Macky Sall ce président qui gouverne du coté obscur de la force !

Afin de valider son deal devant aboutir à la libération d’un condamné pour enrichissement illicite, Macky Sall est d’abord allé le faire valider dans les foyers religieux. Puis pour poser un jalon devant le faire demeurer dans le sens commun, après cette volte-face aux relents de forfaiture, il a marché, à l’heure de la prière du vendredi, de son palais à la mosquée à grand renfort de publicité. Enfin, pour faire croire que ce régime est garant de certains principes alors qu’il « deale », se dédit, et hypothèque ce qui lui restait de légitimité, l’on a demandé à un commissaire de police de convoquer une starlette en mal de popularité, au motif fourre tout d’atteinte aux bonnes mœurs, un vendredi, pour pouvoir la garder à vue pendant trois jours (sachant qu’au parquet on se repose le samedi et le dimanche), et ne la présenter au procureur que le lundi. Pour rien au final, aucune charge, dossier classé.

Mais on se sera assuré d’un weekend pendant lequel les citoyens qui s’étaient ligués contre le deal, le dénonçant, commençant à atteindre une masse critique dangereuse pour tout pouvoir happé par le côté obscur de la force, ont plus mis en avant leurs divergences sur les notions de liberté individuelle et de valeurs sénégalaises que leur unanimité contre la forfaiture en préparation. Beaucoup parmi ceux qui étaient vendredi matin contre la justice à deux vitesses qui libère les « grands » noms accusés ou condamnés de graves crimes et emprisonne des corps anonymes convaincus de petits larcins ou de gros méfaits, se sont mis à nuancer leur jugement à propos de ce système inique dès que la rappeuse jusque là inconnue au bataillon a fait irruption dans le débat. Non finalement ce n’est plus une justice à deux vitesses… et ils trouvaient des arguments pour légitimer ce qu’ils pourfendaient la veille. La justice est là pour réprimer les anti-valeurs ont-ils dit et elle le fait bien.

Soudain ils étaient satisfaits peu ou prou de ce système qui promeut l’impunité, peut-être l’anti-valeur suprême. Ce système capable de laisser en prison, par la magie de la détention préventive, pendant cinq ans, un anonyme, de le juger et de le déclarer… non coupable. Ce système capable aussi de juger un « grand » nom, de le condamner puis de le laisser, au bout d’un moment, vaquer tranquillement à ses occupations. On fait croupir des innocents dans les cachots et on laisse à l’air libre des coupables. Puis on parle de valeurs à sauvegarder (l’entretien dans un journal d’un ministre porte-voix du palais, ce matin). Et on utilise la religion pour légitimer le forfait, se faire passer pour un homme du peuple et déchainer les passions pour monter les uns contre les autres ceux qui s’indignent d’un système fait d’iniquité et d’accaparement du bien commun.

Ailleurs pour faire passer ce type de forfait, des régimes autoritaires désignent l’autre : les étrangers, l’occident (non sans raison pour le dernier cité) pour masquer leurs propres turpitudes..

Ici on désigne des anti-valeurs à travers la proie facile d’une fille qui fait une vidéo dans son salon, ni plus ni moins vulgaire que ce qui se passe dans nos boites de nuit et même nos rues parfois avec par exemple ces sabar torrides qui rythment le quotidien. Déesse major est un prétexte, un moyen dans l’allumage d’un contre-feu. Le comité qui a porté plainte contre elle n’est que l’idiot utile dans l’orchestration de cette mascarade. Quand on dit que le Sénégal est un pays tiré vers le bas par le système LMD (Lutte, Musique, Danse) dont les ambassadeurs, qui ne sauraient servir de modèle à la jeunesse, vont du lutteur Balla Gaye 2 à la chanteuse Déesse Major, on se doit aussi et surtout d’ajouter que ce pays est tiré vers le bas par une caste de privilégiés : politiciens, religieux, businessmen et autres personnages connus ou non, qui se soutiennent mutuellement. Les uns légitimant les forfaits des autres. Les autres donnant des avantages indus aux uns.


On ne peut ériger un socle de valeurs pour faire avancer un pays lorsqu’on veut le fonder sur l’injustice, la banalisation du deux poids deux mesures, l’indignation facile contre les plus faibles et le consensus mou autour des dérives des forts.

