La lutte contre le proxénétisme en Afrique de l’Ouest

La lutte contre le proxénétisme dans les pays de l’Afrique de l’Ouest que sont : Nigéria, Niger, Ghana, Bénin, Togo, Côte-D’ivoire, Burkina-Faso, Sénégal, Gambie, Mauritanie, Mali, Cap Vert, Guinée Bissau, Libéria, Sierra Léone, n’a pas produit les résultats escomptés. Les états ont beaucoup plus axés la lutte sur la question sanitaire, à savoir les maladies sexuellement transmissibles (MST) et en particulier le SIDA. La faiblesse d’une réglementation dissuasive a constitué un terrain fertile au développement du proxénétisme.

On note néanmoins des excursions policières et des contrôles de routines dans les Etats mais ces actions ne sont pas pérennes et coordonnées dans le temps. Au Sénégal par exemple, la nouvelle plaque tournante de la prostitution en Afrique, les actions de la Division des investigations criminelles, de la sureté urbaine et du Groupement mobile d’intervention (GMI) ont permis de démanteler de nombreuses auberges, maquis et hauts lieux du proxénétisme dans les quartiers de Dakar comme la Corniche, le virage des Almadies, les Hlm, les Parcelles Assainies, Grand-Dakar ou encore Grand-Yoff. Rappelons que la prostitution est légalisée au Sénégal depuis 1969.

En Guinée Conakry, pour lutter contre la prostitution, la police arrête, rase, filme clients et prostituées et diffuse les images dans les médias audiovisuels locaux (Enquête de l’événement, L'envers et le décor du " business-sexe " à Ouagadougou, 16 juin 2009).

Au Burkina-Faso, Mali, Togo, Bénin et Côte-D’ivoire, on procède à la fermeture des bordels et chambres de passe pour freiner la propension de la prostitution dans la ville et aussi par des descentes policières musclées dans les grandes villes. Selon l'article 423 du Code pénal burkinabè, la prostitution est définie comme étant "le fait pour une personne de l'un ou de l'autre sexe de se livrer habituellement à des actes sexuels avec autrui moyennant rémunération. Est puni d'un emprisonnement de 15 jours à deux mois et d'une amende de 50 000 à 100 000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement quiconque se livre habituellement à la prostitution par racolage sur la voie publique". La loi du 13 avril 1946 toujours en vigueur, en son article 3, stipule que "seront punis d'un emprisonnement de 6 mois et d'une amende de 200 000 F CFA ceux qui, par gestes, paroles, écrits ou par tout autre moyen, procéderaient publiquement ou tenteraient de procéder au racolage de personnes de l'un ou de l'autre sexe en vue de provoquer la débauche ". Cette même loi réprime le proxénétisme qu'il soit exercé par un individu, un hôtel, ou un pourvoyeur de local privé, c'est-à-dire les gérants ou propriétaires de chambres de passe, de maison closes ou d'hôtel.

Au Ghana, la prostitution n’est pas reconnue comme une activité légale. La Police procède par des interpellations en vue de décourager des fois les jeunes filles et dames qui s’adonnent au plus vieux métier mais l’identification des cibles est un casse-tête car les activités se pratiquent souvent la nuit non plus dans des chambres ordinaires mais plus dans des hôtels et parfois dans des foyers conjugaux en l’absence d’un des partenaires du couple.

