Fiction-Miroir-Réalité et vice versa : Le cas Nollywood (2)

photo de tete E-interview SH

Ken, une amie sénégalaise – peut-être la connaissez-vous, elle est entre autres l’auteure du Baobab Fou, de la Folie et la Mort, de Aller et Retour – m’a confié attendre l’interview de Shari Hammond.

Shari, notre sœur ghanéenne-ougandaise qui était entre ses deux pays pour des raisons professionnelles, a, dès qu’elle a pu convenablement s’installer, pris le temps de nous consacrer un peu du sien. Polyglotte, je lui ai emprunté les mots des langues qu’elle parle ou perfectionne pour vous souhaiter mukulike (luganda), tusemerirwe kukulora (lutooro), akwaaba (twi et ga), wilkommen (allemand), welcome (anglais), bienvenue dans une réalité – celle d’une femme africaine, instruite, professionnelle, globe-trotter, intelligente, comme me l’a dit un certain ambassadeur honoraire en parlant d’elle – bienvenue dans une réalité qui n’est point fiction.

Pour mémoire, ceci est la suite de mon papier diffusée dimanche 6 juillet. Papier dans lequel je vous entretenais via une interview avec Serge Noukoue, de la deuxième édition du Nollywood Week Festival qui a eu lieu du 5 au 8 juin au cinéma parisien l’Arlequin.

Cet évènement a été l’occasion de me faire des nœuds au cerveau, pour reprendre l’expression d’une autre amie, en voulant analyser l’interpénétration entre fiction et réalité. En attendant de partager avec vous mes réflexions profondes, je vous remercie de trouver dans les lignes qui suivent mon e-interview avec Shari Hammond, Responsable Partenariats au sein de l’association Okada Media. Association qui organise le Nollywood Week Festival.

Clic-Text-Send avec Shari Hammond, Responsable Partenariats

Shari HammondGaylord Lukanga Feza : Shari, quel est votre parcours ? Votre histoire ? Votre relation avec les industries créatives ?

Shari Hammond : J’ai fait des études de droit international en me focalisant sur l’Afrique. J’ai toujours aimé me cultiver en lisant, aller à des expositions et découvrir différents artistes. Je m’interrogeais beaucoup sur les différentes scènes artistiques africaines et j’ai donc débuté en m’impliquant dans une revue en ligne d’art contemporain africain (Afrikadaa), en 2011. Par la suite, j’ai rencontré Serge et les autres co-fondateurs de la Nollywood Week.

Dernièrement, j’ai pu collaborer au sein d’un festival d’arts littéraires en Ouganda (Writivism).

Promouvoir, stimuler et développer les industries créatives africaines, qu’il s’agisse des arts visuels, du monde de l’édition ou du cinéma s’avère être pour moi une nécessité, de par leurs contributions au panthéon culturel et à l’essor économique d’un pays.

GLF : Votre formation vous a-t-elle été utile dans vos activités ?

SH : Ma formation de juriste m’a donné discipline et organisation dans mes activités. Il m’est plus facile par exemple de rédiger et relire des contrats de partenariats et autres. Ou encore de prendre en compte les diverses options et mesures juridiques à garantir.

GLF : Quels conseils pouvez-vous donner à ceux qui voudraient se lancer dans les industries créatives, pour leur éviter des écueils ?

SH : Je dirai juste qu’il faut oser relever ses manches et se mettre à la tache dès que l’on a une vision de ce que l’on veut accomplir. Avoir une idée c’est bien, mais une vision c’est mieux. La vision est cette feuille de route qui permettra à tout entrepreneur culturel de ne pas flancher dans les moments difficiles, car il y en a, comme dans toute entreprise. Ce genre d’industrie souffre hélas d’un manque de financements et cela est encore plus difficile en Afrique. Il faut croiser les bonnes personnes : Celles qui croiront en votre projet et qui seront prêtes à s’investir moralement et financièrement.

GLF : Comment choisissez-vous vos partenaires ? Je pense notamment à Total qui a soutenu l’évènement et à l’Arlequin qui l’a de nouveau accueilli.

SH : Nous aimons travailler avec des personnes qui mettent en avant des produits et services de qualité à destination d’une audience africaine ou portée vers l’Afrique. Des personnes qui ont conscience du potentiel et des évolutions, tout comme des avancées exceptionnelles qui ont lieu sur le continent. Des personnes, des mécènes qui promeuvent cette Afrique-là.

Nous ne sommes pas restrictifs quant à nos collaborations. Nous souhaitons stimuler des relations sur le long terme avec des entreprises qui ont fait leurs preuves et qui ne lésinent pas sur la qualité et le respect de leurs clients.

Notre rencontre avec Total a eu lieu par le biais de nos partenaires de l’Association France-Nigéria en 2013. Nous avons depuis engagé de multiples discussions afin de mieux connaître les valeurs et visions de chacun. La Fondation Total a décidé de nous soutenir cette année en raison de notre contribution à un dialogue interculturel et parce que nous créons de nouveaux accès pour de nouvelles audiences.

