Le potentiel des start-ups sociales pour répondre au défi de l’électrification rurale

1,3 milliards de personnes dans le monde vivent actuellement sans électricité, et dépendent de carburants traditionnels aux prix élevés et aux effets néfastes afin de satisfaire leurs besoins énergétiques de base.

La majorité des foyers dépourvus d’accès à l’électricité vivent dans les régions rurales des pays en voie de développement. Ces régions, souvent isolées et parfois difficiles d’accès, sont largement laissées pour compte dans les grands plans étatiques pour étendre les réseaux nationaux de distribution[1]. Ce problème de grande échelle se révèle aujourd’hui être un terreau fertile pour le développement de start-ups sociales, dont les initiatives privées offrent une alternative de plus en plus crédible aux projets humanitaires.

Les organisations à but non-lucratif ont certes remporté de beaux succès avec la réalisation de projets ayant eu un impact significatif sur les conditions de vie de millions de bénéficiaires. Cependant, elles se heurtent également à de nombreuses difficultés, au premier rang desquelles figure le caractère limité de leurs ressources, qui ne leur permet pas d’atteindre une échelle véritablement significative en regard de l’immensité des besoins. La multiplication de leurs projets passerait en effet nécessairement par une multiplication correspondante de leurs financements, ce qui est extrêmement difficile dans le cadre d’un paradigme philanthropique. 

Et de fait, le nombre de personnes dépourvues d’accès à l’électricité reste extrêmement élevé. Selon les prévisions de l’IEA, ce nombre restera même relativement stable au cours des prochaines années, notamment en raison d’une croissance démographique plus rapide que le rythme des nouvelles connexions.

tableau poweronPrévisions de l’Agence Internationale de l’Energie

Vers un changement de paradigme

Un changement de paradigme est donc nécessaire. Un consensus semble se créer progressivement autour de l’idée que ce problème pourrait être éliminé dans la prochaine décennie s’il était démontré que la fourniture d’électricité aux communautés isolées pouvait être réalisée de façon durable et rentable. Le déclin continu du prix des technologies renouvelables au cours des dernières décennies a en effet rendu les solutions de marché accessibles aux habitants les plus pauvres de la planète, qui consacrent aujourd’hui jusqu’à 30% de leur budget à l’énergie.

L’implication du secteur privé dans ce secteur d’intérêt général nécessite cependant de nouveaux business models, adaptées aux populations les plus pauvres (Base of the Pyramid). Les pratiques traditionnellement adoptées par les grands acteurs en place ne prennent pas en compte leur contexte particulier et ne peuvent ainsi pas répondre à leur besoin en énergie.

Ces nouveaux business models sont actuellement principalement développés par de jeunes start up sociales innovantes, dont les premières expérimentations contribuent progressivement à la structuration d’un nouveau marché de l’électrification rurale[1].

D.light a distribué 8 millions de lampes solaires en 7 ans


Une première vague de ces start up à fort impact s’est matérialisée à partir de la deuxième moitié des années 2000, avec la multiplication d’entreprises distribuant des lampes et kits solaires. Certaines de ces entreprises sont extrêmement performantes, à l’image par exemple de d.light qui annonce avoir vendu 8 millions d’appareils solaires en 7 ans d’existence.


Ce mouvement est encouragé et coordonné par les grandes organisations internationales dont la vocation est de faciliter la réalisation des objectifs millénaires du développement, telles que la Banque Mondiale à travers le programme dédié Lighting Africa. Le développement de ces start-ups est par ailleurs soutenu par des investisseurs intéressés par le potentiel à la fois social et financier de ces entreprises.

 

Structuration d’un nouvel écosystème, au service de l’innovation sociale

« Les lampes solaires ne suffisent pas à éliminer la pauvreté. Il faut réussir à alimenter des usages productifs » – K. Yumkella, UN Under-Secretary-General – Special Rep & CEO – Sustainable Energy for All

Ceci étant, ces entreprises sont loin de régler totalement le problème de l’accès à l’électricité. Les solutions qu’elles proposent permettent en effet de révolutionner les usages énergétiques domestiques dans les foyers BoP off-grid, et ce faisant d’améliorer radicalement leurs conditions de vie. Malgé tout, elles ne suffisent pas à répondre à une demande plus intense concernant les usages collectifs et économiques (alimentation électriques de centres de santé, de petites entreprises et ateliers, qui demandent des puissances qu’un kit solaire ne pourra jamais délivrer).

Ce sont pourtant ces usages qui in fine enclencheront un réel développement dans les zones rurales. Pour y répondre, une deuxième vague a émergé, qui s’attaque à des solutions d’électrification d’une autre ampleur, à même de fournir des puissances électriques capables d’alimenter des appareils et machines jusque dans les régions les plus reculées. Ce besoin a là encore été bien compris par les grandes
institutions internationales, à l’image des Nations Unies à l’origine de l’initiative Sustainable Energy For All qui s’attache à mettre en réseau les acteurs de cette nouvelle industrie et à leur fournir des données et ressources susceptibles de faciliter leur action.