La prostitution est intimement liée au trafic des êtres humains et elle constitue même son bras armé. Selon le fond des nations unies pour l’enfance (UNICEF) et l’organisation internationale du travail), entre 200.000 et 300.000 enfants seraient chaque année victimes de la traite en Afrique occidentale1

La majorité de ces enfants ont plus de 90% de chance de se voir violentés, violés ou d’intégrer un réseau de prostitution. Le rapport sur la traite des êtres humains 2010 épingle la Côte d'Ivoire comme étant un pays de destination pour les enfants et les femmes victimes de la traite des personnes, en particulier à des fins de travail forcé et de prostitution forcée, encore qu’elle soit aussi un pays de transit et d’origine. Le rapport poursuit en affirmant que filles qui sont recrutées au Ghana et au Nigéria pour travailler comme serveuses dans les restaurants et les bars, finissent souvent par tomber dans la filière de la prostitution. La police ivoirienne a démontré qu’elle méconnaissait le phénomène de l’exploitation sexuelle des mineures, en effet lors d’une investigation, elle a démantelé un réseau utilisant des mineurs a des fins de prostitution mais elle a vite fait de conclure qu’il s’agissait de prostitution volontaire et non de traite des enfants2.

La Gambie est devenue une destination de choix pour les amateurs de mineurs mais plus spécifiquement pour les amatrices occidentales de très jeunes éphèbes noirs. Des femmes connues sous le pseudonyme "Marie-Claire’’, âgés entre 45-60 dont les pays d’origine sont : les Pays-Bas, la Belgique, la Suisse, du Royaume-Uni, et parfois de la France, se mettent à la recherche de jeunes mineurs. On peut les apercevoir se faire appliquer de la crème solaire sur le dos faire par des adolescents surnommés les «bumsters»3

La lutte contre ce phénomène en Gambie est entrain de porter des fruits non négligeables. Elle est l’œuvre des gérants d’hôtels, dont un grand nombre commence à s’organiser pour lutter contre le phénomène des «Marie-Claire» mais on déplore que beaucoup d’entre elles bénéficient de la complicité de la police et les conditions sociales rendent la situation moins reluisante. A cela, il convient de parler aussi de la lutte contre la prostitution des africaines dans les capitales occidentales. En effet beaucoup de jeunes filles considèrent l’Europe comme un eldorado, elles tombent dans les filets des réseaux criminels qui les obligent à se prostituer. Nous avons le témoignage de Rose, victime d’exploitation sexuelle.

Rose raconte : «Je pensais être libre en Europe », lance-t-elle, songeuse, assise dans le petit appartement lugubre de la ville portuaire de Gênes qu’elle partage avec deux autres travailleuses du sexe. Nous avons été enfermés dans un appartement pendant un mois et demi », se souvient-elle. « Ils ont vidé nos sacs et confisqué nos passeports » Rose pensait qu’elle se rendait en Europe pour y poursuivre ses études et travailler à temps partiel pour se faire un peu d’argent. Mais la jeune nigériane n’imaginait pas que les études n’étaient qu’un leurre et que la prostitution était le travail qui les attendait4

Les « Mamas » (pseudonyme que portent les femmes qui envoient les filles en Europe pour la prostitution) au Nigéria sont les véritables bras armés de la prostitution. Elles transforment ces filles en de véritables esclaves sexuels, les obligeant par un rite d’alliance vaudou à leur rembourser des sommes colossales sinon ces filles risqueraient de mourir ou devenir folles.

Les trafiquants exigent des filles qu’elles leur remboursent 50 000 euros (60 000 de dollars) environ pour les frais de voyage et d’hébergement, celles-ci devant travailler pour eux jusqu’à apurement de leur dette. En Avril 2015, un réseau de prostitution nigérian a été mis au jour à Nice(France) par la sureté. Ce fut un réseau de prostitution organisé par les «mamas » et dont la figure de proue était un prêtre officiant au sein de la communauté nigériane azuréenne5 .

En Mai 2014, un important réseau de proxénétisme en bande organisée, traite des êtres humains en bande organisée, blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs a été démantelée en France. Cette Bande était sous la houlette des « mamas »6. .

