La femme africaine face aux défis de l’éducation et du développement

Par Christian Dior MOULOUNGUI, philosophe, enseignant de philosophie et doctorant à l’Université Omar Bongo (Libreville/Gabon) cdmouloungui@gmail.com

Résumé

Cet article étudie l’idée selon laquelle la femme africaine subsaharienne doit sortir de son état de minorité. Asservie, stigmatisée et affaiblie par le poids de l’histoire, l’esclavagisme et le colonialisme, elle doit s’affranchir des ornières de cet état tutélaire. Il est commode qu’elle prenne l’initiative de se cultiver, de se former et de s’instruire. Dans ce contexte, la société ne doit plus la résumer, comme pour tout parent et conjoint, à la simple femme africaine centrée sur les logiques du foyer, et réfractaire à l’idée de rencontrer l’homme providentiel, voire s’enraciner aux relations clientélaires. Comme le note Simone de Beauvoir, « Les parents élèvent leur fille en vue du mariage plutôt qu’ils ne favorisent son développement personnel » ([1]). Il s’agit maintenant qu’elle revête l’armure de la femme africaine éduquée, dynamique et susceptible de comprendre la nécessité de répondre aux attentes du continent, et de faire face aux défis mondiaux. De cette façon, elle pourra effectivement saisir les ressorts d’appropriation d’être actrice dans le processus de développement en Afrique. On comprend mieux, à l’aune des dynamiques éducatives, que la prise de conscience de la femme africaine subsaharienne, en tant que femme éduquée, formée et compétente, doit être plus que jamais une urgence pour l’Afrique subsaharienne.    

Mots-clés : Femme africaine, Afrique, Raison, Éducation, Instruction, Formation, Développement. 

Abstract

This article studies the idea that sub-Saharan African women must emerge from their state of minority. Enslaved, stigmatized and weakened by the weight of history, slavery and colonialism, she must use reason to free herself from the ruts of this tutelary state. It is convenient for her to take the initiative to cultivate, train and educate herself. In this context, she must no longer be reduced, as for any parent and spouse, to the simple African woman centered on the logic of the home, and resistant to the idea of ​​meeting the providential man, or even putting down roots in client relationships. . As Simone de Beauvoir notes, “Parents raise their daughter with a view to marriage rather than promoting her personal development.” It is now a matter of putting on the armor of the educated, dynamic African woman capable of understanding the need to meet the continent’s expectations and face global challenges. In this way, she will be able to effectively grasp the sources of appropriation of being an actor in the development process in Africa. We understand better, in the light of educational dynamics, that the awareness of sub-Saharan African women, as educated, trained and competent women, must be more than ever an emergency for sub-Saharan Africa.

Keywords: African woman, Africa, Reason, Education Instruction, Training, Development.

Introduction

            « L’Afrique n’a pas d’histoire ; une sorte de légende vaste et obscure l’enveloppe. […] C’est ce qui est absolu dans l’horreur. Le flamboiement tropical en effet, c’est l’Afrique » ([2]). Cette assertion de Victor Hugo prononcée, dans Discours sur l’Afrique, le 18 mai 1879, au cours d’une fête de la commémoration de l’abolition de l’esclavage aux côtes de Victor Schœlcher[3], met en évidence la marginalisation et la stigmatisation de l’Afrique par les Occidentaux. Pour eux, l’Afrique est un continent que l’Europe doit occuper et civiliser. D’après Emmanuel Debono et Stéphane Nivet, « Ce discours montre un homme acquis à la pensée raciale qui domine alors et qui, à aucun moment, ne se montre capable d’en critiquer la portée et les conséquences politiques » ([4]).

        Face à ces propos négatifs traduisant les logiques culturelles du racisme et la discrimination à l’égard des Africains, les femmes noires ne sont pas exemptées. Selon l’imaginaire attaché à l’Afrique et ses habitants ([5]), les femmes africaines du Sud du Sahara ne sont pas assez entrées dans l’histoire. Pourquoi ? Parce qu’elles sont, depuis le XVIe siècle jusqu’à nos jours, souvent enduites par de multiples stéréotypes et préjugés venant de l’Occident. Autrement dit, les croyances de l’imaginaire occidental réduisent les femmes noires à la couleur de leur peau et de leurs cheveux, à l’objet sexuel et leur attribuent le caractère animal. Selon Yann Le Bihan, dans L’ambivalence du regard colonial porté sur les femmes d’Afrique noire

Du XVIe siècle jusqu’à nos jours, les stéréotypes, croyances et images occidentales attachées à la « femme noire », sont caractérisés par leur remarquable permanence. Ils forment autant de représentations traversées par une ambivalence fondamentale se traduisant pars des aptitudes occidentales essentiellement masculines de fascination et/ou de répulsion selon le rapport entretenu par les Européens avec leurs propres société et, en miroir, selon leur représentation valorisée de la  « nature » ([6]).

