Éditorial : Pour nous autres Africains, l’heure est à l’afro-responsabilité.

Au-delà du spectacle puéril et de l’entêtement affligeant qu’offre le camp Gbagbo, la crise ivoirienne a ceci de paradoxal qu’elle symbolise aussi une certaine avancée dans la conquête démocratique en Afrique, tout au moins à deux niveaux.

Tout d’abord l’idée qu’il est inadmissible qu’un chef d’Etat en exercice perde des élections présidentielles et reste au pouvoir vient de faire une avancée considérable. A cet égard, le refus d’Alassane Ouatara d’un scénario zimbabwéen (après les élections présidentielles de Mars et Juin 2008, Morgan Tsvangirai avait dû se contenter de ne devenir que le Premier Ministre de Robert Mugabe) où malgré sa victoire il ne serait que Premier Ministre du Président perdant confirme cette avancée. Celle-ci est loin d’être négligeable : en Afrique, dans le schéma classique auquel nous avons été jusque là habitués, le Président élu Alassane Ouatara et ses partisans auraient été bâillonnés, emprisonnés ou contraints à l’exil.

L’autre aspect de cette avancée qu’offre paradoxalement la crise ivoirienne est la vigoureuse médiation actuellement déployée par l’Union Africaine (UA) et la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ainsi que l’idée d’un éventuel recours à la force militaire pour contraindre un président défait lors d’élections démocratiques à quitter le pouvoir. Au-delà des risques d’équilibre social sous-régional qui sont réels en cas d’usage de la force militaire par la CDEAO d’une part et d’autre part des possibles manipulations par les puissances occidentales, il convient de saluer l’idée d’une Afrique qui entend régler elle-même ses problèmes, ce qui relève d’une maturité politique qui a souvent fait défaut dans ce continent.

De ce point de vue, l’Afrique avance et sur le continent, il existe de véritables forces positives en mouvement. Celles-ci transparaissent notamment dans la réussite économique de pays comme l’Afrique du Sud, le Ghana, le Botswana, l’heureux dénouement de la crise guinéenne et surtout aujourd'hui la grande leçon que nous offre l'admirable peuple Tunisien!

Hélas, Il existe aussi des inerties considérables lorsque les fils continuent de succéder à leurs pères comme au Gabon et peut être bientôt au Sénégal, quand la corruption continue de plomber tout effort de développement ou encore lorsque la Françafrique continue de gangréner les relations avec l’ancienne métropole.

Il s’agit bien d’une réalité duale et « schizophrène » que la crise ivoirienne laisse parfaitement transparaitre et qui continue de nourrir aussi bien l’afro-optimisme que l’afro-pessimisme. Or le véritable débat ne se pose plus en ces termes. Pour nous autres africains, l’heure est à l’afro-responsabilité.

L’afro-responsabilité, c’est la redécouverte de notre culture et de notre histoire souvent méconnue ; c’est un discours sur l’Afrique porté par les africains eux-mêmes et qui ne sera pertinent que s’il est sous-tendu par une solide éducation à tous les niveaux.

L’afro-responsabilité, c’est aussi une plus grande responsabilité démocratique des dirigeants et des populations. A cet égard, 2011 pourra déjà servir de baromètre à travers les nombreuses échéances électorales prévues cette année d’un bout à l’autre du continent, de l’Egypte à Madagascar en passant par le Bénin, le Niger, le Tchad, la Centrafrique, le Nigéria, la République Démocratique du Congo pour ne citer que ces pays.

L’afro-responsabilité c’est aussi la prise en main sérieuse et crédible de notre développement économique et social. L’enjeu consiste à sortir de la minorité et à entrer dans la majorité pour reprendre des catégories kantiennes. Peut-on continuer de fonder nos espoirs d’émergence économique sur l’aide au développement ? Les Etats africains sont-ils prêts à relever le défi de la fiscalité, condition sine qua non d’une gestion efficace des finances publiques ? Peut-on encore se priver en Afrique francophone, un demi-siècle après les indépendances, du levier de la gestion de notre propre monnaie aujourd’hui entre les mains de la Banque de France, et par ricochet de la Banque Centrale Européenne ? Aujourd’hui la jeunesse africaine doit non seulement répondre à ces questions – et en cela constituer une véritable force de proposition –, mais aussi contribuer à la mise en place effective des solutions idoines. Pour l’Afrique, nous devons être des acteurs de changement.

