagner les entrepreneurs et les chefs d’entreprises. Conférencière, consultante et formatrice elle démystifie l’argent et permet aux gens de développer leur créativité financière pour augmenter leurs revenus et améliorer leur qualité de vie. Jenny-Jo a coutume de dire qu’elle est diplômée de la Haute École de la Vie, car autodidacte, c’est dans les entreprises qu’elle acquiert son expertise pratique dans le domaine des affaires et de la vente.

 

Journal d’un apprenti entrepreneur

Je m’appelle Emmanuel Leroueil. Je suis consultant en stratégie et travaille actuellement au Gabon, à partir duquel j’interviens dans plusieurs autres pays africains. J’ai participé à la création il y a quelque années de Terangaweb – l’Afrique des idées. Depuis un an et demi, date d’un déménagement et du début d’une nouvelle expérience professionnelle, je n’ai plus beaucoup contribué au site et à la vie de l’association, ce que je regrette. Certains camarades me l’ont reproché à juste titre. Ma réponse était que je n’arrivais pas à concilier le « faire » et le « dire » : il m’était plus facile d’écrire et de parler de l’Afrique quand je n’y étais pas ; maintenant que j’y suis revenu, je suis absorbé par toutes les activités dans lesquelles je m’implique et n’ai quasiment plus l’énergie pour participer au débat d’idées. Ce « journal d’un apprenti entrepreneur » est ma tentative de réconciliation du « faire » et du « dire ». Je le dédie à Réassi Ouabonzi, pour son exigence constante.

 

Ma vision de l’entrepreneuriat en Afrique

Comme un certain nombre de professionnels (banquiers, consultants, avocats d’affaires), je suis régulièrement amené à étudier des business plan de grandes, moyennes, et petites entreprises. Si ma profession me conduit plus à fréquenter des entreprises matures, dont l’activité est déjà pérenne et qui font face à des problématiques de croissance, la particularité du tissu économique africain fait que la question de la création d’entreprise est centrale à toute réflexion sur le développement de filières économiques, voire d’économie-pays tout simplement.

A cela j’ajouterai que j’ai moi-même la fibre entrepreneuriale et que, pour quelqu’un qui souhaite aider à répondre aux défis que rencontre l’Afrique (créer des emplois dans le contexte de boom démographique – créer des richesses et les redistribuer), la création d’entreprises dynamiques en Afrique est une préoccupation majeure. Je me suis construit des convictions sur le sujet que je souhaite partager ici.

Conviction 1 : Mieux vaut se concentrer sur des entreprises simples, qui répondent à des besoins basiques des populations (ex : maraîchage, boulangerie, élevage de poulet, cuisine, etc.), sur des marchés qui existent déjà, et sur lesquels il est possible d'apporter une petite amélioration dans le cycle production/vente. 

Cela peut paraître relever du bon sens, et pourtant cela se distingue de deux tendances fortes que j’observe.

La première, la plus courante, est que les petits investisseurs africains privilégient quasi systématiquement des petits business connus qu’ils copient à 100% et sur lesquels ils n’apportent aucune amélioration. Exemple : s’acheter un taxi. 

 

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Tout le monde connaît le prix d’une voiture standard pour faire un taxi (entre 2 à 3 millions F CFA achetée d’occasion au Gabon) ; tout le monde sait comment marche le business model de la taxi-industrie (on fait payer au taximan une sorte de loyer : il doit rendre tous les jours un niveau de gain fixé ; le surplus lui appartient, le déficit sera payé de sa poche). Les gains sont connus même si la rentabilité est limitée (environ 75 000 F CFA/semaine au Gabon), les risques sont relativement faibles. En dix mois, un investisseur peut rentabiliser sa mise sur un marché qui continue à absorber l’augmentation de l’offre. Cet exemple est duplicable à merci : la mode des télécentres (téléphones publics payants, dans les années 1990), puis celle des cybercafés, etc. La majorité des investissements immobiliers se rapprochent également de ce modèle. Ces petits business créent certes de la richesse supplémentaire, mais ils n’ont quasiment aucun effet d’entraînement sur le reste de l’économie (pas de hausse de productivité).

La seconde tendance, plus récente en Afrique, est celle suivie par la plupart des incubateurs de start-up, qui privilégient les entreprises sur des segments très innovants et souvent inexistants : services liés aux télécoms ou à internet, énergies renouvelables, voire création d’appareils technologiques. Certains de ces business model peuvent évidemment marcher et sont utiles à l’économie et à la société. Ils  présentent cependant beaucoup plus de risques pour le porteur de projet/investisseur : il faut souvent créer la demande, acquérir la souplesse nécessaire pour faire évoluer son produit vers une demande solvable, trouver l’équilibre économique et opérationnel qui permettra de développer l’entreprise sans toutefois pouvoir s’inspirer de quelque chose qui existe déjà…Le taux d’échec de ces jeunes pousses est logiquement très élevé.

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En Afrique, il y a toujours un océan d’opportunités à saisir dans les secteurs les plus simples où une demande de consommateurs existe déjà pour qui souhaite apporter de petites améliorations à l’existant et professionnaliser son organisation, ses compétiteurs étant souvent dans l’informel, ou tout simplement sous-productifs. Pour rapidement trouver un rendement, il faut se distinguer de l’offre existante par de petites innovations. Les leviers de changement sont multiples : avoir un outil de production un peu plus performant que les autres ; avoir des circuits de distribution/vente différents et plus proches des consommateurs ; avoir une exigence qualité supérieure ; améliorer le marketing de ses produits… De petites innovations qui apportent de la valeur ajoutée aux consommateurs et, in fine, à la société. Toutefois, l’intérêt majeur de ces business est de pouvoir ensuite changer très rapidement d’échelle, et donc d’avoir un modèle réplicable facilement.