          Même dans l’imaginaire africain, certains hommes (campagnards ou citadins) ont une conception statique de la femme africaine subsaharienne, celle de la femme au foyer[7], réduite au silence et à la soumission. Comme le note Aradjouman Modeste Boro, « on pense souvent que la femme africaine n’a de valeur que dans le foyer ; elle n’est qu’une simple domestique » ([8]). Ces différents stéréotypes et préjugés sont relativement à l’origine de la catégorisation de l’image des femmes africaines subsahariennes au cours du temps. Comment comprendre alors, même dans les temps modernes (au XXIe siècle), que les femmes africaines font toujours face à la marginalisation, au racisme, au sexisme et à la manipulation ? Pour Fatou Sarr, la « vision véhiculée par les travaux des Occidentaux et même des Africains, tendant à considérer les femmes du continent comme des objets manipulables entre les mains des hommes » ([9]).  Dès lors, quelle est réellement la place de la femme africaine subsaharienne dans la société ? Face au développement de l’Afrique, au-delà des stéréotypes liés à la couleur de sa peau, la femme africaine a-t-elle les défis à relever ? Peut-on dire que celle-ci est condamnée à subir les humiliations et les discriminations ?

        Admettre la logique selon laquelle les femmes africaines subsahariennes sont condamnées au fatalisme, et elles n’ont pas les défis à relever serait faire obstruction à l’évolution de l’humanité. Parce qu’elles ont une valeur inestimable dans le système traditionnel et moderne de l’Afrique, au-delà des préjugés dont elles font face aujourd’hui. En Afrique et ailleurs, nonobstant qu’elle soit considérée comme une source de procréation, la femme africaine subsaharienne doit maintenant occuper une place prépondérante dans le développement de l’Afrique, et faire face aux défis mondiaux. A cet effet, les Africains, éduquez vos femmes, et mariez-les à l’instruction. En contexte africain, c’est un changement de paradigme de l’image des femmes noires stigmatisées, qui consiste dorénavant à favoriser leur épanouissement, selon leur liberté de choix et en fonction de leurs aspirations. Explicitement dit, les femmes africaines doivent « ouvrir l’esprit, se libérer des contraintes, trouver sa source de créativité et sa passion » ([10]), estime Rameline Kamga. Dans ce cas de figure, elles peuvent effectivement être au centre du développement économique, social, culturel, scientifique et technologique de l’Afrique. Il s’agit donc de promouvoir l’inclusion et la participation de la femme africaine dans la réalisation des projets de développement en Afrique. Dans cette perspective, les gouvernements africains ont la responsabilité d’accompagner les femmes africaines qui aspirent à la formation et au leadership, en mettant en place les politiques d’assistance et de financements appropriés. Dans cet article, nous aborderons plusieurs axes, à savoir : l’histoire de la femme noire (I), la carrière du mariage (II), la femme africaine face aux défis d’éducation et de développement (III) et la femme africaine et le défi politique (IV). 

1- L’histoire tumultueuse de la femme noire

          Les femmes noires ont une histoire jonchée de tristesse et de mélancolie. Les mouvements d’esclavage[11], de colonisation[12] en Afrique subsaharienne, de ségrégation[13] aux États-Unis et d’apartheid[14] en Afrique du Sud sont autant d’éléments qui justifient la triste réalité des Africains, en général, et des femmes noires, en particulier. Selon Jacques Brasseul, « La période coloniale en Afrique a duré 70 ans, de 1890 à 1960, elle a eu impact énorme sur l’Afrique. C’est un processus d’annexion du continent africain par les Occidentaux » ([15]). En effet, les femmes noires n’étaient en marge de la déportation lors de l’esclavage. Parce que, parmi le nombre des Africains déportés, les femmes représentaient environ un tiers. Elles travaillaient dans l’exploitation des plantations des cannes à sucre : « Parmi les 13 à 15 millions d’êtres humains déportés d’Afrique vers les colonies pour l’exploitation intensive des plantations de canne à sucre entre autres, les femmes représentaient environ un tiers » ([16]). En outre, il convient de rappeler que les femmes noires occupaient aussi d’autres fonction, hormis le travail de la coupe des cannes à sucre, tels que servantes, nourricières et cuisinières : 

