Le Mozambique, entre croissance et pauvreté

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Le Mozambique affiche un taux de croissance moyen impressionnant de 7.2 % sur les dix dernières années. La tendance devrait se maintenir en 2012 et 2013, à respectivement 7.5 et 7.9 %. Le coup de fouet donné à la production de charbon par les premiers mégaprojets mis en exploitation en 2011, couplé à la solide performance des services financiers, des transports, de la communication et du bâtiment, a contribué à porter la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel à 7.2 % en 2011. L'économie reste dopée par le niveau élevé des investissements directs étrangers (IDE), destinés en priorité aux industries extractives, mais aussi par la bonne tenue de la production agricole et la poursuite des investissements d’infrastructure.

La mise en œuvre des mesures en faveur des pauvres élaborées en 2011 et l’ambitieux programme d’investissement dans les infrastructures devraient creuser le déficit budgétaire, de -3.3 % en 2011 à respectivement -6.8 et -7.4 % en 2012 et 2013. À moyen terme, le principal défi structurel consistera à élargir l’assiette fiscale du pays. Les apports d’aide devraient poursuivre leur décrue, de 51.4 % du budget en 2010 à 39.6 % en 2012. La diversification de la base du revenu, à travers notamment une fiscalité plus efficace dans le secteur des industries extractives, sera vitale pour soutenir et promouvoir une croissance inclusive.

La forte expansion économique a favorisé les investissements dans les infrastructures du pays, encore embryonnaires, le long des trois principaux couloirs logistiques (Maputo, Beira et Nacala) pour faciliter les exportations de charbon et désenclaver les pays voisins privés d’accès à la mer. Les transports et les communications sont le deuxième moteur de la croissance du PIB.

En 2011, les investissements du secteur privé ont dépassé 1.9 milliard USD, dopés par les IDE dans les mégaprojets houillers. Au total, 30 000 emplois ont été créés pour 285 nouveaux projets, dont 13 dans la Zone économique spéciale (Zes) de Nacala, représentant un investissement de 400 millions USD par les entreprises exportatrices. Le secteur des services et des industries manufacturières arrivent en tête. D’importants investissements dans l’industrie du ciment devraient permettre de tripler la production d’ici 2013. Quatre groupes chinois (Africa Great Wall Cement Manufacturer, China International Fund, GS Cimento et Bill Wood) ainsi que le groupe sud-africain Pretoria Portland Cement investissent le marché avec un apport global de 450 millions USD. Un nouvel opérateur de téléphonie mobile, Movicel, a commencé ses activités en 2012. Il s’agit d’une co-entreprise de 400 millions USD entre Viettel, une firme de télécommunications appartenant au ministère de la Défense du Viet Nam, et SPI (Gestão e Investimentos), la société holding du parti au pouvoir au Mozambique, le Front de libération du Mozambique (Frente de Libertação de Moçambique – Frelimo).

Flag_of_Mozambique.svgMalgré le dynamisme global de l’économie, l’événement le plus important pour l’année 2011 tient à la découverte d’abondantes réserves de gaz naturel au large des côtes. En septembre, Anadarko Petroleum annonçait avoir trouvé environ 623 000 milliards de mètres cubes de gaz dans le bloc de la zone 1. En octobre, un consortium emmené par le groupe pétrolier italien ENI a découvert à quelque 40 km au large de Cabo Delgado pratiquement 424 000 milliards de mètres cubes de réserves de gaz naturel. Si ces découvertes sont confirmées, le cumul des réserves devrait classer le Mozambique en 4e position mondiale, derrière les trois géants que sont la Russie, l’Iran et le Qatar. L’ampleur de ces réserves justifie la construction d’une grande usine de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le pays. La manne potentielle pourrait totalement remodeler la trajectoire de développement économique et humain du Mozambique à moyen terme.

Une situation sociale compliquée

Malgré la croissance économique engendrée par les grands projets et le gain de compétitivité lié au développement des infrastructures, l’impact sur la réduction de la pauvreté a été minime. Le nouveau PARP 2011-14 met particulièrement l’accent sur la relance de la production agricole. Le secteur, qui représentait 30.9 % du PIB en 2011, devrait progresser de 9.9 % en 2012. Mais la production de noix de cajou – la culture de rente traditionnelle du Mozambique – devrait se tasser à 112 800 tonnes, contre 105 000 tonnes en 2010. Un ambitieux plan directeur pour la noix de cajou, visant une augmentation de 80 % dans les dix ans, a été approuvé par le ministère de l’Agriculture. Ses services anticipent aussi une hausse de 23.4 % de la production de canne à sucre. Les gains de production attendus pour le blé et le riz (respectivement +12.5 et +13.8 %) ne suffiront pas à satisfaire la demande intérieure. Malgré un recul de la production halieutique de 5.1 % en 2011, le secteur devrait rebondir de 18.4 % en 2012. Pour autant, conscient du phénomène de surpêche qui touche le secteur de la crevette, le gouvernement a plafonné les prises commerciales à 5 650 tonnes par an.

