Le Kollectif Afrobeat exporte la culture afro en province

Fela, artiste nigerianA force de rencontre, de mariages, de divorces, et de métissage, la culture africaine a essaimé donnant naissance à de nombreux styles de danse ou encore de musique… Aujourd’hui plus que jamais la culture africaine s’exporte et traverse les âges, elle vit hors du continent grâce à la diaspora et à ses amis.

A Marseille, la diaspora (ou plutôt devrais-je dire les diasporas) et les amateurs de culture africaine ont aussi leur lieu de rassemblement, l’Afriki Djigui Théatri. Depuis décembre, le Kollectif Afrobeat y donne un concert tous les deux mois : la « session Afrobeat ». J’ai assisté pour vous à leur dernier concert le 26 février. Récit d’un bel exemple de diffusion de la culture africaine :

L’Afriki Djigui Théatri, un haut lieu de diffusion de la culture afro

Des bancs par-ci, un vieux fauteuil par-là, des cadres et quelques masques africains aux murs. Le local d’Afriki Djigui Théatri a une décoration basique et un confort sommaire, il a tout d’un simple local associatif. Mais sa buvette improvisée et la petite scène que l’on découvre en fond de salle laisse penser qu’il s’y passe bien plus de choses qu’on ne peut le croire en pénétrant au 27 rue d’Anvers. L’association est un haut lieu de la culture afro à Marseille. Créée en 2001 par l’actrice ivoirienne Nacky Sy Savane et le promoteur culturel Kélétigui Coulibaly, dès ses débuts, l’Afriki Djigui a pour vocation d’offrir un espace d’expression aux artistes africains. Théatre, musique, contes, cinéma, rencontres littéraires, expositions, cette association franco-ivoirienne offre une scène aux arts africains et afrophiles qui ne trouvent pas toujours un lieu d’exposition dans nos villes. L’Afriki Djigui crée un pont entre la diaspora et son continent en lui facilitant l’accès à ses racines. Mais ne vous y trompez pas, l’Afriki Djigui Theatri n’a pas pour but d’être sectaire, sa programmation est riche et va dans le fond et dans la forme au-delà des frontières africaines. Kélétigui Coulibaly prône « la rencontre et la découverte autour de la culture […] et que l’on prenne ce qu’il y a de meilleur chez le voisin). Ainsi la programmation fait aussi la part belle aux arts et styles musicaux dérivés de la culture afro : le blues, le jazz, l’afrobeat…

Le Kollectif Afrobeat, un bel exemple de l'universalité africaine

L’Afriki Djigui Théatri apparaît alors comme la scène toute désignée pour laisser éclater la musique festive du Kollectif Afrobeat. Le groupe né il y a cinq ans à l’initiative deux copains musiciens : Christophe le guitariste et Nicolas le batteur qui rencontrent ensuite Fred le chanteur. Le trio s’entoure progressivement de musiciens talentueux et passionnés pour constituer un orchestre. Le Kollectif Afrobeat, c’est une bande de 15 musiciens qui s’enjaillent sur scène sur un mélange de funk, de jazz et de highlife: l’Afrobeat. « J’adore cette musique, une fois que l’on rentre dedans, on n’en sort plus » confie Louise, une saxophoniste suédoise fraîchement recrutée. Le groupe est riche, varié et métissé à l’image de la musique de Fela Kuti auquel la bande rend hommage. Dans le Kollectif Afrobeat on écoute des hommes, des femmes, des blondes, des brunes, des chauves, des jeunes et moins jeunes, de toutes origines mais pas nécessairement africaine. « Non, nous n’avons pas de lien particulier avec l’Afrique, nous ne participons pas non plus à des actions humanitaires, mais on adhère à la musique et au message de Fela Kuti ». Et quand la bande joue, tous les instruments de l’afrobeat sont là : saxophone, trompette, guitare, batterie, conga, clavier et les emblématiques chekeré et clave. Les différents chanteurs du groupe, fidèles à l’œuvre de l’artiste, reprennent même ses paroles en yoruba et en pidging. « Chacun son moyen de lutte » me dira Christophe ; « Fela était un artiste engagé et faisait passer un message à travers sa musique et nous on prend part à la lutte en jouant la musique de Fela! » Le rythme et la ferveur sont là quand on écoute le Kollectif Afrobeat. Dès l’intro le public agit comme en miroir face au groupe, sourire aux lèvres, les pieds qui battent la mesure. A l’écoute des paroles, on cerne le propos « No agreement today, no agreement tomorrow. I no go agree make my brother hungry».