Dans les colonies, les femmes sont partout. Dans les champs, c’est à elles que l’on attribue les travaux les plus durs, les plus usants qu’il s’agisse de la coupe de la canne ou nettoyer les plantations de mauvaises herbes. Elles ont également intégré les maisons ou les habitations en occupant les fonctions de servantes, de cuisinières, de nourrices ([17]).

         Pour Chimamanda Ngozi Adicie, romancière nigériane, avec les colons, « la place de femme était la cuisine et la chambre » ([18]). Ainsi, la marginalisation de la femme noire a un lien de consubstantialité avec son histoire aussi dure que tragique, au-delà de toute dissemblance. Catherine Coquery-Vidrovitch, dans son ouvrage Les Africains. Histoire des femmes d’Afrique subsaharienne du XIXe siècle, affirme : « Les femmes d’Afrique noire ont eu, et continuent d’avoir, sous des formes qui ont varié au cours du temps, la vie dure » ([19]). Il faut noter que depuis l’esclavage, en passant par la colonisation et jusqu’aujourd’hui, la femme noire n’est pas à l’abri de multiples oppressions et autres formes de discriminations. Parce qu’« elles sont esclaves, elles sont femmes, elles sont noires » ([20]). Makhtar Diop pense que « Depuis longtemps, les femmes et les jeunes filles en Afrique font l’objet des discriminations, phénomène qui affecte leur famille, leur communauté et leur pays tout entier » ([21])Cette situation discriminatoire a eu un impact négatif sur l’être des femmes africaines d’hier et celles d’aujourd’hui. Avec pour conséquences, elle se sent inférieure, affaiblie et complexée. Ce qui fait en sorte qu’elle soit affectée et ait des difficultés à s’épanouir, et donc à relever les défis liés à son éducation et sa participation à l’essor du continent. Car : « Jusqu’aujourd’hui, la question se pose encore des conséquences quant à la considération portée aux femmes noires, mais aussi notamment quant aux rapports entre hommes et femmes » ([22]).

II. La carrière du mariage 

         En Afrique subsaharienne, le mariage est l’un des projets primordiaux pour les jeunes filles au détriment de l’école. Parce qu’elles y voient non seulement comme un moyen pour s’affirmer dans la société, mais également comme une fin en soi pour sortir de la pauvreté. En effet, le rêve des femmes africaines c’est l’appartenance au couple, comme une justification sociale. Le plus important pour elles, c’est « Leur fonction biologique de mère » ([23]), affirme Evelyn Reed. Pour certains hommes, dit-on, il n’est pas contraignant de voir une femme sans métier. Parce qu’ils savent que le métier le plus noble de la femme est le foyer. Simone de Beauvoir, dans Le Deuxième Sexe, le note avec pertinence qu’« il y a aussi celui qui trouve sa femme en rien diminuée parce qu’elle n’a pas de métier. La tâche du foyer est aussi noble, etc. » ([24]). La femme pourrait naturellement considérer le foyer comme une carrière noble. Mais tôt ou tard, dans cette logique, c’est elle qui subira les humiliations lorsque le couple aura des tensions : « C’est moi qui travaille et qui nourris la femme. Sans moi tu seras incapable de gagner ta vie » ([25]).

         Même aujourd’hui, malgré que les femmes intègrent les universités, les administrations, le domaine professionnel et technique, si elles ne sont pas mariées, elles n’auront pas leur dignité. Parce que « la femme mariée est autorisée à se faire entretenir par son mari : elle est en outre revêtue d’une dignité sociale très supérieure à celle de la célibataire » ([26]),affirme Simone de Beauvoir. Dans ces conditions, c’est l’appartenance au couple qui confère à la femme sa carrière honorable : « On ouvre aux femmes les usines, les bureaux, les facultés, mais on continue à considérer que le mariage est pour elles une carrière des plus honorable » ([27]). Cette vision de voir en la femme qu’un être de foyer a engendré plusieurs conséquences chez la femme noire. Notamment, l’état de minorité, la paresse dans son processus d’éducation, le complexe d’infériorité face la domination masculine, l’acceptation de son corps comme un capital à exploiter, l’essor du mariage précoce, etc. 

