Le mal du délestage en Afrique…

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Comme la plupart des chroniqueurs, j’aurais pu en cette première semaine du mois de Février jeter mes dévolus sur le dernier sommet de l’Union Africaine. Malgré moi, larmes aux yeux, le sommet de l’Union Africaine, le 22ème du genre, tenu la semaine dernière sur la terre africaine d’Addis-Abeba sera dans le futur. Espérons, dans un tout simple futur, mais pas aux calendres grecques.

Certainement que vous vous demandez ce qui se trame derrière cette excuse, presque interminable. Et pourquoi pas d’Union Africaine en cette semaine de l’Union Africaine.

Dans le somptueux monument, expression de la forte aliénation chinoise sur le continent, les dirigeants de l’Afrique, manifestement éhontés, avaient, derrière chacun dans son pays, un panier désespérément impérissable de grandes difficultés. Aussi montagneuses que le Kilimandjaro, et étendues que le Nil, ces difficultés n’ont que légendaire réputation, le ralentissement d’une Afrique pourtant prédestinée à la gloire.

Etiez-vous au Bénin cette semaine ? Aviez-vous connu le malheur de séjourner au Sénégal ? Êtes-vous maladroitement invités dans les deux Congo ? L’Afrique du Sud et le Maghreb vous-ont-ils accueilli une fois pour le plus court séjour que possible ?

Si vous aviez connu l’Afrique, vous connaissez le délestage. Ces coupures interminables de l’électricité, qui des heures durant pour le mieux, ou des jours pour le pis, font de l’Afrique, un continent potentiellement adepte du noir.

Et c’est bien, faute de coupure d’électricité que cette chronique n’aurait jamais existé. Soixante douze heures durant, j’étais, comme nombre d’habitants de ma ville de Parakou, au nord du Bénin, royalement plongé dans un noir, caractéristique pathologique de l’échec des politiques énergétiques de nombre de pays africains.

La crise de l’électricité en Afrique, c’est un mal dangereusement ancré dans le quotidien du continent, mais dont les impacts vont bien au-delà du domaine économique et du développement. Saviez-vous combien sont morts en cause de ces pratiques viscérales ? Aviez-vous une idée de combien sont-ils, ces africains qui perdent mille et une autre opportunités pour raison de délestage ? La réalité est bien triste.

A Parakou, le dernier délestage de la semaine fera encore parler de lui. Et pour des années encore ! Il aura donné la mort à deux jeunes braves individus. Qui, pour s’extraire du noir du délestage se sont asphyxiés par le monoxyde de carbone d’un groupe électrogène. Un drame qui fait grand bruit dans le coin.

Mais l’espoir est permis. Un espoir uniquement, pour ceux dont les pays prennent conscience de la réorientation de la politique énergétique. Un espoir aussi pour ceux qui fondent leur salut/indépendance énergétique sur les énergies renouvelables. C’est un grand potentiel pour l’Afrique avec ce soleil aussi rayonnant que violent qui fait le charme et la richesse du continent. Si solidarité, il y en avait, et objectivité devenait une valeur partagée sur le continent, un pas de géant vient d’être fait pour extraire toute l’Afrique du mal du délestage avec l’annonce de la construction d’un troisième barrage électrique sur le fleuve Congo (Projet Inga 3).

Une Afrique aux mille lumières, le rêve est permis… 

De-Rocher Chembessi

Les inconvénients de l’énergie électrique photovoltaïque en Afrique

 

Nouvelle image (4)Compte tenu du milliard et demie d’habitants n’ayant pas accès à l’énergie électrique, nombreux sont les programmes nationaux et  internationaux qui militent en faveur de l’énergie pour tous. Ainsi, de l’extension du réseau électrique, au recours aux énergies nouvelles, l’énergie de demain doit répondre d’un gage de non intermittence,  d’accessibilité pour tous, et enfin de qualité.

Dans le précédent billet, nous avions évoqué les atouts de l’énergie photovoltaïque, qui constitue la ressource  énergétique la plus abondante au monde. Malgré qu’elle soit considérée comme l’enfant prodige des énergies nouvelles, son développement se heurte à des difficultés de tout genre que nous tâcherons d’évoquer dans ce dernier article.