Solutions contre cette nouvelle forme d’esclavage humain

La lutte contre la prostitution sous toutes ses formes passe d’abord par rééducation de nos sociétés. La société africaine est malade et agonisante. Les valeurs ancestrales de dignité, d’ardeur dans le travail sont en voie de disparition. Notre société est un centre de consommation sociale irréfléchie que la globalisation est entrain d’ensevelir. Il est grand temps de rééduquer la jeunesse africaine. L’impact néfaste de certaines déviations de la culture occidental sur nos sociétés africaine n’est plus à démontrer. Cela se perçoit dans le mode vestimentaire, la manière de parler…

Il ne s’agit pas ici de faire le procès de la culture occidentale ou de sacraliser les sociétés africaines mais de comprendre le comportement de la jeunesse africaine par les déviations occidentales (pornographie, prostitution, homosexualité…) que l’on tente d’uniformiser en valeur universelle. En effet grâce au NTIC de nouvelles valeurs comportementales ont fait leur entrée en Afrique.

Si la jeunesse africaine est défaillante, c’est parce que les anciens aussi ont échoué quelque part. Les anciens ne sont plus des modèles disait le journalisme burkinabè Norbert Zongo. Nous devons donc éduquer la jeunesse sur la base des repères car ces stars de la pop américaines en général ne sont pas des repères fiables pour notre jeunesse.

Enfin, sans être trop idéaliste, la rééducation de nos sociétés doit passer par sa reconstruction. Nous devons détruire les valeurs de médiocratie et de cupidité, et construire notre société sur des valeurs d’honnêteté et surtout de la culture du mérite.

Par ailleurs, il est impératif de lutter contre la paupérisation dans nos sociétés. Nous devons donner à chaque Homme le moyen de gagner honnêtement et dignement sa vie. Ils sont nombreux ces jeunes diplômés en Afrique de l’ouest, laissés a eux-mêmes qui vagabondent dans les rues de Lomé, Ouagadougou, Bamako. Elles sont nombreuses aussi ces familles au bord de la dépression pour qui les besoins fondamentaux restent un luxe, elles assistent impuissantes a la flambée des prix de premières nécessités. Au même moment les dirigeants se targuent d’une croissance à 5 pourcent ou 7pourcent, ils sont en réalité les fossoyeurs de leur peuple. Eux qui se pavanent avec des voitures de la jet-set parisienne ou londonienne et dont les comptes bourrés en Suisse pourrissent dans les oubliettes devant la misère de nombreuses familles africaines qui plongent dans la résignation ou la rébellion.

Pour reprendre les propos d’un homme politique burkinabè : Si l’odeur de l’argent pouvait tuer mes voisins de quartier seraient déjà morts. La lutte contre la prostitution sous toutes ces formes passe par une coopération sous-régionale et internationale beaucoup plus grande entre les services de sécurité car avec la traite des enfants et le proxénétisme international, elle est entrain de devenir transnational. Il est aussi important de renforcer la sécurité frontalière car la porosité des frontières facilite le proxénétisme transnational des zones rurales vers les capitales des pays voisins.

Pour conclure avec les solutions, nous pensons qu’il faudrait une législation dissuasive et des textes juridiques uniformisés en Afrique de l’Ouest. La lutte contre la prostitution passe par une coopération sécuritaire, juridique sous régionale mais aussi par des plans d’actions d’éducation civique et morale et de lutte contre la pauvreté.

Octave Bayili

(1) Wilfried Relwende Sawadogo,The Challenges of Transnational Human Trafficking in West African Studies Quarterly, volume13, issues1-2, printemps 2012 http://www.africa.ufl.edu/asq/v13/v13i1-2a5.pdf,p3

(2) Source : Ambassade des Etats-Unis en Côte-D’ivoire http://french.cotedivoire.usembassy.gov/tip2010.html

(3) Source : Quotidien Britannique, Gambie. Banjul, nouveau paradis des pédophiles The Guardian – Londres www.guardian.co.uk/

(4) Source : IRIN, Gênes, 7 novembre http://www.irinnews.org/fr/report/69058/nigeria-la-prostitution-brise-leur-r%C3%AAve-de-libert%C3%A9