          De plus, les raisonnements déviants et passifs tels que sans le foyer, la femme n’est rien. Même si elle ne réussit pas à l’école, elle aura un bon mari qui prendra soin d’elle. C’est pourquoi, aujourd’hui, la jeune fille africaine et ses parents n’ont qu’un seul souhait, celui de la recherche du prince charmant et du beau-fils providentiel. Simone de Beauvoir dit en effet : « Tout encourage la jeune fille à attendre du prince charmant fortune et bonheur plutôt qu’à tenter seule la difficile et incertaine conquête », et « Les parents élèvent leur fille en vue du mariage plutôt qu’ils ne favorisent son développement personnel » ([28]). En Afrique, plusieurs parents pensent qu’envoyer leurs filles en mariage est plus rassurant économiquement que de leur permettre d’aller à l’école. C’est l’une des raisons qui expliquent la montée en puissance du phénomène des mariages précoces en Afrique. Selon le Fonds International des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), « L’Afrique compte 130 millions d’enfants mariés, qu’il s’agisse de filles de moins de 18 ans déjà mariées ou de femmes adultes qui ont été mariées dans leur enfance. Aujourd’hui, l’UNICEF a lancé des rapports continentaux et régionaux sur le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines en Afrique » ([29]). Pour l’UNICEF,

Le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines constituent une violation des droits de l’enfant. Pourtant, dans de nombreuses communautés du continent, les filles continuent d’être exposées à l’une de ces pratiques, voire aux deux. Le mariage d’enfants est présent sur tout le continent, avec les niveaux les plus élevés dans le Sahel et dans certaines poches d’Afrique centrale et orientale ([30]).

III. Les défis de l’éducation et du développement

          Si pour Evelyn Reed, « Ce n’est pas la nature, mais la société de classes, qui a abaissé les femmes et élevé les hommes. Ce n’est pas la nature, mais la société de classes, qui a volé aux femmes leur droit à prendre part aux plus hautes fonctions de la société et qui a choisi de mettre l’accent sur leurs fonctions animales liées à la maternité » ([31]), alors on comprend mieux que l’éducation est inexorablement l’une des solutions pour que les femmes africaines connaissent leurs droits fondamentaux, s’épanouissent, font face aux inégalités sociales, sortent de l’emprise de la pauvreté et participent au développement durable de l’Afrique. 

Valèse Mapto Kengne note que « La scolarisation, l’éducation et la formation sont à la fois une nécessité et une contrainte pour l’évolution des pays en développement, car le développement durable exige l’accès au savoir et à la culture moderne et technologique » ([32])Comment les femmes africaines peuvent-elles faire face à l’inégalité des sexes, à la pauvreté, au complexe d’infériorité et au développement du continent si elles n’ont pas un minimum d’éducation ? Selon l’UNESCO, « Dans près de 10 Etats africains, 52 à 95% des filles n’ont pas accès à l’éducation du fait de la pauvreté » ([33]). Le faible niveau d’alphabétisation des femmes en Afrique subsaharienne est très élevé, surtout en milieu rural qu’en milieu urbain. Par conséquent, il constitue l’un des blocages pour le progrès de l’Afrique. Selon Divyanshi Wadhwa, experte en données, groupe de gestion de données sur le développement, Banque mondiale, « avec seulement le taux de 57%, c’est l’Afrique subsaharienne qui accuse le plus faible niveau au monde d’alphabétisation chez les femmes »[34]. Par exemple, entre les années 1990 et 2000, les statiques du taux d’analphabétisme en Afrique subsaharienne se présentent ainsi : « Au Tchad, l’analphabétisme touche 95% des femmes; au Rwanda plus de 57, 2%; en Centrafrique, 87,4% des femmes de plus 10 ans sont analphabètes en zone rurale et  56%  des femmes représentent la population analphabète en zone urbaine…» ([35])En substance, ces différents indicateurs montrent que la scolarisation des filles en Afrique subsaharienne reste un tabou, demeure une problématique. Car :