Conviction 2 : Dès le début, il convient de porter son choix d’entreprenariat sur des projets duplicables et industrialisables.

Concrètement, cela veut dire que si l’on souhaite créer une boulangerie, il faut dès le début avoir l’intention de créer un « projet pilote » avec pour objectif d’en créer ensuite deux, puis trois, puis cinq…en s’inspirant du premier business créé, de ce qui a marché et de ce qui n’a pas marché. Cette ambition est le meilleur moyen de contourner le problème d’accès au financement, déterminant pour les entrepreneurs africains (http://www.omidyar.com/insights/accelerating-entrepreneurship-africa-report). L’idéal est d’abord de commencer le pilote sur fonds propres, ce qui nécessite de privilégier des affaires où l’investissement initial n’est pas trop important et où on peut commencer petit. Les flux de revenus du pilote doivent permettre de financer en partie la seconde vague d’investissement (nécessité de business avec des cycles de revenus courts et cash-flow positif), ils doivent surtout permettre de produire les données comptables sur la pertinence du modèle économique du projet et l’historique de l’activité, qui permettront d’attirer soit des investisseurs (private equity), soit de convaincre des banquiers pour accéder au crédit.

Bien entendu, la duplication du pilote ne sera pas évidente, puisque de nouveaux problèmes peuvent se poser : comment stocker une production plus importante ? Comment distribuer une production plus importante ? Comment répliquer le modèle sur de nouveaux marchés géographiques ? Comment faire face aux risques de malversation/détournement avec des équipes autonomisées et un contrôle plus faible du créateur/investisseur ? Si les difficultés sont réelles, ce sont les écueils du chemin de la croissance pour toutes les entreprises actuelles et à venir en Afrique. Des écueils surmontables.

Fort de ces convictions, je me suis lancé moi-même dans un projet de création d’entreprise il y a un mois. Je souhaite faire de la production maraîchère  intensive sous serre, aux alentours de Kigali, au Rwanda. Ce Journal d’un apprenti entrepreneur me donnera l’occasion de partager cette expérience et les leçons pratiques que j’en tirerai avec les lecteurs qui s’intéressent à la création d’entreprise dans des pays africains. Le prochain billet détaillera l’investissement que j’ai réalisé pour ce projet, et précisera en quoi il répond aux convictions détaillées ici.

 

Emmanuel Leroueil

Entrepreneuriat : Inspiration #1

Pas trop de lecture cette semaine, mais un petit film de 30 minutes pour vous inspirer! L'équipe l'a regardé, a aimé, certains ont commenté, et nous espérons que vous prendrez la suite!

Ce que nous souhaitons? Que vous puissiez, dans la partie Commentaires de cet article, marquer vous aussi quelques mots, quelques idées ou réflexions que vous inspire le film "le Mur du Son". Enjoy!

Quel mur du son? De quoi ça parle? by Lisa

Entreprendre en Afrique, c’est impossible ? Nous ne sommes pas assez formés ? Sans relations, nous n’arriverons à rien ? Les jeunes ne peuvent pas défendre leurs innovations ? Et pourtant … face à toutes ces idées reçues qui freinent souvent les porteurs de projet, voici un magnifique exemple de jeunes africains désireux d’innover pour le continent. Burkinabè, camerounais, burundais : ils ont tous à cœur de créer des entreprises ambitieuses et créatrices d’emplois pour répondre aux besoins de nos populations. Cette motivation les amènera à défier les plus grands entrepreneurs du monde jusqu’aux Etats-Unis ! La preuve en images.

Découvrez le parcours de Roosvelt, Yasmine, Ghislain, Amadou, Moctar et Gérard dans cette grande compétition qu’est la Global Social Venture Compétition et laissez-vous inspirer par le nouveau visage de l’Afrique qui innove!

Le Mur du Son, par 2ie productions:

https://www.youtube.com/watch?v=pQ1i_kIpkOg

Commentaires des rédacteurs

Véra : Un petit reportage autour d’une aventure humaine, une histoire de jeunes entrepreneurs, qui exprime enfin que les Africains sont porteurs d’innovations sociales potentiellement déterminantes pour l’avenir du continent. Inspirant et résolument optimiste, ce documentaire illustre sans aucun doute un précédent, et inspirera d’autres vocations!

Cécile : Ce reportage est un bol d’air frais d’expérience positive à l’africaine mais est également le fruit d’un travail collectif de structures, de personnes qui ont favorisé ce genre d’initiative, loin des poncifs classiques sur le continent, les jeunes africains osent montrer leurs potentiels et réussir. Ce reportage donne envie d’essayer, envie de réussir, envie de partager enfin de vaincre cette crainte lancinante que les jeunes entrepreneurs africains peuvent avoir en se disant simplement pourquoi pas nous ?

A vous! Vos réactions à chaud!

 

L’entrepreneuriat : un modèle de développement pour l’Afrique?

Lors d'un échange passionnant avec Mr Bonaventure MVE ONDO, Philosophe, ancien recteur de la Francophonie et de l'université Omar Bongo, nous nous sommes arrêtés sur des chiffres alarmants : plus de 120 millions de jeunes sortiront des systèmes éducatifs d'ici 2020 en Afrique subsaharienne et les 3/4 de ces jeunes ne trouveront pas d'emploi. Si le marché de l’emploi se raréfie en Europe par exemple, a t-il jamais existé en Afrique ?

Quelles y ont les réelles perspectives d'emploi ? Les entreprises internationales joueront-elles le jeu en créant des emplois dans la sous région ?

Les autorités africaines et internationales ont-elles prévu des plans d'actions opérationnels ? Est-ce que l'entreprenariat ne serait pas une solution efficace pour permettre à un plus grand nombre d'occuper une place d'acteur économique dans une Afrique en pleine croissance ?