Fela Kuti et l'Afrobeat : l'histoire d'un musicien engagé

Ni musicienne, ni historienne, je ne connaissais rien de l’Afrobeat ni de son créateur et encore moins son histoire. C’est donc à travers la performance du Kollectif Afrobeat et suite à mes échanges avec ses porte-paroles que j’ai découvert l’art et le combat de Fela Kuti. Il y a quelque chose de frappant dans l’histoire de l’artiste musicien nigérian. Sa musique est à l’image de sa vie et sa vie à l’image de l’Afrique, pleine de ressources et influencée, brave et engagée, entre gloire et déchéance. Né en 1938 au Nigeria, Fela Kuti va faire son éducation musicale en Europe. En voyage aux Etats-Unis au début des années 1970, il se forge une conscience politique. De retour au Nigéria, la musique de Fela Kuti opère un retour aux rythmes africains savamment alliés à des rythme jazz et funk. Ses textes en pidging porte un message politique engagé en faveur de l’émancipation et de la responsabilisation du peuple nigérian face à la corruption de la classe dirigeante de l’époque. Les titres « Why blackman dey suffer » et « no agreement » clairement expriment son engagement. Homme de culture populaire, il est arrêté, battu et incarcéré à plusieurs reprises. Il meurt en 1997 du virus du sida et usé par des années de lutte pour le Nigéria.

Imprégnée, géniale, inspirée, engagée, tragique, telle se résume l’œuvre et la vie de Fela. L’africain est artiste, il devient génie lorsqu’il discipline ses élans créateurs et se nourrit de ses racines pour inventer. Il se mue en leader quand il utilise son art pour conscientiser, il meurt mais son œuvre lui succède quand il a su rassembler. 

Pour qu’elle vive et traverse les frontières, la culture afro a besoin de caisse de résonnance. C’est ce que propose l’Afriki Djigui Théatri à Marseille. Sa programmation met la lumière sur des artistes influencés par la culture afro sous toutes ses formes. C’est le cas du Kollectif Afrobeat, dont certains membres marqués par les performances scèniques de Fela de son vivant, contribuent aujourd’hui à la diffusion de son œuvre. Les oeuvres comme celles de Fela sont une richesse, qui doit être transmis aux nouvelles générations de jeunes africains et issues de la diaspora car la culture est aussi une arme de lutte soft, il est dans l’intérêt commun que la nôtre rayonne. 

Michelle Camara

Le tout puissant Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou

Malgré l’engouement suscité à l’échelle nationale et régionale, rares sont les musiques africaines qui se retrouvent dans les classements internationaux. Non pas qu’elles ne soient pas exportables, mais bien souvent par faute de moyens de communication et de soutien marketing efficace. C’est pour pallier à cette situation que j’ai décidé de rédiger ce billet sur Le tout puissant Orchestre Polyrythmo de Cotonou, qui a œuvré à faire du Bénin le Quartier Latin de l’Afrique, jadis. C’est l’un des secrets les mieux gardés de l'Afrique, qui aurait pu disparaitre sans avoir fait goûter au monde l’intensité de ses mélodies.

L’histoire de ce groupe est celle d'un pari sur le temps d’une quinzaine d’amis. Créé dans les années 60, l’orchestre a évolué avec les soubresauts sociaux, culturels et politiques des pays africains à l’heure des indépendances et de l’éveil d’une certaine identité panafricaine. Bercé par les rythmes mythiques de James Brown en passant par Salut les Copains et les Yéyés, Polyrythmo a su créer un rythme inspiré des hits de l’époque et des percussions locales proches de la culture vodoo. C’est la naissance de mélodies qui se définiront plus tard comme l’afro beat. C’est l’époque de Bailly Spinto en Côte d’Ivoire, de GG Vickey entre Paris et Cotonou, sans oublier les Golden Sounds du Cameroon, auteurs de l’intemporel Zangalewa récemment repris par la chanteuse colombienne Shakira pour la Coupe du Monde 2010.