En économie, l’une des principales variables d’ajustement est le prix. Au centre de la majorité des théories économiques, le prix  et les variations de prix symbolisent tout consentement à payer ou à recevoir, le changement de comportement par rapport à nos habitudes, et enfin notre capacité à adopter ou non une nouvelle technologie. De ce fait, quand bien même le coût de l’énergie photovoltaïque a chuté sur le plan mondial, les prix d’acquisition demeurent élevés pour la moyenne des ménages africains. L’installation solaire, qui est un investissement de long terme n’est pas souvent compatible avec les besoins financiers de court terme des populations. A titre d’exemple, un système de 400Wc qui permet d’alimenter la TV, 6 ampoules, la radio coûte environ 800 000FCFA HT[i], quand le SMIC est de l’ordre de 372 000FCFA/an/personne[ii], soit 744 000FCFA au moins pour un ménage où les deux parents sont actifs. La situation est d’autant plus grave qu’il n’existe pas de mécanisme de subventions, d’exonération fiscale, de prêts bancaires ou de soutien aux besoins de consommation des ménages.

Ensuite, l’énergie électrique pose le problème du stockage. L’énergie électrique ne se stocke guère, mis à part le recours à des barrages pour pomper l’eau en journée et la rétribuer  en soirée. Les énergies renouvelables sont pour la plupart intermittentes. Dans le cas du photovoltaïque, à la tombée de la nuit, le système devient totalement passif dans la mesure où il n’y a plus d’irradiation solaire, malgré que notre demande en énergie soit constante. La solution actuelle réside dans le recours au stockage sous forme de batteries, des piles géantes qui accumulent l’énergie non consommée durant la journée afin de la redistribuer le soir et les jours de faible ensoleillement. Malheureusement, la technologie des batteries n’est pas encore très avancée, dans la mesure où dans les pays développés, elle n’est pas souvent sollicitée (en Europe par exemple, on parle de raccordement au réseau or bien souvent dans les zones rurales africaines, on est en réseau isolé dit « Off Grid »).  Ainsi, le coût du stockage peut représenter jusqu’à 40%[iii] du montant initial de l’investissement, sachant que les batteries ont une durée de vie beaucoup plus réduite que les autres composants, avec un facteur risque en cas de court circuit ou d’erreur d’installation.

D’autre part, en l’absence d’organismes de conformité, de normes définies et appliquées, et d’un marché de consommation bien identifié, le secteur énergétique électrique en amont[iv] est peu identifié des grands  industriels mondiaux. La plupart des matériels utilisés sont  importés et utilisés sur la base de réglementations des pays exportateurs. Etant donné également que les réseaux présentent souvent des déviances (le cas des multiples baisses de tension, des surtensions, et des coupures non programmées), l’utilisation qui en découle devient impropre aux données d’utilisation du constructeur. Cette question va de paire avec le manque de compétence locale pour assurer le fonctionnement des installations, ce qui explique pourquoi la plupart des principaux projets solaires furent des échecs. Le rôle de la recherche et du développement, précédemment évoquée dans un article de TerangaWeb,  ainsi que de l’innovation pour un marché africain de consommation, compte tenu des ses particularités et de ses attentes devient alors un pilier phare du déploiement énergétique.

Enfin, un des principaux obstacles, ou du moins une ouverture de réflexion représente le duopole public-privé. L’énergie est un bien stratégique où la géopolitique  témoigne de l’importance des enjeux qui en découlent. Les investissements énergétiques sont très onéreux, et l’état actuel des réseaux et infrastructures dans les pays africains est synonyme des problèmes auxquels font et feront face les pays africains. L’implication du secteur privé s’avère donc nécessaire, pour dynamiser et pérenniser la filière, bien qu’à l’origine le secteur de l’énergie soit réputé pour être des plus monopolistiques. L’Etat, à mon avis se devra donc d’être un intermédiaire d’échange, régulateur et maitre d’œuvre des feuilles de route énergétique, en ayant toujours à l’esprit qu’économiquement non viable, l’énergie devra toujours être socialement disponible pour tous.

 

                                                                                                        Leomick SINSIN

 

 


[i] Il s’agit d’une moyenne recensée sur les installations au Bénin, et de mon retour d’expérience

 

 

 

 

 

[ii] 31000 FCFA (environ 48€) par mois

 

 

 

 

 

[iii] Revoir le précédent billet sur la décomposition du CAPEX d’une installation solaire

 

 

 

 

 

[iv] L’amont, tel que définit ici, concerne principalement les composants tels que les onduleurs, les régulateurs et les données de fréquence pour le réseau.

 

 

 

 

 

La facture énergétique, un frein pour une bonne performance économique de l’Afrique ?

