La plupart des barons du PDS sont empêtrés dans de beaux draps avec la décision des autorités sénégalaises de les poursuivre en justice. Ainsi, après la mise sous mandat de dépôt de Ndèye Khady Gueye, certains d’entre eux sont-ils montés au créneau pour dénoncer un énième épisode de ces traques. Mais la manière dont ces enquêtes sont décriées laisse à désirer, car elle fait fi de ce qu’elles représentent des moments-clé dans la vie d’une Nation.
Par exemple, Monsieur Babacar Gaye, ancien Ministre des Affaires Politiques sous Wade, actuellement Président du Conseil Régional de Kaffrine (Centre), est intervenu dans quelques médias dakarois pour fustiger les décisions des autorités politiques et judiciaires du Sénégal. De même, Me Ousmane Ngom, ancien Ministre de l’Intérieur et ancien Ministre de la Justice, estime qu’aucune juridiction sénégalaise ne devrait statuer sur le cas des anciens Ministres de Wade, excepté la Haute Cour de Justice de la République.
Pour leur propre information, les cours spéciales du Sénégal, y compris la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI), sont organisées par des textes adoptés par le Parlement du pays, avec des missions claires et précises. De ce fait, sauf à ne plus faire confiance à la justice de ce pays et à ses lois, Ousmane Ngom, au vu des fonctions qu’il a occupées, se devrait de laisser libre cours à cette justice.
L’Etat du Sénégal ne se perd pas en conjectures en mettant en place un dispositif de répression des crimes économiques. Que les anciens caciques du PDS se rassurent donc, la volonté de faire rendre des comptes et/ou de rapatrier les fonds publics mal utilisés n’est pas une perte de temps. D’ailleurs, le Sénégal est un pays dont les hommes de droit sont réputés intègres et les institutions politiques et judiciaires fiables. Les récriminations dont ces procédures de reddition des comptes font l’objet pèchent par trop de juridisme. Bien entendu, il incombe aux magistrats d’en décider. Mais encore faut-il qu’on leur accorde, et par la même occasion à la justice sénégalaise, l’occasion de rendre leurs décisions. Et cela passera inévitablement par le crédit qu’on accordera aux institutions judiciaires du Sénégal.
Le billet d’écrou délivré à Ndeye Khady Gueye, ancienne Directrice du Fonds de Promotion économique, par le Doyen des Juges d’instruction, Mahawa Sémou Diouf, n’est qu’une page de la longue liste d’auditions et mandats de dépôt dont les anciens barons du PDS font l’objet. Sur rapport de la Cellule Nationale de traitement des informations financières (Centif), le magistrat a décidé de placer sous mandat de dépôt la dame de la Gueule-Tapée pour escroquerie portant sur des deniers publics, détournement de deniers publics, complicité de détournement et de blanchiment de capitaux. La gravité des chefs d’accusation, portant sur près de 3 milliards, démontre à elle seule qu’il s’agit, pour cette affaire comme pour les autres, de moments-clé de la vie d’une Nation.
Seul l’avenir nous édifiera sur la réalité des faits incriminés, envers elle comme envers les autres. Mais nul n’a le droit de faire obstacle à la justice sénégalaise. Car c’est bien l’avenir de cette dernière qui est en jeu, qu’il s’agisse de la CREI, de la CENTIF, de la Haute Cour de Justice, ou des tribunaux ordinaires.
Mouhamadou Moustapha Mbengue