Les hits s’enchainent alors au fil des bals poussières de l'époque. Le succès est au rendez-vous, car L’Orchestre Polyrythmo de Cotonou, c’est avant tout un panel de rythmes s’étalant du cubain à la pop rock et réglés au clapet des pas africains. Le célèbre magazine portugais Publico le qualifia dans un article de « musique dure à définir, ni africaine, ni occidentale, ni du passé, ni du présent, mais tout simplement immortelle ». Pour le New York Times, il s’agit tout simplement « d’un des meilleurs groupes de Funk au monde ». Malgré l’engouement suscité et les multiples collaborations régionales avec des artistes en vogue tels que Fela Kuti, Manu Dibango, Myriam Makeba, Angelique Kidjo ; Polyrythmo n’est jamais sorti d’Afrique pour faire connaître son talent et sa musiquequi ne se définit d’aucun genre, car elle n’appartient pas à un registre donné ni même à l’ère du temps. Gnonas Pedro, du groupe Africando, chantait en son temps « La musique ne nourrit pas son homme ». Le Polyrythmo a ainsi failli périr dans l’oubli sans ne plus jamais reprendre la voie des studios.

Il aura fallu une interview à Cotonou d’Élodie Maillot de Radio France en 2007 pour réaliser le rêve du groupe : signer une tournée internationale. En 2010, le groupe se produit de Cotonou à New York en passant par l’Écosse et le pays de la samba. L’expérience a été si positive que de juin à aout 2012, une douzaine de dates sont de nouveau arrêtées dans une trentaine de capitales occidentales après la sortie de leur dernier album « Cotonou Club ». Un jeune et célèbre groupe de rock écossais les a même sollicité pour l’enregistrement d’un hit sur ces mélodies incantatrices (vidéo ci-jointe). Malgré la ferveur des musiques ivoiriennes et européennes accentuée par la substitution des disc jockeys au live, la nostalgie de la belle époque demeure toujours intacte dans le cœur des béninois qui réitèrent à chaque occasion leur passion pour ces musiques qui ont traversé plusieurs générations et qui nous titillent l’ouïe à chaque écoute.

À l’heure des MP3 et d'Internet, Polytrythmo se fait une nouvelle jeunesse, au regard de l’engouement suscité et du nombre de clips postés et « likés » sur les réseaux sociaux. Un nouveau site internet d’une ergonomie très simple permet de mesurer l’ampleur du phénomène et l’héritage qui aurait pu être qualifié de vestige. Élodie Maillot a créé un label ; « Son d’ailleurs » afin de promouvoir ces musiques de lointains horizons qui méritent aussi d’avoir leur chance sur les ondes radiophoniques occidentales.

En résumé, Le Tout Puissant Orchestre Polyrtyhmo de Cotonou, ce ne sont plus que 10 copains encore en vie, 42 ans de musique et près de 500 morceaux. L’histoire de ce groupe a suivi par bien des aspects l'histoire de notre continent. Celles des valeurs et cultes qui finissent par imploser fautes de perspectives. Un gisement de talents, bien souvent identifiés localement, mais qui s’atrophient par le temps et l’absence de politiques culturelles fortes. Mais c’est aussi celle d’hommes et de femmes, bien loin de l’éblouissement des projecteurs ; qui ne perdent pas la foi ni la joie de vivre. Et loin des gigantesques budgets des maisons de production internationales, il suffirait d’une bonne volonté pour tout simplement les faire renaitre à l’âge de la retraite ; afin de faire miroiter aux plus jeunes talents l’espoir d’une issue à ce tunnel sombre, dans lequel persiste et survit en bruit de fond ; le silence de ces mélodies que sont nos secrets d’Afrique…

Et si ces mots ne suffisent toujours pas, faites donc un tour dans la rubrique médias de leur portail web.