La scolarisation des filles demeure un problème en Afrique subsaharienne. Les indicateurs de scolarisation de l’Unesco et de la Banque mondiale, de même que les travaux sur la scolarisation des filles en Afrique subsaharienne en font foi. Selon les statistiques de l’Unesco, de l’Unicef et de la Banque mondiale, la scolarisation des filles dans les pays en développement accuse un retard d’au moins 30 ans par rapport à la scolarisation des filles dans les sociétés développées ([36]).

            L’analphabétisme des femmes est encore un phénomène croissant en Afrique subsaharienne, donc il accentue la situation de précarité pour le continent. Ce qui revient à dire que si les femmes ou les jeunes filles africaines subsahariennes croupissent au seuil de l’analphabétisme, alors il sera difficile qu’elles soient en concurrence avec les hommes sur le marché du travail, voire qu’elles s’épanouissent ou qu’elles sortent de la pauvreté. En effet, l’éducation est un facteur substantiel pour leur épanouissement, et leur insertion dans la vie active. Parce que la femme africaine est considérée comme la pièce charnière de la famille. Ce qui sous-entend qu’elle doit se cultiver pleinement, se former et se responsabiliser. Dans cette optique, il faut favoriser la scolarisation des jeunes filles dans les pays africains. Au final, l’objectif de cette action est de valoriser la pleine intégration sociale et économique de la femme, et de promouvoir l’égalité des chances. Claudine Bralet affirme :

L’éducation est un droit fondamental de l’enfant. C’est pourquoi, en 1989, la Convention sur les droits de 1’enfant a fait du droit de  l’enfant au développement et de l’universalisation de l’enseignement primaire en faveur des filles des objectifs prioritaires. Forte de cette Convention, la conférence panafricaine sur l‘éducation pour tous, tenue à Ouagadougou en 1993, a eu pour objectif de donner priorité à l’éducation des filles ([37]).  

Dans le cas contraire, une femme africaine qui n’est pas éduquée est non seulement un potentiel danger pour le patrimoine matrimonial, mais également pour le développement du continent africain. Pour Caroline Fink, dans L’éducation des femmes et le développement en Afrique subsaharienne, « L’éducation des femmes en Afrique subsaharienne est indispensable pour pouvoir façonner les fondements d’un développement durable et le plus équitable possible pour l’ensemble de la population » ([38]). Selon elle,

L’ensemble des organismes internationaux pointent le fait que les femmes sont des vecteurs considérables de développement au sein des pays en développement mais sont bien souvent victimes des coutumes, des visions de la société et des lacunes du droit, ce qui les empêche bien évidemment de pouvoir contribuer comme elles le devraient à l’augmentation de la croissance économique mais aussi du développement, ce qui prive la plupart des pays d’Afrique subsaharienne d’une hausse considérable du bien-être de la population de cette région d’Afrique ([39]).

Partant de là, les gouvernements africains subsahariens ont le devoir d’intervenir dans le processus d’éducation des femmes. Parce que l’éducation est un moyen efficace pour briser la muraille des genres. En contexte africain, elle permet aux femmes de comprendre non seulement les logiques économiques et sociales, mais également de saisir les ressorts de l’inégalité des sexes. Pourquoi ? Dans Le Deuxième Sexe, troisième partie, Simone de Beauvoir pense, en substance, que l’indépendance économique et sexuelle est essentielle pour l’émancipation de la femme en tant qu’un être humain autonome et responsable. Dans ces conditions, l’instruction est l’un des facteurs primordiaux permettant aux femmes africaines de comprendre cette nécessité d’accéder à l’autonomie, comme principe de la pleine réalisation de l’être féminin. Néanmoins, il va falloir mettre à contribution les moyens d’accompagnement pour la formation de ces femmes, afin de favoriser l’accès à l’éducation et à la promotion de la femme. C’est dans l’objectif de faciliter leur intégration dans le processus de développement en Afrique. Cela suppose donc de promouvoir efficacement les politiques d’alphabétisation des femmes africaines au travers le dynamisme et la volonté des actions publiques par le canal du Ministère des Affaires sociales et de la promotion de la femme, du Ministère de la solidarité, du Ministère de la culture, du Ministère de l’Éducation nationale, du Ministère de l’Économie et avec l’appui des organismes nationaux et internationaux (ONG).