2013_03_AFS_energy-growth_img L’énergie est depuis longtemps au cœur d’enjeux géopolitiques et économiques qui s’articulent du local au mondial. Ainsi, la pénurie énergétique qui menace le monde pourrait sans doute avoir des impacts importants sur l’Afrique. Dotée d’un potentiel important, elle est courtisée par tous les pays industrialisés, les entreprises pétrolières et nucléaires, et les producteurs de biocarburants. De ce fait, l’Afrique tend à devenir le principal fournisseur du monde. Ainsi, elle compte au moins 16 pays producteurs de pétrole dont les plus importants  sont le Nigeria (2,5 millions de baril/jour), la Lybie (environ 2 millions de baril/jour), l’Algérie (1,9 millions de baril/jour), et l’Angola (1 million de baril/jour). Cependant le continent n’est pas à l’abri de cette famine énergétique qui s’annonce.

Importante réserve mondiale d’or noir convoitée, l’Afrique est cependant très dépendante du pétrole venant de l’extérieur (notamment le carburant et le gaz) : c’est un paradoxe africain.

2013_03_AFS_energy-growth_imgi Alors qu’elle fournit au monde entier du pétrole brut, elle doit importer l’énergie nécessaire pour assurer sa consommation énergétique (production d’électricité, gaz butane, carburants,…). Le cas le plus palpant est celui du Nigéria qui malgré son statut de plus grand producteur africain n’arrive pas à assurer sa sécurité énergétique notamment à cause de ses raffineries défectueuses. Le continent dispose de plusieurs raffineries ; mais la production reste largement en deçà de la capacité installée, du fait de la mauvaise gestion.[1] Cette production ne sert dans une moindre mesure qu’à alimenter la demande  intérieure en constante progression estimée à près de 1,6 millions de baril/jour en  2012.[2] Dès lors, les pays Africains doivent recourir aux importations de produits raffinés pour combler ce déficit de production.

 

2013_03_AFS_energy-growth_imgiiLe continent tend à prendre son envol vers le développement (perspective de croissance 2013 à 5% selon la BAD) avec l’émergence du secondaire et la tertiarisation prononcée de son économie mais sa dépendance face à l’extérieur pour l’énergie pourrait ralentir le processus de rattrapage du continent. En effet, si la richesse qui se crée sert à assurer, en partie, une facture énergétique (plus de 10% en moyenne des valeurs des importations) qui tend à s’alourdir (la rareté de l’or noir dans les prochaines années devraient en renforcer le prix conjuguée à une demande croissante du continent), alors les marges de manœuvre pour une politique économique efficiente et efficace (indépendane de l’aide extérieure) seraient sans doute restreintes. La vente de brut est une source importante de devises pour le continent, grâce à la performance des industrie extractives, qui permet de maintenir un niveau de croissance assez élevé sur la dernière décennie cependant elle subit assez bien la volatilité des cours du brut, notamment en 2008 et 2009.

2013_03_AFS_energy-growth_imgiiiHormis les échanges de produits pétroliers, le continent dégage un solde commercial moins déficitaire (cf. figure ci-après). Partant de ce constat, si les exportations de brut devraient se poursuivre, la tendance pourrait s’inverser au profit du continent même si un effet pervers lié à la demande pourrait se créer. En effet, la demande inhibée de produits pétroliers[3] peut se reporter sur d’autres biens, notamment les produits alimentaires, les machines, les automobiles, induisant ainsi une hausse des prix intérieurs et créant une entorse au développement de certains secteurs de l’activité économique.

2013_03_AFS_energy-growth_imgiiiiProduire soi-même ou changer de sources d’énergie (le solaire par exemple) seraient des solutions envisageables. Cependant, créer ou renforcer les raffineries déjà présentes nécessiteraient des investissements supplémentaires auxquels les pays ne sauraient consentir surtout qu’ils mènent de front une lutte pour doter le continent d’infrastructures adéquates et lutter contre la pauvreté.  Le recours à d’autres sources d’énergie comme le solaire, le charbon, l’éolienne, l’hydroélectricité qui tendent à faire l’unanimité sur le continent (nécessitent tout autant des investissements importants). Par ailleurs, ces nouvelles technologies pourraient freiner la dynamique du secteur secondaire (qui revêt une grande importance dans cette phase de décollage de l’Afrique) et dont la structure productrice repose énormément sur le pétrole. L’Afrique serait-elle donc condamnée à s’appuyer sur l’énergie importée ?