Je crois personnellement que l'entrepreunariat est une conséquence logique de la mutation de notre société. En quittant l'ère industrielle pour passer à l'ère de l'information, le nord et le sud se retrouvent dans une situation presque similaire : la nécessité de revoir leurs fondamentaux socio-économiques et l'obligation de concevoir de nouvelles approches dans le domaine du travail.  J’imagine parfois que dans un futur proche où nos petits-enfants et arrière-petits-enfants découvriront le « salariat » en allant visiter les musées ! En effet notre économie, fondée sur l’industrialisation et la consommation date du début du 19ème siècle, soit plus de 200 ans ce qui est infiniment petit à l’échelle de l’histoire de l’humanité. Il y a eu d’autres modèles avant et il y a aujourd’hui l’opportunité de créer de nouveaux modèles durables. Ceci est un enjeu majeur pour l’Afrique et une grande responsabilité. Mais c’est surtout une grande chance car contrairement à l’époque industrielle qui nécessitait de gros investissements et des équipements lourds, on peut aujourd’hui créer son entreprise seul chez soi avec un téléphone, un ordinateur, une connexion internet et surtout de la matière grise ! C’est sans précédent. Et pendant que les monopoles perdus nous parlent de « la crise », il n’y a jamais eu autant d’initiatives et de success stories. Même si créer son entreprise nécessite certaines aptitudes et compétences, notamment la gestion, nous serons de plus en plus nombreux à tenter notre chance en « Terre entrepreneuriale». De la révolution industrielle à la révolution individuelle, quelle sera le modèle de développement de l’Afrique à l’aube du 22ème siècle ?

C'est pour faire un tour d'horizon de la situation globale et des spécificités de chaque pays que je me suis tournée vers des opérateurs économiques confirmés ou débutants pour prendre le pouls de cette économie africaine qui fait l'objet de toutes les convoitises.

Episode 1 : Au Bénin les jeunes diplômés créent leur job !

Lors d'un séjour à Cotonou, j'ai eu le plaisir de rencontrer une équipe de jeunes diplômés qui a décidé de prendre son avenir en main en créant sa propre structure. Ils partagent leur expérience et leur vision du futur. Une génération ambitieuse qui est à l'écoute d'un monde qui bouge mais qui doit composer avec ses réalités et les usages locaux.

Entretien avec Steve Hoda, Directeur des opérations et Vianio Kougblenou Directeur Général du cabinet Intellect Consulting 

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Présentez-nous votre structure 

Intellect Consulting est le seul cabinet-conseil pluridisciplinaire du Bénin géré par de jeunes Béninois. Fondé en Janvier 2012, le cabinet propose ses expertises en vue de favoriser le développement économique des pays africains. Les activités du cabinet tournent autour de 7 départements (Recherche-Formation et Développement – Informatique – Communication et Stratégie – Ingénierie solaire – Management des Projets – Juridique – Évènementiel & Création) et repose sur les valeurs telles que la responsabilité, la réactivité, l’éthique et la qualité. Le cabinet, à ce jour, travaille en partenariat avec plus d’une dizaine de partenaires à travers le monde. (Consulter www.intellect-consulting.com pour plus d’informations)

 

Quelle est globalement la situation des jeunes diplômés au Bénin ?

La question de l’emploi est un véritable problème dans notre pays le Bénin. Il suffit simplement de voir le nombre de candidats lors des concours de la fonction publique pour s’en rendre compte.

 

Quels sont les dispositifs mis en place pour favoriser l'emploi ? Sont-ils opérationnels ?

Pour favoriser l’emploi, l’État a mis en place des Business Promotion Center (BPC) qui sont des cadres qui incitent les jeunes à la création de leur emploi. Ces BPC accompagnent les micro-entrepreneurs dans leur idée d’entreprise.

En dehors de cela, l’État a mis en place l’Agence Nationale pour le Promotion de l’Emploi qui accompagne également les jeunes dans la mise en œuvre de leur propre entreprise et aussi pour l’employabilité dans une entreprise qu’elle soit privée ou publique. Mais il faut noter que ces structures ne sont pas tellement opérationnelles.

 

Comment vous est venue l'idée de créer votre entreprise ?

Nous sommes pour la plupart membres de l’Association des Volontaires du développement Durable (AVD-Bénin) qui est une organisation non gouvernementale que nous avons créée en 2011. Vu qu’il était difficile d’avoir des financements et que la plupart d’entre nous étaient diplômés dans divers domaines, nous nous sommes dit « pourquoi ne pas mettre en place un cabinet-conseil pour financer nos activités ? » C’est ainsi que nous avons crée Intellect Consulting.

Comment ont réagi vos familles ?

La génération de nos parents ne sait rien de ce qu’on appelle « entrepreneuriat ». Ils préfèrent voir leurs enfants au sein d’une grande entreprise, signe de réussite pour eux. C’est donc normal qu’ils soient restés sceptiques au départ. Maintenant, ils nous apportent leurs bénédictions puisqu’ils sont conscients qu’il n’est plus facile de trouver un emploi.

 

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

Nous avons deux grandes difficultés. La première est qu’il est difficile pour les banques de nos pays d’accompagner les start-up. Vous êtes donc bien conscients qu’une jeune entreprise qui se bat seule risque de disparaitre. Ce qui fait que le taux de « mortalité » des entreprises est très élevé. À côté de cela, il faut dire que la fiscalité dans notre pays n’est pas une fiscalité de développement. Elle tue plutôt les entreprises.  

Deuxième difficulté : Nous sommes très jeunes et la génération des personnes aux affaires ne fait pas confiance à la jeunesse qu’elle estime immature et incompétente.

 

Comment a été accueillie votre initiative ? Que pensent vos camarades de promotion de votre projet ?

C’est une initiative qui a été bien accueillie et qui force l’admiration autour de nous. Nos amis de promotion sont fiers de nous même s’ils trouvent le pari trop risqué.

