L’entrepreneuriat ethnique: vers une « économie de la communauté » ?

La permanence d’une réalité exprime au mieux l’état de vérité atteinte par celle-ci dans les phénomènes caractérisant la nature humaine et ses manifestations dans le temps et l’espace. C’est avec ce chapeau que je souhaite habiller le faîte de mon message à l’adresse de la communauté formée par les migrants économiques inter et intra états.

Il y a quelques années, j’arrivais en France pour y poursuivre mes études supérieures en sciences, et je découvrais, édifié, les possibilités technologiques de l’époque. Parmi elle le Tatoo, le Tam Tam et le Kobby qui permettaient d’envoyer de courts messages sur les afficheurs ou dans les boites vocales. Ils furent assez vite remplacés par les SMS avec l’essor de la téléphonie mobile. Bien que généralement considérés par moi, prolétaire dédaigneux de fait, comme des gadgets high-techs, les slogans Marketing n’en étaient pas moins évocateurs : « Votre tribu garde le contact avec vous » ; « Mais comment faisait-on sans Tam Tam ? » ; « Si on te cherche on te trouve ».

Cette notion de connexion et de proximité pour justifier le groupe subsiste encore de nos jours dans les adhésions aux pages et flux des réseaux sociaux et des blogs. On se reconnait dans les messages, on partage des valeurs ou on agit ensemble dans un but précis. Autrefois, on se définissait déjà par l’usage en commun du dialecte, de la terre, de la foi, et autres attributs socioculturels. Ce positionnement permanent face à soi, à l’autre et à l’environnement ne vise, selon moi, qu’à apaiser le vide existentiel ressenti et qui nécessite la clarification d’un fondement de l’être : l’Identité.

Avec la mondialisation passée et sa petite sœur plus véhémente « l’oppression économique » c’est justement cette Identité qu’on se doit de questionner pour mieux se la réapproprier. En effet, la tentative d’entropie générale associée à l’édulcoration de cette Identité s’est amorcée par la mise en compétition tout azimut des peuples avec l’intensification des échanges commerciaux, l’essor des technologies de l’information et la perte de la dualité en matière de modèles économiques. Les mains d’œuvres qualifiés s’extradent alors d’elles-mêmes dans une triangulation « départ pour étude-emploi en exil-retour fébrile » entrainant des mini chocs culturels locaux dans les sociétés d’accueil et donc des frictions à l’intégration économique. Aussi, assiste-t-on à l’hégémonie de grands groupes corporatifs qui font cavaliers seuls dans la création et l’exploitation de richesses quand ce n’est pas parfois de la simple spoliation.

Face à cela, l’apparition des mouvements de rejet de cette domination rappelle (à juste titre ?) le besoin qu’à l’Homme de se sentir libre dans cette Identité et de pouvoir décider ou s’aligner sur le destin de sa communauté. On observe ainsi les efforts d’éveil pour la renaissance africaine en lieu et place d’un package Marketing « d’émergence économique » soufflé sinon dicté par les acteurs et vecteurs de l’aliénation affective de toujours.

C’est dans cet ordre d’idée qu’il m’est apparu nécessaire de continuer à favoriser la création de ponts entre les terres mère et les diasporas sur le plan économique et identitaire et de revendiquer un tant soit peu une meilleure reconnaissance du statut ethnique :

« Une ethnie = une identité commune. Les pays qui ont favorisé l’établissement de peuples forts ont généralement délaissé la notion d’ethnie lors de leur constitution. De fait, l’appellation “entrepreneuriat ethnique” ne doit pas uniquement s’appliquer au phénomène issu de l’immigration dans les pays suscités mais aussi à l’entrepreneuriat local dans les pays où l’ethnicité est préservée. Les mécanismes sociopolitiques et culturels font souvent intervenir, dans ces derniers, les mêmes enjeux d’intégration économique pour des communautés ethniques composant les classes moyennes et populaires face à des minorités à privilèges. Cela concerne notamment les pays du sud (tiers monde) dont l’Afrique et sa diversité. Dans ce contexte cet entrepreneuriat se doit d’acquérir, à son tour, ses lettres de noblesse par sa compétitivité, la durabilité de sa performance et la qualité de ses extrants. »

Ceci pose donc le cadre d’une économie que j’appelle depuis « l’économie de communauté » qui comporte en son sein l’économie informelle des terres mère et l’économie ethnique des diasporas. Il va s’en dire, que la prise en compte des mécanismes communs de ces deux économies doit guider la recherche de solutions à l’insuffisance de revenus des populations concernées en marge de la gouvernance étatique justifiée ou non. C’est ce à quoi je m’attelle dans mon travail quotidien.

Je vous invite donc simplement à le suivre et à y contribuer avec les moyens qui sont les vôtres.

Arnaud Segla

 

Arnaud Segla, M. Sc., M. Sc. A., CAPM. Consultant spécialisé dans l’entrepreneuriat ethnique. J'organise et anime des activités d’apprentissage et accompagne plusieurs entrepreneurs dans l'atteinte des objectifs de leur projet d'affaires.

www.entrepreneurethnik.com

www.theleanintention.com