Avec un peu de chance, je finirai l'année 2012 en ayant eu raison sur le Mali. Je ne sais si on se souvient de la fièvre qui saisit "l'intelligentsia" en juillet dernier, lorsque tombes et monuments funéraires de Tombouctou furent détruits par les Islamistes d'Ansar El Dine, comme si les populations civiles, brutalisées des semaines durant par ces terroristes avaient moins d'importance que de vulgaires bâtisses en terre cuite. Je ne crois pas qu'on se rappelle correctement les manifestations à Bamako, appelant à la violence contre les Touaregs et l'envie de pogrom qui enflamma les populations de Bamako en février 2012. J'avais crû détecter là, le signe d'un malaise plus profond et plus lointain, dû au fait que le Mali était, depuis le départ, une "mauvaise idée" qui avait plus ou moins pas mal réussi, mais une mauvaise idée quand même.
J'avais été dégoûté par l'incroyable passivité, la permissivité de la classe politique malienne lorsque la clique du Capitaine Sanogo et ses sous-fifres du CNRDR s'empara du pouvoir en mars. J'avais soupçonné, dès les tous premiers jours de cette aventure, la volonté réelle de Sanogo de se battre. Installé à Kati avec ses troufions, il s'était fait bâtir une sorte de palace/bunker au milieu du camp, exigeant qu'on lui accorde le respect dû à un ancien chef d'Etat et gesticulant pour que d'autres y aillent à sa place une intervention étrangère: ce n'était certainement pas l'attitude d'un soldat attendant impatiemment l'occasion de retourner au combat. La décision même d'interrompre l'ordre constitutionnel dans un pays menacé de sécession était peut-être l'idée la plus sotte qu'on ait jamais eue depuis cent ans dans cette Afrique Occidentale, pourtant experte dans le domaine. Mon compagnon de barricade, Moustapha Mbengue avait eu lui, la hardiesse de recommander… la négociation devant les difficultés pratiques de l'intervention et les risques pour les populations civiles. Recommandations ayant reçu un accueil plutôt tiède.
J'ai toujours eu pour ma part, une position plutôt réservée par rapport à ces populations, ses forces armées et sa classe dirigeante. Les souffrances des premières sont réelles, le désarroi des secondes au plus fort de l'offensive du MNLA étaient compréhensible et palpable, la désunion de la classe politique prévisible. Ce qui, en revanche, est inacceptable c'est l'absence de conviction démocratique et la lâcheté. S'être rendu relicta non bene parmula à la clique de Sanogo est une débandade injustifiable. Que des soldats de la CEDEAO aient à sacrifier leurs vies pour aider ces soldats et défendre la "démocratie malienne" est un mal, pas nécessairement nécessaire. La récente démission forcée de Modibo Diarra, "premier ministre de consensus", lâché par une partie du gouvernement, dénoncé par une partie de l'appareil militaire, arrêté sur ordre du capitaine Sanogo, contraint à annoncer qu'il se retirait, presque sous la force des baïonnettes est une infamie — et le signe que le Mali n'est pas encore prêt à être aidé.
Avant que le moindre franc soit dépensé pour le Mali, bien avant que le moindre début de commencement d'intervention militaire soit décidé il faudrait absolument que Sanogo, les militaires le protégeant et les hommes politiques le soutenant soient écartés des discussions; qu'un gouvernement solidement démocratique et reconnaissant, sans faux-semblant, le besoin d'une intervention armée au Mali et la soutenant entièrement, soit en place. Et que la société civile malienne choisisse son camp.
Le Capitaine Sanogo n'est pas Thomas Sankara. Il n'est plus "capitaine", ni même soldat. Sanogo est un politicien. Et Sanogo doit partir.
**** Promis, j'arrête les titres en anglais.
Leave a comment
Your e-mail address will not be published. Required fields are marked with *
Sanogo n'a pas eu un comportement responsable depuis le début. Et comme tu le dis (tu as de la suite dans les idées), il n'est pas le seul à blâmer, vu le soutien qu'il a eu (avec la verve nationaliste grand-malienne). Mais ATT (inepte) n'est pas en reste, ni Diocounda (muet s'il en est), ni Diarra (incompétent et insolent). Et c'est là que la surenchère sanogienne prend tout son sens, en comblant le vide laissé par les politiques. Cependant, il n'est pas dans une approche tout à fait politique (même si nationaliste), car on doit quand même tenir compte de l'opinion de l'armée malienne pour toute guerre. Je persiste quand même à croire que celle-ci doit être faite après la remise sur pied de l'Etat, élections à l'appui. A suivre…