Deir es-Sultan: un coeur discret à Jérusalem

Deir es-Sultan 1Quelle expérience est plus vivifiante que la découverte de la sainte capitale de l’Humanité? Les ruelles étroites enfermées dans les remparts sont construites avec des pierres brûlantes qui transpirent l’Orient. La diversité y est omniprésente, à la fois celle des religions, des Nations, des idéaux. La beauté de Jérusalem et tout ce qu’elle respire sont d’une inspiration chamboulante, qui vous renvoie en pleine figure histoire, géopolitique et cohabitation des croyances. Deir es-Sultan s’est transformée en une réponse d’une quête d’africanité en territoire oriental.

Tout a commencé lorsqu'Hébron m’a appris que les soldats israéliens d’origine subsaharienne ne sont pas facilement intégrés dans la société. Pire, ils sont envoyés dans les zones les plus sensibles pour effectuer leur service militaire. Naturellement, les pieds posés à Jérusalem, une de mes questions lors de ce séjour a été celle de la présence d’une empreinte religieuse africaine. Depuis plus de 1.500 ans, l’Eglise éthiopienne survit à Jérusalem grâce à la persévérance et la force de ses moines. En effet, dépourvu de ressources significatives, ils se contentent de revenus peu diversifiés. L’identité de ses fidèles se résume en leur attirance pure vers la sainteté de la Ville de cuivre et d’or.

La place du Saint-Sépulcre bouillonne, peu importe l’heure. Les fidèles s’extasient et se recueillent dans cette église où, selon la tradition chrétienne, le corps de Jésus de Nazareth fut déposé après avoir été descendu de la croix. Et pourtant, à droite de l’entrée, une petite porte interpelle les plus curieux. De la même taille, des escaliers en pierres vous font deviner que l’édifice se situe sur un toit. Son étroitesse est à l’image du monastère: cette église éthiopienne, installée à l’extérieur du Saint-Sépulcre et non en son sein comme les représentants des autres rites, est d’une austérité quasi-mystique. Cette caractéristique en fait son charme et le lieu dont la spiritualité m’a le plus frappée. Deir es-Sultan 2

La visite de la chapelle se fait en un regard mais ses détails sont captivants, à l’image de la cathedra, siège épiscopal, d’un rose et d’un kitsch ultra-prononcé. L’originalité du lieu me fait regretter son manque de visiteurs, en me faisant l’effet d’un de ces trésors ramassé à tout hasard. Après avoir longé la chapelle et escaladé une volée de marches, une cour intérieure s’offre à nous. Le dôme qui y trône se trouve être celui qui filtre les rayons de lumière éclairant la chapelle Sainte-Hélène, se situant juste dessous. Pointer l’exotisme du lieu, en référence au continent africain, comme un regard calqué sur l’orientalisme, est simplement l’antithèse de l’architecture de Monastère du Sultan.

Il est presque curieux de réaliser que la condition de Deir Es-Sultan est représentative des migrants subsahariens au Proche-Orient. Reléguée en seconde position, la condition des africains l’est autant à l’image des diverses polémiques en Israël et de leur traitement dans les pays arabes. Lieu d’un autre temps, il me fait remarquer que l’évolution met du temps à se mettre en place. Mais, malgré son histoire, son aspect pittoresque vous marque par son authenticité. Deir es-Sultan est la seule présence africaine dans un des lieux les plus saints du christianisme. Néanmoins, l’Afrique respire à travers le maintien de ce monastère au coeur des fois de l’humanité.

Ghita Chilla