Le Cinéma l’Arlequin, lieu emblématique au cœur de Paris, nous a donné notre chance lors de la première édition et nous ont fait confiance après cette première réussite. Leur soutien tout au long de la préparation à l’aboutissement du Festival nous a été précieux et nous leur remercions à nouveau pour cela.

GLF : A qui, à quoi seront alloués les bénéfices de ce festival ?

SH : Une chose à savoir est que les festivals de cette envergure ne font pas encore de bénéfices. Le peu d’argent récolté sera affecté à la préparation de l’édition prochaine et à des activités connexes de l’association portant le Festival : Okada Media.

Mother of GeorgeGLF : Présente la journée de samedi au festival, j’ai pu constater l’engouement du public. Nombreux sont ceux à qui on a répondu « Séance complète ! », même pour celles du lendemain. Où tous ceux qui n’ont pu se rendre au festival ou accéder aux différentes séances, peuvent-ils retrouver les films de la sélection ?

SH : En effet, comme dans la plupart des festivals, il est préférable de bien identifier les projections auxquelles on veut assister et prendre son billet dès que possible. Beaucoup de séances ont affiché complet et nous en sommes ravis. Ce festival a pu proposer des premières de films inaccessibles en France et le public qui y était présent a témoigné de son intérêt et de son envie de voir plus de films provenant de l’industrie nigériane.

Notre plus grand souhait, ainsi que celui des directeurs et producteurs présents lors du festival, est d’avoir ces films disponibles sur le plus de plateformes possibles. Des partenaires comme Canal + ou Nollywood TV envisagent d’acquérir les droits de diffusion de certains de ces films. Il reste donc à attendre et voir.

GLF : Si c’était à refaire que changeriez-vous à cette édition 2014 ? Peut-on déjà prendre rendez-vous pour l’année prochaine ?

SH : Question difficile ! Les challenges ne sont là que pour nous faire grandir et nous en apprendre. J’accentuerais peut-être plus la communication, notamment pour inviter le public à prendre ses billets dès la veille du Festival ou en Early Bird comme nous l’avions déjà fait.

Oui. Vous pouvez déjà prendre rendez-vous pour l’année prochaine avec, nous l’espérons, encore plus de films qui vous toucheront et encore plus de rencontres avec ceux qui font Nollywood.

GLF : Le cinéma, grâce à une technique et des moyens de diffusion, met à notre disposition des images, des sons, nous dépeignant un tableau vivant, imitant ou distinguant la réalité. Quelle est selon vous le rôle de ceux qui créent ces images ?

SH : Le cinéma porte bien son surnom de septième art.

Le cinéma étant un art, il est là pour sublimer, dévoiler, dépeindre ou adapter une réalité. L’artiste, ici le réalisateur ou le producteur n’a le devoir que de suivre sa propre ambition et vision, même si cet art est un vecteur considérable d’influences que nous ne pouvons négliger. C’est pour cela qu’il y aura toujours des messages plus ou moins directs dans les films. Le rôle des créateurs selon moi n’est pas d’aboutir à une mission spécifique, mais de faire ce qu’ils font avec brio et ardeur, en définitive de laisser leur marque en ne cessant d’inspirer.

GLF : Shari Hammond, merci.

SH : Merci à vous

Propos recueillis par Gaylord Lukanga Feza

Fiction-Miroir-Réalité et vice versa : Le cas Nollywood

ARLEQUINMusique, cinéma, séries tv, mode : des secteurs liés à l'image. Des secteurs qui rapportent. Des secteurs à la vitalité économique témoin de la capacité et du besoin du continent de créer de la valeur ajoutée à partir de ses cultures et pour répondre à ses préoccupations. Des secteurs rangés sous le fanion : Industries créatives.

Et les industries créatives Chers Tous, sont, comme nous l'indique notre ami commun Wikipédia, « les acteurs majeurs de l'économie de la connaissance. Leur développement rapide est le reflet de la contribution de plus en plus importante de l'économie de l'immatériel à la croissance économique. » Je reviendrai vers vous sur les effets de cet immatériel dans nos vies, à l'occasion d'autres articles.

Je vais ici vous rapporter la voix d'un des acteurs de cette industrie.

E-Interviews

Il s'est déroulé du 5 au 8 juin 2014 au cinéma l'Arlequin à Paris, la deuxième édition du Nollywood week festival.

Serge Noukoue en est le Directeur exécutif. Afféré et très sollicité, c'est par e-mail qu'il a finalement pu nous consacrer quelques minutes d'un temps toujours précieux.

Suivra l'interview de Shari Hammond, Responsable des partenariats.

J'ai demandé à ces deux personnes clefs du festival, de répondre à des questions sur cet événement, sur les industries créatives et sur l'interpénétration entre fiction et réalité.

Clic-Text-Send avec Serge Noukoue – Directeur exécutif

SN(1)GLF : Serge, quel est votre parcours ? Votre histoire ? Votre relation avec les industries créatives ?

