Tanzanie : un « lion » de la croissance en Afrique de l’Est

CarteTanzanie-ZanzibarLa croissance de l’économie tanzanienne a progressé pour atteindre 6.4 % en 2012 contre 6.4 % en 2011. Les perspectives de croissance à moyen terme ont été considérablement améliorées par les découvertes de gaz naturel. Avec environ 930 milliards de mètres cubes de réserves prouvées exploitables, la Tanzanie peut espérer encaisser quelques 10 à 15 milliards USD au cours des dix prochaines années. Ces découvertes pourraient conduire à la création d’une usine de gaz liquéfié (GNL). Elles ouvrent des perspectives d’augmentation des investissements directs étrangers (IDE), stimulés par les relations de la Tanzanie avec les économies asiatiques en forte croissance (notamment l’Inde) appelées à devenir des destinations intéressantes pour des exportations de GNL. En 2012, le groupe British Gas, un investisseur important, a ainsi fait part de son intention d’intensifier sa présence en investissant 500 millions USD dans l’exploration du gaz naturel tanzanien.

Selon les prévisions, le PIB réel augmentera de 6.9 % en 2013 et de 7 % en 2014, tiré principalement par les investissements dans le secteur gazier et par la poursuite de l’expansion des services et de l’industrie. La construction en cours d’un gazoduc de 532 kilomètres entre Mtwara et Dar es-Salaam dopera également à moyen terme la croissance. Le secteur des services, qui compte pour environ la moitié du PIB, devrait progresser de 8.5 % en 2013 et de 8.9 % en 2014, sous l’effet de la croissance rapide du commerce et de la réparation (10.4 % en 2013, 11.2 % en 2014), des communications (19.2 % en 2013 et 2014) et de l’intermédiation financière (10 % en 2013, 10.5 % en 2014). Les secteurs de l’industrie et de la construction, toujours selon les prévisions, connaîtraient une croissance de 9.8 % en 2013 et de 10.2 % en 2014.

Au cours des vingt dernières années, l’économie de la Tanzanie a connu d’importants changements structurels. La part de l’agriculture dans le PIB a chuté de plus de 22.5 %, passant de 30.6 % en 2001 à 23 % en 2011. Durant la même période, la part de l’industrie dans le PIB a progressé de 10.7 %, passant de 8.4 à 9.3 %, mais ne compte toujours que pour un dixième de la production totale. Le secteur des services a progressé de 41.7 à 48 % du PIB. Les nouvelles composantes de la croissance, comme les communications, la construction, l’électricité et l’extraction minière, dont le gaz, accentueront probablement encore cette mutation.

La création généralisée de richesses et la réduction de la pauvreté attendues de ces changements structurels ont été  modérées. L’agriculture qui, avec 74 % de la population active, reste le premier secteur d’emplois pèse encore fortement dans la croissance. Le secteur manufacturier reste modeste alors que les nouveaux secteurs de croissance, comme l’activité minière, fonctionnent en circuit économique fermé peu créateur d’emplois. Avec les ménages ruraux, dont la majorité dépend de l’agriculture pour vivre, représentant 80 % des pauvres, la Tanzanie demeure un pays à prédominance agraire. Les autres phénomènes relèvent principalement d’une transformation en surface.

Energie : un goulot d'étranglement à la croissance

À moyen terme, les perspectives de croissance pour la Tanzanie dépendent fortement d’une amélioration de la situation de l’énergie. L’hydroélectricité assure 55 % des sources d’énergie et l’entreprise publique Tanesco fournit l’électricité à un prix élevé, non seulement parce qu’elle doit acheter l’électricité coûteuse fournie par les producteurs indépendants pour remédier à la pénurie, mais aussi parce qu’elle est minée par son inefficacité dans la distribution du courant et dans la perception des recettes. Alors que la production d’énergie s’était à peu près stabilisée en 2012, la situation s’est aggravée début de 2013 et le secteur est aujourd’hui considéré comme étant sur le point de s’effondrer. Avec des arriérés financiers de l’ordre de 1.3 % du PIB, Tanesco aurait besoin d’importants investissements pour moderniser ses infrastructures obsolètes de production, de transmission et de distribution. Pour la seule capitale Dar es-Salaam, principal centre industriel et commercial du pays, Tanesco devrait remplacer la plupart des transformateurs – en service depuis plus de 35 ans – desservant le centre-ville. Selon les pouvoirs publics, la réalisation du gazoduc de Mtwara à Dar es-Salaam apportera une solution aux problèmes actuels grâce à l’augmentation de l’indispensable production d’électricité par du gaz.