En réaction aux tensions sociales de 2010, le gouvernement a restructuré son programme de développement autour d’un nouveau Plan d’action pour la réduction de la pauvreté (PARP 2011-14) qui fait la part belle au renforcement de la production agricole, la promotion des emplois à travers le développement des petites et moyennes entreprises (PME) et l’investissement dans le développement humain et social. Les filets de sécurité sociale ont été consolidés avec l’élargissement des mécanismes de transfert monétaire direct aux groupes les plus vulnérables, parallèlement au maintien des subventions aux transports publics urbains et aux programmes de travaux publics productifs, dans une volonté d’atténuer les effets négatifs du renchérissement des prix alimentaires et des carburants sur les pauvres. Les allocations budgétaires aux secteurs prioritaires ont augmenté de 6.8 % en 2012, atteignant 66.7 % du budget.

Le Mozambique connaît une forte croissance démographique (2.8 % par an), avec environ 300 000 nouveaux arrivants sur le marché du travail chaque année. La croissance est tirée par des projets à forte intensité de capital, en particulier dans les industries extractives. Le taux global de chômage s’établit à 27 %. L’économie formelle est essentiellement urbaine et ne représente que 32 % de l’emploi total. Bon nombre de jeunes actifs sont contraints d’accepter des emplois marginaux dans l’économie informelle, en ville comme dans les zones rurales, sans guère de perspectives de décrocher un emploi stable.

Article publié par African Economic Outlook

La réforme de l’Etat au Mozambique (2)

 

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Dans la deuxième partie de cet article sur la réforme de l'Etat au Mozambique, Mouhamadou Mbengue présente les premières mesures de réforme déterminantes et propose une explication à leurs résultats insatisfaisants.

II L’adoption des premières réformes publiques déterminantes au Mozambique


Un plan décennal de réforme de l’Etat, intitulé Stratégie globale en faveur de la réforme du secteur public (EGRSP), fut adopté en 2001 sous l’égide des bailleurs de fonds. Ce nouveau programme avait pour but d’amener de véritables changements dans l’exécution des services publics, en passant par : « la décentralisation, la gestion des ressources humaines, la politique publique, la gestion financière publique et la lutte contre la corruption ». (1)

Les éléments du NPM inspirent fortement les politiques publiques : « guichets uniques », gouvernement électronique, mise en concurrence pour les marchés publics dans la prestation de service et le recrutement des hauts fonctionnaires, nouveau régime salarial, systèmes de gestion du rendement, responsabilité financière, entre autres. (2) 

Les finances publiques en particulier subirent une véritable cure d’assainissement, et la lutte contre la corruption est rapidement devenue un sacerdoce. Dans le même temps, une simplification des procédures se mit en place dans la plupart des services publics contre les lenteurs bureaucratiques. Cependant, les formalités n’ont pas atteint le degré de standardisation souhaité, malgré la création de « guichets uniques », du fait du manque de formation des agents. Idem pour l’e-gouvernement.

Il faut en déduire que la plupart des fonctionnaires n’ont pas eu les compétences nécessaires pour atteindre les objectifs des réformes passant par les méthodes administratives modernes. Le poids de la culture politique et des réflexes habituels a beaucoup galvaudé l’élan de changement. Plus de la moitié des cadres publics ne possèdent pas un diplôme d’enseignement supérieur (3) et ignorent les principes les plus basiques du fonctionnement de l’Etat. Pour palier ce déficit, le gouvernement créa en 2004 des formations destinées aux agents de l’Etat. L’institut Supérieur d’Administration Publique (ISAP) fut ouvert pour offrir ces nouvelles formations.

III Améliorer les programmes de réforme par le capital humain

La plus grosse erreur commise par les dirigeants politiques mozambicains, comme la plupart de leurs collègues africains, a été de croire qu’il suffisait d’adopter les programmes issus du NMP pour parvenir à un Etat moderne en un temps record. L’application immédiate des recettes et préceptes des bailleurs de fonds n’ont pas suffi.