Husk Power System – Success story du nouveau paradigme de la fourniture d’électricité pour le BoP

Le meilleur exemple de ces start-ups dédiées à l’électrification rurale est à mes yeux celui de Husk Power Systems. A l’aide de leur technologie de gazification de biomasse (cosses de riz) associé à du solaire photovoltaïque et de réseaux de distribution low cost en bambou, la start up indienne a pu construire près d’une centaine de minigrids depuis 2007 et commence aujourd’hui à s’implanter en Afrique de l’Est. Ses minigrids sont capables de produire une électricité à un prix très attractif pour les habitants des régions les plus pauvres du monde. Les bénéficiaires les plus pauvres sont impliqués durablement dans leur électrification.

Plusieurs grands groupes industriels du secteur électrique traditionnel développent de leur côté des initiatives tournées vers le BoP s’inscrivant pour la plupart dans le cadre de politique de responsabilité sociale et environnementale (comme par exemple le programme BIPBOP de Schneider Electric). Mais la dynamique globale dans ce domaine est surtout portée par quelques dizaines de start-ups qui développent leurs propres modèles dans différentes régions à travers le monde, chacune expérimentant différents choix technologiques et différents modèles d’affaires susceptibles de rendre les projets à la fois durables et rentables.

Frilosité des financeurs…

La plupart des projets sont encore relativement récents et ne sont guère au-delà de la phase pilote. C’est bien en raison de cette incertitude fondamentale que ce mouvement reste pour l’heure soutenu majoritairement (et assez paradoxalement) par des acteurs issus du secteur philanthropique. Ce sont en effet les fondations (parfois issues de grands groupes de la filière comme la Fondation Shell), les donneurs privés et certains fonds public dédiés à l’aide au développement qui assument le financement d’une l’innovation sociale jugée encore trop risquée ou pas assez rémunératrice par les financeurs de l’économie traditionnelle.

D’un point de vue d’ensemble, cette situation est assez regrettable dans la mesure où en renonçant à jouer leur rôle, à l’image des fonds de capital risque traditionnels, les « Venture Philanthropists » privent nombre de start-ups des fonds qui leur seraient nécessaires pour émerger. Ces derniers préfèrent en effet se concentrer sur le créneau du capital développement, afin d’accompagner des entreprises déjà établies (et situées dans la première vague citée plus haut) dans leur changement d’échelle. Pourtant, les montants pour lancer un pilote, relativement limités par rapport aux tickets moyens dans les deals avec les start-ups, leur permettraient de prendre des positions intéressantes dans de nouveaux projets tout autant, voire plus prometteurs.

…en dépit d’un vrai potentiel de disruption pour tout le secteur

Toujours est-il que nous assistons actuellement à la naissance d’une nouvelle classe d’acteurs, qui vient disrupter le secteur de la fourniture d’électricité par le bas, c’est-à-dire en s’attaquant à un segment du marché (les communauté off-grid situées à la Base de la Pyramide) qui est resté durant des années inaccessible aux acteurs traditionnels (si ce n’est totalement négligé).

Power:On, l’entreprise sociale dont je suis le fondateur, s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Power:On est un fournisseur d’électricité dédié aux villages isolés des pays en voie de développement, exploitant des minigrids hybrides photovoltaïque-diesel, efficients et intelligents, tirant parti de ressources renouvelables locales. Notre mission est de révolutionner le rapport de communautés rurales à l’énergie – pour un prix moins élevé́ que ce que nos clients dépensent actuellement en carburants fossiles de mauvaise qualité́.

Power:On vend des contrats prépayés, liés à des catégories d’usages énergétiques spécifiques tels que l’éclairage, l’utilisation d’un moulin électrique, d’un réfrigérateur ou d’une pompe électrique. Chaque client a donc accès à l’électricité́ en fonction de ses besoins et de ses ressources.

Nos systèmes sont ainsi optimisés et conçus sur-mesure, en réponse aux demandes exprimées par nos clients qui sont les entreprises, les foyers et les services publics. Nous avons également voulu tirer parti des nouvelles technologies pour affirmer notre crédo : le BoP n’implique pas le low cost et la faible qualité de service. Au contraire, les technologies numériques permettent de mieux communiquer avec les clients, de proposer une excellente expérience utilisateur et de promouvoir des usages responsables. Le contexte BoP représente une opportunité́ unique de transformer le métier de la fourniture d’électricité́, en adoptant des technologies de nouvelle génération sans pâtir d’un héritage d’installations obsolètes.

Grâce au déploiement de réseaux de compteurs intelligents, nos clients peuvent ainsi contrôler, payer leur consommation et recevoir des conseils d’efficacité énergétiques personnalisés directement sur leurs téléphones mobiles. Ces mêmes technologies de l’information et des communications permettent aussi à nos réseaux de devenir intelligents et d’optimiser leur fonctionnement en temps réel. Enfin, la gestion des systèmes isolés est facilitée par la mise en place d’une plateforme de maintenance et de formation technique en ligne.

Power:On est actuellement en pleine préparation d’un premier projet pilote au Bénin, pour la fin de l’année 2014.