Le taux national d’accès à l’électricité est de 16 % seulement, et est encore plus bas dans les campagnes (3.6 %). La forte dépendance à l’hydroélectricité de la Tanzanie, qui subit de fréquentes périodes de sécheresse, la rend vulnérable aux conditions climatiques et les coupures de courant à répétition représentent un handicap majeur pour les entreprises. L’accroissement de la capacité de production électrique grâce à des sources alternatives d’énergie est par conséquent vital. À cet effet, la société nationale d’électricité Tanesco s’efforce de trouver des solutions pratiques pour accroître son efficacité et alléger son budget.

Coopération économique, intégration régionale et commerce

La Tanzanie est partie prenante dans plusieurs accords commerciaux régionaux et organisations économiques régionales, en particulier la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (Southern African Development Community – SADC). Conformément aux protocoles signés, le pays a fait des efforts considérables pour accélérer l’intégration régionale en s’appuyant sur la réduction tarifaire. Il met en oeuvre le protocole du marché commun de la CAE, opérationnel depuis juillet 2010, qui a fait l’objet d’une stratégie nationale spécifique, la National Strategy for Implementing the Common Market Protocol. La Tanzanie joue un rôle important dans le processus des États membres de la SADC pour instaurer un marché commun.

flagsElle participe aussi activement, dans le cadre des accords régionaux, et notamment au sein de la CAE, aux travaux visant à simplifier les procédures douanières et à mettre en oeuvre des mesures facilitant le commerce. Les barrières tarifaires ont déjà été éliminées grâce à la mise sur pied d’une union douanière régionale. Avec les autres membres de la Communauté, la Tanzanie travaille à la levée des barrières non tarifaires et à faciliter le commerce transfrontalier régional. L’implantation d’un poste frontière unique à Namanga, à la frontière entre le Kenya et la Tanzanie, est en cours pour simplifier les mouvements de marchandises entre les deux pays. Parallèlement à ses efforts pour mettre en oeuvre une union douanière pleinement opérationnelle de la CAE, la Tanzanie a conclu en 2012 avec le Kenya un accord prévoyant des échanges en continu (24 heures sur 24) à travers leur frontière.

Les exportations de biens et services se sont élevées à 8.7 milliards USD en 2012, une hausse de 17.4 % sur les 7.4 milliards USD enregistrés en 2011. Les importations de biens n’ont augmenté que de 5.3 %, passant de 12 milliards USD en 2011 à 12.7 milliards USD en 2012. Un fait marquant des exportations tanzaniennes a été la diversification des marchés en dehors de l’Union européenne (UE). De 2000 à 2011, les exportations vers l’UE ont chuté de 50 à 30 % du total des exportations, alors que, vers l’Asie, elles ont grimpé de 23 à presque 30 %. Plus important encore : les exportations vers les pays africains ont bondi de 10 à 30 %.

Malgré ces développements positifs, la Tanzanie reste vulnérable aux chocs extérieurs. D’abord, les exportations sont très concentrées : en valeur, l’or compte pour 40 % du total des marchandises exportées ; une chute des cours mondiaux aurait pour effet de réduire fortement les recettes totales tirées des exportations. Ensuite, la rapide croissance annuelle de la période 2000-12 partait d’une base très faible, la part des biens et services exportés dans le PIB n’étant initialement que de 13 %. En troisième lieu, la grande majorité des marchandises exportées, comme les minerais et les produits agricoles non transformés, ont peu de valeur ajoutée et peu d’effet direct sur les emplois et le développement technologique dans l’économie nationale. Par conséquent, un ralentissement de l’activité économique au plan mondial et régional pourrait affecter négativement la croissance des exportations, les IDE et le financement des marchés.