 En outre, ces actions publiques peuvent s’appuyer sur les trois points centraux que nous supposons être nécessaires pour l’épanouissement de la femme africaine. D’abord, au niveau des jeunes filles à l’âge de la scolarisation, il faut promouvoir les formations universitaires et professionnelles (universités et grandes écoles) de qualité et à long terme, notamment sanctionnées par les diplômes de Licence, Master et Doctorat dans plusieurs domaines comme enseignement, magistrature, administration, économie, ingénierie, finance, médecine, banque, architecture, énergie, etc. Ensuite, au niveau des jeunes filles de plus de 25 ans avec Brevet d’Études du Premier Cycle et le Baccalauréat général, technologique et professionnel, valoriser les formations professionnelles de 2 à 3 ans en secrétariat, logistique et transport, gestion des ressources humaines, communication, enseignement 1er degré, techniciens, etc (avec les diplômes de BTS, DUT, et autres.). 

Et enfin, au niveau des jeunes filles et femmes analphabètes, mettre en place les cours d’alphabétisation magistraux, suivis des formations professionnalisantes dans les centres de formation, en particulier dans les métiers tels que la couture, la coiffure, le commercial, l’agriculture, l’artisanat, la restauration, l’entretien, conduite, la mécanique, la soudure, etc. Ce processus de formation doit aussi prendre en compte les jeunes filles et femmes africaines qui sont dans les zones rurales, en tenant compte de la planification familiale. Au final, ces différentes formations ne doivent pas faire l’objet d’un aboutissement de l’association des chômeurs, comme c’est le cas dans bon nombre de pays africains, mais plutôt elles doivent obéir à la politique d’insertion centrée sur la formation-emploi. Ce qui permettra sans doute d’assurer à chaque pays africain un développement durable, et l’égalité des genres en matière d’éducation et d’emploi. Par conséquent, dans la mesure où les femmes africaines subsahariennes ont d’énormes potentiels pour booster le développement en Afrique. Par exemple, dans le domaine de l’agriculture, les femmes africaines produisent des denrées alimentaires destinées dans la vente du marché local. D’après Valentine Ambert, « En Afrique subsaharienne, les femmes produisent jusqu’à 70% (voire 80% en Afrique centrale selon la FAO) des denrées alimentaires destinées à la consommation des ménages et à la vente sur les marchés locaux. Elles répondent à une demande alimentaire croissante face à la démographie galopante du continent » ([40]).

Ainsi, pour augmenter la production et maximiser les ventes, non seulement dans le domaine de l’agriculture, mais aussi dans d’autres domaines, les femmes africaines devraient se constituer en association ou en coopérative. A cet effet, celles-ci doivent avoir pour capital les revenus générés par les cotisations mensuelles ou annuelles de leurs membres. A cela s’ajoute les revenus de ventes et subventions financières et matérielles venant des partenaires nationaux et internationaux. 

IV. Le défi politique

         Dans certains pays d’Afrique subsaharienne aujourd’hui, les jeunes filles africaines sont de plus en plus nombreuses à fréquenter les universités et grandes écoles. A ce titre, Valentine Ambert affirme : « De nos jours, pour la première fois, on voit dans un certain nombre d’universités africaines presque autant de filles que de garçons » ([41]). Malgré les préjugés sociaux, cette ouverture au monde du savoir, comme partout ailleurs, permet effectivement de voir que les femmes africaines réussissent dans de nombreux domaines tels que le droit, l’économie, le journalisme, l’enseignement, la médecine, l’ingénierie, etc. Ce qui sous-tend que l’Afrique regorge maintenant de femmes universitaires hautement diplômées, qualifiées et responsables. Mais dans le domaine politique, en dépit des avancées significatives dans certains pays africains, la présence et la participation de femmes dans les instances politiques sont encore hétérogènes, voire insignifiantes, dans l’ensemble du continent. D’après Léa Masseguin, « Avec une moyenne régionale de 23,9% de femmes au Parlement (chambre unique ou basse), l’Afrique subsaharienne se place à la 5e place du dernier classement d’ONU Femmes et l’Union interparlementaire (UIP) derrière les pays nordiques, l’Amérique et l’Europe (pays nordiques inclus et non inclus) » ([42])Pour Laurence Rossignol, « la présence des femmes en politique est loin d’être une évidence et ne résulte pas d’un processus naturel » ([43]). Cette présence de moins en moins de femmes dans les gouvernements et parlements africains montre en suffisance qu’elles demeurent encore marginalisées dans le domaine politique. A cet égard, il reste encore beaucoup à faire : « Certains Etats comptent moins de 5% de femmes parlementaires comme la Mauritanie, Madagascar ou le Niger » ([44]). En effet, il faut noter que : 