Il serait tout d’abord nécessaire d’évaluer les impacts de cette lourde facture énergétique sur l’économie africaine et de penser à la mise en place d’un mix énergétique au lieu d’un virement radical d’un type d’énergie à un autre. En plus, un renforcement du partenariat public-privé, pourrait éviter d’avoir recours à des prêts ou à l’aide extérieure. Cependant, la réflexion menée autour de l’internalisation de la production énergétique (sur la base d’autres sources) pourrait induire le continent dans un cercle encore plus vicieux. Ceci d’autant que nombre de pays Africains sacrifient leur agriculture au profit de cultures destinées à la production de biocarburants (Caoutchouc, Noix de Cajou, Hévea, …) destinés à l’extérieur (Chine, Inde, Brésil) au lieu d’être transformées sur place pour substituer les importations de carburants. Le cercle vicieux pourrait encore se recréer : Du brut exporté pour du carburant importé plus cher, passerait-on à l’exportation de produits agricoles pour du biocarburant importé ?

Ananou Foly


[1] 45 raffineries pour une capacité totale théorique de 2,8 millions de baril/jours

 

 

[2] Elle pourrait atteindre 2,5 millions de baril/jour d’ici 2025 selon le CITAC (Continuous Improvement Training and Consultancy)

 

 

[3] La diminution de la part des importations de produits pétroliers face une poursuite d’exportations de brut est créateur de richesse, du fait de l’excédent de la Balance Commerciale. La richesse qui ainsi se crée est une motivation à l’augmentation de la consommation (notamment de qualité).

 

 

Lumière sur l’Afrique : le futur de l’énergie solaire

 

 

Soleil sur l'AfriquePour tout novice, utiliser l’énergie du soleil pour couvrir ses besoins en électricité paraît une évidence. L’Afrique, avec 5 à 7 kilowatts d’énergie solaire au mètre carré, semble propice au développement de cette énergie renouvelable.[1] Face au coût des technologies appropriées, quels facteurs pourront contribuer au développement de la filière solaire en Afrique ?

Rappelons tout d’abord certains faits. Les mix énergétiques africains sont globalement plus verts que ceux des pays européens. Par exemple, la composition énergétique des Pays-Bas ou de l’Italie comprend environ 95% d’énergies carbonées (pétrole, gaz, charbon).[2] Les pays d’Afrique subsaharienne quant à eux consomment 73,5% d’énergies fossiles, majoritairement en provenance de l’Afrique du Sud, fortement dotée en charbon. La part conséquente de l’hydraulique qui représente 22,8% de la production énergétique, soit 96,8% de l’énergie renouvelable sur le continent, explique ce bilan.[3] Mais la forte croissance de l’éolien et du solaire (respectivement 66% et 22,8% en 2010 et 2011) invite à prédire un changement rapide dans la structure énergétique africaine.[4]

Entre le Maroc et l’Afrique du Sud, il y a bien sûr tout un continent ! 54 pays, autant de politiques énergétiques. Il y a d’ores et déjà en Afrique de multiples « bonnes pratiques » mutualisables autour de la technologie solaire, et les défis à relever sont souvent de même nature.

De l’énergie solaire, plus d’autonomie

L’exemple du Maroc, dépendant à 97% de l’approvisionnement énergétique extérieur, illustre une forte volonté politique de réduire le déficit commercial creusé par l’importation d’énergies fossiles.[5] Pour atteindre l’objectif de 2.000 MW d’énergie solaire d’ici à 2020, le Maroc s’est lancé dans la construction de la plus grande centrale photovoltaïque à concentration du monde à Ouarzazate. [6]

Tous les pays ne font certes pas le choix du solaire pour verdir leur énergie. Il n’empêche qu’aujourd’hui, la filière photovoltaïque reste privilégiée dans l’électrification rurale, à hauteur de 122 GWh pour le continent en 2011.[7] Si l’électricité ne doit pas rester un luxe, le solaire permet de résorber les inégalités ville-village en la matière.

En Afrique, l’énergie solaire produite est consommée directement sur place, alors que la filière solaire française s’est principalement développée par la revente au réseau électrique. L’autonomie électrique ainsi générée offre d’ailleurs un courant plus stable aux utilisateurs que celui des réseaux nationaux africains, fréquemment coupés en raison de la vétusté du système. L’installation solaire tient également compte des besoins propres à l’activité. Dans le cas d’un bâtiment administratif, cela conduit à n’installer que de petites batteries et à réduire fortement le prix de revient.