Une éducation en souffrance

L’insuffisance des ressources humaines contrarie sérieusement les efforts de la Tanzanie pour libérer son potentiel de croissance. Le niveau élevé de malnutrition infantile (39 % des moins de 5 ans ont des retards de croissance et 16.8 % souffrent de carences alimentaires) affecte le développement du capital humain. Le taux de scolarisation dans le primaire est retombé à 94 % (contre 95 % en 2010 et un pic de 97 % atteint en 2006), comme le taux d’achèvement de la scolarité, tombé de 69.3 à 64.4 %. Le rapport 2012 sur la pauvreté et le développement humain attribue ces reculs à « l’absentéisme » et à la violence. Bien qu’en amélioration, de 1.51 en 2010 à 1.48 en 2011, le ratio enseignant/élève souligne l’existence de classes surpeuplées. Favoriser et améliorer l’environnement scolaire, remédier à la pénurie d’enseignants et d’équipements et prendre des mesures incitatives en faveur des enseignants, en particulier dans les régions reculées disposant d’un accès limité aux routes, figurent parmi les principales réformes à promouvoir.

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Le taux de scolarisation dans l’enseignement secondaire est passé de 29.9 % en 2010 à 32.1 % en 2011. Dans l’enseignement supérieur, il s’est accru de 17 % en 2010/11 ; dans l’enseignement professionnel, il a progressé de 26 % du fait du doublement des admissions par des institutions non gouvernementales, et de 69 % en 2011 dans l’enseignement technique. L’effondrement récent (de 90 % en 2007 à 50.4 % en 2010) de la proportion des élèves réussissant les examens de quatrième année et les faibles niveaux scolaires dans les écoles primaires sont particulièrement préoccupants. Autre sujet d’inquiétude : le nombre croissant de diplômés du supérieur mal préparés à l’entrée sur le marché du travail.

Une croissance qui ne réduit pas la pauvreté

Les plans et stratégies pour le développement national de la Tanzanie proposent un programme de réduction de la pauvreté, considérée comme un enjeu politique prioritaire. L’Enquête sur le budget des ménages (Household Budget Survey 2007) fait état d’un haut niveau de pauvreté (33 % au plan national, 37.6 % dans les zones rurales), en dépit de la forte croissance économique que continue de connaître le pays. Selon une enquête par sondage (National Panel Survey- NPS) la situation s’est encore dégradée sur la période 2009-11. Une croissance économique dépourvue de base large, des taux élevés d’inflation et une forte croissance démographique peuvent expliquer la détérioration du taux de pauvreté. Les données du sondage révèlent aussi un léger tassement au regard de l’inégalité, le coefficient Gini passant de 0.36 en 2009 à 0.37 en 2011.

De nombreuses initiatives destinées à réduire la pauvreté sont suivies de peu d’effet, faute de moyens, d’engagement et de volonté politiques et d’un environnement institutionnel adéquat. L’initiative baptisée « Kilimo Kwanza » ou « Agriculture d’abord » n’a pas encore produit les fruits escomptés pour les revenus et l’emploi dans le secteur agricole. Une autre initiative (Agricultural Growth Corridor of Tanzania) destinée à encourager le partenariat public/privé dans la transformation agricole progresse lentement en raison d’une politique incohérente et de sa faible transparence, en particulier sur les questions des impôts et de la terre.

L’absence de tout système efficace de protection sociale aggrave encore le fléau de la grande pauvreté. Les mécanismes actuels sont limités et, pour l’essentiel, réservés aux entreprises du secteur formel. Ils excluent l’économie informelle qui emploie la majorité des travailleurs. Conséquence : seulement 3 % de la population active tanzanienne sont couverts par un système de sécurité sociale. En outre, les institutions en place ne sont pas financièrement solides en raison de leur très mauvaise gestion. Faute d’une réforme énergique, le risque de banqueroute imminente pèse sur les trois caisses de retraite couvrant les travailleurs du secteur public, un problème aggravé par des réformes qui tardent à venir, en raison du manque d’intérêt politique qu’elle suscite. Parallèlement à ces réformes, la Tanzanie devra achever l’élaboration du Cadre de protection sociale ( National Social Protection Framework) en panne depuis 2011.