(5) Source : Nice-Matin, http://www.nicematin.com/nice/info-nice-matin-un-reseau-de-prostitution-nigeriane-mis-au-jour-a-nice.2188696.html 

(6) Source : http://www.prostitutionetsociete.fr/actualites/actualites-france/un-important-reseau-de

Les causes du proxénétisme et les acteurs en présence

Selon le lexique des termes juridiques, le proxénétisme peut être défini comme une activité délictueuse de celui ou de celle qui, de quelque manière que ce soit, contraint une personne à se prostituer, favorise ou tire profit de la prostitution d’autrui. De nombreux faits, pouvant directement ou indirectement faciliter la prostitution, sont assimilés par le législateur à l’infraction de proxénétisme.  L’Afrique de l’Ouest est en proie a ce fléau grandissant et les rues des grandes villes ouest-africaines sont quotées à la bourse de l’immoralité et du commerce sexuel.

A titre d'illustration, quelques grandes places africaines du tapinage : l’Avenue Kwamé N’Krumah et Bolomankoté au Burkina-Faso, la rue Princesse de Yopougon en Côte d’Ivoire, la rue d’Anfangua au Mali, la croisette au Niger, l’avenue Ponty au Sénégal, etc.

Les adolescentes font l’objet d’exploitation sexuelle par les tenanciers de maisons closes comme en témoigne Ouaga Camping (une maison close a Ouagadougou) qui fut épinglé par les services municipaux. Elles sont aussi insérées dans les rouages du tourisme sexuel. C’est l’exemple de Saly, station balnéaire située à environ 90 km de Dakar, qui est surtout le haut lieu du tourisme sexuel au Sénégal.  Raoul Mbog affirme :

«Saly est le point de ralliement des Occidentaux vieillissants qui souhaitent goûter aux charmes de jeunes Sénégalais(es), pas toujours majeur(e)s.»

A cela il faut ajouter le proxénétisme des africaines dans les pays occidentaux comme la Suisse, l’Italie, la France, la Hollande, le Danemark. 

Les causes de la prostitution sont à rechercher d’abord dans les conditions de vie des populations. En effet, les programmes d’ajustement structurel (PAS) des années 1990 ont conduit au licenciement de nombreux chefs de famille. La conséquence des PAS a été la désintégration de la structure familiale. Chaque membre de la famille étant laissé à son sort. Les filles qui sont les plus vulnérables, vont développer des moyens de survie telle que la prostitution.

Après les programmes d’ajustement structurel, la dévaluation du franc CFA dans l'espace francophone va sonner le glas de la paupérisation croissante des familles africaines. En parallèle à cela, il faut noter la cupidité d’un monde libéral sans humanisme qui ne fait que creuser les écarts sociaux entre les riches et les pauvres. En témoigne la crise économique de 2008 qui soulèvera de nombreuses vagues de protestations appelées « émeutes de la faim » en Afrique de l’Ouest (Burkina-Faso, Sénégal, Mali, Togo, etc.) où «  les pauvres demandaient des comptes au plus riches»

Il faut ensuite prendre en compte les causes politiques de la prostitution. La gabegie financière, la corruption et la  mauvaise gouvernance démocratique en Afrique matérialisées par la patrimonialisation du pouvoir politique et assassinats politiques ont conduit les populations a être abandonnées à leur sort. A cela il faut ajouter les conflits sociopolitiques et guerres civiles avec son lot de misère et d’exactions criminelles tel que le proxénétisme. 

La crise post-électorale ivoirienne ou la guerre civile au Libéria ont été des facteurs favorables au développement du proxénétisme surtout de l'exploitation sexuelle des mineurs. Combien de lycéennes et étudiantes qui pour satisfaire leurs besoins élémentaires à savoir se nourrir, se loger, se soigner, sont obligés de vendre leur corps en échange de maigres sommes d’argent. 