SN : Après un Master en Management de Projets Culturels à Paris, je me suis dirigé vers l'audiovisuel de manière générale, en faisant tout d'abord des stages. Puis, très rapidement, je me suis mis en tête de contribuer au développement du secteur audiovisuel en Afrique. C'est une vaste tâche et ce n'est pas évident de savoir par où commencer quand on a à cœur une mission comme celle-là.

J'ai d'abord travaillé en tant que Chargé de projets à Canal France International. Par la suite, j'ai décidé de voler de mes propres ailes en montant ce projet de festival, que j'envisage comme un outil de développement au service de l'industrie du cinéma nigérian.

GLF : Nollywood week festival est un événement organisé par Okada Media, une association loi 1901 en France et créée en 2013.

Quel objet poursuit cette association ? Qui en sont les membres ? L'association est-elle la meilleure structure juridique pour encadrer un tel évènement ?

SN : L'association nous a en effet semblé être la meilleure forme juridique pour ce projet. Mais le projet a précédé la création de l'association. Okada Media a donc été créée parce qu'il fallait une entité juridique pour porter le festival.

Ses membres sont les 3 personnes qui dirigent le festival : Nadira Shakur, Shari Hammond et moi-même. Nous avons également d'autres personnes qui nous ont aidées tout au long de la préparation du festival et qui souhaitent s'impliquer à long terme autour de ce projet.

En tout, l'association compte une petite vingtaine de membres.

GLF : La NWF existe(ra)-t-elle dans d'autres pays ? Présumez-vous ou connaissez-vous le besoin des consommateurs en cinéma nigérian sur les différents continents ? Quelle est votre unité de mesure ?

SN : Potentiellement oui, la Nollywood Week peut avoir lieu dans d'autres endroits. Nous ne nous y sommes pas encore attelés car cela nécessite un travail important en amont et en premier lieu un modèle économique.

GLF : « Okada est l'appellation communément donnée aux moto-taxis que l'on trouve dans de nombreuses villes du Nigéria. Synonyme de débrouillardise et de créativité, l'arrivée de l'Okada a permis de combler un vide et de faciliter l'accès à des zones autrement inaccessibles. En tant que créateur d'accès au meilleur du contenu "Made in Nigeria", ce nom s'est imposé comme une évidence aux organisateurs de la Nollywood Week. » in nollywood.com

Quel est votre ambition à court, moyen et long terme ? Est-ce d'être une courroie de transmissions pour d'autres industries, d'autres géants du continent ? Ou est-ce de travailler dans cette industrie ?

SN : Créer un accès qualitatif au contenu Nollywoodien de qualité est notre objectif. On peut estimer que notre festival nous permet de remplir cet objectif. Cependant, le combat est encore long. Et nous aurons gagné la bataille que lorsqu'il sera normal de voir au cinéma en France, des films nigérians à l'affiche, ou alors sur les grandes chaînes de télévisions de ce pays.

Il est important que l'Afrique consomme ses propres produits culturels et il est important qu'elle les exporte également. Nous avons décidé de nous focaliser sur un pays : le Nigéria. Mais globalement, c'est de ça dont il s'agit. Le cinéma est un secteur stratégique, mais il n'est pas impossible que dans le futur on élargisse notre action à d'autres disciplines.

SALLEGLF : Dans un avenir plus ou moins lointain, le Nigéria pourrait-il devenir un centre de formation cinématographique pour le continent ?

SN : C'est possible, mais ce qui serait davantage intéressant serait que le modèle nigérian fasse des émules ailleurs sur le continent.

Et ce que j'appelle le modèle nigérian ici, consiste à produire des films de manière indépendante avec une véritable optimisation des coûts de production et une autonomie financière.

Dans d'autres parties du continent, les longs-métrages de cinéma ne voient le jour que lorsque les financements en provenance de l'Occident sont obtenus. Cette situation n'est pas acceptable et le Nigéria représente à cet égard un exemple.

GLF : L'Etat nigérian, accompagne-t-il, encadre-t-il cette industrie ? De quelle manière ?

SN : Au Nigéria, qui est un Etat fédéral, force est de constater que depuis peu, le gouvernement central tout comme les Etats locaux – avec une mention particulière pour celui de Lagos qui fait partie des plus dynamiques en la matière – ont donné le La pour que l'investissement culturel soit considéré comme un élément clé de la politique publique.

Des prêts sont proposés aux réalisateurs, des salles de cinéma voient le jour un peu partout. L'importance du secteur est enfin reconnue par l'administration qui y voit un pourvoyeur d'emplois pour la jeunesse, ainsi qu'un vecteur de bonne image du pays à l'étranger.

GLF : Vous étiez présent au Forum économique de la Cade sur Bâtir des industries modernes et compétitives en Afrique. Jeudi 12 juin, vous avez, aux côtés de Sylvestre Amoussou (Réalisateur-Producteur de cinéma), Xavier Simonin (Directeur technique du Festival A Sahel Ouvert de Mbumba au Sénégal) et Jacques Nyemb (Avocat associé), été invité d'honneur de la rencontre-débat de la Cade sur Economies culturelles et créatives d'Afrique : Quelles contributions au développement socio-économique ?