Article réalisé par African Economic Outlook

Le Mozambique, entre croissance et pauvreté

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Le Mozambique affiche un taux de croissance moyen impressionnant de 7.2 % sur les dix dernières années. La tendance devrait se maintenir en 2012 et 2013, à respectivement 7.5 et 7.9 %. Le coup de fouet donné à la production de charbon par les premiers mégaprojets mis en exploitation en 2011, couplé à la solide performance des services financiers, des transports, de la communication et du bâtiment, a contribué à porter la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel à 7.2 % en 2011. L'économie reste dopée par le niveau élevé des investissements directs étrangers (IDE), destinés en priorité aux industries extractives, mais aussi par la bonne tenue de la production agricole et la poursuite des investissements d’infrastructure.

La mise en œuvre des mesures en faveur des pauvres élaborées en 2011 et l’ambitieux programme d’investissement dans les infrastructures devraient creuser le déficit budgétaire, de -3.3 % en 2011 à respectivement -6.8 et -7.4 % en 2012 et 2013. À moyen terme, le principal défi structurel consistera à élargir l’assiette fiscale du pays. Les apports d’aide devraient poursuivre leur décrue, de 51.4 % du budget en 2010 à 39.6 % en 2012. La diversification de la base du revenu, à travers notamment une fiscalité plus efficace dans le secteur des industries extractives, sera vitale pour soutenir et promouvoir une croissance inclusive.

La forte expansion économique a favorisé les investissements dans les infrastructures du pays, encore embryonnaires, le long des trois principaux couloirs logistiques (Maputo, Beira et Nacala) pour faciliter les exportations de charbon et désenclaver les pays voisins privés d’accès à la mer. Les transports et les communications sont le deuxième moteur de la croissance du PIB.

En 2011, les investissements du secteur privé ont dépassé 1.9 milliard USD, dopés par les IDE dans les mégaprojets houillers. Au total, 30 000 emplois ont été créés pour 285 nouveaux projets, dont 13 dans la Zone économique spéciale (Zes) de Nacala, représentant un investissement de 400 millions USD par les entreprises exportatrices. Le secteur des services et des industries manufacturières arrivent en tête. D’importants investissements dans l’industrie du ciment devraient permettre de tripler la production d’ici 2013. Quatre groupes chinois (Africa Great Wall Cement Manufacturer, China International Fund, GS Cimento et Bill Wood) ainsi que le groupe sud-africain Pretoria Portland Cement investissent le marché avec un apport global de 450 millions USD. Un nouvel opérateur de téléphonie mobile, Movicel, a commencé ses activités en 2012. Il s’agit d’une co-entreprise de 400 millions USD entre Viettel, une firme de télécommunications appartenant au ministère de la Défense du Viet Nam, et SPI (Gestão e Investimentos), la société holding du parti au pouvoir au Mozambique, le Front de libération du Mozambique (Frente de Libertação de Moçambique – Frelimo).

Flag_of_Mozambique.svgMalgré le dynamisme global de l’économie, l’événement le plus important pour l’année 2011 tient à la découverte d’abondantes réserves de gaz naturel au large des côtes. En septembre, Anadarko Petroleum annonçait avoir trouvé environ 623 000 milliards de mètres cubes de gaz dans le bloc de la zone 1. En octobre, un consortium emmené par le groupe pétrolier italien ENI a découvert à quelque 40 km au large de Cabo Delgado pratiquement 424 000 milliards de mètres cubes de réserves de gaz naturel. Si ces découvertes sont confirmées, le cumul des réserves devrait classer le Mozambique en 4e position mondiale, derrière les trois géants que sont la Russie, l’Iran et le Qatar. L’ampleur de ces réserves justifie la construction d’une grande usine de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le pays. La manne potentielle pourrait totalement remodeler la trajectoire de développement économique et humain du Mozambique à moyen terme.