Notre objectif à travers ce premier projet est de démontrer la viabilité de nos modèles technique et économique, et leur capacité à produire un impact social et des retours financiers significatifs. Ce faisant, nous participerons à la structuration d’un écosystème capable de mobiliser les ressources nécessaires au changement d’échelle de ces nouvelles solutions, notamment par le biais de l’impact investing. Power:On pourra alors répliquer l’initiative dans d’autres localités au Bénin et dans la sous-région en 2015.

Tristan Kochoyan, fondateur de Power:on



[1] voir les précédents articles de Power On publiés sur leur blog : The pricing issue et Smart subsidies to fight poverty

 

 

Quatre modèles économiques pour l’électrification rurale en Afrique (2 /2)

Nouvelle imageL’association Africa Express a étudié en 2012, 25 projets d’énergie sélectionnés par un Comité Stratégique. A partir du Livre Blanc sur les bonnes pratiques des énergies durables en Afrique, publié par l’Association, nous avons présenté dans un précèdent article, deux modèles portant sur l’entreprise sociale (1), et la création de filière économique nouvelle (2). Voici deux autres reposant sur la fidélisation de la clientèle (3) et le développement de partenariats public-privé (4).

(3) Fidéliser les clients

Les projets d’électrification rurale décentralisée peuvent faire face à un taux élevé de non-recouvrement du paiement du service rendu par les clients, pour différentes raisons : insatisfaction, difficultés financières… Il s’agit d’un risque majeur pour la pérennité du projet, puisqu’il entraîne une diminution des recettes, qui pèse sur les opérations de maintenance préventive ou curative et dégrade ainsi la qualité du service.

La conservation de la rente assurée par les clients acquis exige donc un investissement qui peut représenter un coût élevé : relances, mobilisation de personnel pour récupérer les créances, désinstallation du matériel… Cependant, il est nécessaire pour garantir la qualité de service et assurer la viabilité de l’opérateur.

BPC Lesedi propose une solution innovante parfaitement adaptée au cas du Botswana, car il s’agit d’une région à fort pouvoir d’achat des populations. Le concept du paiement au service est une solution qui peut être répliquée pour d’autres bassins de population.

Projet BPC Lesedi / Botswana : mise en œuvre du concept de «paiement au service » via un réseau de franchisés

Nouvelle image (BPC Lesedi (joint-venture détenu à 55% par BPC – opérateur national d’électricité botswanais – et à 45% par EDF) est née en 2010 et a pour mission de mettre en œuvre le programme national d’électrification rurale à partir d’énergies renouvelables, solaire en particulier. L’objectif de la politique énergétique du Bostwana est d’atteindre un taux d’électrification de 80% des foyers d’ici 2016 et de 100% d’ici 2030.

Le modèle mis en place par BPC Lesedi est celui de « paiement au service » déjà mis en œuvre dans d’autres pays par EDF. Au Botswana, l’innovation de cette approche réside dans son système de franchises. Le « paiement au service » vise à répondre au plus grand défi posé par les systèmes hors-réseaux par rapport à l’électrification via le réseau électrique conventionnel : prendre en charge la maintenance et sa charge financière qui pèse sur le client en échange d’une redevance mensuelle.

La force du système de franchises réside dans l’adaptabilité des entrepreneurs à différents environnements, et la durabilité d'une prestation de services performante qui conduit l'entrepreneur local à maintenir son entreprise en pleine croissance en conservant ses clients captifs et satisfaits. En impliquant le secteur privé pour mener le processus d’électrification rurale à travers le pays au lieu de confier la mission à un unique opérateur national, le concept de franchises va permettre à BPC Lesedi d’encourager l’ensemble de l’industrie solaire dans le pays et d’apporter de la valeur ajoutée à son expansion.

Après 3 ans, BPC Lesedi a déjà réussi l’installation de 600 systèmes solaires (pour 3 000 bénéficiaires environ)  grâce au recrutement et à la formation de 10 franchisés. Ceci a contribué à la création de 47 postes permanents dans le solaire à travers le réseau de franchises et de sous-traitants.

(4) Construire des partenariats public-privé (PPP)

Les PPP peuvent représenter une solution pertinente de financement de l’accès à l’énergie, si la politique nationale d’électrification rurale d’un État ou d’une région est définie, et que le cadre réglementaire est transparent et incitatif.

Dans le domaine de l’électrification rurale, les États peuvent libérer des concessions dont elles confient la gestion à une entreprise privée, alors titulaire d’une délégation de service public sur un territoire défini. Elle est alors en charge du développement de l’accès à l’énergie, et bénéficie d’une exclusivité d’exploitation sur une durée longue (10 à 20 ans) afin de rentabiliser ses investissements et dégager des bénéfices. Au terme de la concession, la puissance publique devient propriétaire et gestionnaire des infrastructures. D’autres systèmes existent, comme l’affermage, dans lequel l’opérateur privé gère un service public, en contrepartie d’une rente reversée à l’État.

Pour les infrastructures énergétiques d’envergure nationale ou régionale, les PPP représentent une voie pertinente d’une croissance durable. À l’initiative des gouvernements et sur impulsion internationale, bailleurs publics, agences internationales et partenaires privés sont associés afin de mettre en œuvre un projet de  production ou de distribution énergétique.

