La stabilité des prix constitue pour les autorités une priorité. En effet, dans un contexte de croissance permanente des prix, sachant que les revenus n’évoluent que très peu, la crise économique et sociale est inévitable. Les analyses théoriques sur le sujet ont permis d’identifier la politique monétaire comme instrument pour lutter contre l’évolution des prix. Cette mission est donc confiée aux Banques Centrales Le succès remporté par certains pays développés[1] suite à l’adoption d’une politique de ciblage de l’inflation a amené plusieurs pays dans le monde à adopter une telle politique pour lutter contre l’inflation. Cette politique consiste en un engagement de la Banque Centrale sur un objectif d’inflation pour une période déterminée sous la forme d’un niveau ou d’une fourchette.
En Afrique, les pays de la zone franc et plus récemment l’Afrique du Sud (2000) et le Ghana (2007) ont adopté une politique de ciblage de l’inflation mais nous intéresserons dans ce cas précis au Ghana et à l’Afrique du Sud – dans la zone franc, l'inflation ayant toujours été sous contrôle. D’après le graphique ci-dessous, on peut dire que le Ghana en adoptant cette politique a réussi dans une large mesure à réduire son taux d’inflation qui est passé de 46% en 1996 à 10,7% en 2007 et 11.6% en 2013. En Afrique du Sud, elle a permis de contenir l’inflation, qui avait atteint en 2008 11.5% suite à l’envolée des prix internationaux des carburants et des produits alimentaires au cours du premier semestre de cette année, sous la barre de 7%.
Généralement, l’efficacité de la politique de ciblage de l’inflation est associée à l’amélioration de la performance économique. Plusieurs travaux ont montré que les pays qui adoptent cette politique sont caractérisés par une baisse du niveau et de la volatilité de l’inflation ainsi que de la volatilité de l’output. D’après les tableaux suivants on peut confirmer l’efficacité de la politique de ciblage de l’inflation à l’Afrique du Sud et au Ghana dans la mesure où on assiste à une baisse de l'évolution du niveau des prix ainsi que de la volatilité de l’inflation à la période post-ciblage dans les deux pays. Aussi, une hausse du taux de croissance peut être constatée dans sur la même période et dans les deux pays, avec cependant une volatilité plus importante au Ghana.
En somme on peut dire que la politique de ciblage de l’inflation a contribuer à améliorer la performance économique dans ces deux pays africains tout en conservant pour les deux un taux de change flexible .
Le recours à une politique de ciblage de l’inflation signifie nécessairement une annonce publique saine et claire d’un objectif de moyen terme de lutte contre l’inflation. Cela implique un engagement institutionnel qui fixe comme objectif la stabilité monétaire en faisant recours à une politique monétaire transparente et crédible qui permet de développer les capacités d’anticipations des autorités monétaires. Selon Mishkin (2000), la poursuite d’une politique de ciblage de l’inflation repose, en réalité, sur deux principales conditions:
- Les autorités monétaires sont amenées à annoncer le niveau ou la fourchette cible de l’inflation lors de la poursuite de l’objectif de stabilité des prix.
- La politique monétaire est sensée être transparente et mise en œuvre par une Banque Centrale indépendante, autonome et responsable afin d’atteindre ses cibles d’inflation.
A ce niveau deux types d’indépendance se présentent. En premier lieu, l’indépendance politique des autorités monétaires qui repose sur l’absence d’intervention du gouvernement concernant les décisions de politique monétaire. En deuxième lieu, l’indépendance économique qui repose principalement sur les limites posées au financement de l’État par la Banque Centrale. D’après le tableau ci-dessous, la spécification de l’objectif de la politique monétaire en Afrique du Sud et au Ghana est effectuée par la Banque Centrale et le gouvernement. Ce dernier peut emprunter auprès de l’institut d’émission dans les deux pays. En Afrique du Sud, le gouvernement ne participe à la prise des décisions des autorités monétaires tandis qu’au Ghana le gouvernement est considéré comme un membre votant. Néanmoins, dans ces deux pays aucun rapport n’est publié en cas d’échec au niveau de réalisation de la cible de l’inflation.
La réussite de la politique en Afrique du Sud et au Ghana a été porté par l’indépendance dont jouissait les Banques Centrales de ces pays. Dans ce contexte, les pays africains qui adoptent déjà la politique de ciblage de l’inflation ou qui ambitionne d’adopter une telle politique devraient renforcer, d’un coté l’indépendance et l’autonomie des autorités monétaires et d’un autre coté, la crédibilité et la transparence de leur politique monétaire pour garantir l’efficacité désirée de cette politique.
Ben Hassine Aymen
Références :
- Don C., Jack S. et Carolyn W., 2006, « Une nouvelle analyse de l’horizon de la cible d’inflation. » ; Revue de la Banque du Canada.
- Faber S. M. et Fischer A. M., 2000, « L’inflation sous-jacente en Suisse. » ; Bulletin trimestriel n° 4 de la Banque Nationale de Suisse.
- Mishkin F. C., 2000, « Inflation targeting in emerging market countries. »; American Economic Review Papers and Proceedings.
- Quah D. et Vahey S. P., 1995, « Measuring core inflation. »; Economic Journal n°105.
- Symphorien E. M., 2003, « La cible d’inflation en zone CEMAC. » ; Revue d’Economie & Gestion vol. 4 n°1.
- Roger S., 2009, « Inflation Targeting at 20: Achievements and Challenges»; IMF Working Papers.
- Roger S. et Stone R., 2005, « On Target? The International Experience with Achieving Inflation Targets»; IMF Working Papers.
[1] La Nouvelle Zélande est le pays pionnier qui s’engageait officiellement dans l’objectif de ciblage de l’inflation à partir du février 1990.
Leave a comment
Your e-mail address will not be published. Required fields are marked with *