La foi est lumineuse. Elle forge un rapport fécond au monde, permet de vivre en paix avec soi-même et parfois de soulever des montagnes.
Mais lorsqu’elle est instrumentalisée, comme je pense que cela a été le cas dans cette affaire, aux dépens d’une proie facile, pour distraire les uns, flatter, rassurer les autres sur une prétendue préservation de valeurs alors qu’on pille le pays sous leurs yeux, cela s’appelle de l’obscurantisme.

Gouverner par le côté obscur c’est mettre tout ce monde qui devait nouer une alliance objective pour arrêter les pillards, les uns contre les autres en suscitant « une affaire » où il faut se déterminer non plus entre nous qui voulons une gouvernance vertueuse et eux qui pillent et « dealent », mais entre ceux d’entre nous qui seraient plus croyants parce qu’ils ont cloué la rappeuse sortie de nulle part au pilori et ceux qui le seraient moins ou pas du tout parce qu’ayant considéré que la jeune femme n’était que le dindon de la farce de l’inégalité devant la justice, celle de l’iniquité, de l’impunité et des privilèges indus.

Et l’ennemi, la caste des privilégiés, rit sous cape. Il a de beaux jours devant lui pour piller à son aise, creuser les inégalités sociales et continuer l’exploitation des plus faibles.

Racine Demba 

Cet article est paru initialement sur le blog de Racine Demba consultable ici : http://livracine.overblog.com/

 

Karim Wade, de l’arrogance à la trahison des siens

 

Photo+Karim+WadeLe prononcé du verdict de la Cour de répression de l’enrichissement illicite contre Karim Wade et ses complices, ce lundi 23 mars 2015, a été accueilli par une immense clameur de désolation dans la salle 4 du Palais de justice Lat Dior de Dakar. Celle des partisans de l’ancien ministre d’État, finalement condamné à six ans de prison ferme, une amende de 138,293 milliards de francs Cfa, la confiscation de tous ses biens identifiés par l’enquête, mais gardant ses droits civils et politiques.

A dire vrai, cette sentence n’a surpris personne en dehors de ceux qui avaient la naïveté de croire que la machine judiciaire, sur ce dossier de la traque dite des biens mal acquis, avait les moyens de « négocier » quelque arrangement spécifique au statut du fils de l’ancien président de la république. Patatras ! Quoique modérée, la main des juges du tribunal de la Crei n’a pas tremblé, même si le président Henri Grégoire Diop a paru s’essouffler au terme de deux heures de lecture d’une sentence historique.

En soi, nous ne nous réjouissons pas de la condamnation de monsieur Karim Wade à six années de prison. Simplement, nous avons le devoir de saluer la détermination politique du pouvoir sénégalais à aller, pour une fois, au bout d’une logique saine et salutaire : la protection des ressources de la collectivité nationale contre les criminels économiques et financiers de passage dans les hautes (ou basses) sphères de l’État.

Karim Meïssa Wade, ancien tout-puissant ministre d’État aux responsabilités stratosphériques, paie aujourd’hui les pots cassés d’une ascension irréfléchie, brutale, sans commune mesure avec le vécu réel qui était le sien au moment de l’accession de son père à la magistrature suprême. Plastronnant sous une littérature directement extraite d’un conte de faits pour enfants, l’ex-ministre d’État s’est vu trop beau trop tôt, trop fort trop vite, ignorant volontairement ou naïvement les ingrédients de base constitutifs de la carapace d’un vrai homme d’État. 

Sans base ni éducation politique, dépourvu de charisme, sans relais structuré dans le Sénégal des profondeurs, il avait fait le choix de vivre sur l’énorme capital politique et humain de son père, Abdoulaye Wade. Or ce dernier, faut-il le rappeler, s’est assujetti à endurer vingt six ans de carrière dans l’opposition avant de toucher le Graal de son engagement et de ses sacrifices. Le fils, lui, se forgeant des ambitions phénoménales avec la complicité irresponsable des ascendants, s’est laissé embarquer dans ces réseaux inextricables d’intérêts et de magouilles que seule l’immersion dans le pouvoir permet. 

Novice dans la manipulation du principe de puissance, imprudent face aux conséquences imprédictibles permises par la volonté démocratique des peuples, Karim Wade s’est aveuglé avec l’aide des siens, intransigeant contre ceux qu’il considérait à tort ou à raison comme des ennemis bruts de son ascension, n’écoutant que ceux qui lui contaient sornettes pour tirer profits et avantages de son propre éclosion, autour d’une tasse de thé ou de café, quelque part entre Dubaï et Monaco, mais aussi dans Dakar intra muros. 

