Présidentielle algérienne: le duel Bouteflika – Benfils aura-t-il lieu?

bouteflika-malade-930_scalewidth_630« Poussé par le devoir national sacré (…) J’ai décidé de me présenter à la présidentielle ». Ce sont les mots d’Ali Benfils. De quel devoir national sacré s’agit-il ? Celui de servir de « béquille »  à  Abdelaziz Bouteflika en légitimant un scrutin qui selon certains n’en est pas un ? Ou celui devoir d’apporter une alternative, un renouveau au sein de l’appareil étatique  algérien à travers une alternance démocratique ?

Les  positions sont partagées au sein de la  société et de la classe politique algérienne. Sans ambages, Ali Benfils serait le candidat le plus dangereux pour affronter le Président sortant. C’est pour cette raison que certains pensent que sa participation  à ce qu’ils appellent une mascarade électorale aura pour effet non pas de modifier l’échiquier politique algérien, mais plutôt de légitimer ce qu’on peut appeler « une élection, présélection ».

En Afrique, la problématique de  la participation ou du boycott  d’un scrutin électoral taxé de « non transparent » ne date pas d’aujourd’hui. La question s’est déjà posée par le passé concernant d’autres pays. La seule chose sur laquelle on pourrait être d’accord, c’est que le choix pour l’une ou l’autre des stratégies ne change généralement pas la donne finale. C’est encore le cas en Algérie, où dès l’annonce de la candidature du président sortant, tout porte à croire que les jeux sont déjà faits. Dès lors, quel peut être le véritable enjeu de cette élection pour Ali Benfils ?

Empêcher Bouteflika de faire la course en solo pour s'octroyer un plébiscite?

Ne pas  se présenter aux élections c’est laisser la voie libre au régime en place d’organiser avec le concours des partis politiques «  satellites » un scrutin « théâtral » où toutes les normes attestant d’une élection transparente seront bafouées. Ce qui en fait une élection presque  jouée d’avance. Bouteflika sera compétiteur et arbitre  à la fois.

La participation d’Ali Benfils  pourrait empêcher cela. Loin de pouvoir faire éclater la vérité des urnes, sa participation pourrait au moins limiter l’ampleur des fraudes électorales qui s’y dérouleront.

La vigilance et la détermination de son équipe électorale pourraient permettre une meilleure observation du scrutin, et empêcher des fraudes délibérées et exagérées de la part du régime.

D’ailleurs sur ce point bien précis, l’équipe électorale du candidat assure que tout est mis en œuvre pour que le soir des élections, les résultats proclamés soient le reflet des aspirations électorales des Algériens.

Seul bémol à cette analyse, les résultats obtenus par Ali Benfils  lors de l’élection présidentielle de 2004. Il avait certes fini derrière le président sortant mais  avec seulement 6,42 % des suffrages. Notons que cette déconvenue l’avait obligé à se retirer de la vie politique jusqu’à son grand retour pour les élections d’avril. Pourra-t-il cette fois ci prendre sa revanche ?

Revendiquer le statut de chef de file de l'opposition ?

A défaut d’être élu Président de la République, le statut de chef de file de l’opposition est très prisé en Afrique. Ali Benfils  pourrait être encore plus intéressé en se référant   à l’état de santé fragile du président-candidat qui inquiète plus d’un Algérien. La question se poserait alors en ces termes : Bouttlefika, même réélu, pourra-t-il finir son mandat  à la tête de l’Algérie ?

Dans le cas d’une élection anticipée pour vacances au sommet de l’Etat, l’ancien Premier Ministre pourrait alors tenter de surfer sur cette vague d’adhésion populaire qui pourrait  lui bénéficier au cours de ce scrutin. Le président Bouteflika, dans cette hypothèse, ne serait pas candidat. La logique voudrait qu’Ali Ali Benfils  soit le favori pour incarner l’alternance. Cette dernière hypothèse  est peut-être le véritable enjeu de cette confrontation.

Giani Gnassounou