Projet GDC / Kenya : PPP pour la construction d’une centrale géothermique de 400 MW

Nouvelle image (3)L’entreprise GDC (Geothermal Development Company), créée en 2008, développe l'énergie géothermique au Kenya. La géothermie est l’unique grande source d’énergie encore inexploitée, peu chère, fiable et disponible.

On estime le potentiel géothermique du pays à plus de 10 000 MW, principalement le long de la vallée du Rift. Le premier projet développé par l’entreprise est la centrale de Menengai, qui produira 400 MW à l’achèvement de sa construction en 2017.

En raison des coûts très élevés liés à l'exploration des ressources en amont, les investisseurs sont généralement frileux quant au développement de la géothermie, dont l’exploitation des ressources a stagné dans la plupart des pays. Cependant GDC a été conçu comme un accélérateur du développement géothermique du pays.

GDC prend en charge les risques de l’exploration : elle procède ainsi à des études de surface, d’exploration, d'évaluation et de production de forage. Les investisseurs seront par la suite invités à s'associer au développement de la centrale dans le cadre d’un partenariat public-privé.

Grâce à la prise en charge des risques initiaux engendrés par l’exploration géothermique, GDC favorise les investissements dans le secteur en limitant les risques qui pèsent sur eux. Si les investisseurs privés devaient être impliqués dans l'investissement de l’intégralité de la chaîne de valeur géothermique, le risque serait de facto répercuté sur les tarifs au consommateur, qui deviendraient alors trop élevés pour la population locale.

Grâce à ce modèle, le Kenya développera une industrie géothermique efficace tandis que les consommateurs  bénéficieront également de tarifs plus bas.

En conclusion :

L’Afrique dispose de ressources énergétiques très importantes. Pourtant les investissements actuels dans les unités de production, et une approche strictement technique et macro-économique ne sont pas suffisants pour délivrer l’électricité à l’ensemble de la population. Des freins subsistent : infrastructures vulnérables aux variations de la demande, réseaux peu interconnectés qui freinent le développement de structures de production énergétiques régionales, surcoût à l'investissement des énergies renouvelables… Enfin, l'économie actuelle du système électrique empêche les investissements nécessaires faute d'efficacité, de solvabilité des acteurs et de stabilité politique et réglementaire.

La réussite de l’accès à l’énergie en zone rurale nécessite une autre vision, tout aussi à long terme, mais menée au plus près du terrain. Surtout, elle requiert la construction de modèles économiques mieux adaptés à des populations pauvres et souvent peu solvables, l’implication de tous les acteurs des filières et enfin le placement de l’innovation sociale et financière au cœur de la problématique de l’accès à l’énergie.

 

Jeremy DEBREU d’Africa Express

Quatre modèles économiques pour l’électrification rurale en Afrique (1/2)

Nouvelle imageEn 2012, l’association Africa Express a étudié 25 projets d’énergie sélectionnés par un Comité Stratégique, pour comprendre quels sont les facteurs-clés qui sous-tendent leur réussite. La diversité des projets audités était très large, tant en type de développeur de projet et de source d’énergie produite qu’en termes d’impact pour les populations bénéficiaires ou encore de variété des stades de développement.

En septembre 2013 l’association a publié un Livre Blanc des bonnes pratiques tirées de l'ensemble de ces projets, qui peuvent servir de modèle et être adaptées ailleurs. Cet ouvrage, déjà téléchargé à plus de 6 000 exemplaires, se veut une source d’inspiration pour les porteurs de projets actuels et futurs, leurs bailleurs et partenaires financiers, mais aussi pour les gouvernements en charge de la politique énergétique.

 A travers une série de deux articles, voici une revue de quatre modèles observés par Africa Express : l’entreprise sociale (1),  la création de filière économique nouvelle (2), la fidélisation de la clientèle (3) et le développement de partenariats public-privé (4). 

Avec presque 600 millions d’exclus de tout service énergétique, l’électrification rurale décentralisée (ERD) reste un enjeu majeur pour le développement du continent. Les solutions techniques sont pourtant connues et disponibles. Malgré des sources d’énergie abondantes, l’électricité est rare et chère en Afrique subsaharienne, avec des prix moyens supérieurs aux normes internationales.

Dans le domaine de l’électrification rurale, le rôle du porteur de projet est déterminant. Au-delà de la technique déployée, le succès d’un projet d’accès à l’énergie relève d’une capacité à comprendre les besoins locaux, intégrer les parties prenantes, développer des relations fiables avec les partenaires financiers, assurer un management positif et soutenable, notamment sur le plan de la formation.

Mais avant toute chose, un projet d’énergie doit impérativement s’adosser à un modèle économique garantissant la viabilité économique de l'exploitation.  Un business model est la manière dont une entreprise crée, partage et retient de la valeur. Dans la plupart des projets, l’investissement de départ est fortement subventionné – jusqu’à 80% du montant total, souvent par des bailleurs internationaux. Cet apport initial risque toutefois de rester inopérant s’il n’est pas relayé par un modèle d’exploitation commerciale viable permettant de développer les projets au-delà du périmètre initial.