Léomick Sinsin

Seun Kuti, l’Afrique révoltée en chansons

Mettre des mots simples sur les aspirations profondes de ses contemporains. Créer les rythmes qui électrisent les corps, affolent les sens. Transcender la frustration et le sentiment d’injustice qui habitent les Africains pour les conduire vers une philosophie de la révolte. C’est ainsi que l’on peut résumer l’esprit qui anime l’afrobeat. Et c’est à cette aune qu’il faut juger le rôle joué en ces temps agités par le principal héritier de ce courant musical, Seun Kuti.

Oluseun Anikulapo Kuti est un héritier de génie. Il est le plus jeune fils de Fela Kuti (1938 – 1997), fondateur de l’afrobeat, un syncrétisme musical aux confluences du jazz, du funk et des rythmes traditionnels yorubas, qui s’exprime dans un mélange d'anglais bâtard et de dialecte nigérian des faubourgs de Lagos. Seun Kuti naît en 1982 quand son père est au sommet de son art et au pinacle de sa figure d’artiste protestataire contre les dérives politico-économiques d’un Nigeria et d’une Afrique en déshérence. Né dans la musique, Seun se révèle particulièrement prédisposé : à l’âge de 8 ans, il joue du saxophone et du piano ; à 9 ans, il est choriste dans l’orchestre de son père et assure bientôt les chansons d’ouverture de ses spectacles. Lorsque ce dernier disparaît tragiquement en 1997, c’est tout naturellement que les vétérans du mythique orchestre de son père, l'Egypt 80', se rangent derrière l’adolescent de 15 ans. Pendant près de dix ans, le jeune homme sera le légataire du répertoire de son père auquel il donnera une nouvelle jeunesse et une nouvelle exposition mondiale.

Seun Kuti sort son premier album personnel en 2008, Many things. L’album, furieux et puissant, puise incontestablement à la source du père, dans la force d’entraînement de la rythmique afrobeat, dans la philosophie des paroles percutantes, dans la présence scénique du jeune saxophoniste, chanteur et danseur. Mais Seun innove également, en intégrant de nouvelles influences reggae et hip hop à sa musique, en insistant plus sur les paroles, ce qui lui permet de mieux affirmer son message politique, on ne peut plus clair et engagé dans ses différents titres.

African Problems

Dans cette chanson, Seun Kuti incite d'une voix rugissante les Africains à dépasser le découragement qui les saisit devant l'immensité des problèmes du continent. Le chœur de chanter : « Les problèmes africains » et Seun de répondre « y en a trop pour en parler, trop pour y penser, trop pour les chanter » mais pourtant « je dois en parler, je dois les chanter, je dois les hurler » avant de saluer ses "frères là où ils meurent pour le futur de l'Afrique, là où ils se battent pour le futur". C'est investi d'un projet messianique qu'il entonne en refrain : "je dois essayer d'apprendre aux gens une nouvelle mentalité, leur faire apprécier la supériorité africaine" qui contraste avec la "médiocrité de nos leaders qui nous laissent dans une souffrance et une pauvreté sans fin". Le crédo politique de l'afrobeat est posé, qui puise aux sources du panafricanisme, qui exhorte à la revalorisation culturelle africaine, idéologie contestataire et progressiste qui incite à la révolte du peuple face aux détournements démocratiques et économiques. Fela n'aurait pas dit mieux. 

Ne m'amène pas cette merde

"Don't give that shit to me" évoque de manière crue une triste réalité du continent, qui a vu l'Afrique devenir la poubelle du monde développé. La chanson fait écho au drame du Probo Koala qui a mis en lumière l'exportation en Afrique de déchets toxiques. "On voit plein de merde en Afrique, on est dedans quotidiennement" constate Seun Kuti, qui évoque "la politique merdique et l'économie merdique". La merde est ici une métaphore englobante des différents maux africains que le chanteur énumère : la désunion, la malhonnêteté, la disgrâce, la discrimination, la destruction, la dévaluation… Mais la merde ne vient pas que de l'extérieur, et c'est aussi à "ses frères et soeurs" que Seun s'adresse en leur demandant "ne m'amenez pas cette merde, ne l'amenez pas à l'Afrique".

