L’Afrique à l’ONU : quel mode de représentation ?

mmm_onuQuelques dossiers brûlants ont retenu l’attention des dirigeants du monde lors de l’ouverture de la 68e session de l’Assemblée Générale de l’ONU. Il s’agit notamment des crises en Centrafrique, victime d’un effondrement de l’Etat depuis le coup d’État de mars 2013, en République démocratique du Congo, où l’instabilité à l’Est du pays menace toute la région des Grands Lacs, ainsi que les situations précaires au Soudan, en Egypte, et au Mali. Mais au-delà de la gestion de ces urgences, une question a été remise au devant de la scène : la nécessité de faire plus de place à l’Afrique dans les institutions de l’ONU, en particulier au niveau du Conseil de sécurité. Les présidents tchadien et sud-africain, Idriss Déby et Jacob Zuma, se sont ainsi faits les hérauts d’une meilleure représentation de l’Afrique au sein de cet organe vital de l’ONU, où se prennent les décisions majeures au plan international. Ce débat, déjà agité au début du siècle avec le fameux projet de réforme de l’ONU, est remis au goût du jour avec insistance avec, comme nouvelle échéance, la 70e session de l’Assemblée Générale en 2015. Cependant, plusieurs questions restent en suspens dans ce débat.

Un débat légitime, mais source de rivalités

La place grandissante de l’Afrique dans les questions qui occupent l’ONU, ajoutée à une croissance démographique et économique continue qui en font un continent incontournable à l’heure actuelle, rendent obligatoire la prise en compte de ces revendications. Dans le même ordre d’idées, il est temps d’ouvrir cet organe à l’Amérique Latine et au monde arabe.

Pour l’Afrique, plusieurs schémas de représentation pourraient être envisagés. L’idéal serait que les dirigeants africains eux-mêmes se mettent d’accord sur un pays pour les représenter de manière permanente au Conseil de sécurité. Cela aura l’avantage d’éviter les querelles de positionnement tout en préservant la configuration actuelle de cet organe. Bien entendu, ce n’est pas gagné d’avance, parce que les candidats à ce fauteuil se révèlent nombreux. L’Afrique du Sud, première puissance économique du continent, se verrait naturellement occuper cette place. Le Nigéria, autre géant politique du continent, ne le verrait pas d’un bon œil, tout comme le Tchad. Le Maroc, îlot de tranquillité dans une Afrique du Nord trouble, pourrait lui aussi réclamer cette place. De même, le Sénégal, fort de son aura démocratique et de sa stabilité politique, serait un bon candidat. D’autres Etats moins en vue sur la scène internationale, mais non moins importants sur l’échiquier continental auraient leur mot à dire : Ghana, Botswana et Gabon, pourquoi pas ?

Ce dilemme pose le problème des critères à prendre en compte pour la désignation d’un tel représentant. Faut-il plutôt miser sur le poids politique, l’embellie économique, la stabilité politique ou l’ancrage démocratique ? Ce sont autant de facteurs à ne pas négliger pour un enjeu aussi important. Peut-être qu’il faudrait aussi mieux distribuer les parts : un pays anglophone et un pays francophone, ou encore un pays choisi pour sa stabilité politique et un autre pour ses performances économiques. Peut-être qu’il faudrait un pays nord-africain et un autre au sud du Sahara. Tous ces scénarios ne sont qu’hypothèses, mais il serait légitime d’avoir deux pays africains au Conseil de sécurité. L’Europe en a bien deux. Et cette réforme doit aller plus loin qu’une révolution de palais.

L’Union africaine, candidat de compromis ?

En visite au Sénégal début octobre, le Président Zuma a promis de porter le débat avec son homologue sénégalais au niveau continental lors du prochain sommet de l’Union africaine. Peut-être que c’est là que réside la solution. A défaut de pouvoir s’entendre sur le profil du futur représentant de l’Afrique au Conseil de sécurité de l’ONU, l’Union africaine pourrait elle-même y être désignée. Puisque les questions qui y sont traitées sont essentiellement multilatérales, et que l’organisation panafricaine demeure une instance où jusqu’à présent les heurts majeurs ont été évités, il serait judicieux de la mandater pour défendre les positions africaines sur les questions d’ordre mondial. 

 

MMM