Or, au vu de la faible rentabilité de l’activité (petit nombre de clients, faibles consommations, difficultés de paiement), l’activité commerciale se révèle le plus souvent insuffisante pour assurer le renouvellement et l’entretien des installations ou pour investir dans des équipements lourds ou d’envergure qui permettraient de changer d’échelle, au-delà du petit matériel de maintenance.

1. Favoriser l’entreprise sociale et engager les populations locales

L’accès à l’énergie est un investissement social avec une finalité de développement. L’entreprise sociale vise à utiliser la création de richesse pour répondre efficacement à des besoins sociaux. Elle représente un modèle original et particulièrement adapté aux pays en développement. Ici on s’adresse prioritairement aux 4 milliards de personnes qui vivent avec un revenu local inférieur à 3 000 dollars par an en parité de pouvoir d’achat (WRI/rapport IFC) regroupées sous l’appellation « base de la pyramide »  (BoP).

A lucrativité limitée, l’entreprise sociale adopte une gouvernance ouverte, en associant les différentes parties prenantes : acteurs locaux, salariés, bénéficiaires… dans une optique d’économie sociale et solidaire (ESS). Or la gestion participative est une des garanties de la pérennisation d’un projet rentable, car les bénéficiaires d’un projet d’énergie sont aussi les premiers artisans de son succès. Pour que ce nouvel accès à l’énergie s’inscrive dans la durée, ils doivent en être également les partenaires.

À ce titre et en premier lieu, une participation financière partielle des usagers est un prérequis indispensable à la bonne acceptation du système, quel qu’il soit : location-rechargement de batteries, micro-réseau solaire, générateur diesel… Et ce, même si on s’adresse à des populations à très faibles revenus. D’une part, l’acte d’achat confère de la valeur à l’équipement ou au service. D’autre part, cette participation, même subventionnée, permet d’assurer la maintenance des systèmes et constitue une base de capitaux nécessaire pour le remplacement d’équipements défectueux. Elle stabilise donc le modèle d’exploitation.

Une gestion participative du projet responsabilisera en outre l’ensemble des bénéficiaires en faisant de l’installation énergétique un bien commun à préserver. Collecte du règlement des factures par un groupement villageois, maintenance générale par un technicien du village formé par le porteur de projet… Autant de méthodes qui participent à assurer un engagement fiable des populations.

Exemple: Projet écovillage Villasol / Sénégal : développement d’un micro-réseau avec la population locale

Nouvelle imagefÀ Dar Salam à l’Est de Tambacounda au Sénégal, l’entreprise Schneider Electric a subventionné l’installation d’une micro- centrale solaire qui permet à l’ensemble du village d’accéder à une énergie primaire grâce à un système de location-rechargement de batteries.

Après une consultation initiale des responsables du village afin que le projet réponde bien aux attentes de la population, les habitants ont constamment été partie prenante du projet. Tout d’abord, chaque client s’est acquitté d’un montant de 12 000 F CFA pour l’achat d’une batterie. Ensuite, un technicien issu du village a été formé pour maintenir le bon état général du système, gérer le parc de batteries et entretenir un lien avec les porteurs du projet : Schneider Electric et l’Agence Nationale des EcoVillages. Enfin, la gouvernance a été confiée à un comité villageois destiné à garantir la bonne gestion de l’argent collecté — 100 F CFA par rechargement de batterie.

Ces fonds seront réinvestis dans le projet avec une double fonction : régler le salaire du technicien et constituer une réserve pour l’achat de nouveau matériel quand l’actuel arrivera en fin de cycle. Après un an  d’expérimentation de ce projet en cogestion, les indicateurs de suivi ont permis d’identifier des points  d’amélioration. Sa rentabilité étant strictement limitée, la participation de l’ensemble des clients au bon développement est capitale. Des adaptations sont en cours pour améliorer le taux de non-recouvrement qui demeure élevé. Les gestionnaires du projet à Dar Salam bénéficient par ailleurs de formations complémentaires.

2. Développer une filière économique locale

Le porteur de projet d’énergie tisse de nombreuses interactions avec de multiples acteurs : représentants de l’État (commune, agence nationale d’électrification rurale, etc.), communautés d’usagers, partenaires financiers… En parvenant à les impliquer à ses côtés, il accélère son intégration dans le tissu économique et social local et assure ainsi la création de revenus nécessaires au maintien des systèmes de génération électrique dans la durée.

En s’appuyant sur un réseau de partenaires qualifiés et disponibles, le projet d’énergie devient un catalyseur d’activités génératrices de revenus. Plus généralement, il pourra favoriser le développement d’une économie locale, source d’une croissance durable.

Exemple: Projet GERES / Bénin de création d’une filière locale de production d’huile de jatropha avec des plateformes multiservices

Nouvelle image1Le Bénin est un pays essentiellement rural qui importe 100% de sa consommation d’électricité et de carburant. À peine 3,5% des populations rurales ont accès à l’électricité et elles ont recours au secteur informel pour s’approvisionner en pétrole lampant et gasoil. Ce déficit énergétique freine le développement du pays.

