Le combat de Malick Noel Seck pour une alternance générationnelle au parti socialiste sénégalais

Note aux lecteurs

Ce mois d'octobre, nous avons décidé, au sein de la rubrique Analyse politique de Terangaweb, de consacrer une série d'articles à des jeunes leaders politiques en Afrique. L'un des objectifs de notre think tank est, en effet, de défendre, promouvoir et accompagner le processus de renouvellement des élites politiques sur le continent. Dans le premier article de ce focus, Fary Ndao s'intéresse à Malick Noel Seck, récemment exclu du parti socialiste sénégalais pour avoir posé un débat de fond relatif à, selon lui, la nécessité de changer la direction actuelle de cette formation politique. Dans les prochaines semaines, suivrons d'autres articles sur Julius Malema, étoile montante de l'ANC et Wael Ghonim, influent blogueur égyptien et icône de cette jeunesse qui a eu raison du régime de Hosni Moubarack.

 Hamidou Anne

Responsable de la rubrique Analyse politique

 

 

Après plusieurs semaines d'observation de la vie politique sénégalaise, il était intéressant de se pencher sur le "cas" Malick Noël Seck, jeune leader du parti socialiste sénégalais qui vient d’être exclu pour avoir défié publiquement le secrétaire général de ladite formation politique. Si l'on positionne le débat d'un point de vue sociétal, voire générationnel, il est difficile de rester insensible au discours tenu par Malick Noël Seck. Le jeune responsable socialiste s’est fait exclure de son parti après avoir demandé au secrétaire général, Ousmane Tanor Dieng, de céder son fauteuil après sa défaite à l'élection présidentielle de mars dernier. L’on comprend certes que l'on puisse reprocher à Malick Noël Seck d'avoir initialement porté ce débat sur la toile, dans la presse et sur les ondes radio. Il aurait en effet pu défendre d’abord ses vues au sein des structures du parti. Cependant, en avait-il la latitude nécessaire dans ces instances dirigées par un homme promu à l'issue d'un congrès sans débat ? Il est possible d’en douter.

Pour en venir au débat de fond, Malick Noël Seck dit une chose simple : "Dans tout parti politique, il doit y avoir un renouvellement de leadership". Cette parole est d'une réelle évidence et n'est pas seulement valable en politique, mais dans beaucoup de domaines: de la gestion du domicile familial avec la responsabilisation des ainé(e)s, aux terrains de sport collectif où les leaders techniques sont renouvelés à chacune des fins de cycle de leur équipe. Dans une société sénégalaise de plus en plus démocratique, il est devenu difficile d’imposer une omerta dans les appareils politiques en dépit des opinions des uns et des autres. Dans un pays qui a connu Sembène Ousmane, Cheikh Anta Diop ou Mamadou Dia, aucune compétence n'est irremplaçable, aucun homme n'est éternel. L’ancien président de la République Abdoulaye Wade l'a appris à ses dépends au soir du 25 Mars 2012, comme Abdou Diouf avant lui à l'aube de ce siècle. Aucun homme n'est irremplaçable, encore moins en politique où les échéances électorales viennent régulièrement sanctionner la capacité des leaders de partis à porter les débats, fédérer les troupes et susciter l'engouement populaire. Sur ce dernier point, Ousmane Tanor Dieng a failli car il a été battu à aux deux élections présidentielles (2007 et 2012) auxquelles il fut le candidat de son camp.

De 41% en 2000, le score socialiste est passé à 14% en 2007 puis à 11% en 2012. Les faits sont là et ils sont têtus. Voilà les chiffres qui caractérisent le bilan de Tanor Dieng à la tête du PS sénégalais. Comment le parti le plus ancien du Sénégal et le mieux implanté sur le territoire national peut-il fermer les yeux sur ce passif ? Pourquoi ce parti, qui a dirigé le Sénégal pendant 40 ans, et qui dispose d’un nombre conséquent de cadres et d’intellectuels, fait-il la sourde oreille sur ce que prêche Malick Noël Seck ?

Ces questions méritent réflexion et engagent l'ensemble de la jeunesse sénégalaise. Le Sénégal et l'Afrique ne méritent pas moins que les Etats Unis ou le Royaume Uni. Barack Obama a été élu à la tête de la première puissance mondiale à 47 ans. David Cameron dirige la 7ème économie mondiale depuis ses 42 ans. Malick Noël Seck a, lui, 39 ans, et il s'estime encore immature pour briguer la tête du parti socialiste, il demande tout de même un renouvellement de son leadership. La jeunesse sénégalaise et africaine devrait lui prêter une oreille attentive, soutenir sa posture et l'encourager à poursuivre son combat pour le bénéfice de la démocratie et du renouvellement des élites dans les formations politiques en Afrique.
 

Fary Ndao