Trop noir pour être clean !

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La publicité ouvertement raciste d’une marque de lessive chinoise a récemment défrayé la chronique. On y voit un noir taché de peinture à qui une jeune chinoise met de la lessive dans la bouche avant de le plonger dans une machine à laver. Il en ressort « plus blanc que blanc », sous un phénotype… asiatique. 

Ce n’est pas nouveau qu’une publicité fasse ainsi preuve de racisme sans équivoque. Et ce ne sera sans doute pas non plus la dernière. Mais nous avons le devoir, voire l’obligation, de ne point nous habituer au phénomène. 

Le racisme est un mal de nos sociétés et le banaliser signifierait verser dans le renoncement, qui est vecteur de culpabilité. Au même titre que dans l’espace politique, médiatique, ou sportif, la publicité est encore, trop souvent, un véritable véhicule du racisme. Même si elle pense faire appel au rire, à l’humour ou à l’intelligence émotionnelle.. 

Cette histoire tumultueuse d’une partie de l’Europe avec la publicité raciste a fait l’objet d’un admirable article de la journaliste Séverine Kodjo-Grandvaux. Certains se rappellent des fameuses marques de javel ou de produit nettoyant qui basaient leur renommée sur leur capacité à « blanchir même un nègre. »

Personne n‘oublie non plus le fameux « Y’a bon Banania », symbole d’une ségrégation raciale et d’une atteinte à la dignité d’hommes armés et impliqués dans une guerre qui n’était pas la leur. Même le poète Senghor s’en était offusqué à travers un vers resté célèbre. Qu’à cela ne tienne. Jouant sur un imaginaire collectif vassalisé, le visage ridiculisé du tirailleur a accompagné les petits déjeuners de France et de Navarre tout au long du 20ème siècle, au mépris du simple respect dû aux mémoires des Tirailleurs sénégalais.

Il n’y pas ni plus, ni moins de racistes. 

Notre époque n’est pas ni moins, ni plus raciste que par le passé. La médiatisation rapide des phénomènes donne seulement une plus grande résonnance à  une situation qui se déroule en Chine, loin de nous. Et qui, paradoxalement, est dans le même temps témoin des temps qui changent. Puisque la Chine compte une diaspora de plus en plus active et visible en Afrique. 

Mais il y a des choses que notre époque ne pourrait, ne saurait accepter. Il y a des maux devant lesquels on ne doit s’habituer. Un racisme, même sous un manteau ludique, demeure une ignominie qu’il faut dénoncer et combattre de façon vigoureuse. 

Il faut certes laisser place dans nos vies à l’humour, à l’ironie et à la plaisanterie, parfois à la blague lourdingue, même sur des sujets polémiques. Mais sans, comme c’est le cas pour la marque Qiaobi, tomber dans le grotesque, la grossièreté et le mauvais goût. Nous devons nous fixer des limites fermes et résolues devant l’inacceptable, et dénoncer avec force les productions qui s’appuient sur les ressorts de la division et l’incitation à la haine entre les peuples. 

Le racisme anti-noir est aussi un mal asiatique.

Le racisme asiatique vis-à-vis des populations noires est souvent moins connu. Or, il est aussi prononcé que celui que l’on peut rencontrer en Europe ou dans d’autres régions du monde. 

Même si nous avons tendance à nous focaliser très souvent sur ces dernières. Le lynchage sur les réseaux sociaux subi par Ariana Miyamoto, du fait de sa couleur de peau à la suite de son élection comme miss Japon en 2015 prouve ce mal asiatique. On a nié à la jeune femme, née au Japon, son identité nippone du fait de son métissage. Mais le racisme anti-noir ou la xénophobie de façon plus générale qui sévissent en Asie, semble étrangement bénéficier d’une certaine tolérance, sous le prétexte de la méconnaissance ou de l’ignorance de l’Afrique qui séviraient dans cette partie du monde éloignée de nous. Faux. 

A l’heure de la généralisation de la télévision, des médias en général et de l’Internet quasi gratuit, aucune excuse ne tient, et rien ne justifie de dévisager sottement un individu dans la rue sous prétexte qu’on n’est pas familier de sa couleur de peau.

 

Hamidou Anne