Doit-on comprendre que miser sur la culture et incidemment sur les valeurs ajoutées créées par les activités de ce secteur-industrie peut-être un levier de développement pour notre continent ?

SN : La Culture, les Industries créatives représentent effectivement un outil pour le développement. La difficulté est qu'il faut  avoir conscience de cela pour pouvoir élaborer des stratégies appropriées et les mettre en œuvre. Les industries créatives doivent créer de la richesse et des emplois en Afrique, comme elles le font ailleurs. Le potentiel est là. Les stratégies un peu moins. Mais c'est pour ça qu'il faut regarder vers ce qui fonctionne.  Et le Nigeria, malgré tous les problèmes auquel ce pays est actuellement confronté, semble avoir pris conscience de l'importance des industries créatives. Il faut que d'autres pays s'inspirent de ce qui se fait là-bas et adaptent certains procédés à leurs réalités propres.

GLF : Pour finir, j'aimerais en revenir à des considérations socio-philosophico-culturelles. Le continent est confronté comme partout ailleurs à des problématiques identitaires. Et vous ? Etes-vous un Français d'origine béninoise ou un Béninois de nationalité française ?

SN : J'ai les deux nationalités. Les deux passeports. Maintenant en ce qui concerne mon identité personnelle, elle est on ne peut plus hybride. J'ai vécu en France certes, mais aussi au Sénégal, au Cameroun, en Centrafrique, aux Etats-Unis, au Brésil et ma femme est Afro-Américaine.

Tous ces voyages m'ont nourri. J'ai toujours été curieux et ouvert sur le monde. Le Nigeria m'influence énormément. J'y puise mon inspiration pour beaucoup de choses. Je rêve de décloisonnements, d'échanges. L'Afrique en a besoin. J'ai été dans toutes les régions en Afrique, qu'il s'agisse d'Afrique Centrale, d'Afrique de l'Ouest, d'Afrique Australe, d'Afrique de l'Est, du Nord… Et même si j'ai horreur des généralisations, je peux affirmer une chose : Personne ne connait moins l'Afrique que les Africains eux mêmes… C'est une triste réalité qui puise ses sources dans un passé douloureux que nous connaissons tous. Mais c'est bien à nous-mêmes de choisir si l‘on veut que ce passé continue de nous définir ou pas.

FILE ATTENTEGLF : Quel est l'accès des Nigérians à son cinéma ? Que reflète ce cinéma de ce pays ?

SN : Cet accès pourrait être amélioré. Le cinéma nigérian est populaire sur place bien évidement, mais nous sommes loin de ce que représente Bollywood pour les Indiens par exemple.

GLF : Vous ne semblez pas être un prestataire au service de la culture nigériane, mais un entrepreneur qui investit avec toute l'acuité d'un citoyen conscient des différents enjeux, dans un domaine à forte valeur ajoutée.

J'évoque là votre sélection méticuleuse, aussi bien dans la diversité des sujets évoqués dans les différents films, que dans les personnalités de la délégation nigériane. Des personnes que je qualifierais d'éclairées et engagées. Pouvez-vous nous édifier sur ces points? Quel public visait cette programmation ?

SN : L'idée était de mettre en avant la qualité de l'industrie cinématographique nigériane et de mettre également en avant sa diversité. Il fallait donner à voir un panel de films qui traite des thèmes différent les uns des autres.

L'idée était aussi de présenter ce pays sous son meilleur jour. C'est une sorte d'Opération-séduction d'une certaine manière.

Je pense que ça permet de tordre le cou aux idées reçues. Le Nigeria fait partie de ces pays qui font l'objet de beaucoup de clichés. Clichés négatifs la plupart du temps. Il est important d'aller à l'encontre de tout ça et de rendre possible un véritable échange, un véritable dialogue.

GLF : Afrique anglophone/Afrique francophone, avez-vous observé des disparités entre ces deux blocs ? Que ce soit au niveau culturel, structurel, économique ou autre ?

SN : Les disparités sont importantes… L'Afrique Anglophone est plus avancée économiquement. Peut-être plus décomplexée culturellement aussi. Mais ce qui est primordial, c'est de faire en sorte que ces deux blocs se parlent et échangent, parce qu'ils n'ont finalement que très peu l'occasion de le faire. Et la Nollywood Week sert aussi ça. A décloisonner.

J'ai la chance de parler anglais et français et je suis assez content que cela permette à des Nigérians d'échanger avec des Sénégalais pendant le festival par exemple. Ce sont de petites choses, mais on peut en espérer d'heureux résultats : des amitiés qui se créent, qui pourront déboucher sur des partenariats, sur des co-productions… Qui sait ? C'est aussi ça la magie des rencontres et c'est pour ça qu'il faut plus de rencontres entre Africains francophones et Africains anglophones.

GLF : Serge Noukoue, merci.

SN : Merci à vous. Merci pour votre intérêt et pour vos bonnes questions!

