La tradition de la violence s’intensifie dans nos universités. Aucune leçon tirée des précédentes crises, même celles récentes de 2008 et de 2011. Les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets, on ne peut que retomber dans les travers du passé pérennisant ainsi le mal-être dans nos universités. La dégradation des relations entre étudiants et autorités universitaires va crescendo et on est en droit de se demander qui des deux acteurs doit faire preuve de sagesse ?
C’est l’impression générale qui se dégage de cette nouvelle crise universitaire, qui certainement restera gravée à jamais dans les annales et surtout dans les mémoires des étudiants directement concernés. Mais quelles ont pu être les raisons de ce qui est convenu d’appeler la crise des cités universitaires de Ouagadougou?
Origines de la crise
Tout a débuté au soir du 30 juillet par une information verbale signifiant aux étudiants l’arrêt des œuvres universitaires (fermeture des restaurants, cités, infirmerie etc.) au 31 juillet 2013 et ce pendant deux mois (août et septembre). Vraisemblablement cette décision ne respecte pas le droit d’autant plus qu’elle n’a pas été officiellement notifiée par écrit aux intéressés d’une part et d’autre part par ce qu’elle ne prévoit aucun délai raisonnable pour son entrée en vigueur. A l’analyse du contexte sociopolitique, cette incongruité se justifie tout simplement par des motivations d’ordre politique. En effet, la grande mobilisation estudiantine pour les manifestations de l’opposition les 29 juin et 28 juillet et de la société civile le 20 juillet 2013 y ont été pour beaucoup. En rappel, ces différentes manifestations s’inscrivent en droite ligne de la contestation nationale contre le régime de Blaise Compaoré à travers le refus de l’instauration d’un Sénat et d’une éventuelle modification de l’article 37 de la Constitution limitant à deux le nombre de mandats présidentiels.
Pris de cours par les événements
Pris au dépourvu, les étudiants s’organisent spontanément dès le lendemain dans une série de manifestations qui visaient d’une part à contraindre le Centre National des Œuvres Universitaires (CENOU) à revenir sur sa décision et d’autre part informer l’opinion publique de leur situation. C’est ainsi que dans toutes les cités universitaires et sur le campus, des actions de « résistance » seront initiées. A la cité Kossodo où se trouve le siège du CENOU, une quarantaine de véhicules de l’Etat, d’ONG… seront confisqués en guise de pression.
La riposte des autorités ne se fait pas attendre. Les forces de la gendarmerie et de la Brigade Anti-Criminalité (BAC) seront lancées contre les étudiants et une bataille rangée s’en suivra avec son lot de dégâts incalculables. Au cours d’une conférence de presse tenue le 2 août, le DG du CENOU assisté par le commandant de la gendarmerie et celui de la BAC a dressé le bilan des manifestations. Selon les conférenciers, 32 véhicules ainsi que 15 vélomoteurs ont été détruits, deux blessés dans les rangs des forces de l’ordre et 49 étudiants interpellés. Au-delà de ce bilan officiel, il convient de noter de nombreux blessés graves et légers dans les rangs des étudiants.
Une tentative de « clochardisation » de l’étudiant ?
Après ce coup de force ayant conduit à l’expulsion manu militari des étudiants, s’engage un véritable chemin de croix pour ces milliers d’apprenants désormais sans abri. C’est ainsi que le plus grand groupe issu de la cité Kossodo a tenté de passer sa nuit à la belle étoile au rond-point de l’Union Africaine ne sachant où s’abriter, mais c’était sans compter sur la BAC résolue à en finir avec eux. En effet, ils seront encore déguerpis de ces lieux vers deux heures du matin sous prétexte d’occupation anarchique de l’espace public selon le commandant Patrice Yéyé.
La solidarité en marche
Fort heureusement pour ces « réfugiés » dans leur propre pays, une chaine de solidarité s’est rapidement constituée. Des particuliers, des structures telles que « le Balais citoyen », des partis d’opposition et des groupes religieux sont spontanément venus à leur secours. Les différentes actions de ces bonnes volontés ont consisté pour certains à l’affectation de lieux d’hébergements, de vivres, de soins, et pour d’autres à des levées de fonds etc. Qu’il soit souligné au passage que la diaspora burkinabè n’est pas restée insensible à cet élan de solidarité. Toujours dans cette manifestation de solidarité, un donateur particulier se dévoile ; le gouvernement burkinabè une semaine plus tard soit le 6 août à travers le Ministère de l'Action Sociale et de la Solidarité Nationale a proposé ses « bons offices aux étudiants en situation difficile » en les invitant à venir s’enregistrer. Le boycott des destinataires fut total, fustigeant cette « main tendue » et la qualifiant d’ « insulte à leur conscience ». A y voir de près, cette action est loin d’être fortuite ; elle consistait pour le gouvernement à ne pas laisser le terrain de la solidarité au seul apanage de la société civile et surtout de l’opposition décidée à récolter les dividendes.
Enfin la liberté provisoire !
Pendant ce temps, les étudiants interpellés croupissaient dans les geôles de la Maison d’Arrêt et de Correction de Ouagadougou (MACO). Et jusqu’aujourd’hui ne sont pas encore définitivement fixés sur leur sort judiciaire après moult péripéties. Apres un premier report, le procès du 13 août a débouché sur une exception d’inconstitutionnalité opposée par les avocats de la défense fondée sur l’article 4(2) de la constitution posant le principe de la présomption d’innocence, en contradiction flagrante avec la loi N° 026-2008/AN du 08 mai 2008 portant répression des actes de vandalisme commis lors des manifestations notamment en son article 15. Cette loi dispose que lors d’une manifestation illicite, « tous ceux qui sont arrêtés (sur les lieux de la manifestation) sont coupables ». En attendant que le Conseil constitutionnel statue sur cette exception d’inconstitutionnalité pour que le feuilleton judiciaire puisse reprendre son cours, les étudiants ont bénéficié d’une liberté provisoire le 23 août dernier. Affaire à suivre donc !
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C'est autorités me font pitiés. Entre le ministère des réformes politiques et celui des enseignement secondaires ett supérieurs il existe un grand pond. Pourquoi alors toutes ces confusions de rôles? L'étudiant burkinabè ne sera jamais un minable à la solde du régime en place. Nous allons toujours agir conformement à l'élan républicain dans la dignité et l'intégrité que nous ont légué nos ancêtres. Ce n'est pas la MACO qui peut nous éffréer. A bas le sénat et toutes les politiques répréssives du régimes Compaoré et vive le peuple. LA PATRIE OU LA MORT NOUS VAINCRONS!!!