 

Quels sont vos atouts ?

Nos atouts : Nous sommes jeunes diplômés dans plusieurs domaines (droit, informatique, journalisme, économie, gestion, finance, ingénierie solaire, e-marketing…). Nous avons fait pour la plupart des expériences dans de grandes entreprises de la place.

Intellect-Consulting s’est également entouré de personnes qui ont du succès dans leur domaine d’expertise, afin de bénéficier d’une formation continue pour notre équipe car nous souhaitons apporter un service de haute qualité sur le marché africain. Nous avons noué des partenariats avec des entrepreneurs & des experts en France, en Suisse, au Sénégal, au Togo, au Canada et en Inde. Ils nous apportent leur concours sur le plan méthodologique et sur le plan des idées.

Pour nous faire connaître et vulgariser le métier de consultant et plus largement la prestation de service intellectuel, nous avons également un magazine économique en ligne « LeConsultant » : http://intellect-consulting.com/la-mediatheque/bulletin/

 

Qu'apportez-vous à vos clients ?

Nous accompagnons nos clients pour développer leur chiffre d’affaires tout en adoptant une attitude éco-responsables. Tout le monde fait du business au Bénin, mais combien d’entreprises sont vraiment rentables ? Nous les aidons à préparer l’avenir en étant plus performantes.

 

Quels objectifs souhaitez-vous atteindre ?

Notre objectif : accompagner sur les trois prochaines années plus de 100 entreprises à développer leurs activités et leur chiffre d’affaires dans la sous-région.

 

Vous êtes-vous déjà imaginé ce que vous deviendrez dans 10 ans ?

Dans 10 ans, nous envisageons devenir un grand groupe qui accompagne les chefs d’États africains dans les processus de développement économique. C’est pourquoi, nous avons travaillé sur la vision de l’Afrique à l’orée 2050 que vous pouvez lire en allant sur ce lien : http://stevehoda.over-blog.com/2014/04/quand-intellect-consulting-vous-plonge-dans-l-afrique-de-2050.html

 

Quelles sont les aptitudes indispensables pour réussir ?

Pour réussir, il faut avoir une vision, des objectifs clairs et mettre les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs. Cela demande beaucoup de discipline, de rigueur et surtout de persévérance.

 

Quels conseils donneriez-vous à des jeunes qui veulent se lancer ?

Pour les jeunes qui veulent se lancer, nous les encourageons et nous leur disons qu’ils ont fait le meilleur choix. Maintenant, il leur revient de bien mûrir leur idée de projet, de s’entourer de personnes qui partagent la même vision qu’eux et de maintenir l’esprit d’équipe.

Ils rencontreront certainement des difficultés qui sont des marches vers le succès. Ils ont donc besoin d’un esprit guerrier pour avancer.

 

Quels sont vos prochains défis ?

  • Mettre en place différentes micro-entreprises à travers le projet CAFE (Conférence/Plan d’Action Africain sur l’Entrepreneuriat). À cet effet, nous travaillons avec Lawson Investissements pour la mise en place d’une ferme agricole à Zinvié au Bénin.
  • Servir de foyer d’opérationnalisation pour aider la diaspora à investir au Bénin.
  • Amener tous les professionnels, élèves et étudiants à maitriser les logiciels de leur domaine respectif.
  • Installer l’énergie solaire dans bon nombre de foyers béninois.

 

Article de Jenny-Jo Delblond Coach financière et passionnée d’entrepreneuriat elle est spécialiste de l’éducation financière. Elle intervient en France, aux Antilles et en Afrique pour accompagner les entrepreneurs et les chefs d’entreprises. Conférencière, consultante et formatrice elle démystifie l’argent et permet aux gens de développer leur créativité financière pour augmenter leurs revenus et améliorer leur qualité de vie. Jenny-Jo a coutume de dire qu’elle est diplômée de la Haute École de la Vie, car autodidacte, c’est dans les entreprises qu’elle acquiert son expertise pratique dans le domaine des affaires et de la vente.

Jumia Kenya – An Afro-European success

dresses jumia

In April 2013, I purchased a dress on Jumia. The reasons for my purchase were threefold; I wanted a dress, my flatmate was working for the company, and, needing a credit card purchase to ensure their system was working, he offered me a 20% discount. After an exhausting exchange of emails and phone calls, I eventually received the dress. The amount of human work involved – phone calls, emails and delivery – just for the purchase of a simple dress, revealed a company in the throes of start-up hell.

One year later, Jumia Kenya sells 5000 items per month and has become an unavoidable actor on the Kenyan reselling market. Such success is testament to the ability of Rocket Internet, the German company which owns Jumia, to apply its internet reselling business model in an economically booming country.

At heart of Jumia, The Cream of European Entrepreneurship

"Our companies succeed bjumiaecause we provide all they need: Great people, functional best practices, funding and ongoing hands-on support” (Alexander Kudlich, Group Managing Director of Rocket Internet). It is hard to argue with the model; seven years after its creation, Rocket Internet owns 75 ventures in 134 countries.

Africa’s large market base and rapid development of internet services were undoubtedly the primary factors behind Rocket’s decision to invest in the continent. A (THE FIRST?) beneficiary of this decision was Africa Internet Holding, the company that created Jumia in 6 African countries. Jumia Kenya opened at the dawn of 2013.

Kenya’s economic rise

Kenya – like several other countries in Africa – presents unique opportunities for growth. On the demand side, the demographic boom provides the company with a large potential market. With fast economic growth, a middle class is emerging, creating a large customer pool for Jumia. These people are starving to access western consumption and this is precisely what the company offers. Jumia sells everything from fashion items, to electronic devices – laptop, cameras and mobile phones -, to home equipment.

On the supply side, Kenya presents undeniable competitive advantages as both land and manpower are extremely cheap (the average wage is about 3 euros per day).