Clic-Text-Send avec Shari Hammond – Responsable Partenariats

SH(1) Chers internautes, Shari Hammond est en ce moment entre deux voyages, non pas de type astral, mais professionnel et d'ordre privé. Dès qu'elle posera un pied sur la terre ferme d'Ile-de-France (région administrative de France au coeœur de laquelle se niche sa capitale : Paris), je m'en irai lui porter un verre d'eau fraîche, lui transmettrai vos meilleures salutations et lui demanderai de m'accorder pour vous un entretien.

En attendant cet autre rendez-vous, j'espère que cette petite e-causerie avec Serge Noukoue vous a édifié sur l'importance de donner à voir du beau, de la qualité, du rêve, sans nier ou renier la réalité.

Mais surtout, à ceux qui sciemment ou pire en moutons de Panurge méconnaissent, sabotent, outragent leurs cultures, empêchant rayonnements culturels et retombées économiques, sachez qu'il n'est pas trop tard pour faire amende honorable, revenir à de meilleurs sentiments et surtout affronter votre miroir culturel en toute sérénité.

Gaylord Lukanga Feza.

Kyle Shepherd joue Xamissa au Festival d’Automne à Paris

Neuvième mois de l’année du calendrier grégorien, septembre est un mois de récolte : vendanges, impôts sur les revenus des ménages et autres contributions fiscales, prix littéraires et lauriers pour les heureux admis.

C’est également un mois où le soleil des pays du nord rejoint de plus en plus précipitamment sa couche, laissant pauvres hères comme joyeux drilles sous les feux électriques des grandes métropoles. C’est le mois qui accueille l’automne en zones tempérées.

Et c’est avec un puissant rayon arc-en-ciel que l’Afrique du Sud illumine et réchauffe de sa culture la Ville-Lumière, à l’occasion de la 42e édition du Festival d’Automne à Paris.

Dans les  lignes qui suivent : la performance du musicien Kyle Shepherd… prétexte à causerie.


graph1Dîners et autres évènements mondains : Et le quidam devient expert

En spécialiste ès Afrique lorsque j’ai en majorité des autochtones, ès RDC lorsque j’ai en majorité pour assemblée des Africains, m’interroge-t-on quasi invariablement sur les Noirs : de Adama à Zenaba, en passant par Ngoyi, Haïle, Nafissatou, une vraie panafricaine quoi ! Sur Koffi Olomide : un bonheur puisque je l’adore. Sur les ‘‘lacunes’’ des langues africaines : le français, l’anglais, l’arabe voir d’autres idiomes, étant copieusement saupoudrés dans nos parlers et chansons. Sur la sape : toujours imités, jamais égalés. Sur l’authenticité de mes cheveux ; ou comment faire preuve de savoir-vivre. Sur la pauvreté des miens dans l’abondance de notre territoire. Sur Tintin au Congo : référence culturelle s’il en est. Sur les banlieusards : dans une Afrique de castes et des classes sociales fortement clivées, la banlieue a mis tous les ‘‘Blacks’’ – on ne dit que peu ‘‘Noir’’ en France, et même, dans la bouche de certains individus on n’entendra que ‘‘personne de couleur’’ – à égalité : tu es au ban, toi comme celui qui d’après toi ne te ressemble pas !

Et dernièrement, parlant musique lors d’une soirée parisienne, un convive rwandais de souligner la perte de vitesse de la musique congolaise sur le continent, au bénéfice des anglophones du Nigeria et même du Ghana. Celui togolais d’affirmer que la musique congolaise restera l’eau sur la table. L’autre de renchérir en vantant les qualités vocales des Sud-Africains, leurs chœurs étant mondialement connus.

Le hasard est une loi qui voyage incognito

graph2Quelques semaines après ce débat musical, en me baladant dans Paris dans les environs du Quartier Latin, mon regard s’arrête sur une grande affiche ciglée Festival d’Automne, l’Afrique du Sud à Paris. Affiche illustrée avec des hommes en habit européen, portant des chéchias rouges. Je suis perplexe. Des Arabes en Afrique du Sud ? Je ne savais pas. Que vont-ils (les organisateurs) encore vouloir montrer ? Yvonne Chaka Chaka née à Soweto et aujourd’hui ambassadrice de bonne volonté aux Nations Unies (dont nous dansions Stimela dans nos boums au Zaïre), Johnny Clegg aka le Zulu blanc (dont on a vu et revu le clip Asimbonanga  sur Télé Zaïre), Miriam Makeba aka Mama Africa (icône de la lutte anti-apartheid dont la chanson Malaïka – ange en swahili – chantée avec Harry Belafonte est un frisson de romantisme), Brenda Fassie (la diva de la pop dont le tube Vul’indlela a été un incontournable des soirées franciliennes), Culoe de Song (super dj qui mixe avec brio musiques africaines et house), n’est-ce pas ça la musique sud-africaine ?

Le hasard donc a fait escale à Paris pour m’ouvrir les portes Festival d’Automne. Festival qui tel un album photo montre différents visages de la famille Afrique du Sud : sous ses jours musique, théâtre, art plastique, performance, cinéma.  

Et sur la première diapo : Kyle Shepherd au Théâtre des Bouffes du Nord, pour la première de Xamissa, le mercredi 25 septembre.