Depuis 2008, le GERES appuie le Département du Zou à travers divers programmes orientés vers le désenclavement énergétique des zones rurales, particulièrement l’nstallation des plateformes multiservices de transformation des produits agricoles (moulins entraînés par moteur diesel). Le programme ALTERRE vise à créer une filière courte de production d’agrocarburant à base de Jatropha Curcas pour alimenter les moulins.

Cette filière courte respecte les principes suivants : (i) une estimation des besoins en carburant de la localité, (ii) un dimensionnement des champs à cultiver en fonction des besoins, (iii) un accord de production avec des producteurs volontaires et disposant d’assez de terres cultivables, (iv) une utilisation au maximum du dixième du total de la superficie cultivable du producteur pour le jatropha, (v) le respect d’une pratique d’association de cultures vivrières/jatropha sur au moins les 4 premières années de vie du jatropha, (vi) l’engagement d’un entrepreneur rural local disposé à participer financièrement à l’installation et à la gestion d’une unité de fabrication d’agrocarburant.

Les producteurs sont regroupés par affinités et, au sein de chaque groupe, des responsabilités opérationnelles sont attribuées et évaluées périodiquement. Les tests d’utilisation de l’huile de jatropha se font au sein d’une  association de propriétaires d’équipements diesel. Ceci développe les pratiques de substitution du gasoil, d’entretien et de maintenance des moteurs, etc.

La filière courte de proximité d’agrocarburant apporte une solution concrète à l’enclavement énergétique des  zones reculées et suscite donc une adhésion massive des populations. D’une seule commune volontaire en 2009, le jatropha est cultivé aujourd’hui dans les 7 communes rurales du Zou. 850 paysans sont aujourd’hui adhérents du premier cluster de production regroupant les communes de Covè et Zangnanado. Ce cluster dispose déjà d’une unité de fabrication d’huile d’une capacité de 250 litres par jour. Surtout, plus de 500 propriétaires de moteurs diesel se sont déjà engagés pour l’achat de cette huile, structurant les débouchés de la filière.

Dans un prochain article, nous présenterons les modèles de la fidélisation de la clientèle et le développement de partenariats public-privé. 

Jeremy Debreu d'Africa Express

 

Comment financer l’accès à l’énergie en zone rurale?

Le constat : L’Afrique subsaharienne est la région où le taux d’accès à l’énergie électrique est le plus faible. Le constat est encore plus alarmant quand l’on considère les zones rurales où vivent plus de 60% de la population. L’électrification rurale a toujours été au cœur des enjeux de développement du continent africain. Sa spécificité tient du fait qu’au nom de la péréquation spatiale, toutes les régions d’un pays doivent être raccordées au courant conventionnel, en garantissant à chaque habitant un même service, une même qualité et un même prix d’accès. Mais compte tenu de l’hétérogénéité des superficies des pays du continent, l’enjeu des politiques d’électrification rurale est multiple quand à PIB quasiment égaux, le Bénin (PIB 2005 : US$ 13Milliards) avec une superficie de 112 622km2 doit électrifier toutes ses zones rurales au même titre que le Mali (PIB 2005 : US$ 15Milliards) avec une superficie de 1.240.192km2. Pourtant, ces pays ont tous ratifié les Objectifs du Millénaire pour le Développement avec des cibles d’environ 30 à 50% de couverture des zones rurales à l’horizon 2015.

Nouvelle imageToute politique d’électrification doit répondre à un besoin de développement économique pour la valorisation des régions et localités, et d’équité sociale pour l’amélioration du bien être des populations touchées. Avec le coût onéreux de l’extension du réseau, et du déploiement des énergies renouvelables qui demeurent encore cher au niveau international, la rentabilité financière ne doit pas être une des conditions sine qua non de l’investissement dans le secteur de l’énergie, mais plutôt la rentabilité économique et sociale.

D’après les statistiques relatives au taux d’accès à l’énergie électrique en zone rurale, nous remarquons une certaine homogénéité des pays africains hors Afrique du Sud et Afrique du Nord : Madagascar a un taux d’environ 5% en 2012, le Bénin entre 4 et 6%, la Côte d’Ivoire une moyenne de 34%, le Cameroun est à 12%, la Zambie à 4.5%, le Niger à moins d’un pour cent et enfin la Somalie à environ 20%.

Il est donc indispensable de trouver le modèle de financement le plus approprié pour la réalisation d’infrastructures énergétiques rurales quand bien même les secteurs public et privé, tous deux impliqués ont des valeurs et des stratégies différentes.

Le cadre : D’après les conclusions de l’étude du Club des agences et structures Africaines en charge de l’Electrification Rurale (Club-ER), le partenariat Public-Privé est marqué par une faible mobilisation des financements privés, l’existence de risques liés à des contrats imparfaits ou mal rédigés, l’absence d’un cadre juridique favorable et un besoin ardent de gros investissements du secteur public. La plupart des experts sont unanimes sur le fait que l’électrification rurale est déficitaire en termes de moyens financiers et de compétences humaines et techniques.