Yet, besides these intrinsic qualities for company development, Kenya is not an easy place to settle in. The country lacks basic amenities, notably low internet coverage in some regions and frequent power cuts. In addition, and more importantly, Kenya is characterized by high levels of violence and corruption which seriously hindered the work of Jumia’s co-founders and employees. All the equipment at the first Jumia office was stolen. The warehouse was constantly under threat, forcing the co-funders to implement drastic security measures._MG_7813_bis

Moreover ‘Nairobbery’, as some have dubbed the capital of Kenya, has a deserved reputation for pervasive scams, which seriously hindered the trust of customers. To reinforce the customer’s trust, Jumia is offering to pay cash at the reception of the items. Also, if the customer is not satisfied, items are exchanged for free or reimbursed.

 

 

A risky but fruitful Afro-European success

Despite these challenges, Jumia Kenya has experienced positive market development thanks to its ability to solve these issues, in a local manner. A capacity to deal with local issues and adapt to hardship lies in the nature of the company itself. As each venue is constituted as an independent company, the co-founders have all the power in their hands to deal with problems. This is how, for instance, they hired Maasai guards to watch over the warehouse, as the Maasai are the only tribe allowed to carry a weapon – their traditional spear. They are also in charge of their human resources which allows them to hire and fire people at will, to suit the needs of the company at best. This constitution frees the company from bureaucratic issues, and provides it with a necessary flexibility when dealing with local issues.

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In that regard, entrepreneurship culture is at core of Jumia’s success as it allows the company to take advantage of Kenya’s economic features and deal with difficulties in a local and flexible manner. Their results speak for themselves. Opening a company in Kenya is a risky enterprise, as displayed by the numerous issues Jumia faced. Yet as Varun Mittal – former intern at Jumia Kenya puts it, “To start something in Africa can be a daunting task but the rewards will outweigh the problems”.

Impacts on Kenya

Jumia has demonstrated how a company can successfully take advantage of Kenyan market features. However, assessing the success of a company purely based on its profit margin could be considered reductive in a country still characterized by high levels of poverty and inequality. Jumia has successfully taken advantage of the Kenyan boom, but for the majority of Kenyans any positive results are yet to emerge.

Caroline Guillet

Pour aller plus loin : http://www.jumia.co.ke/

FinAfrique : catalyseur de la finance africaine

De façon quotidienne, le cabinet FinAfrique conseille et forme les cadres financiers africains. C’est ainsi qu’il accompagne le rapide développement du secteur financier en Afrique subsaharienne. Son directeur général, Fabrice Kom Tchuente, a accepté de répondre à nos questions.

finafrique 2Fabrice Kom Tchuente, Directeur général de FinAfrique

Pourriez-vous nous présenter FinAfrique ?

FinAfrique est un cabinet de Conseil intervenant dans les domaines de la banque, finance et assurance. En 2008, avec trois cadres financiers, nous avons créé ce cabinet afin de rendre disponible en Afrique des prestations de haute qualité et technicité financière. Le constat au départ était qu’il y avait un réel besoin de compétences techniques dans le domaine de la banque, finance et assurance en Afrique pour beaucoup de cadres voire non cadres. A l’époque, pour avoir accès à ce type de prestations, notamment dans la finance « moderne », il fallait systématiquement se déplacer à l’étranger ou faire appel à de grands cabinets étrangers. Nous, nous proposons dans le cadre de notre branche formation FinAfrique Learning, au lieu de déplacer systématiquement les cadres à l’étranger (ce qui peut être onéreux), de faire venir des experts aux compétences équivalentes et qui bénéficient en plus d’une connaissance des problématiques financières locales. Tout ceci à des prix modérés afin que nos services soient à la portée du plus grand nombre, c’est-à-dire que notre but n’est pas de former uniquement les top-managers mais aussi des middle-managers et des non cadres.

FINAFRIQUE

Quelles sont les prestations de FinAfrique et à quel type de clients s’adressent-elles ?

Nous faisons du Conseil, des Etudes et de la Formation. Nos premiers clients sont les institutions financières privées (des banques et des compagnies d’assurance) ainsi que des administrations financières telles que les ministères de l’économie et des finances, des banques centrales, des banques de développement. Nous offrons également des services aux directions financières de quelques groupes industriels.

Depuis janvier 2012, nous sommes partenaire d’IFC (International Finance Corporation), filiale de la Banque Mondiale spécialisée dans le financement du secteur privé des pays en développement. Nous avons signé un contrat pour la mise en place d’un outil destiné aux PME camerounaises. Ce programme, le SME Toolkit, (boîte à outils pour les PME) offre un accompagnement et des formations en ligne via une plateforme déjà déployée dans une dizaine de pays africains. L’animation du réseau est centralisée au niveau d’IFC qui fournit du contenu aux partenaires responsables de chaque pays, mais à notre niveau nous développons, en plus de cela, nos propres contenus adaptés aux réalités locales. Nous avons mis en place cette activité il y a deux ans et elle fait sont petit chemin. Nous comptons aujourd’hui un portefeuille de 700 PME que nous formons via cette plateforme. Parallèlement nous collaborons avec des entreprises camerounaises, notamment un mouvement patronal – ECAM – dont le portefeuille d’adhérents est quasi exclusivement constitué de PME.

Plus récemment, c’est-à-dire fin juillet de cette année, nous avons conclu un partenariat avec l’African Guarantee Fund (AGF) basé à Nairobi et son partenaire l’African Management Services Company (AMSCO) basé à Johannesburg pour l’animation d’ateliers sur un ensemble de pays francophones (Afrique Centrale, Afrique de l’Ouest et Maghreb) avec l’objectif principal de renforcer les capacités des cadres des institutions financières partenaires d’AGF dans la création de nouveaux produits à destination des PME/PMI.