Ces derniers ont complètement fait table rase du degré de culture démocratique nécessaire dans tout pays avant l’introduction d’éléments du Nouveau Management Public. Pour remplacer l’etat wéberien, encore faut-il qu’il existe. Les techniques administratives modernes n’ont pas pu avoir le résultat escompté du fait de l’absence d’Etat solide. Les agents responsables de leur exécution n’avaient pas reçu les notions de base en matière de service public et de gestion, non même celles wébériennes. L’efficacité n’a donc pas été au rendez-vous.

Ainsi, malgré le grand nombre de mesures entreprises pour améliorer la gestion publique, les résultats escomptés ne sont pas venus. La multiplication des programmes, écoles, et procédures modernes n’y a donc pas fait grand chose. L’une des raisons principales en est que les fonctionnaires mozambicains n’ont pas de formation de base sur le fonctionnement de l’Etat classique, de type wébérien. Cette carence est imputable à la brutalité de la libération nationale.

Comme Harry Taylor, spécialiste reconnu du Management Public dans les pays en développement, l’a si bien décrit, les administrations publiques doivent « apprendre à marcher avant de courir ». (4) La plupart des programmes de réforme ont brûlé les étapes rudimentaires de la gestion publique. L’inclusion de techniques modernes visant à améliorer le rendement et l’efficacité du service public est bien entendu inévitable au Mozambique. Mais à l’heure actuelle, la priorité doit être la formation des agents de l’Etat aux concepts de base de la gestion des affaires publiques.

De manière générale, l’administration publique africaine souffre du niveau de ses fonctionnaires. Ceux-ci, même lorsqu’ils ont acquis des enseignements orientés vers la gestion publique, ne se soucient pas beaucoup des impacts de leurs décisions pour l’intérêt général. Or, ce dernier doit être au début et à la fin de toute politique publique, pour que le vouloir-vivre commun demeure. Il est en effet irrationnel d’oublier cette notion qui fonde le contrat social, dont les fonctionnaires sont censés garantir la pérennité. Il faut bannir la gestion publique épicière à tout prix.

Les Etats africains pourront difficilement se perpétuer sans la prise en compte de cette exigence. A tous les niveaux de l’administration, la formation en droit, en histoire, en économie, en expression écrite et orale, ainsi que dans d’autres disciplines liées aux départements techniques, doit absolument être revisitée, tout en tenant compte des exigences de modernisation. L’ignorance de ces paramètres essentiels a beaucoup réduit l’élan réformateur et novateur au Mozambique. La standardisation, la simplification, et la modernisation des procédures suivront.

Cependant, il existe aussi peu d’incitation financière en particulier au profit des agents de l’Etat. Il est effectivement difficile de mener à bien des réformes novatrices, ou même d’assurer le fonctionnement régulier des services publics, sans une véritable politique globale en leur faveur. Les fonctionnaires voient parfois défiler des sommes colossales qu’ils doivent utiliser pour leurs institutions, mais sont souvent tentés d’y puiser pour régler des préoccupations personnelles. 

Mouhamadou Moustapha Mbengue

 

 [1] Awortwi, Nicholas : « Doter les administrateurs et gestionnaires publics de nouvelles compétences à l'époque des réformes du secteur public : le cas du Mozambique » , Revue Internationale des Sciences Administratives, 2010/4 Vol. 76, p. 767.

[2] République du Mozambique (2006).

[3] Awortwi Nicholas, Op. Cit. p.771.

Les conflits du Mozambique (1) : la guerre d’indépendance

A travers cet article, Terangaweb inaugure une nouvelle série dans la rubrique Histoire, dédiée aux conflits qui ont marqué le continent Africain et constituent des moments certes douloureux, mais aussi décisifs. Il s’agira non seulement d’analyser les différentes dimensions de ces conflits, des acteurs impliqués et des conséquences pour les peuples concernés, mais aussi de les replacer dans leur contexte régional et international.

Le Mozambique a connu, durant près de trois décennies, deux conflits particulièrement meurtriers, qui ont non seulement eu un impact fort sur ses habitants, mais aussi sur l’Afrique australe, et au delà, ont constitué un des terrains d’affrontement de la Guerre Froide. Avant de traiter de la guerre civile qui fera rage jusqu’en 1992, il convient de remonter à la lutte indépendantiste, conflit colonial qui dura de 1964 à 1975.

Le contexte : une des plus vieilles colonies du monde 

Présents sur le littoral de l’océan Indien dès 1498 à travers les expéditions de Vasco de Gama, les Portugais  établirent une présence durable dans la région, d’abord avec des comptoirs commerciaux dédiés au commerce des esclaves, puis remontèrent le Zambèze et explorèrent l’intérieur des terres.  Dès le XVIème siècle, des colons s’établirent dans ces territoires, et développèrent la culture du sucre et du coton. En 1752, le territoire du Mozambique sera ainsi doté de sa propre administration, concentrant tous les pouvoirs aux mains des gouverneurs militaires et maintenant les populations locales dans un état de servage.

