La question des limitations de mandats présidentiels, plus d’un demi-siècle après les indépendances, reste plus que jamais au cœur des débats africains. Des tripatouillages et des tentatives de tripatouillages constitutionnels, orchestrés par des présidents « véreux » et avides de pouvoir sont régulièrement constatés sur le continent. Blaise Compaoré, après avoir passé plus d’un quart de siècle (27 ans) à la tête du Pays des Hommes Intègres, veut récidiver et tient mordicus à un passage en force pour être éligible aux futures élections présidentielles de 2015.
Un climat politique délétère
Le Burkina Faso est à la croisée des chemins, à quelques mois d’une des plus importantes élections présidentielles de son histoire. Et pour cause, Blaise Compaoré veut tenter un passage en force pour se maintenir à la tête de l’État, malgré l’interdiction formelle de se représenter que lui impose l’article 37 de la Constitution, qui limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Sa machine de séduction du peuple est déjà en marche, dévoilant ainsi ses intentions et moyens. Sa tournée dans le centre-ouest, les 9 et 10 mai dernier, est révélatrice de cet état de fait. Son objectif est de s’éterniser au pouvoir et sa campagne électorale est déjà officieusement lancée.
Jeu de dupe et stratégies malsaines ?
Depuis quelques mois le président du Faso est en quête d’un moyen salvateur qui puisse lui permettre de briguer un nouveau mandat pour les cinq prochaines années. Son camp, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et autres soutiens ne cessent de multiplier les tentatives et stratégies pour parvenir à leur fin. Cette attitude, digne d’un « monarque constitutionnel», représente une atteinte grave à la démocratie. Sa dernière trouvaille, l’idée d’un référendum, agite la classe politique, la société civile et l’ensemble du peuple burkinabè. Et pourtant, aucun Burkinabè n’est bloqué par le verrou de l’article 37 de la Constitution à part le président. Le référendum ne concerne donc que lui, et lui seul cherche un « lenga » (bonus) présidentiel exposant du coup tout le peuple à des risques d’une crise.
La phase d’affrontement passif bat son plein
Les prémisses d’une situation de crise sont perceptibles au Burkina Faso. Pro- et anti-référendum accentuent les actions, s’affrontent par articles de presse et meetings interposés, ouvrant une lucarne sur ce que 2015 sera. Des fronts de refus naissent sur le plan national et international pour le contrecarrer. L’opposition politique réunie derrière Zéphirin Diabré, le Chef de file de l’opposition politique (CFOP) a lancé officiellement le sien le 31 mai dernier au Stade du 4 août de Ouagadougou lors d’un meeting de protestation contre un éventuel référendum sur l’Article 37 de la constitution. C’est devant un public immense que le CFOP a lancé officiellement les Comités Contre le Référendum (CCR). A Bobo-Dioulasso, ce fut le même son de cloche ce 14 juin au stade Omnisport Sangoulé Lamizana, mais avec moins de succès. En effet, la jeunesse du CDP/Houet organisait aussi au même moment un meeting pour « saper les efforts de l’opposition » et aurait « marchandé des gens avec de l’argent et des tee-shirts » pour leur participation. Rien d’étonnant, sous le règne Compaoré, car cela semble être une « marque de fabrique » à toute activité de mobilisation du CDP. Le Balai Citoyen et d’autres structures de la société civile, à travers des conférences publiques, des meetings, des concerts pédagogiques etc. lancent également la sonnette d’alarme et s’opposent farouchement à ce projet de modification de l’article 37. Sur les réseaux sociaux un front contre le référendum est né.
Les partisans du référendum multiplient également les mobilisations. Le 21 juin, au Stade du 4 août de Ouagadougou, le CDP organisait un meeting pour exhorter Blaise Compaoré à convoquer officiellement le référendum. La tension est montée d’un cran et chaque camp se prépare d’avantage, l’étape d’observation se poursuit, mais, jusqu’à quand ?
Ce qui est certain, ce jour n’est plus loin. Bien malin qui saura prédire les prochains mois au Burkina.
Ismaël COMPAORE
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