Que faire ?  L’ampleur et la diversité des besoins de même que la complexité et la variété des réponses impliquent une bonne compréhension des aspects soci-culturelles des populations cibles. C’est dans ce cadre qu’EDF leader français et européen du secteur de l’énergie propose une stratégie reposant sur 5 piliers :

  • Partenariat : Maximiser les partenaires locaux privés/publics.
  • Continuité : Avec des cycles relativement longs dans le secteur, tous les projets doivent s’inscrire dans la durabilité.
  • Innovation et partage d’expériences : La nécessité de la Recherche et du Développement permet d’obtenir des effets d’échelle importants dans le temps, sur le coût aussi bien que sur l’adoption d’une technologie. C’est pour cela qu’il est très important de partager les expériences pour une progression efficace.
  • Rentabilité : L’accès  à l’énergie doit entrainer le développement de plusieurs activités qui génèrent des revenus pour pérenniser le projet.
  • Mesure d’efficacité : Il est nécessaire de s’appuyer sur des évaluations régulières, que le constat soit positif ou négatif afin d’améliorer le retour d’expériences.

Des actions concrètes : Plusieurs actions ont été menées et il est important de mettre en exergue les plus phares à notre connaissance :

L’expérience EDF : EDF a développé un modèle pour l’électrification rurale décentralisé, en partenariat avec l’ADEME nommé « SSD ». Il s’agit d’un concept pour proposer un ensemble de services portés par une société de droit local. Ce programme est effectif en Afrique du Sud, au Maroc, au Mali et au Sénégal. Les SSD, ou sociétés de services décentralisés sont gérées par des entrepreneurs locaux. Initialement, une Joint Venture est mise en place avec EDF et sur le long terme, toutes les parts sont transférées vers l’entrepreneur local. Au Maroc, plus de 23 000 clients soit 161 000 personnes sont concernés par ce programme.

Le GERES au Bénin : Il s’agit d’un projet de développement d’une filière locale de production d’agro carburant dans des activités mécaniques en milieu rural. Doté d’un budget de 3,3 millions d’euros,  le projet a permis l’installation d’unité d’extraction d’huile d’une capacité de 250L/jour avec un réseau de consommateurs riche de plus de 500 propriétaires de moteur diesel qui améliorent ainsi leur empreinte écologique.

UpEnergy en Ouganda : UpEnergy contribue à combattre la pauvreté, améliorer la santé des populations et protéger les forêts en mettant à la disposition des populations des technologies propres comme les foyers améliorés. Le financement est en assuré par les mécanismes de la finance carbone. Chaque four permet d’économiser 19h de cuissons par semaine, et 5 heures de temps de collecte de bois, l’équivalent d’un litre de carburant. Au total, cela a permis d’économiser 200 000T de et de sauver plus de 600 000 arbres.

En conclusion : Etant donné que l’accès à l’énergie constitue un moyen d’accélérer l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement, nombreux sont les programmes nationaux ou internationnaux qui se développent autour de l’accès à l’énergie. Sous formes de dons, de conventions de concession ou purement financiers, la réussite de ces projets réside dans la façon dont ils seront appropriés par les populations cibles et dans la pérennisation financière de ces derniers. C’est pourquoi une formation professionnelle adaptée  et une forte sensibilisation sont nécessaires.

Au niveau régional, il s’agit de promouvoir les solutions locales, décentralisées, sur l’ensemble de la filière : de la production à la consommation. La valorisation des énergies locales aura un effet d’échelle important sur l’emploi des jeunes, l’autonomie des femmes ainsi que l’accroissement de la valeur ajoutée économique des zones qui auront accès à une énergie abordable, disponible et propre.

Enfin, Le rôle des Etats sera de définir des plans ambitieux pour le très long terme, garantissant une législation appropriée de même que de fortes incitations pour stiumler le secteur privé et indirectement l’activité économique. La gouvernance efficace ainsi que l’émergence des nouveaux cœurs de métier sont donc les mots d’ordre.

Le dilemme de l’électrification rurale

Nouvelle imageDu 25 au 30 Décembre dernier se tenait à Djibouti un sommet africain sur le thème de l’électrification rurale.  Une trentaine de pays aussi bien francophones qu’anglophones ont répondu à l’appel. L’objectif était de faire un bilan du sous secteur de l’électrification rurale. À travers ce billet, nous tâcherons d'en faire la synthèse et de mettre en exergue les difficultés auxquelles font et feront face les pays africains.

L’électrification rurale a toujours été au cœur des enjeux de développement du continent africain. Sa spécificité tient du fait qu’au nom de la péréquation spatiale[1], toutes les régions d’un pays doivent être raccordées au courant conventionnel, tout en garantissant à chaque habitant un même service, une même qualité et un même prix d’accès. Mais compte tenu de l’hétérogénéité des superficies des pays du continent, nous comprenons d’emblée l’enjeu des politiques d’électrification rurale quand on sait qu’à PIB quasiment similaire[2], le Bénin (PIB 2005 : US$ 13Billion[3]) avec une superficie de 112 622km2 doit électrifier toutes ses zones rurales au même titre que le Mali (PIB 2005 : US$ 15Billion) avec une superficie de 1.240.192km2. Pourtant, ces pays ont tous ratifié les objectifs du millénaire pour le développement avec des cibles d’environ 30 à 50% de couverture des zones rurales à l’horizon 2015.