L’échec d’une défense

Wade Jr. n’a pas été seulement victime de faux-amis qui, incapables d’assumer par eux-mêmes leurs propres ambitions, avaient fini de dissoudre leur destin politique dans le sien. Il l’a été également d’un père devenu dieu de ses obligés mais qui avait envisagé que seule une double succession monarchique dans « son » parti et dans un État capturé depuis 2000 était en mesure de lui assurer la postérité qu’il revendiquait à la hauteur de son égo. De fait, il ferma peut-être les yeux – s’il était au courant – sur tous les stratagèmes que son fils développait à partir de ses positions de pouvoir au sommet de l’Etat. Abdoulaye Wade était-il informé des pratiques peu orthodoxes auxquelles se livrait Karim Wade et que l’énoncé du verdict de la Crei a mises en lumière ce 23 mars ?
Victime, Karim Wade l’a aussi été de ses avocats et conseils. La plupart de ceux-ci, donc pas tous, sont reconnus comme des professionnels aguerris des prétoires. Des hommes d’expérience aux capacités tactiques qui peuvent être utiles à leurs clients. Mais ne se sont-ils pas trompés de procès au bout du compte ? Le caractère exceptionnel de la Crei, ses procédures aux antipodes des juridictions classiques, sa résurgence en ces temps de la maturité des peuples et des exigences morales liées au principe de la reddition des comptes, ne suffisaient-ils pas à leur imposer une démarche plus efficace pour sauver leur client ? Comment expliquer que des manquements inhérents à ce type de procès aient pu servir de motif pour déserter ainsi le prétoire ?

On peut respecter leur stratégie, cela n’empêche pas d’avancer le propos qui fâche : ils ont opté pour la facilité, plaidant plus dans les médias que devant le tribunal, arc-boutés à des principes universels de droit qui ne font pas tout le droit, finissant par boycotter un procès que la lourdeur des charges contre Karim Wade rendait ingagnable à leurs yeux, oubliant même que, « en matière pénale, la preuve est libre », ainsi que leur rappelait un de leurs confrères.

Le principal concerné n’a pas été exemplaire non plus ! Emmuré dans le silence face aux accusations précises et accablantes de ses contradicteurs, Karim Wade ne s’est pas révélé courageux, en droite ligne d’ailleurs de l’ascension couvée dont il a bénéficié durant sa (brève) carrière politique. Son mutisme, il le voulait sélectif : en extase quand il fallait parler du fameux compte de Singapour et des bijoux de sa défunte femme, deux dossiers sur lesquels il savait qu’il aurait gain de cause ; aphone lorsqu’il était question de AHS, ABS, Blackpearl Finance, etc.

Et maintenant ?

Dans notre entendement, si ce procès historique ne devait pas être l’amorce d’une transformation radicale des modes de gouvernance en vigueur dans notre pays depuis cinquante cinq ans, il n’aura servi à strictement rien, sauf à donner bonne conscience à des politiciens professionnels. C’est le moment pour les politiques au pouvoir de confirmer leur détermination à promouvoir un Sénégal en lutte perpétuelle contre la corruption. Les Sénégalais les ont à l’œil, patients.

Mais le nœud gordien de notre salut à tous réside dans l’émancipation du pouvoir judiciaire, garant de nos libertés, arbitre de nos turpitudes. Car, si nous laissons les politiciens de ce pays conduire seuls nos destinées selon leurs agendas, des centaines d’énoncés de verdict comme celui de ce 23 mars 2015 nous sont d’ores et déjà promis. Encore que, dans l’attente, il y en a qui méritent le sort de Karim Wade.

 

Momar Dieng

Article initialement paru sur le blog http://momardieng.blogspot.fr/

 

Abdoulaye Wade: Chronique d’un clown triste…

Me-Abdoulaye-Wade-Macky-SallVacances. Congés. Autrement dit, je me suis déconnecté complètement des Internets et des réseaux sociaux pour profiter de la grisaille de Paris, ainsi que de la rudesse et de la froideur de ses habitants.

