La jeunesse de la population africaine constitue un atout pour sa croissance économique. Toutefois, les jeunes sont confrontés à un chômage deux à trois fois plus élevé que celui des adultes. Plusieurs politiques publiques sont envisageables. Laquelle choisir ?
La jeunesse de la population africaine est l’un des atouts majeurs pour son développement. Aujourd’hui, la frange de la population âgée de 15 à 24 ans représente 20% de la population totale, soit près de 200 millions de personnes. De plus, les projections démographiques prévoient son doublement en 2045[1]. Alors que ces données suscitent l’espoir d’une main d’œuvre abondante pour la croissance économique de l’Afrique, plusieurs obstacles subsistent et rendent plus difficile le choix des politiques économiques appropriées.
En effet, quoique la situation soit hétérogène d’un pays à l’autre, les pays Africains partagent certaines caractéristiques qui constituent des obstacles à l’emploi des jeunes. D’abord, l’offre de travail est limitée par une faiblesse du niveau et de la qualité de l’éducation. Il convient de noter toutefois que selon le récent rapport sur les perspectives économiques en Afrique, « la qualité est surtout insuffisante dans les pays pauvres ; alors que la quantité fait défaut dans les pays à revenus intermédiaires ». Ensuite, en ce qui concerne la demande de travail, elle reste inférieure à l’offre en partie du fait de la qualité de la croissance économique. Cette dernière est principalement tirée par le secteur des services, notamment les télécommunications. Or, ces secteurs ne sont pas abondants en main d’œuvre, surtout non qualifiée. Enfin, la troisième caractéristique commune aux pays africains est l’inadéquation entre l’offre et la demande. Cela se traduit par un taux de chômage plus élevé chez les jeunes les plus instruits et un taux de chômage deux à trois fois plus élevé chez les jeunes que chez les adultes.
Face à ces obstacles, on peut envisager plusieurs politiques publiques. Elles peuvent être des politiques de croissance, de l’éducation ou du marché du travail. Dans certains pays comme le Sénégal, le gouvernement privilégie les grands travaux pour réduire le taux de chômage des jeunes. Cependant, les emplois issus des politiques de grands travaux ne sont pas en général durables. Ainsi, certains pays privilégient le développement du secteur privé à travers la mise en place d’un environnement plus favorable aux affaires. Les emplois créés dans ce cadre prennent plus de temps pour être concrétisés mais sont plus durables.
En complément aux politiques de croissance, une amélioration de l’offre de travail des jeunes peut être envisagée via une augmentation de l’accès à l’éducation et un renforcement de la qualité de celle-ci. Une faiblesse de la qualité de l’éducation interagit avec la croissance économique pour créer un cercle vicieux du chômage des jeunes. Concrètement, la faiblesse de la productivité due à la qualité de l’éducation entrave la croissance économique, toute chose égale par ailleurs ; ce qui affaiblit la demande de travail. Il faut trouver un équilibre entre le cursus académique et le cursus professionnel. A ce niveau un diagnostic plus approfondi des perspectives économiques de chaque pays est nécessaire pour identifier le cursus auquel il faudra accorder plus de priorité.
Ces politiques d’amélioration de l’offre de travail sont surtout destinées aux jeunes – de plus de 15 ans – qui entreront plus tard sur le marché du travail. Quant à ceux qui y sont déjà et qui ne disposent pas des qualifications demandées, ils doivent être ciblés par des politiques du marché du travail appropriées. Les programmes de formation sont les plus répandus. Ils peuvent être intégralement financés par l’Etat ou pris en charge en partie par le secteur privé comme c’est le cas au Maroc. Sachant que le secteur privé est plus à même d’identifier les formations les plus appropriées, cette dernière option a permis de réduire le chômage des jeunes au Maroc selon les conclusions d’une évaluation menée par l’Agence Française de Développement. La seconde option serait un recrutement direct dans le secteur public, quoique les capacités d’embauche y soient limitées par le budget de l’Etat. D’autres options consistent à mettre en place des structures d’orientation et d’assistance à la recherche d’emploi pour favoriser l’insertion des jeunes, des subventions pour le recrutement des jeunes ou des incitations à l’entrepreneuriat des jeunes.
Face à cette pluralité des options de politiques publiques, les choix s’avèrent complexes surtout avec des ressources financières très limitées et l’existence de plusieurs autres priorités de développement. Par ailleurs, le manque d’évaluation rigoureuse des politiques déjà adoptées dans certains pays ne permet pas de dégager des « Bonnes Pratiques » pour les autres pays. Dès lors, à défaut d’une analyse spécifique à chaque pays en vue d’identifier les politiques les plus adéquates, il revient au lecteur de formuler des choix sur la base des connaissances qu’il ou elle possède sur un pays en particulier. A vos méninges !!!
Georges Vivien Houngbonon
[1] Perspectives économiques de l’Afrique, Banque Africaine de Développement, 2012.
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