Nous menons également des études et des réflexions sur le développement et la croissance économique en Afrique. C’est dans ce cadre que nous avons organisé en Novembre 2013 à Douala le Forum FIFAS (Forum International de la Finance en Afrique Subsaharienne) sur le thème de la surliquidité bancaire, l’épargne et le sous-financement du secteur privé. L’objectif était de  comprendre le paradoxe qui existait entre, d’une part, les banques et des compagnies d’assurances-vie qui connaissent une situation de surliquidité et, d’autre part, le secteur privé qui peine à se financer, principalement les PME. Il y a eu de nombreux débats à la suite desquels un certain nombre de propositions ont été faites. Suite à cela nous avons rédigé un Livre Blanc qui a été présenté à de nombreux hauts responsables en Afrique Centrale, en Afrique de l’Ouest, en Afrique de l’Est, à l’île Maurice et à Madagascar afin de les sensibiliser à la mise en œuvre de ces recommandations.

La diffusion du Livre Blanc a-t-elle porté ses fruits ?

Je ne pourrais pas affirmer que c’est le Livre Blanc du FIFAS 2013 qui en est l’origine, mais je peux dire qu’il y a des recommandations présentes dans le Livre Blanc qui sont en cours de réalisation, notamment en Afrique Centrale où la banque centrale (BEAC) a accéléré la mise en place des bureaux d’information sur le crédit. Ces bureaux sont très importants et avaient été vivement sollicités par les banquiers lors du Forum. En effet, à titre d’exemple, il était très facile pour un entrepreneur, ou un particulier d’ailleurs, de faire défaut auprès d’une banque et ensuite d’aller emprunter auprès d’une autre banque sans être inquiété. Les bureaux d’information sur le crédit permettent d’éviter les abus de ce type.

Ce succès est-il dû au fait que des personnalités influentes aient pris part à ce Forum ?

Effectivement, les personnalités clés du secteur de la finance étaient présentes. Nous avons pu compter sur le Président de la FANAF (Fédération africaine des sociétés assurances), le Président des banquiers du Cameroun (APECAM), le directeur général de l’économie du Cameroun, un haut responsable de la Banque centrale (BEAC), un autre du Groupe Natixis en France, ou encore de la Banque Kepler en Suisse, ainsi que de nombreux spécialistes de tous horizons, comme le Private-Equity, des institutions internationales de développement telles que IFC et Proparco, etc.

Avez-vous l’intention d’organiser d’autres conférences sectorielles ?

En novembre dernier, il s’agissait de la première édition du FIFAS. Nous envisageons d’organiser une deuxième édition en 2015 et cette fois-ci elle aurait lieu à Abidjan.

Pour revenir au SME Toolkit, comment se matérialisent concrètement l’accompagnement des PME membres ?

Concrètement, le SME Toolkit prend la forme d’une plateforme en ligne sur laquelle les membres ont accès à des contenus qui traitent des sujets divers très utiles pour la gestion quotidienne d’une entreprise : le management, la gestion financière, le développement de son image et de son offre commerciale, la gestion des ressources humaines … Ce dernier élément est très important car les PME sont souvent gérées de façon très familiale.

Aidez-vous également les entrepreneurs que vous accompagnez à accéder plus facilement à des sources de financement ?

Nous comptons parmi nos partenaires bancaires la banque UBA Cameroon (United Bank for Africa), mais nous n’avons pas encore suffisamment développé cet axe « accès aux sources de financement » car il s’agit de l’axe le plus difficile du fait de la frilosité des banques. Avec le soutien d’IFC, nous allons accroitre ce réseau bancaire dans les mois qui viennent, notamment dans le cadre d’un projet de sélection de PME qui seront triées sur le volet. Je ne peux pas en dire plus sur ce sujet étant donné que le projet n’a pas encore été officiellement lancé.

Dans ce cas, les 700 PME déjà affiliées à la plateforme sont-elles toutes autofinancées ?

Oui, nos membres sont des entrepreneurs accomplis, ils se connectent régulièrement à nos modules de formation en ligne pour se former et lorsqu’ils ont besoin de conseils ou de services, ils nous contactent. Nous mettons à leur disposition des formateurs agréés sur le SME Toolkit qui répondent à leurs questions et échangent avec eux sur les problématiques rencontrées. C’est dans ce sens là qu’il faut comprendre le volet accompagnement.

Nous savons que dans les pays africains la très large majorité des entreprises opèrent dans le secteur informel. Cela est-il le cas des affiliés de la plateforme ?

Les entreprises que nous accompagnons n’opèrent pas forcément dans le secteur formel. Le profil de nos affiliés peut aller du simple vendeur de cigarettes qui a besoin d’améliorer la gestion de son budget à la PME de plus grande envergure qui doit diversifier son offre commerciale.

Quel est le coût pour accéder à la plateforme et aux services qui s’y rattachent ?

Tout cela est totalement gratuit. IFC ne finance pas les coûts de gestion de la plateforme, nous la maintenons par nos propres moyens. Cependant, lorsque nous avons besoin de débloquer des moyens supplémentaires, nous pouvons y installer des applications publicitaires qui vont rémunérer la plateforme.

L’autre service que nous fournissons c’est l’organisation des Journées de l’entrepreneur à la Chambre de Commerce de Yaoundé ou de Douala, en collaboration avec l’ONG Harambe Cameroon. Lors de ces journées, un certain nombre d’acteurs économiques (banquiers, consultants, des entrepreneurs ayant connu des success stories, des trésoriers, des conseillers en management) viennent tour à tour faire des présentations de façon bénévole. Cela dure toute une journée, les participants se voient remettre des supports et l’entrée coûte généralement autour de 10 000 FCFA (environ 15 euros).

Concernant le cœur de métier de FinAfrique, qui est le conseil et l’accompagnement des entreprises (banques, assurances, institutions financières), quels sont vos principaux domaines d’intervention et comment êtes-vous déployés ?