A Terangaweb – L’Afrique des idées, nous prônons donc l’afro-responsabilité. Ni afro-optimisme, ni afro-pessimisme, l’afro-responsabilité répond d’une logique différente : mieux comprendre les énormes défis auxquels fait face le continent africain afin d’œuvrer à ce qu’il puisse les relever. A cet effet, nous comptons mobiliser différentes approches analytiques, différents cadres de pensée, différents talents.

Nicolas Simel, Rédacteur en Chef

Une candidature unique de l’opposition en 2012 : la seule voie de salut au Sénégal

A entendre les Sénégalais, Abdoulaye Wade, ni son fils biologique Karim, ni son fils spirituel Idrissa Seck (qu’il vaut mieux ne pas encore enterrer) ni même tout autre candidat du pouvoir en place ne saurait remporter leurs suffrages dans un scrutin transparent. Ce serait une erreur de le croire car le pouvoir en place a encore des chances sérieuses de ne pas perdre les prochaines élections présidentielles. La seule voie de salut réside aujourd’hui dans une candidature unique de l’opposition réunissant aussi bien celle traditionnelle que celle qui a quitté le navire libéral.

Mettre au plus vite les Sénégalais devant un choix extrême

Dans cet enjeu de la candidature unique, le timing constitue un paramètre particulièrement important alors même que l’homo senegalensis n’est guère réputé pour avoir un rapport très efficace au temps. A deux ans des élections, plus tôt le candidat unique de l’opposition sera désigné, plus les chances de victoires seront réelles.

Continue reading « Une candidature unique de l’opposition en 2012 : la seule voie de salut au Sénégal »

Bilan de 2009 pour le Sénégal: Etat en deliquescene, appauvrissement et frusatration des populations

De l’année 2009 qui vient de s’écouler, que retenir pour le Sénégal si ce n’est que l’Etat y est en déliquescence, que les populations se sont incontestablement appauvries et que la frustration y a touché un seuil jusque là jamais atteint ?

Il n’est guère besoin de s’y attarder, l’Etat au Sénégal est en faillite. Le Président Wade n’incarne même plus un pouvoir qui a déserté un gouvernement pléthorique dont la plupart des ministres sont des pantins, une Assemblée Nationale entre les mains d’un petit groupe de bandits, un Sénat qui ne sert qu’à élargir l’éventail de rente du pouvoir. Dans ce pays, la constitution et les institutions y ont été vidé de leur sens ; le président sent bien venir l’apocalypse et ne pourra sauver ni l’Etat, ni son parti ni même son propre fils. il ne lui reste plus qu’à s’accrocher à son espèce de monument dit de la renaissance africaine qui suscite l’indignation de notre peuple et fait la risée de notre pays dans la presse internationale. On ne peut plus rien attendre d’Abdoulaye Wade sur le plan politique, il a perdu la mesure des choses et son entourage ne l’a jamais suffisamment eue. Continue reading « Bilan de 2009 pour le Sénégal: Etat en deliquescene, appauvrissement et frusatration des populations »

Interview sur la situation des étudiants sénégalais au Maroc

Le Maroc est connu pour être la seconde patrie des Sénégalais. Ceux-ci sont notamment très nombreux à effectuer leurs études supérieures dans le Royaume chérifien qui constitue, juste derrière la France, la deuxième destination des étudiants sénégalais. Terangaweb est allé à la rencontre de cette forte communauté sénégalaise en interviewant Arame NDAO, Présidente de l’Union Générale des Etudiants et Stagiaires Sénégalais au Maroc (l’UGESM). Avec une pertinence et un sens de la formule remarquables, elle aborde la situation, souvent difficile et généralement méconnue, des étudiants sénégalais au Maroc. Un entretien qui vaut sans nul doute plus qu’un simple détour !

Terangaweb : Pouvez-vous présenter aux internautes de Terangaweb l’association que vous dirigez ?

Arame NDAO : Permettez-moi tout d’abord de me réjouir de l’intérêt que vous portez à notre association. L’Union Générale des Etudiants et Stagiaires Sénégalais au Maroc (l’UGESM) est une association qui, comme son nom l’indique, regroupe tout élève, étudiant et stagiaire sénégalais résidant sur toute l’étendue du territoire marocain. Elle a été créée en 1979 par de valeureux étudiants comme j’ai l’habitude de les qualifier. Des étudiants qui avaient senti la nécessité de s’unir, de s’entraider dans un pays avec lequel le Sénégal a pu tisser des relations séculaires et exemplaires.