Des blocages politiques

Des difficultés subsistent, qui demanderont des politiques énergétiques volontaristes pour être dépassées. Une vision de long-terme s’avère primordiale, tant pour orienter les investissements que pour démocratiser ces nouvelles technologies.

Au Congo par exemple, une seule entreprise nationale est engagée dans le secteur et les marchés publics représentent la majeure partie de son activité.[8] Le milieu politique est alors à un pas, et tous les travers de corruption et de lenteur administrative entravent, de fait, le développement plein et entier du solaire.[9] Il est vrai qu’une usine de production et d’assemblage chinoise va être ouverte au Congo…dans le village du Président de la République.[10] Les investissements congolais en faveur du solaire sont encore trop liés à des intérêts particuliers pour connaître un véritable essor.

Dans un tel contexte, le prix d’achat et d’installation reste très onéreux pour le particulier et les entreprises. La Tanzanie fait figure de précurseur en matière d’incitations fiscales, puisque le gouvernement vient de supprimer les taxes et droits de douanes sur les panneaux solaires importés.[11] Reste à savoir quels marchés vont réellement se créer localement. Malgré l’entrée fulgurante des producteurs chinois en 2007 sur le marché et la réduction drastique des prix qui en a découlé, l’épargne nécessaire pour acheter un kit solaire dépasse bien souvent les ressources des familles en milieu rural.

Des évolutions à suivre

L’entrepreneur congolais témoigne d’un changement des mentalités. Il y a dix ans, arrivant dans un village et installant l’électricité solaire, il était pris pour un magicien dans le meilleur des cas, pour un sorcier bien souvent. Aujourd’hui, l’énergie solaire est mieux comprise, acceptée…et même convoitée si l’on s’en tient aux nombreux actes de vandalisme dont sont victimes les installations. Plus inquiétant cependant, l’absence de contrat de maintenance. Dans un pays où le sable et la poussière sont très présents, cela pose un sérieux problème de durabilité pour les investissements dans le solaire.

Un mot pour conclure

Le développement énergétique durable est aujourd’hui une nécessité sur tous les continents. Plus particulièrement encore en Afrique, puisqu’il engendrera à la fois essor économique, sécurité et indépendance énergétiques. Les dispositions nationales orientent la composition du mix énergétique national, en incitant à investir dans un type d’énergie. A l’instar du projet Dersertec au Maghreb, véritable pari qui va permettre d’approvisionner l’Europe à hauteur de 15% de ses besoins énergétiques, le risque existe également que ces nouvelles ressources africaines soient exportées abusivement et ne profitent pas directement à la population. La bonne répartition et l’usage destiné à l’énergie ainsi produite est, une fois de plus, entre les mains des décideurs politiques

 

Véra Kempf



[1] « L’Afrique parie sur l’énergie verte », Slate Afrique, 06/11/2012, http://www.slateafrique.com/271/electricite-energie-verte-eoliennes-panneaux-solaires, consulté le 20/03/2013 à 18h

[2] « L’énergie solaire après Fukushima : la nouvelle donne », Louis Boisgibault, Editions Medicilline, 2011, p.22

[3] La production d’électricité d’origine renouvelable : détails par région et par pays », Chapitre 3, 14ème inventaire, Observ’ER, Credit Agricole, EDF.

[4] Voir infra.

[5] « Plan solaire : le Maroc à l'avant-garde de l'électricité verte dans la région », Agence Française de Développement, 2012, http://www.afd.fr/home/pays/mediterranee-et-moyen-orient/geo/maroc/projets-maroc/energie-maroc?actuCtnId=88821, consulté le 20/03/2013 à 18h

[6] « Le Maroc s’apprête à devenir “un des phares de la carte solaire mondiale” », Achnoo.com Portail d’informations sur le Maroc, http://achnoo.com/2013/01/31/le-monde-le-maroc-sapprete-a-devenir-un-des-phares-de-la-carte-solaire-mondiale/ consulté le 20/03/2013 à 18h

[7]« La production d’électricité d’origine renouvelable : détails par région et par pays », Chapitre 3, 14ème inventaire, Observ’ER, Credit Agricole, EDF.