En 2011, alors que la jeunesse africaine se révolte un peu partout et bouscule certains pouvoirs corrompus, Seun Kuti sort un second album personnel en parfaite résonance avec le climat continental. From Africa with fury : Rise est à ranger dans la catégorie des hymnes de toute une génération. On pourra dans le futur se souvenir de la décennie 2010 en Afrique et des idées qui habitaient les hommes et femmes de cette époque, en réécoutant les morceaux de Seun Kuti. Chaque chanson est un slogan politique, chaque parole une invitation à la révolte citoyenne, à la reprise en main de la destinée africaine par les jeunes générations sacrifiées.

Mr Big Thief

Ce morceau est un formidable hommage à la musique de Fela. Il commence par un long instrumental jazz dont seul l'Egypt 80' a le secret, une rythmique percussion – cuivres à la signature si particulière. Le thème de la chanson ensuite, le "grand voleur", est une figure récurrente de l'afrobeat, une personnification de la corruption, désigné parfois nommément (Obasanjo par Femi Kuti), parfois génériquement comme c'est le cas dans cette chanson. "Si tu ne connais pas M. le grand voleur, je vais t'en parler : tout le monde respecte M. le grand voleur ; la police le protège, cette police qui est censée l'arrêter ; tu le vois montrer son pouvoir". Monsieur le grand voleur est un notable, un homme lié au parti au pouvoir, un homme d'affaire influent et respecté. Un homme envié par le tout venant. Un exemple pour la société. C'est ce renversement des valeurs que dénonce Seun Kuti, sur un ton d'autant plus mordant qu'il s'exprime par l'humour.

Rise

C'est sur un ton plus apaisé que d'habitude que Seun entonne que "nous devons nous soulever" . La révolte est devenue une évidence, l'artiste n'est plus dans l'appel enflammé, mais dans la tranquille affirmation du nouveau crédo d'une jeunesse africaine pour qui la coupe est pleine. "Je pleure pour mon pays quand je vois entre les mains de qui il se trouve" ; "Il n'y a pas de business à faire sur le dos de notre pays", avant que soit entonné le refrain "Nous devrons nous révolter un jour". Cette révolte doit être multiforme, et Seun pointe nommément du doigt les pouvoirs contre lesquels il faudra se soulever : les compagnies pétrolières qui pour du pétrole détruisent les terres (la situation du Biafra sert évidemment ici de toile de fond), "ceux qui utilisent nos frères comme esclaves tailleurs de pierre", les dirigeants africains corrompus, les multinationales prédatrices et corruptrices comme Monsanto et Halliburton. Au-delà des mots, ce morceau constitue une évolution musicale dans la discographie de Seun et dans le courant afrobeat, laissant plus de place à la guitare et à la musique synthétique. Le jeune artiste s'inspire de son temps, de sa nouvelle musique et de son nouveau contexte politique et social. Mais comme il le reconnait lui-même, les choses n'ont pas tant changé que cela entre le Nigeria des années 1970 où vivait le jeune Fela et le Nigeria de 2011 de Seun. Les problèmes sont les mêmes. Le devoir du chanteur afrobeat n'a pas changé.

Une philosophie que Seun décrit lui-même au cours d'une interview : "Aujourd'hui en Afrique, la plupart des gens luttent en silence. La répression systématique des populations les a rendu aveugle à leur réalité. Tout le monde pense d'abord à sa survie. Personne ne veut s'élever contre quelque chose, tout le monde veut juste rester dans le rang. Donc j'essaye de faire réfléchir les gens à certaines choses qu'ils sont en train d'oublier. Je veux inspirer en eux le désir du changement. La musique a un grand impact sur les sentiments des gens. Mais la pop music aujourd'hui, c'est le règne du moi, moi, moi. Personne ne chante de nous. Et il n'y aura aucun changement si l'on ne s'occupe pas de nos frères et de nos soeurs."

 

Emmanuel Leroueil