A coté des professionnels du sexe, il ya des mineurs qui sont esclaves des réseaux mafieux. La plupart provienne des zones rurales et venues en ville pour chercher du travail comme ménagère, serveuse dans les débits de boisson. Malheureusement elles tombent entre les mains de personnes mal intentionnées qui les utilisent à d’autres fins.  

Enfin, nous pouvons évoquer des raisons sociologiques pour expliquer la recrudescence de ce fléau. La prostitution quoiqu’on puisse en dire, répond à un besoin social. Les prostituées sont prisées par des hommes de tout âge et de toute catégorie sociale. Si la prostitution existe, est-ce parce que la société se conçoit mal sans elle ?

En 2009, le maire de la ville de Ouagadougou décide d’entrer en lutte contre les tenanciers de chambre de passe et autres hauts lieux du proxénétisme dont la plupart faisait recours à des filles mineures. Dans le rang de ces  filles on notait celles de nationalités burkinabè, nigériane et ghanéenne surtout. Il a été dénombré près de cinq mille prostituées dans la ville de Ouagadougou (selon le projet SIDA III). La lutte menée par le maire s’est heurtée à l’opposition d’une grande partie de la population, dans un pays où le poids de la tradition ancestrale et de la religion dominent la conscience collective.

Aussi nous pouvons dire que la prostitution est un métier libéral. C'est-à-dire que de la même manière que l’on décide de devenir enseignant, on décide de devenir prostituée.   

Octave Bayili

Prostitution, crime organisé en Afrique de l’Ouest

La prostitution  ou le plus vieux métier du monde peut être définie comme un fléau social qui gangrène nos sociétés africaines.  Ce terme vient du latin «prostitution »  et  désigne une activité consistant à échanger des relations sexuelles contre une rémunération. Les Programmes d’ajustement structurel (PAS) des années 1990 et les effets pervers de la globalisation ont causé la paupérisation et la désintégration du tissu social et familial qui ont permis le développement de la prostitution.  La prostitution est de nos jours une véritable industrie qui fait vivre des milliers de personnes en Afrique de l’ouest.  Les jeunes filles de tout âge, neuf ans parfoiss’adonnent  à la prostitution volontairement ou de force, dans la quête de leur pitance quotidienne sous le regard passif de la société, qui ne fait que creuser les inégalités sociales. En témoignent la crise économique de 2008 qui a été suivie par de nombreuses vagues de protestations appelées « émeutes de la faim » en Afrique de l’Ouest (Burkina Faso, Sénégal, Mali, Togo, etc.) où les pauvres demandaient des comptes aux plus riches.

La prostitution n’est pas légale dans la plupart des états de l’Afrique de l’Ouest. Le Sénégal a légalisé la prostitution en 1969. Au Mali, la prostitution n’est pas interdite. La constitution malienne stipule que : La personne humaine est sacrée et inviolable. Tout individu a droit à l’intégrité physique de sa personne, par contre le fait de pousser une personne à se prostituer, ou par exemple de recevoir l’argent de la  prostituée, est sanctionné par la loi2.

Au Ghana, Burkina-Faso, Togo, Guinée-Conakry, Nigéria, la prostitution n’est pas reconnue comme une activité légale.

Les textes en la matière en Afrique de l’Ouest interdisent le racolage et l’exploitation sexuelle. Le racolage est une forme de prostitution qui consiste à arpenter les artères des grandes villes a la recherche d’un partenaire sexuel.

Les filles mineures sont intégrées dans le cercle vicieux de la prostitution. Utilisées comme « des bêtes sexuelles » par des réseaux mafieux et criminels afin d’assouvir les appétits sexuels démesurés de leurs clients. Elles sont de plus en plus nombreuses en Afrique de l’Ouest, ces jeunes adolescentes qui se  prostituent. Selon les services officiels du Togo, 27 000 prostituées travaillent dans le grand Lomé ; 31% d’entre elles ont moins de 18 ans. Au Ghana selon le Service de santé du Ghana (GHS, 2012), 750 000 adolescentes âgées de 15 à 19 ans tombent enceintes chaque année et 15,5% ont eu des rapports sexuels avant l’âge de 15 ans.