[8] Entretien réalisé à Pointe-Noire le 19/03/2013 avec le Directeur général de CAGIDIAX, http://cagidiax.net/

[9] Selon les dires de l’entrepreneur

[10] « Congo : la Chine investit dans le solaire », Mediaterre, 01/12/2011, http://www.mediaterre.org/afrique-centrale/actu,20111201190246.html, consulté le 21/03/2013 à 19h

[11] « Energie renouvelable : L’Afrique bientôt fournisseur énergétique de l’Europe ? », The Independent, Londres , 25 août 2009

 

Un projet d’avenir : Le CSP en Afrique du Sud

Les espoirs suscités par les déclarations des gouvernants africains quant à leur volonté de développer les énergies renouvelables (autres que l’énergie hydraulique) sont souvent douchés par le manque de stratégie ambitieuse et de réalisations concrètes mises en place dans leur pays. Dans ce contexte, il est important de souligner les actions sur le continent qui vont dans le sens d’une utilisation accrue de ces énergies pour soutenir le développement auquel aspirent les populations africaines.

Dans ce domaine, différents projets sont en cours de réalisation sur le continent, notamment dans le domaine solaire. Parmi les plus importants, figure le projet de centrale solaire CSP (Concentrated Solar Power Plant) prévu à Upington en Afrique du Sud. Le rendement espéré de cette centrale solaire, de type thermodynamique, est compris entre 60% et 65% et il est prévu qu’elle fournisse 100 MWe. En comparaison, les centrales thermiques à cycle combiné ont un rendement de l’ordre de 60% et 100 Mwe, c’est la consommation d’une ville de 100 000 habitants avec des standards de vie européens.

Certes la puissance prévue pour cette centrale ne représente qu’une infime partie des 45 000 MW environ de capacités installées en Afrique du Sud mais sa réalisation constitue une étape importante dans la volonté de l’Afrique d’utiliser toutes ses potentialités pour assurer son développement.

En effet, la centrale CSP, participera à satisfaire la demande croissante d’électricité en Afrique du Sud. Selon les prévisions de la compagnie électrique nationale ESKOM, cette demande atteindra 80 000 MW en 2025, soit le double de la demande actuelle. Cette centrale, si elle fonctionne normalement en base comme prévu, constituera un exemple de la fiabilité de ces technologies tant critiquées sur cet aspect. L’intégration de cette technologie dans le SAPP (équivalent du WAPP en Afrique de l’Ouest) sera donc envisageable, vu le potentiel de la région estimée à 20 000 MW.

De plus, cette centrale constitue un pas important dans le développement de cette technologie (CSP) parce que c’est le premier projet au monde d'une telle taille (100 MWe) avec une technologie de miroirs pour concentrer la chaleur, deux tours de refroidissement, utilisant des sels fondus comme fluide de transfert et un centre de stockage thermique. L’Afrique, à travers l’Afrique du Sud, peut donc être considérée comme pionnière en la matière.

Dans un pays où plus de 90% de la production électrique est faite à partir de charbon avec tous les impacts négatifs sur la production de gaz à effet de serre que cela comporte, un tel projet est en ligne avec les engagements de l’Afrique du Sud de promouvoir un développement à faible intensité carbonique. Ce projet permettra ainsi d’augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique sud-africain, et de faire un premier pas vers la réduction de 44% à horizon 2025 des émissions de gaz à effet de serre prévue dans la stratégie du pays pour le climat (Climate Change Response Strategy).

Enfin, le fait qu’un tel projet, d’une valeur de 881.154.380 UAC[1], soit financé par divers organismes tels que la BAD, la Banque Mondiale, l’AFD, KFW et la BEI peut être perçu comme un gage de sérieux et de professionnalisme (s’il en fallait encore un ) d'ESKOM. C’est bien la preuve que lorsque les Africains allient compétence et rigueur, ils peuvent décrocher des financements comme n’importe quelle entreprise crédible. Le coût relativement élevé du projet (2,5 fois le coût du MW nucléaire installé par exemple) doit être relativisé au vu du potentiel effet de série envisageable s’il s’avère concluant et du nombre d’emplois qu’il va générer dans la région (jusqu’à 2000 emplois pendant la phase de construction).

En conclusion, il est important d’encourager l’initiative du gouvernement sud-africain dans la mesure où elle permet à l’Afrique d’exploiter ses immenses richesses, d’espérer un leadership dans ce domaine stratégique et de montrer la voie aux autres pays Africains. En espérant que ces derniers s’en inspirent…

Stéphane MADOU


[1] 1 UAC= 1 DTS = 1,42927 USD