Une situation sociale compliquée

Malgré la croissance économique engendrée par les grands projets et le gain de compétitivité lié au développement des infrastructures, l’impact sur la réduction de la pauvreté a été minime. Le nouveau PARP 2011-14 met particulièrement l’accent sur la relance de la production agricole. Le secteur, qui représentait 30.9 % du PIB en 2011, devrait progresser de 9.9 % en 2012. Mais la production de noix de cajou – la culture de rente traditionnelle du Mozambique – devrait se tasser à 112 800 tonnes, contre 105 000 tonnes en 2010. Un ambitieux plan directeur pour la noix de cajou, visant une augmentation de 80 % dans les dix ans, a été approuvé par le ministère de l’Agriculture. Ses services anticipent aussi une hausse de 23.4 % de la production de canne à sucre. Les gains de production attendus pour le blé et le riz (respectivement +12.5 et +13.8 %) ne suffiront pas à satisfaire la demande intérieure. Malgré un recul de la production halieutique de 5.1 % en 2011, le secteur devrait rebondir de 18.4 % en 2012. Pour autant, conscient du phénomène de surpêche qui touche le secteur de la crevette, le gouvernement a plafonné les prises commerciales à 5 650 tonnes par an.

En réaction aux tensions sociales de 2010, le gouvernement a restructuré son programme de développement autour d’un nouveau Plan d’action pour la réduction de la pauvreté (PARP 2011-14) qui fait la part belle au renforcement de la production agricole, la promotion des emplois à travers le développement des petites et moyennes entreprises (PME) et l’investissement dans le développement humain et social. Les filets de sécurité sociale ont été consolidés avec l’élargissement des mécanismes de transfert monétaire direct aux groupes les plus vulnérables, parallèlement au maintien des subventions aux transports publics urbains et aux programmes de travaux publics productifs, dans une volonté d’atténuer les effets négatifs du renchérissement des prix alimentaires et des carburants sur les pauvres. Les allocations budgétaires aux secteurs prioritaires ont augmenté de 6.8 % en 2012, atteignant 66.7 % du budget.

Le Mozambique connaît une forte croissance démographique (2.8 % par an), avec environ 300 000 nouveaux arrivants sur le marché du travail chaque année. La croissance est tirée par des projets à forte intensité de capital, en particulier dans les industries extractives. Le taux global de chômage s’établit à 27 %. L’économie formelle est essentiellement urbaine et ne représente que 32 % de l’emploi total. Bon nombre de jeunes actifs sont contraints d’accepter des emplois marginaux dans l’économie informelle, en ville comme dans les zones rurales, sans guère de perspectives de décrocher un emploi stable.

Article publié par African Economic Outlook

Le Gabon, une économie et une société en transition

Le Gabon est confronté au déclin de la production pétrolière, qui a structuré son économie depuis l’indépendance. Dans ce contexte, le pays fait face à un double défi : d’un côté, la création d’un tissu économique diversifié reposant sur la mise en valeur des ressources naturelles ; de l’autre, l’insertion professionnelle d’une population relativement jeune. Le Gabon ambitionne de devenir un pays émergent à l’horizon 2035. Cette vision s’est matérialisée par une croissance significative des investissements publics en 2010 et 2011, appelés à se maintenir au cours des deux prochaines années. La stratégie du Gabon encourage par ailleurs les investissements privés, tant nationaux qu’étrangers dans le cadre des Zones économiques spéciales (ZES).