Une étude menée par l’Alliance pour les droits de la santé reproductive (ARHR) a révélé que, l’âge du premier rapport sexuel dans certains districts du Ghana est aussi bas que huit (8) ans.

Les adolescentes sont victimes d’esclavage sexuel orchestré par les gourous du proxénétisme. L’Afrique de l’Ouest est aussi en proie au tourisme sexuel et selon Raoul Mbog,  journaliste à Slate Afrique cela est du à La faiblesse d’une réglementation dissuasive et une population libérée du poids des traditions qui font de l'Afrique un nouveau repaire pour touristes sexuels. Des pays comme la Gambie, le Sénégal, Mali, Burkina-Faso y sont confrontés.

A ce type de prostitution comme crime organisé, s’ajoute les réseaux de prostitutions africains en Europe qui ont aussi des antennes de recrutement des futures esclaves sexuels en Afrique de l’ouest. 

La Suisse est considérée comme  L'eldorado européen de la prostitution africaine. Selon l'inspecteur Sylvain Lienhard de la brigade des mœurs de Lausanne, le Cameroun et le Nigeria sont les deux pays les plus représentés dans le milieu de la prostitution africaine en Suisse. Les prostitués nigérianes et ghanéennes rivalisent d’ardeur. Celles des nigérianes sous l’influence des mamas (terme nigérian utilisé pour désigner les marraines du proxénétisme) arpentent les rues des capitales européennes (Rome, Genève, Londres, etc.).

Le choix de notre sujet s’inscrit dans un contexte de dénaturation et d’exploitation croissante de la personne humaine. Nos objectifs peuvent se résumer a la volonté d’aboutir a une lutte nationale et sous régionale en Afrique de l’Ouest contre la prostitution et surtout celle des mineurs par les réseaux mafieux et le proxénétisme africain en Europe et en Afrique, par l’élaboration régionale des politiques et textes juridiques communs en la matière mais une coopération régional beaucoup plus accrue entre les services de sécurité.

Octave Bayili

(1) Imoro T. Ayibani, Isidore Kpotufe, Prostitution des mineurs en Afrique de l’Ouest : des enfants de 9 ans dans la pratique publiée le mardi 24 juin 2014   |  Sidwaya 

(2) Bassala Touré, Source : La Nouvelle Patrie du 24 déc. 2014 – Plus de données : http://maliactu.net/mali-la-prostitution-feminine-un-phenomene-qui-prend-de-lampleur/#sthash.8htGCErl.dpuf.

(3) Photo à la une Matthias Kihr

4ème FIFDA – W.A.K.A, un film de Françoise Ellong

 

WAKA affiche  La 4ème édition du FIFDA- Festival des films de la diaspora Africaine s’est tenue cette année du 5 au 7 septembre à Paris. Parmi la sélection du jury, le film W.A.K.A, premier long métrage de la réalisatrice Françoise Ellong, paru en 2013 et projeté le dimanche lors de la journée consacrée aux « migrations-transmigrations ».

Le film entièrement tourné à Douala par une équipe franco-camerounaise raconte l’histoire de Mathilde une jeune femme qui élève, seule, son fils Adam. Mathilde, interprétée par Patricia Bakalack, recherche une source stable de revenus afin de subvenir aux besoins de son fils mais nulle part elle ne parvient à faire accepter sa condition de mère et de surcroit célibataire. A court d’options, Mathilde se résigne à accepter une proposition lourde de conséquences: Mathilde devient Maryline, une W.A.K.A. 