De 1979 à 2009 l’UGESM n’a cessé de s’agrandir. Elle compte aujourd’hui plus de 1 000 étudiants qui sont aussi bien dans le public que dans le privé. Et avec nos sections qui sont dans presque toutes les villes du Royaume, nous essayons tant bien que mal de hisser la communauté estudiantine sénégalaise au rang des communautés les plus unies et les plus solidaires. Continue reading « Interview sur la situation des étudiants sénégalais au Maroc »

l’ « Affaire Bara Tall »

Le cas Bara Tall, du nom de l’entrepreneur sénégalais qui dirige le holding Talix International et l’entreprise Jean Lefebvre, mérite l’attention de tous les sénégalais, en particulier celle des jeunes encore plein de rêves pour leur pays. Grosso modo Bara Tall, dont l’entreprise Jean Lefebvre participait, avec une quarantaine d’autres, aux fameux chantiers de Thiès, s’est vu en 2004 accusé de surfacturations et d’intelligence avec l’homme à abattre d’alors Idrissa  Seck, en vue de détournement d’argent portant sur des milliards de FCFA. Ces accusations ont valu à Bara Tall un séjour carcéral de deux mois et demi à la prison Rebeuss alors même qu’à ce jour la justice sénégalaise ne reconnait un quelconque fondement aux accusations malhonnêtes et mensongères portées contre sa personne.

On pourrait ne pas s’en émouvoir si l’Etat du Sénégal ne devait pas encore aujourd’hui la rondelette somme de 10 milliards de FCFA à Bara Tall pour les travaux de la route Kaolack-Fatick d’après ses propos tenus la semaine dernière lors d’une interview accordée à la 2STV, propos non démentis par le Ministre des Finances Abdoulaye Diop qui, dans une interview au quotidien Le Soleil, dit attendre une autorisation dans ce sens. Les biens fondés de la réclamation de Bara Tall ne font pas l’objet d’un doute tant la dette est quasiment reconnue par l’Etat du Sénégal par le biais de son argentier Abdoulaye Diop d’une part et d’autre part par l’Assemblée Nationale qui avait voté un budget pour que Bara Tall soit payé  et il semblerait que ces montants aient été alloués à Karim Meissa Wade pour la construction de villas dans le cadre du dernier sommet de l’OCI. Continue reading « l’ « Affaire Bara Tall » »

On ne change pas une équipe qui perd !

Au cours du Conseil des ministres du jeudi 30 avril, Hadjibou Soumaré a réitéré au Président Wade sa volonté de quitter ses fonctions de Premier Ministre. Wade, après avoir vraisemblablement essayé de reconduire celui qu’on qualifie de « technocrate », a finalement accepté la démission de Hadjibou Soumaré. Mais le Sénégal n’a pas attendu longtemps pour avoir un nouveau Premier Ministre, en la personne de Souleymane Ndéné Ndiaye. Quel que soit le prisme par lequel on essaie d’analyser cette nomination, on ne peut échapper à ce constat : Wade ne fait que du saupoudrage en reconduisant une équipe qui a échoué dans tous les domaines et en faisant le panégyrique de la défaite et des perdants.

Continue reading « On ne change pas une équipe qui perd ! »

L’actualité de la Négritude: être et demeurer métis

La Négritude est de nos jours trop vite évacuée quand on ne finit pas de reprocher aux écrivains qui en furent les pionniers d’avoir écrit en français. Pourquoi les poètes de la Négritude ont-ils écrit en français? Fut-ce-t-elle un classique, cette question semble la plus à même de laisser transparaitre en l’occurrence l’actualité de la Négritude dont elle révèle d’ailleurs la quintessence.

Léopold Sédar SENGHOR lui-même répondait à cette question dans la postface d’Ethiopiques[1]

Voici (et on y reviendra) ce qu’en dit le poète de la Négritude et non moins futur membre de la prestigieuse Académie française : « Mais on me posera la question : pourquoi, dès lors, écrivez-vous en français? – Parce que nous sommes des métis culturels… ». Continue reading « L’actualité de la Négritude: être et demeurer métis »