Malgré le fait que six pays africains figurent dans le top 20 des pays comportant le plus de femmes au sein de leur Parlement, la participation des femmes au processus politique est encore très faible dans de nombreux pays. Le Mali, la Centrafrique, le Bénin, le Swatini, les Comores et le Nigeria sont les États africains les moins avancés en matière d’égalité entre les femmes et les hommes au sein de la sphère politique ([45])

          Selon les données du groupe de la Banque africaine de développement, la présence des femmes dans les sphères politiques et gouvernementales en Afrique a connu une évolution significative :

La proportion des femmes ministres est passée de 4% à 20%, avec l’Afrique du Sud (45 %), le Cap-Vert (36 %) et le Lesotho (32 %)9 en tête. Au niveau parlementaire, le Rwanda compte près de 60% de femmes et en Afrique du Sud près de 50% des représentants sont des femmes, d’autres pays comme la Namibie, le Burkina Faso, la Tanzanie, le Burundi, l’Ouganda ont près de 30% de femmes. Cette place est déterminante car, c’est là que se joue le changement politique. En Afrique du Sud, les femmes parlementaires ont réussi à faire légaliser l’avortement et pénaliser la violence familiale. En Ouganda, elles ont contribué à l’adoption d’une loi faisant du viol un crime passible de la peine capitale. Même l’investiture suprême a été conquise : au Libéria, au Malawi,  les chefs d’Etat sont des femmes ([46]).

         Ces données illustrent manifestement qu’il est temps que les femmes africaines subsahariennes s’impliquent davantage dans l’organisation politique du continent. Pour ce faire, les gouvernements africains doivent faciliter les mécanismes d’insertion. De plus, les femmes africaines, elles-mêmes, doivent se battre pour accéder à une éducation de qualité, afin de s’imposer dans le leadership ou dans la politique. C’est par l’éducation que l’Afrique a eu de femmes d’affaires, diplômées, militantes féministes qui influencent aujourd’hui le domaine politique. 

Selon Catherine Coquery-Vidrovitch, c’est effectivement l’idéal qui anime les femmes africaines actuelles : « Des femmes d’action, militantes féministes ou femmes d’affaires, cherchent à influer dans le domaine législatif et politique »[47]. Ainsi, il y a quelques femmes africaines qui ont montré le chemin de la réussite dans le domaine de la politique en Afrique. En l’occurrence, Ellen Johnson Sirleaf, qui est la première femme à diriger un pays africain, le  Libéria (2006-2018). Joyce Benda est la deuxième femme à diriger un pays africain, le Malawi (2012-2014). Rose Francine Rogombé, ancienne Présidente du Sénat et présidente par intérim au Gabon en 2009 après la mort d’Omar Bongo Ondimba. Nkosazana Dlamini-Zuma, après plusieurs postes ministériels occupés en Afrique du Sud, est devenue la première femme à diriger la Commission de l’Union Africaine en 2008 succédant au Gabonais Jean Ping. Judith Suminwa Tuluka est devenue la première femme cheffe du gouvernement en République Démocratique du Congo, le 01 avril 2024. L’Afrique a plusieurs potentiels féminins qui excèdent en politique, dans leadership féminin et dans d’autres domaines. Mais que les jeunes filles africaines subsahariennes sachent que l’éducation est l’antichambre de cet essor.  

