Le FMI et la Banque Mondiale mettent en avant l’importance des classes moyennes dans la dynamique de croissance de l’Afrique. Qu’est la classe moyenne, dans un espace où l’on considère que plus de la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté ? Que représente-t-elle ? Quelles sont ses caractéristiques et quel rôle joue-t-elle effectivement dans l’environnement économique du continent ? Cet article introduit une série d’articles concernant la classe moyenne en Afrique.
Le concept de classe moyenne en Afrique n’est pas récent, mais son importance comme moteur de développement est de notre millénaire. Déjà à l’époque coloniale, le concept existait avec ce qui était dénommé « auxiliaires indigènes du colonisateur ». Aujourd’hui, il occupe une place importante dans le discours des partenaires financiers au développement.
Fruit de l’afro-optimisme contemporain, le concept prend racine dans une théorie économique qui stipule que la croissance économique entraînerait une augmentation des revenus et donc de la consommation, puis des investissements productifs qui, eux-mêmes seraient favorables à la croissance économique. Un tel mécanisme suppose donc qu’une partie de la population profite suffisamment de la croissance économique, en ayant accès à un niveau de revenu lui permettant de sortir de sa situation de pauvreté. Cette évolution de la structure sociale sera suivie par une modification des habitudes de consommation. La consommation ne se limitera plus à la couverture des besoins de base ; elle s’étendra au-delà de la nécessité de survie et aux loisirs, permettant de renforcer l’activité économique en incitant à l’industrialisation et à une diversification du tissu économique.
Ces changements de comportements pourraient aussi affecter la sphère politique. Les classes moyennes auraient accès à termes à l’information, à l’éducation et pourraient ainsi se construire une expérience suffisante sur la base des pratiques observées dans d’autres pays. Tout ceci, leur donnant les moyens de participer activement au débat politique, et par voie de conséquence, de contribuer effectivement au processus de démocratisation. L’accumulation de connaissances et d’expériences importées d’ailleurs devrait, par ailleurs, se traduire par l’émergence de l’individualisme – signe de l’émancipation des individus par rapport aux pratiques traditionnelles et aux principes de la solidarité. En fait, il ne s’agit là que d’une caricature de ce qui est considéré comme classe moyenne dans les pays développées et dans une moindre mesure de la vision qu’ont les principaux partenaires financiers au développement de l’Afrique et qui justifie l’intérêt qu’ils portent à l’émergence de classes moyennes en Afrique.
En dépit de cette présentation reluisante du rôle de la classe moyenne, il est néanmoins nécessaire d’être prudent quant à son importance en Afrique. Au-delà du fait que l’appartenance aux classes moyennes reposent sur des considérations monétaires et relatives au coût de la vie, l’Afrique présente des particularités qui rendent presque impossible la projection de l’image des classes moyennes dans les pays développés sur le continent. [1]
En effet, le secteur informel occupe une place importante dans l’économie des pays africains, de sorte qu’il est difficile de déterminer de façon strictement objective une frontière entre personnes pauvres et personnes appartenant à la classe moyenne. La réduction lente de la pauvreté en pplus de l'importance du secteur informel constituent un frein à l'émergence d'une véritable classe moyenne en Afrique. Si des stratégies de développement existent dans tous les pays du continent, notamment dans le cadre des OMD, leur mise en œuvre et les résultats qu’elles fournissent ne sont pas très convaincants. Par ailleurs, le processus de démocratisation en Afrique n’est réduit qu’à la tenue régulière d’élections sans un réel changement dans les régimes ni dans le dialogue politique.
Si une chose est certaine, c’est que la dynamique économique du continent a induit l’émergence de nouveaux groupes sociaux qui modifient son paysage social. Analyser la dynamique de ces groupes permettra certainement de mieux encourager l'émergence de la classe moyenne africaine et d’en faire un levier de développement pour le continent. Les prochains articles portant sur ce thème abonderont dans ce sens. Ils feront l’état des lieux au regard des critères « socio-économiques » caractéristiques des classes moyennes (revenu/consommation et comportements) et analyseront leurs impacts sur l’activité économique et l’environnement politique des pays africains.
Foly Ananou
[1] Selon la BAD, appartient à la classe moyenne en Afrique toute personne dont les dépenses sont comprises entre 2 USD et 20 USD PPA par jour alors qu’en France, sera considéré comme individu de la classe moyenne une personne dont le revenu mensuel (hors impôts et prestations sociales) se situent entre 1 163 et 2 127EUR.
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Bravo et bonne continuation car vous et nous, nous et vous, nous et eux restés aux pays, eux et ceux de la diaspora sont les acteurs du présent et surtout du futur de NOTRE SI CHERE AFRIQUE ne demandant qu'à voir ses peuples lui offrir le succès mérité, se traduisant par un développement économique et dans d'autres secteurs phares.
Mais aussi par un leadership plus conquérent sur la scène mondiale.
Paul MENDY