Comment mesurer la croissance inclusive en Afrique ?

On veut de leau potable, Sinzinzin. Sculpture de Kifouli Dossou, Peinture de Kifouli Dossou, 2010 - 2011
On veut de leau potable, Sinzinzin. Sculpture de Kifouli Dossou, Peinture de Kifouli Dossou, 2010 – 2011

Au cours de la dernière décennie, l’Afrique a connu une croissance économique forte et stable.[1] Cette performance économique a suscité beaucoup d’espoir sur la réduction de la pauvreté comme ce fût le cas dans d’autres régions du monde comme la Chine et l’Inde.[2] Cependant, la part de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté n’a baissé que très légèrement durant la période.[3] La plupart des études académiques à ce jour se sont intéressées à comprendre les causes du décalage entre la croissance économique et la réduction de la pauvreté en Afrique. L’approche consistant à mesurer l’impact de la croissance sur l’ensemble des groupes sociaux (en fonction des niveaux de revenu) et non plus seulement sur les catégories les plus pauvres est toutefois moins courante.

La mesure de l’inclusivité de la croissance est devenue progressivement un sujet majeur de préoccupation. Toutefois, nous en savons encore très peu sur l’évolution réelle des revenus et des dépenses des différentes catégories de ménage en fonction du taux de croissance global de l’économie dans laquelle ils s’inscrivent. De ce fait, il n’est pas possible encore à ce jour d’identifier les politiques publiques appropriées susceptibles de rendre la croissance économique plus inclusive. Cela est dû à l’absence d’observations empiriques sur les liens réguliers qui existent entre certaines politiques publiques et « l’inclusivité de la croissance ».

Le think-tank Terangaweb-l’Afrique des Idées s’est donc proposé de mener une observation empirique de l’évolution des revenus des ménages dans trois pays africains (Tanzanie, Cameroun, Sénégal) au regard des taux de croissance économique respectifs de ces pays.  Cette étude a permis d’identifier des relations stables entre l’évolution des revenus/dépenses des ménages et le niveau, la stabilité et la structure de la croissance économique. L’identification de ces relations a permis d’apporter des éléments de réponses aux questions suivantes :

  • La croissance économique a-t-elle besoin d’être forte pour être inclusive ?
  • Faut-il promouvoir une croissance stable pour la rendre inclusive ?
  • Existe-t-il un lien entre la structure de l’économie et « l’inclusivité de la croissance »

Sur la base de l’étude de cas de trois pays africains aux performances économiques différentes que sont le Cameroun, le Sénégal et la Tanzanie, nous avons pu obtenir des résultats préliminaires qui sont présentés à Helsinki dans le cadre de la conférence de l’Institut Mondial de recherches sur le développement de l’Université des Nations Unies (UNU-WIDER), les 20 et 21 septembre 2013.


[1] Selon les Perspectives Economiques pour l’Afrique de 2012, le taux de croissance réel du PIB a été de 5,2% sur la période allant de 2003 à 2011.

[2] Avec un taux de croissance d’environ 8% en 25 ans, la part de la population Chinoise vivant avec moins de 1,25 dollars EU par jour est passée de 73% en 1980 à environ 12% en 2005. (Voir Ravallion, 2009)

En Inde, la plus forte baisse de l’incidence de la pauvreté a été enregistrée durant la période de forte croissance (voir Aghion & Aghion, 2004, p.4). En effet l’incidence de la pauvreté a chuté de 10 points en Inde à la fois en milieu urbain et en milieu rural durant la période où le taux de croissance a été d’environ 5%.

[3] Selon la Banque Mondiale, la proportion des pauvres en Afrique est passée de 47% à 40% entre 2002 et 2008.