Une brique Brics pour Paname 

Le cadre de cette rencontre est celui de la coopération culturelle et diplomatique entre l’Afrique du Sud et la France.

L’Afrique du Sud, première puissance d’un continent vers lequel tous les regards se tournent – de nouveau, encore, lorgnant sur sa jeunesse, ses terres, son sous-sol, ses émissions de gaz, son soleil, ses eaux, ses matières premières – est le pays arbitre de conflits, tendant à devenir une sorte de Suisse africaine. Au top mondial des puissances minières, il est aujourd’hui également un pays dit émergent et est considéré comme une des grandes puissances de demain avec quatre autres pays : le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. Ce groupe de cinq est réuni sous l’acronyme anglais BRICS.

La France, membre du G8 (groupe de discussions et de partenariats économiques, représentant les huit pays les plus puissants du monde, économiquement) est aujourd’hui une puissance qui stagne. ‘‘Ces jeunes sont malheureux voire désespérés. Ils ne savent plus où investir leur savoir et leur vouloir […] Une génération sacrifiée […] En France, tout projet social ou économique est analysé en termes de lutte des classes’’ Volker Schlöndorff, cinéaste allemand, dans le numéro 357 de Challenges.

La culture, la diplomatie sont donc ainsi autant d’instruments propices aux dialogues des cultures, aux échanges humains, scientifiques, commerciaux et aux développements économiques subséquents. Mais également, ils confortent des liens créant une reconnaissance mutuelle qui permet protections en période de conflits, aides en cas de crises.

En 2012, la France avait fait rayonner sa culture en Afrique du Sud. En 2013, l’invité devient hôte.

Qui est Kyle Shepherd ?

graph3De ce que j’ai vu et entendu sur scène…

Un artiste talentueux, conscient, à la plastique comme sa musique : métisse, faussement badine, véritablement travaillée.

De ce que j’ai lu sur le net…

Il a 26 ans : né au Cap en 1987. Il se définit sur son site comme un musicien, un poète, un artiste créatif (creative artist).

Il affiche au compteur trois albums : South African History !X, A Portrait of Home et fineART. Il touche à la poésie et a collaboré à différents projets artistiques.

Il est entré en musique par le violon. Il s’en élèvera par le piano, grâce à sa rencontre avec Abdullah Ibrahim aka Dollar Brand, dans une vie précédente. Un musicien qui comme lui est né au Cap et a été pour le jeune multi-instrumentiste en plus d’un maître en musique, un maître spirituel : Il lui aura permis d’atteindre non seulement une nouvelle élévation musicale, mais encore de se révéler à lui-même, en découvrant sa propre musique.

De ce que j’ai glané ça et là après la représentation…

Rien de plus. Ayant posé la question, on m’a répondu : Il est né au Cap.

C’est vrai que le jeune homme déteste les étiquettes.

Et dans un pays où ‘‘ta peau était ton étoile jaune’’ pour reprendre les mots de Barbara Masekela, la question de l’identité reste une question sensible.

Est-il utile de connaître son cépage pour apprécier un grand millésime ? Est-il nécessaire de savoir qui est Kyle Shepherd pour être touché par sa musique ?

L’information, nerf de la guerre, fait partie de notre société de consommation. Et le savoir fait partie de notre condition d’humains.

L’identité n’est pas une donnée accessoire, ni n’est un accessoire.

J’aurais volontiers poursuivi avec un petit crochet historique, pour rappeler les conditions qui ont mené cette partie du monde qu’on appelle aujourd’hui Afrique du Sud, à s’ériger en nation arc-en-ciel. Mais c’est une longue histoire.

Je suppose donc en anthropologue amateur que Kyle Shepherd a une ascendance indonésienne.

Xamissa ?

C’est une création commandée par la directrice artistique du Festival d’Automne, Joséphine Markovits, il y a un an. Elle avait alors, à l’occasion de ses repérages d’artistes pour organiser l’événement, eu de bons échos de la part d’une de ses amies sur le jeune Kyle Shepherd, star montante de la nouvelle génération de musiciens sud-africains.

Le talent de l’artiste aura une fois de plus été son meilleur avocat et commande lui aura été faite de composer une pièce musicale sur Le Cap.

Xamissa ? Prononcez Klamissa. Une sorte de X qui laisse claquer un K, suivi d’une sorte de clapotement salivaire dans ce particularisme lingual des Sud-Africains. C’est ainsi qu’en langue khoi on identifiait la région du Cap.

Xamissa signifie le lieu des eaux douces (the place of sweet waters). Eaux venant de la montagne de la Table. Aujourd’hui s’écoulant en réseaux souterrains, le sol ayant fleuri de constructions urbaines.

Xamissa est la région des premiers peuplements et des premières invasions. C’est la cité-mère. 

Le Cap est aujourd’hui une ville magnifique, cosmopolite, une cité touristique et un haut lieu de tournage de nombreuses réalisations cinématographiques et autres. C’est également une ville gayfriendly.

A noter : l’Afrique du Sud est la première nation africaine à légaliser (en 2006) le mariage homosexuel. Elle est la cinquième au monde. Et Desmond Mpilo Tutu, archevêque anglican sud-africain et prix Nobel de la paix en 1984, est quant à lui le premier homme d’église en faveur de l’homosexualité.