En comparant les statistiques relatives au taux d’accès à l’énergie électrique en zone rurale[4] présentées lors du sommet, nous remarquons une certaine homogénéité des pays africains hors Afrique du Sud et Afrique du Nord : Madagascar a un taux d’environ 5% en 2012, le Bénin entre 4 et 6%, la Côte d’Ivoire une moyenne de 34%, le Cameroun est à 12%, la Zambie à 4.5%, le Niger à moins d’un pour cent et enfin la Somalie à environ 20%. La plupart des pays aussi bien anglophone que francophone oscillent entre 5 et 30%, en fonction de leur taille, de l’intérêt qu’accordent les gouvernements en place au sous secteur[5], et de la structure de tutelle en place.

Concernant l’organisation du sous-secteur, il s’agit d’un point déterministe car suite aux recommandations du FMI et de la Banque Mondiale dans les années 1990 dans le cadre de l’accélération de l’électrification des zones rurales, deux groupes se sont formés : les uns privilégiant le renforcement des structures étatiques, avec une hausse considérable des montants alloués au sous secteur (en l’occurrence le Maghreb et l’Afrique du Sud), les autres (pour la plupart sub-sahariens) allant dans le sens de la création d’agence ou de structures spécialisées d’électrification rurale.  Sans revenir sur les résultats et  les performances annuelles de chacun des groupes, la tendance nous indique que le premier groupe, a réussi en moins de 20 ans à atteindre des niveaux d’électrification rurale supérieurs à 80%, contrairement au second groupe qui peine à atteindre les 30%. En l’absence de statistiques fiables qui nous auraient permis de faire des conclusions critiques, nous pouvons toutefois émettre quelques hypothèses: la mise en place d'agences, au détriment du renforcement des sociétés nationales d’électricité pose le problème de leur autonomie financière notamment leur dependance à la création de nouvelles lignes budgétaires et/ou de subventions que l’État n’arrive pas toujours à honorer et leur forte dépendance aux bailleurs de fonds internationaux dont les montants accordés ne peuvent toujours être budgétisés. Et ce, malgré le fait que le budget de ces agences dépend le plus souvent d’une ponction imputée sur les factures des abonnés ou des « rentes » ou tirées d’une libéralisation de la filière par des concessions, comme c’est le cas en Côte d’Ivoire.

Pour finir, nous aborderons le dilemme de l’approvisionnement et de la fourniture d’énergie électrique dans les zones rurales. Bien qu’il n’existe pas de définition arrêtée « d’une zone rurale », une zone peut se définir comme rurale compte tenu du nombre d’habitants (jusqu’à 5000 habitants par exemple), de son poids économique, ou de sa proximité avec le réseau conventionnel. Dans le cas du Bénin, l’Agence en charge de l’électrification rurale s’est donnée comme seuil d’action 20 km des lignes du réseau national. Mais à la vue de la superficie de certains pays ainsi que des questions relatives au coût du kWh produit, l’électrification rurale pose le double enjeu de pouvoir rendre accessible l’énergie électrique sans augmenter le coût d’accès. Même dans les pays comme la Côte d’Ivoire[6] et le Ghana où le mix énergétique est très intéressant, la base[7] est assurée le plus souvent par du thermique (gaz, jet-A1 ou autre combustible), l’hydraulique étant très dépendant des saisons climatiques. Quand on tient compte des pertes d’ordre techniques et non techniques, il devient alors important de promouvoir les sources de production décentralisées dans les zones rurales très éloignées. Les choix de ces sources décentralisées (solaires, éoliens, hybride diesel-renouvelables, hybride renouvelable-micro barrage, etc.) doit se justifier par des analyses cout-bénéfices pointues, et contingentes entre le coût de ces nouvelles sources d’énergie et le coût très onéreux de l’extension du réseau. En effet, comme nous l’avions toujours dit, l’énergie est ce bien social économiquement inaccessible pour tous, qui se doit toutefois d’être disponible pour tous.

 

                                                                                                                      Leomick SINSIN

 


[1] La péréquation est un mécanisme de redistribution qui vise à réduire les écarts de richesse, et donc les inégalités, entre les différentes collectivités territoriales

[2] Se baser sur le PIB ne permet pas de comparer les performances économiques des pays mais juste d’avoir un indice de de mesure du niveau de richesse réel généré

 

 

 

 

 

[3] WorldWiki

 

 

 

 

 

[4] Rappelons que le taux d’accès se calcule sur la base du nombre de localités électrifiées par le nombre total de localités du pays

 

 

 

 

 

[5] L’importance des gouvernements dépend du budget annuel alloué à l’électrification rurale

 

 

 

 

 

[6] 57% de thermique et 43% d’hydraulique

 

 

 

 

 

[7] La base constitue la source d’énergie la plus utilisée pour la production d’énergie en continue, contrairement à la pointe qui constitue la source activée pour répondre à l’énergie marginale à produire