Néanmoins, et à partir du XIXème siècle, le déclin de leur empire colonial et l’établissement d’autres puissances dans la région (Britanniques et Français), obligea les Portugais à réformer le système. Ils accordèrent à trois compagnies privées le droit d’exploiter les ressources de la majeure partie du territoire pendant cinquante ans. Plusieurs siècles de colonisation maintinrent le Mozambique dans un état de sous développement chronique et sa population dans une situation d’extrême pauvreté.  

Le régime dictatorial de Salazar amorça une nouvelle ère, qui visait à pleinement intégrer le territoire à la métropole. Des organes représentatifs furent mis en place, mais réservés aux seuls colons, et des investissements furent consacrés au développement des infrastructures de la région. Parallèlement, l’émigration Portugaise vers les colonies fut encouragée, ce qui fit passer le nombre de colons au Mozambique de 30.000 en 1930 à 200.000 au début des années 1970. En 1951, alors que les premières revendications autonomistes se font entendre, le Mozambique est proclamé province d’outre-mer par le Portugal.

Le déclenchement de la lutte 

Encouragés par un contexte régional mondial favorable à la décolonisation, des groupes nationalistes voient le  jour pour exprimer  les revendications de la population rurale et illettrée qui forme la majorité des habitants du Mozambique, et réclamant la fin du système colonial. Sous l’impulsion de l’intellectuel Eduardo Mondlane(1920-1969), sociologue formé aux Etats Unis, et avec le soutien de Julius Nyerere et Kwane Nkrumah, un Front de Libération du Mozambique (FRELIMO) est formé le 25 juin 1962 à Dar es Salam (Tanzanie) pour réclamer l’indépendance du pays.

Après deux ans de structuration, et suite à l’échec de tentative de libération pacifique, le FRELIMO décide de déclencher la lutte armée à partir de 1964.Depuis sa base arrière en Tanzanie, il mène des campagnes de plus en plus structurés en territoire Mozambicain. Mais les quelques milliers d’hommes que compte l’aile militaire du FRELIMO demeureront toujours en large infériorité numérique face à l’armée Portugaise, qui déploie jusqu'à 24000 hommes en 1967, et recrute autant de soldats localement.

Les enseignements du conflit

Deux facteurs ont permis au mouvement de se maintenir : le soutien de la population,  influencée autant par la perspective de l’indépendance que par l’idéologique communiste du FRELIMO, et le soutien international dans le contexte de la Guerre Froide. Ainsi, l’Union Soviétique et la République Populaire de Chine livreront des quantités importantes d’armes au mouvement, alors que l’Algérie assurera la formation militaire des combattants.

La guérilla menée par le FRELIMO a également su prendre avantage du terrain accidenté et boisé, ainsi que du climat de la région, en menant des attaques lors des périodes de fortes pluies pour empêcher l’aviation portugaise d’exprimer sa supériorité aérienne. Les mines anti-personnelles utilisées massivement par la guérilla ont  par ailleurs contribué à affaiblir le moral des troupes coloniales et à rendre l’ennemi encore plus insaisissable.

Alors que le conflit s’enlise, le Portugal a su mobiliser ses alliés de l’OTAN pour développer des moyens de lutte anti-insurrectionnelle. En particulier, la mise en place de troupes d’élites rapidement transportables par hélicoptères et l’usage systématique de l’aviation, ont permis aux forces Portugaises de lancer des contre-offensives qu’elles espéraient décisives, telle que l’opération Nœud Gordien en Juin 1970 qui a mobilisé prés de 35000 soldats. Les ratissages de l’armée Portugaise et la politique de regroupement forcée des populations visait par ailleurs à couper la guérilla de son soutien populaire. Cette radicalisation du conflit s’accentue après l’assassinat du leader du FRELIMO Eduardo Mondlane, tué par l’explosion d’un colis piégé déposé dans son quartier général à Dar es Salam.

Le temps de l’indépendance

Après plus d’une dizaine d’années de lutte, la guerre d’indépendance du Mozambique devint une guerre d’usure qui instaura un doute profond jusqu’au sein de l’armée portugaise, des autorités et de la population de la métropole. La légitimité de la lutte anti-insurrectionnelle sera davantage ternie par la révélation de massacres commis par l’armée Portugaise à l’encontre de civils soupçonnés de soutenir le FRELIMO, tel que celui des villageois de Wiriyamu en 1972.