Seulement, c’est sous-estimer le pouvoir d’attraction qu’exerce la toile (particulièrement chez un misanthrope reconnu qui ne vit que devant l’écran), et, mardi 24 février, alors qu’apparaissaient les premiers symptômes du manque occasionné (tremblements, filet de bave, tics), je rallumai mon PC. Premier contact, vidéo choc : Abdoulaye WADE s’en prend à l’actuel président du Sénégal, le traitant d’anthropophage, de descendant d’esclaves, entre autres joyeusetés. Pris d’horreur, je refermai immédiatement la machine (un magnifique PC de gamer, avis à ceux qui seraient prêts à m’affronter en ligne sur Rayman Legends ou PES 2015).

Malgré ma pathétique digression montrant l’étendue de mon addiction, cher lecteur, tu (ne fais pas de manières) ne sembles pas surpris de la sortie de Maître (sérieusement ?) Abdoulaye WADE. Comment te donner tort ? La veulerie de l’attaque à laquelle il s’est livré fait ressurgir l’un des graves maux dont souffre notre société : la complaisance vis-à-vis d’un système inique de castes, essentiellement basé sur la délation, et qui mine la société sénégalaise au quotidien. La population laisse faire au nom de la sacro-sainte « tradition » servant à sauvegarder des « valeurs », valeurs qui, ironiquement, s’évaporent quand « Monseigneur CFA » entre en jeu.

Il est donc tout à fait déplorable de voir « l’homme le plus diplômé du Caire au Cap » (c’est lui qui le dit) se faire le miroir de la face la plus méprisable facette de la société sénégalaise. Ce que je trouve personnellement regrettable, c’est que, connaissant la bête, cette sortie ne m’ait pas surpris. Est-il nécessaire de revenir sur tout le mal qu’Abdoulaye Wade a fait au Sénégal ? Dois-je vraiment rappeler le gouffre économique dans lequel, grandement aidé par le reste des vautours du PDS, il a plongé le pays ? La fracture technologique subie, le bradage des sociétés publiques, le dévoiement des institutions nationales et diplomatiques, ainsi que les ententes avec certains leaders « religieux » ont fait beaucoup de mal, plongeant le Sénégal dans le chaos ; ce qui poussa la jeunesse désabusée à descendre dans la rue pour refuser toute modification de la constitution qui lui eût permis de gagner les élections présidentielles de 2012 au premier tour en réunissant seulement 25% des suffrages, et qui eût facilité la transmission du pouvoir à son dauphin, son fils Karim Wade. Karim, à qui il avait confié, entre autres, un poste de conseiller spécial, à qui il avait donné les clés de l’organisation de la très juteuse Agence Nationale de l’Organisation de la Conférence Islamique, Karim qui sera nommé par son père (retiens ton souffle), ministre d'Etat chargé de la Coopération internationale, de l'aménagement du territoire, des transports aériens et des infrastructures.

Karim qui, aujourd’hui, est poursuivi pour enrichissement illicite, et qui risque 7 ans de prison ferme, et plus de 380 millions d’euros d’amende. J’aurais pu donc croire que c’est le père, blessé dans sa chair, mû par l’amour filial, qui, dans un dernier râle, se cabre pour défendre le fils injustement attaqué. Mais les révélations des assassins de Maître Babacar SÈYE, les bouffonneries médiatiques Wadiennes qui ont duré douze ans, d’anciennes mesquineries et basses attaques menées par le vieux Président, font que je refuse d’y croire.

Je me refuse tout autant à lui témoigner de l’indulgence du fait de son grand âge, même si, comme le disait le bien-nommé Docteur Jerry Artree, professeur à l’université de Columbia : « la vieillesse est un naufrage »… Je refermai donc ma machine, et ne consentis à la rouvrir que le surlendemain, quand les convulsions reprirent et que mes paupières se mirent à trembler toutes seules.

Je parcourus quelques articles, et tombai sur la réaction de Macky SALL face aux attaques de Wade. Ayant choisi la carte de l’humour et de l’indifférence, le Président actuel du Sénégal a fait preuve d’une grandeur que je ne soupçonnais pas de sa part. Les réactions en substance des commentateurs sénégalais sur le web, fustigeant la sortie de Wade, me firent aussi le plus grand bien. J’allais donc célébrer mon regain de foi en l’humanité, quand je vis une robe qui déchirait les Internets en deux. Était-elle bleue et noire, ou blanche et dorée ? Je refermai à nouveau mon PC, me levai, me dirigeai vers les toilettes, me blottis derrière le bidet… Et me mis à pleurer. Je pleure encore.

P.S. : La robe est blanche et dorée.

Souleymane LY