Ayant longtemps souffert l’enfer des discriminations raciales, l’Afrique du Sud a effectivement décidé de tourner le dos à toutes les  discriminations.

Un show en équipe

 

graph4Kyle Shepherd n’est pas seul sur scène. Et il y est très bien entouré.

Claude Cozens (premier à gauche) est aux percussions ghoema. Né en 1989, il a fait ses gammes comme beaucoup au Cap, à l’église, manipulant guitare basse, batterie, piano. Il est repéré à quatorze ans par le pianiste Fred Kruit, enseignant au lycée de Muizenberg, qui l’initiera au jazz. Expérience qui l’emmènera à jouer avec quelques grands du jazz sud-africain, comme Errol Dyers, Hilton Schilder, André Peterson. Il est diplômé de la prestigieuse Université de Cape Town.

Buddy Wells (grand Blanc au regard azur lorsque ses paupières ne tapissent pas ses rétines) est saxophone ténor. Né en 1972 dans une famille profondément anti-apartheid, il s’est très tôt passionné pour les musiques traditionnelles africaines et pour le jazz. Il passera de la flûte au saxophone à

l’écoute des Kippie Moeketsie, Barney Rachabane, Hugh Masekela et autres grandes icônes musicales.

Xolisile Yali, voix, (coupe à la main, yeux étincelants, soulignant mon amateurisme en photographie) a étudié et chanté au sein de l’Université du Western Cape. Il enseigne aujourd’hui les sciences et les mathématiques.

Bulelani Madondile (homme à droite, en blanc), Portia Shwana (femme à droite, en top blanc) et Busisiwe Ngejane (au centre, en chemise blanche) sont tous trois nés dans le township de Gugulethu et ont fait partie, à différentes périodes, du chœur du Lycée de Fezeka, lauréat de nombreuses récompenses. Chœur créé et dirigé par Phume Tsewu.

Bulelani Madonlile et Portia Shwana poursuivent leurs études à l’Université de Cape Town.

Il est de Soweto, mais on le sort quand même

Il ? Notre vuvuzela bien-sûr ! Il serait originaire de Soweto, banlieue de Johannesburg aux batailles et émeutes tristement célèbres, qui ont fait de ce township une des villes symboles de la lutte anti-apartheid.

Nous le sortons donc pour saluer le disciple d’Abdullah Ibrahim qui a enchanté le public du Théâtre des Bouffes du Nord. Un lieu hautement symbolique puisque c’est là que trente sept ans plus tôt se produisit, toujours au Festival d’Automne à Paris, Abdullah Ibrahim. Pour la petite histoire, Abdullah Ibrahim est un pianiste de jazz et compositeur sud-africain, autre grande figure de la lutte anti-apartheid.

Ainsi donc, les traits quelque peu fatigués de l’artiste n’ont en rien entamé son talent. Le petit est doué et le public a été conquis. Qui de s’essayer aux youyous maghrébins. Qui de hurler bravo. Qui de siffler. J’en suis venue à me demander si tous étions de ‘‘réels’’ spectateurs ou si la majorité était composée d’amis, de connaissances de quelqu’un aux Bouffes du Nord.

Pour sûr, le public semblait lui aussi arc-en-ciel, brassant coupe afro, cheveux défrisés, crépus coupés à ras, tressés au naturel ou avec rajouts, cheveux raides ou bouclés, longueurs blondes, brunes, poivre-sel, ‘‘elite financière (qui va à l’opéra) comme élite médiatique (qui va au cinéma)’’ pour reprendre une classification de l’homme de théâtre Olivier Py, dans un article sur le théâtre du numéro de septembre de La Terrasse. Un journal culturel qui a été distribué à l’entrée des Bouffes du Nord, par une demoiselle à qui le show aurait mis du baume au cœur.

Quelques temps forts du show

 

graph5Ma voisine de gauche, une Guadeloupéenne, accompagnée de son doudou et salariée de la Société Générale – l’un des trois piliers de l’industrie bancaire française non mutualiste et mécène de la soirée – était légèrement enrhumée. Elle a donc passé la soirée la tête amoureusement scotchée à l’épaule virile de son cher et tendre. Je suis sûre que les improvisations de Shepherd et les profondes vocalises des quatre fantastiques du Fezeka Youth Choir, lui auront évité tout torticolis.

Son homme, en pleine forme lui, et dont le bras enveloppant n’a pas souffert d’ankylose, battait la cadence sur les hanches de sa dulcinée. Cadence qui a commencé par des caresses, Shepherd ayant débuté la pièce avec un xaru. Un arc traditionnel, non pas pour chasser ou tuer lors de batailles, mais pour jouer, animer, rythmer les actes sacrés ou profanes du quotidien et j’ajouterai, pour enchanter le regard.

Enchanter le regard, car le xaru s’entend et se regarde. Ou plutôt fait regarder avec attention son joueur. C’est en effet dans l’union d’un baiser sensuel que l’instrument fait vibrer l’air des sons qu’on lui insuffle.