Economiquement, les guerres coloniales (au Mozambique mais aussi en Angola) plombaient les finances du Portugal (40% du budget national) et accentuaient son isolement sur la scène internationale. Ces conflits constituent l’un des facteurs du déclenchement de la Révolution des Œillets  en avril 1974, qui mit fin au régime dictatorial et accorda leur indépendance aux colonies portugaises, plusieurs années après la fin des dernières colonies Britanniques et Françaises sur le continent Africain. C’est ainsi l’armée qui aura menée ce changement politique majeur à partir de la métropole, exténuée par des années d’effort inefficace et déterminée à mettre fin à un dangereux statu-quo colonial en ouvrant des négociations qui déboucheront sur l’indépendance du Mozambique, le 25 juin 1975 (soit 13 ans exactement après la création du FRELIMO).

Avec un bilan de plus de 3500 morts pour l’armée portugaise, 10 000 morts pour les combattants du FRELIMO et  50 000 civils tués durant le conflit, la guerre d’indépendance du Mozambique est l’une des luttes de libération les plus meurtrières du continent, un des fronts de la Guerre Froide et un conflit riche d’enseignements historiques, stratégiques, et humains.  L’indépendance du Mozambique ne fut néanmoins qu’une étape sur le long chemin vers la paix, qui allait passer par une guerre civile longue et particulièrement destructrice.

Nacim KAID SLIMANE

 

 

Le Grand Zimbabwe

Les actuels Zimbabwe et Mozambique sont des foyers de peuplement humain très anciens et actifs, les habitants ayant adopté l’agriculture dès 8000 ans avant J.-C. Au VI° siècle de notre ère, les populations Gokomere s’illustrent par une intense activité d’extraction et de travail de l’or, par leur qualité artisanale dont viennent témoigner des vestiges d’objets en céramique, des bijoux et des sculptures. L’élevage de bovins et l’agriculture y étaient très développés. Il s’agissait d’une population guerrière, qui s’est illustrée dans la construction de forts en pierre, mais également d’une société commerciale connectée à une forme ancienne de mondialisation, puisqu’y ont été retrouvées des poteries chinoises et des objets en provenance d’Inde.

Un long processus de centralisation du pouvoir et de rigidification des strates sociales, basée sur la division du travail (artisans, mineurs, paysans-éleveurs, noblesse guerrière, commerçants) a conduit à une forme de féodalisme avancé, incarné dans un Etat puissant, à l’origine de l’avènement du Grand Zimbabwe, nom qui désigne aussi bien le royaume que l’édifice monumental qui abritait la Cour royale des Shonas. Ce site, achevé au XIII° siècle et qui existe toujours de nos jours, est une ville de pierres étendue sur 7 km² qui abritait jusqu’à 5000 personnes intra-muros. Le Grand Zimbabwe étendait son contrôle sur l’actuel Zimbabwe, l’Est du Botswana et le Sud-Est du Mozambique et y battait sa propre monnaie. Si cette civilisation n’a pas développé son propre alphabet, elle était coutumière de l’arabe, devenu langue d’échange pour les commerçants des côtes est-africaines.

L’océan indien a été le vecteur de nombreuses relations d’échanges de populations, de connaissances et de technologies entre l’Afrique, le monde arabo-musulman, le sous-continent indien et même la Chine. La présence de commerçants arabes et indiens sur les côtes mais également à l’intérieur des terres australes est ancienne. La plupart des villes importantes de ces régions étaient multiculturelles. Le swahili est le fruit de ce métissage entre des langues bantous et l’arabe, et s’est rapidement imposé comme la langue véhiculaire

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[1]par excellence de l’Est africain. Premier partenaire commercial de cette région, la côte ouest de l'Inde exportait principalement des textiles en direction de l’Afrique, et en recevait des objets artisanaux en fer et en or, de l’ivoire, et des carapaces de tortues. L’océan indien était également le théâtre d’un commerce d’esclaves en provenance d’Afrique, principalement des populations pastorales ou de chasseurs-cueilleurs capturées par les populations africaines mieux organisées politiquement et militairement.

C’est également par l’océan indien que les Portugais sont arrivés sur les côtes du Zimbabwe à la fin du XV° siècle, rentrant en contact avec le royaume Shona des Torwa et le royaume du roi Monomotapa, successeurs du Grand Zimbabwe qui s’était délité au cours du XV° siècle.

 

Emmanuel Leroueil

 


[1] : Il s’agit en fait plutôt d’un groupe de langues qui partagent une structure commune forte, leur permettant de communiquer entre elles. Le Kiswahili en est désormais une version standardisée, langue nationale de la Tanzanie, du Kenya et de l’Ouganda.