En 2011, le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) est estimé à 5.8 %, en baisse par rapport à 2010 (6.6 %), mais supérieur aux prévisions. Dans l’ensemble, l’activité économique a été intense, soutenue par la hausse des investissements publics pour la construction et la réhabilitation des infrastructures routières et des stades, en préparation de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2012, organisée par le Gabon et la Guinée équatoriale. L’année 2012 et dans une certaine mesure l’année 2013 se présentent bien, avec notamment :

i) le maintien à un niveau élevé des cours des produits exportés (pétrole, manganèse et bois) ;
ii) l’optimisation des vieux champs par les compagnies pétrolières ;
iii) l’entrée en activité de la ZES de Nkok ;
iv) l’entrée sur le marché du premier producteur mondial de manganèse BHP Billiton dans la région du Haut-Ogooué ; v) l’entrée du géant chinois CICMHZ (Compagnie industrielle et commerciale des mines de Huazhou).
Enfin, les répercussions de la CAN 2012, avec son impact positif sur l’emploi, devraient permettre de stimuler la demande intérieure.

La bonne tenue des indicateurs macroéconomiques reste toutefois dépendante des cours du pétrole, dont les revenus représentent plus de 60 % des recettes de l’État et 75 % des exportations. Cette situation a poussé les autorités à engager une transformation de l’économie en s’appuyant sur la diversification de l’activité et la promotion d’un climat favorable aux affaires. Cependant, le programme ambitieux d’investissements publics, annoncé pour enrayer le déficit en infrastructures du pays, risque d’entraîner une dégradation de la situation budgétaire à moyen terme ; le déficit budgétaire hors pétrole a augmenté en 2011 à 22.5% du PIB non pétrolier. 

Niveau de vie 

Le PIB par habitant (7 370 USD) est relativement élevé par rapport à la plupart des pays d’Afrique sub-saharienne. Reste que l’économie fonctionne davantage selon les critères d’un pays à faible revenu. Les inégalités et la pauvreté persistent. La population gabonaise est relativement jeune et en demande d’insertion professionnelle. 

Le taux de chômage est estimé à 16 % de la population active ; il atteint 30 % chez les jeunes de moins de 30 ans. Pour y remédier, le gouvernement a lancé plusieurs actions, notamment des fonds spécifiques pour soutenir les réformes entreprises par l’Office national de l’emploi (ONE), ainsi que la mise en œuvre d’un projet de « e-emploi », en collaboration avec la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC). Ces mesures, auxquelles s’ajoutent les créations d’emplois générées par les investissements directs étrangers réalisés dans les ZES et le secteur minier (manganèse et fer), devraient stimuler l’emploi en 2012 et 2013, en particulier chez les jeunes.

Selon l’enquête sur la pauvreté (EGEP 2005), qui a identifié les individus, les groupes et les localités pauvres du pays, le tiers de la population gabonaise vivrait sous le seuil de pauvreté. Les disparités dans la répartition des richesses demeurent fortes. Le Document stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP) 2006-08, tout comme le plan stratégique « Gabon émergent », ont mis l’accent sur la croissance inclusive et une répartition équitable des ressources du pays à travers des transferts vers les plus démunis. Toutefois, même si des progrès ont été faits en matière de programmation des ressources, leur mobilisation effective reste un défi. Les faibles taux d’exécution des programmes prioritaires, particulièrement dans les secteurs sociaux, s’expliquent en grande partie par la persistance de nombreuses insuffisances dans le système de gestion des finances publiques, qui continuent d’affecter la qualité et l’efficacité de la dépense publique. Dans le cadre du suivi des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), le rapport de progrès, préparé avec l’appui du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) en août 2010, montre qu’un nombre important d’OMD pourrait ne pas être atteint à l’horizon 2015, notamment ceux relatifs à la prévalence de la pauvreté et du chômage, la réduction de la mortalité infantile et maternelle, le taux de redoublement dans l’enseignement primaire et l’amélioration de l’habitat.

Dans le domaine de la protection sociale, la Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale (CNAMGS) a été mise en place. A cet effet, les pensionnés de l’État sont soumis depuis janvier 2011 à un prélèvement obligatoire de 1.5 % sur le montant brut de leur pension de base et de leurs primes de revalorisation au profit de la CNAMGS. En contrepartie, ces agents bénéficient de la prise en charge de leurs soins de santé.

 

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