Nos domaines d’interventions sont assez divers dans le domaine de la Finance. S’il faut en citer quelques-uns, je citerais le Conseil en investissement, la Gestion Actif-Passif, la structuration d’un marché financier, la mise en place des normes prudentielles Bâle I, II et III.

Quel bilan faîtes-vous de vos six années d’existence ?

Nous nous sommes beaucoup enrichis en termes de partenariat, avec des institutions financières de renom (IFC, AGF à Nairobie, CESAG à Dakar). Nous avons su développer un large réseau d’entreprises partenaires et nous intervenons aujourd’hui pour de nombreuses institutions à travers l’Afrique subsaharienne.

Awa Sacko

Pour plus d’informations sur le SME Toolkit en Afrique francophone :

Afrimarket : au délà du buzz médiatique, une potentielle réussite ?

Logo AfriMarket

Afrimarket est devenu en quelques mois la référence du « cash to goods » en Afrique. La startup française a su très rapidement se positionner  comme leader sur une niche du marché du transfert d’argent vers l’Afrique. Les mastodontes du secteur ont –ils des raisons de s’inquiéter de l’arrivée de cette innovante startup ?

L’environnement 

Le transfert d’argent vers l’Afrique : Taille du marché et contraintes

En 2014, les transferts de fonds de la diaspora africaine en direction du continent représenteront 32,5% du total des apports financiers à destination de l’Afrique (soit un volume de 60 Milliards en USD courants). Ce sera la plus grande source de revenus extérieurs de l’Afrique devant les Investissements Directs Etrangers (29,3%) et l’aide publique au développement (26,7%)[1]. Et encore, cette estimation ne tient pas compte des transferts informels (de particuliers à particuliers).

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 Apports financiers extérieurs et recettes fiscales en Afrique 2000-2014

Source : Calculs des auteurs d’après CAD/OCDE, Banque mondiale, FMI et les données des Perspectives économiques en Afrique.

Ces données mettent en évidence la taille colossale du marché de transfert de fonds que se partagent les deux (2) principaux acteurs du marché que sont Western Union (40% de part de marché) et Money Gram (25% de part de marché)[2]. D’après un article de Corine Moncel pour Mondafrique.com, « …cette situation « duopolistique » leur a permis de taxer au prix fort les transactions sur l’argent. En mai 2013, la Banque mondiale confirmait que les commissions pratiquées par les sociétés de transfert d’argent en Afrique étaient en moyenne de 12,2 % – mais avec des écarts très grands – contre 8,96 % pour le reste du monde. C’est sur les transactions entre pays africains que ces commissions sont les plus élevées : 20 %, voire plus, vers l’Afrique du Sud, le Ghana ou la Tanzanie ! Un manque à gagner considérable pour les Africains : si ces taxes baissaient de 5 %, l’Afrique recevrait 4 milliards de dollars de plus.« [3]

En plus des taux de commissions élevés, le transfert d’argent vers l’Afrique est confronté à d’autres contraintes parmi lesquelles on peut citer :

  • L’insécurité après encaissement des fonds réceptionnés. Les personnes sortant d’un bureau de transfert de fonds étant susceptibles de transporter d’importantes sommes en liquide, elles deviennent de potentielles victimes de vol.
  • Le taux élevé de potentiels bénéficiaires de transfert qui ne disposent pas des papiers d’identité requis pour le retrait de fonds. Cette situation oblige les expéditeurs à passer par des intermédiaires qui sont parfois peu scrupuleux ou qui prélèvent une commission supplémentaire.
  • Les fonds envoyés sont très souvent utilisés pour des raisons autres que celles pour lesquelles ils sont transférés.

Le cash to goods 

Contrairement au transfert d’argent classique, où le réceptionnaire reçoit le montant transféré en liquide et peut ainsi en disposer comme bon lui semble, le principe du cash to goods permet à l’expéditeur des fonds de contrôler l’usage de la somme envoyée en payant directement pour le  bien ou le service dont le besoin a été exprimé par le bénéficiaire. Ainsi,  les fonds transférés sont réceptionnés directement par le fournisseur du bien/service vendu.

Le cash to goods permet ainsi de lever les contraintes liées à la sécurité et à l’usage des fonds transférés. Demeurent cependant les risques de revente des produits reçus contre de l’argent liquide. 

Même s’il ne fait pas le bonheur de certains bénéficiaires, le principe du cash to goods a le potentiel pour séduire les expéditeurs dont 70%, d’après une étude réalisée par la Banque mondiale, souhaiteraient avoir davantage de contrôle sur les usages des fonds transférés. De nombreux bénéficiaires sont aussi sensibles à l’aspect sécuritaire et à la réduction de tracasseries.

Afrimarket…

La jeune startup a donc flairé un bon filon. Même si de petites initiatives de cash to goods  pour l’Afrique existaient déjà (congoprox, niokobok, etc.), elles étaient cantonnées à des communautés ou ciblées pays.  Lancée(?) en Juin 2013 par trois jeunes français avec le soutien de grands noms tels que Xavier Niel (Free), Jacques-Antoine Granjon (vente-privee.com) et David Foskett (ex cadre de Western Union),  Afrimarket est passé par l’accélérateur de Startup de Orange (Orange Fab France) et a très rapidement su se positionner comme la référence du cash to goods sur le continent.

Actuellement présente dans trois pays (Bénin, Côte d’Ivoire et Sénégal), la startup ambitionne progressivement couvrir tout le continent. Le Mali, le Cameroun et le Togo sont les prochains pays sur sa liste. Elle travaille aussi d’une part, à nouer différents partenariats pour étoffer sa gamme de biens et services offerts, et d’autre part, à développer un réseau de collecte de cash à travers divers points de vente. Selon Rania Belkahia, une des cofondatrices, l’objectif est de  capter 1% des flux circulant via Western Union.