Dans l’argot camerounais, une « waka » désigne une prostituée. Ce nom dérive du verbe anglais « to walk » qui signifie marcher et par extension, les WAKA sont celles qui marchent la nuit, à la recherche de clients. Le jour Mathilde est la mère d’Adam et la nuit elle devient Maryline, la WAKA. Mathilde pouponne Adam, l’emmène à l’école et lui fournit un toit et pour permettre cela Maryline doit se laisser aller à des pratiques humiliantes, parfois violentes avec des inconnus. La frontière qui sépare ces deux mondes est donc bien fine et les rend, résolument, interdépendants. Ainsi, alors que Mathilde essaie tant bien que mal de protéger son fils du monde de la prostitution plusieurs personnages et situations influencent le destin de ce couple mère-fils. Famille, voisins ou encore camarades de classe, tous observent et sanctionnent le choix de cette mère qu’ils accablent ou saluent. Il faut également composer avec les rencontres qui rythment la vie nocturne de Maryline et leurs intentions peu scrupuleuses. A cet égard, on ne peut manquer d’évoquer Bruno, le proxénète intransigeant qui refuse de voir son affaire impactée par la situation de Mathilde. Celle à qui il a donné le nom de Maryline doit travailler quoiqu’il lui en coûte et il compte bien y veiller. Arrivera t-elle à l’écarter d’Adam ? Quel prix devra t-elle payer pour cela ? 

A bien des égards le film proposé par Françoise Ellong est convaincant. D’abord le scénario est cohérent et tient les spectateurs en haleine tout le long par des mises en scènes crédibles. Le jeu des acteurs, plus ou moins confirmés, est remarquablement mis en valeur par un sérieux travail cinématographique. Les sons, images, plans et montages participent à créer l’atmosphère adaptée à chaque scène en révélant tantôt l’ambiance lugubre d’un trottoir où s’agitent des prostituées ou la tendresse partagée à un anniversaire. A ce titre, il faut saluer notamment le choix des lieux qui donnent à voir une ville de Douala diverse et propice aux tournage de jour comme de nuit.

Grâce à tous ces éléments, W.A.K.A met en scène des personnages complexes permettant de se questionner sur des sujets qui le sont tout autant. Ils sont à la fois attachants et repoussants ; par moments on aimerait les soutenir mais on ne peut ignorer leurs écarts et on s’empresse de les juger. Mathilde est certes une prostituée mais est-ce que solution qu’elle choisit à un moment précis pour de multiples raisons doit annuler tout son passé, diminuer son combat ou la condamner dans ses rapports avec les autres et la soustraire irrémédiablement à leur amour? Est-ce parce que des femmes sont réduites à ce moyen qu’elles en perdent leur humanité ? Ce sont ces questions difficiles et ô combien nécessaires que le spectateur est amené à étudier à travers à ce film. 

On aura donc rapidement compris que l’intention du film va au-delà qu’une plongée dans l’univers de la prostitution à Douala mais se concentre sur le parcours d’une jeune mère en difficulté. En réalité, la prostitution n’est rien de plus qu’un cadre, un prétexte pour raconter le combat de Mathilde en tant que mère. Françoise Ellong explique et justifie d’ailleurs ce choix dans la note d’intention qui accompagne le film :

« En choisissant de confronter cette femme à l'univers de la prostitution, le but est clairement de la mettre dans une position jugée dégradante au regard de la société, afin de montrer au mieux sa force et son combat en tant que mère. Au delà de ce que ce barbarisme évoque spécifiquement aux Camerounais, la lecture du titre doit être faite sous la forme d'un acronyme. Ainsi, W.A.K.A dans ce contexte, bien que référant à l'univers global de la prostitution, signifie Woman Acts for her Kid Adam. »

Travail sincère des acteurs, rendu cinématographique intéressant, histoire touchante et réalisatrice engagée, finalement, W.A.K.A est un film camerounais à voir et à soutenir pour diverses raisons qui somme toute se résument en une seule : c’est un BON film. 

 

Claudia Muna Soppo