Un chœur de larmes. Confrontations des autochtones aux Européens. Exils. Apartheid. Mise au ban sur ses propres terres par des étrangers. Difficultés de se poser en chef de famille, d’éduquer ses enfants, ses cadets, de s’imposer en tant qu’adulte, en tant que citoyen d’une nation, lorsque sa dignité d’être humain est entachée, bafouée au plus intime et à la vue de tous. Souvenirs des meurtres, d’une injustice institutionnalisée. Embarras causé par une réconciliation entre mémoire vive et vivre ensemble jalonné d’obstacles sociaux et économiques que seule une volonté de fer, de tous les jours, peut surmonter. J’imagine combien forte peut être la charge émotionnelle, à l’évocation de toutes ces turpitudes de l’histoire sud-africaine.

Le ton grave et l’attitude du chœur suggèrent un épisode tragique de l’histoire du Cap.

Les larmes de Busisiwe Ngejane achèvent de me le confirmer.

Mon niveau d’anglais ne me permet pas de vous écrire quelques phrases de la pièce et de vous faire partager encore plus avant la beauté et la magie de ce live. Mais peut-être les percevez-vous ?

Solo du saxo. Il n’y a pas que sur les photos que Buddy Wells soustrait à notre vue ses yeux bleus. Il le fait également sur scène. Et c’est avec un jeu sui generis qu’il esquisse de son pinceau métallique un nouveau trait de Xamissa, révélant plus encore la personnalité sonore de la  cité-mère. Notre banc vibre. La femme enceinte à ma droite, une blonde, caresse son ventre rond d’une âme à accueillir : bébé doit swinguer.

J’arrive à détacher mon regard de la scène quelques secondes, pour jeter un coup d’œil sur le public. On dodeline de la tête. On sourit.

Shepherd aime, savoure son art. Mais c’est un plaisir qu’il ne veut pas solitaire. Et tel un amant plié par le désir mais attentionné, il sort de temps en temps la tête de son piano Steinway & sons pour s’enquérir de son public : vous êtes là ? Communions-nous ?

L’amoureuse a chaud. Elle enlève un habit. Shepherd aussi a chaud. Il déboutonne d’un cran sa chemise noire.

graph6Ghoema sessions. Figurez-vous un papillon géant qui fendrait l’air de ses ailes gigantesques. Réaction immédiate : une tempête de vibrations dans tout l’être. C’est l’effet percutant de Claude Cozens. Ghoema est un instrument de percussions sud-africain, qui a été spécialement monté en batterie pour le show. Et Bulelani Madondile ponctue chaque drums de pas bien sentis. 

Dirigiste le Shephed ? Son équipe est souvent tournée vers lui. Attendant de petits signes de tête, feu vert pour entonner les différents actes de la pièce musicale. Je ne sais quoi penser de ces petits signes de tête. S’il faut à chaque fois le regarder pour débuter un acte, pourquoi en chef d’orchestre ne s’est-il pas positionné mieux en avant ?

Mais peut-être est-ce là une mise en scène permettant d’illustrer des manières sud-africaines ? On sait ce qu’on a à faire, mais on accueille d’abord l’aval du chef avant de s’exécuter !

Ou n’est-ce que ses envolées, ses improvisations pour lesquelles deux jeunots s’extasiaient à la fin du spectacle imposent à son band une attention de tous les instants.

Ce que art ne peut, hasard achève

Et une nouvelle aventure riche d’enseignements ! Un voyage musical d’une heure quinze minutes à travers une ville, Le Cap, que je ne connaissais qu’en écrin pour films publicitaires, m’a mené vers une nouvelle acception de l’Afrique du Sud. A côté du beau Henry Cele, interprétant Shaka Zulu, d’après le roman historique de Thomas Mofolo et porté au cinéma dans les années 1980. A côté du grand Madiba (Nelson Mandela), icône africaine, icône mondiale. A côté de Carmen de Khayelitsha, film de Mark Dornford-May mettant en scène la Carmen de l’Opéra de Bizet dans un township du Cap. A côté de Tsotsi, le voyou porté au cinéma par Gavin Hood. A côté donc de mes vieilles photos, de nouvelles se sont ajoutés, dans mon album personnel de l’Afrique du Sud.

Cela m’aidera-t-il aidé à décrocher mon doctorat en ethnologie africaine ? En sociologie des diasporas – spécialité Noirs du monde ? En linguistique des dialectes subsahariens ?

Pour aujourd’hui, j’espère qu’il aura permis aux uns de redécouvrir l’Afrique du Sud. Aux autres aura-t-il sans doute donné envie de vivre la magie des spectacles vivants.

Le Festival d’Automne à Paris se poursuit jusqu’au 12 janvier 2014. Sa programmation réserve encore de nombreuses et belles surprises.

Faites du bien à vos sens et soutenez par la même occasion les cultures africaines, la culture en général, et à travers elle ses artistes : des hommes, des femmes, des citoyens du monde.

Ngiyabonga. Je vous remercie.

 

Gaylord Lukanga Feza