Le fonctionnement

« Si par exemple 100 euros sont envoyés, cette somme sera allouée dans le réseau Afrimarket. Le consommateur peut ensuite aller dans un point de vente, effectuer ses achats, et lors de son passage en caisse, c’est le téléphone qui se substitue à la carte bancaire« , explique Rania Belkahia. « Et son authentification se fait grâce à un téléphone mobile classique : le marchand entre le montant de l’acheteur, son numéro de téléphone tandis que le consommateur entre un code PIN dans le terminal. « Si le compte du bénéficiaire est créditeur, le serveur appelle le téléphone du client qui émettra alors un son crypté qui sera entendu par le terminal. Cela permet de vérifier si le client est le bon et de rendre la transaction irrévocable« [4].

Fonctionnement et Technologie Afrimarket

La technologie

La technologie utilisée pour la sécurisation des transactions est celle du NSDT (Near Sound Data Transfer) développée par la société Tagattitude. Elle permet d’utiliser n’importe quel type de téléphone mobile (même les Feature phones) pour effectuer un paiement grâce à un échange de signal audio contenant des données cryptées avec un terminal approprié détenu par le marchand. Une technologie qui a déjà fait ses preuves dans plusieurs pays africains dont la Côte d’ivoire, le Mali, L’Afrique du Sud, etc.

… la future référence du transfert de fonds vers l’Afrique?

Bien qu’installée sur une niche à forte croissance (qui peut même devenir un vrai marché?), et offrant l’un des plus bas taux de transfert du marché (5%), Afrimarket ne représente actuellement pas une menace pour les mastodontes du transfert d’argent vers l’Afrique.  L’une des principales raisons du succès des leaders du marché est la taille de leur réseau de distribution.  Western Union et Money Gram ont su, grâce à des partenariats avec des banques, des postes, des petits commerces, etc., se rapprocher le plus possible des usagers.

Pour devenir un concurrent réel du duo du transfert d’argent sur le continent africain, la jeune startup devra donc multiplier les partenariats sur le continent africain, et faire adhérer un nombre très important de commerçants de proximité à son réseau.

Le futur d’Afrimarket pourrait aussi s’envisager dans un rachat par l’un des leaders du marché du transfert d’argent ou de la grande distribution en Afrique. Car, au vu de l’intérêt du concept, les acteurs traditionnels ne resteront certainement pas les bras croisés à observer la jeune startup leur grignoter des parts de marché.

Ismael Christian JEKINNOU

Profession de foi pour une rubrique entreprenante !

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Des idées, les entrepreneurs en ont souvent dix par minute. Là-dessus, l’Afrique n’est pas en reste. Le continent de l’informel abrite des dizaines de milliers d’entreprises, qui contribuent à la croissance économique et au développement, menées par des entrepreneurs désireux de changer le monde ou le regard porté sur leur pays, qui se débrouillent pour se faire financer et persévèrent pour faire fructifier leurs projets.  En somme, l’Afrique bouge et innove, et notre think-tank est bien décidé à le démontrer.

Dans cette nouvelle rubrique dédiée, l’Afrique des Idées souhaite explorer les différentes facettes de l’entrepreneuriat africain, confronter les idées et les tendances pour contribuer à faire émerger des idées innovantes. Dans le processus d’une pensée en construction, nous nous intéresserons à des acteurs très différents, pour décrire sans prétendre pour autant à l’exhaustivité, une réalité que nous savons d’avance complexe et différente dans chacun des pays du continent. Entrepreneurs bien sûr mais pas seulement : structures d’appui, politiques publiques, investisseurs, entrepreneurs sociaux, institutions mondiales, joint ventures… font aussi partie du paysage entrepreneurial africain. Il y aura de la matière, c’est sûr ! Nous nous attaquerons également à des sujets plus transverses, à des analyses plus poussées, pour par exemple discuter de la définition d’une PME en Afrique, du rôle de l’informel dans la création d’activité, ou encore de l’avenir de l’entrepreneuriat social sur le continent.

L’entrepreneuriat africain est en  effet pluriel, de plus en plus féminin et les entrepreneurs africains ne font pas forcément du business comme dans la Silicon Valley. Ils ont d’ailleurs des conceptions sociales et environnementales de l’entreprise que l’Europe ou les Etats-Unis redécouvrent avec béatitude. En plus de vous informer, nous essayerons de vous inspirer, de vous donner envie de suivre certaines entreprises, voire même, sait-on jamais, de les aider d’une manière ou d’une autre. Nous tâcherons de montrer le meilleur de l’entrepreneuriat africain, en analysant les faiblesses et les difficultés spécifiques au continent.

Plus que jamais, nous sommes ouverts aux tuyaux et autres suggestions, aux mises en contact et aux contributions irrégulières. Ici, on ne dira pas « Non » mais « Pourquoi pas ? ».

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Vous n’y connaissez rien aux affaires ? Tant mieux, vous découvrirez des perles rares loin des projecteurs. Vous êtes curieux ? Nous sommes bien partis pour nous entendre. Vous vous sentez trop idéaliste ou anticapitaliste pour parler d’entrepreneuriat? Qu’à cela ne tienne, vous vous épanouirez à interviewer tous les entrepreneurs sociaux d’Afrique et découvrirez une autre façon de penser l’activité lucrative. Vous avez une compétence particulière ou une connaissance spécifique sur un sujet donné ? Partagez cela avec nous. Vous avez un peu la tchatche et vous adorez refaire le monde ? Les entrepreneurs répondront encore plus volontiers à vos questions ! Si vous avez encore plein de questions, si vous hésitez encore à vous lancer dans l’aventure, écrivez un petit mail, ce sera l’occasion de faire connaissance : vera@terangaweb.com

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