Conclusion

Au terme de cette analyse, il sied de retenir qu’au-delà des stéréotypes et le préjugé de supériorité masculine, il y a surtout le déficit d’éducation qui constitue l’un des blocages de l’épanouissement de la femme africaine subsaharienne. Ce difficile accès à l’éducation, voire ce phénomène de la déscolarisation ou de l’analphabétisme chez les filles africaines, a plusieurs causes, notamment la pauvreté qui sévit les familles africaines. Chez les filles (battantes et assistées) dont les familles sont pauvres et non instruites, il est difficile d’accéder à l’éducation. Dans la mesure où « avec relativement peu de moyens financiers et d’appui familial, ces filles doivent se débrouiller et concevoir des solutions inédites afin de triompher de l’adversité » ([48]).

Parfois, certaines abandonnent complétement l’école tôt, et d’autres n’y sont jamais allées. Alors que chez les filles (héritières) dont les familles sont instruites et opulentes, il y a plus de chances de persévérer dans les études : « les parents instruits ont de meilleures chances de voir leurs filles, des héritières, persévérer dans leurs études » ([49]). En l’occurrence, la pauvreté affecte les femmes africaines de multiples façons, à savoir : l’incapacité d’accéder à l’éducation et le sentiment d’impuissance face à certains défis, en ce qui concerne la réalisation de leurs projets à court et à long terme. 

Mais il faut noter que celle-ci (pauvreté) est due partiellement aux inégalités sociales et au manque d’opportunités financières auxquelles les femmes africaines font face actuellement. Comment pourraient-elles aspirer aux meilleures conditions de vie si elles sont pauvres (sans formation, éducation et emploi) ? On estime que l’Afrique subsaharienne possède un capital humain exceptionnel, parmi lequel le féminin. C’est pourquoi, les gouvernements africains gagneraient à penser inéluctablement l’engagement des femmes africaines dans la redynamisation économique, sociale, culturelle et politique. C’est une organisation étatique qui intègre le principe d’égalité des genres, et donc favorisant l’essor éducatif, économique et social de la femme africaine. Gouverner ainsi donnerait naturellement la possibilité aux pays africains d’éradiquer la pauvreté, mais aussi d’amorcer respectivement le véritable développement durable en Afrique. 

 Dès lors, si on part de l’idée selon laquelle certains anciens grecs (Platon, Xénophon, Aristote) considéraient l’économie comme une science relevant de l’activité ou de la gestion familiale, alors les femmes africaines, étant les gouvernantes des foyers, assumeraient logiquement et mieux les charges économiques, sociales et politiques dans les pays africains. Plus précisément, les femmes ont la capacité de gestion administrative conséquente, et un véritable sens organisationnel. Toutefois, l’accès à une éducation de qualité est la clé pour booster ce potentiel féminin. Dit autrement, la formation est une voie salvatrice pour l’accomplissement des femmes africaines, donc elle est l’unique voie du progrès de la femme. N’est-ce pas « le bonheur s’accroît lorsque la qualité de la vie peut être améliorée grâce à divers moyens techniques et, en particulier, grâce à l’éducation » ([50]) ? Si l’égalité entre les sexes est aussi une question de pouvoir, alors les femmes africaines subsahariennes auront la pleine responsabilité de lutter pour leur leadership, voire pour leur réussite. Parce que le pouvoir ou la réussite n’est pas acquis d’emblée, mais c’est le fruit d’un long processus impliquant de nombreux efforts et sacrifices. Chez les filles africaines « battantes, la scolarisation est vécue dans le sacrifice, la souffrance et l’impuissance » ([51]). Comme pour dire, « On ne naît pas femme, on le devient » ([52]). En somme, on comprend mieux que nonobstant l’hégémonie masculine, l’avenir de l’Afrique subsaharienne sera entre les mains des femmes : « Multiple et indivisible, l’Afrique sera sauvée par les femmes. […] à Dakar, Bamako, Harare ou Naïrobi. À Djibouti, […] elles s’impliquent plus dans les grands dossiers sociaux – éducation, santé […] Éduquez les femmes, poussez-les vers l’instruction […] » ([53]).

 Christian Dior MOULOUNGUIphilosophe, enseignant de philosophie et doctorant à l’Université Omar Bongo (Gabon),cdmouloungui@gmail.com

Indications  bibliographiques 

Ambert, Valentine, 2021, « Afrique : le rôle sous-estimé des femmes dans le développement », Youmetter, 31 août. 

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              2011, Femme noire en image. Racisme et sexisme dans la presse française actuelle, Paris, Éditions Hermann, 422 p.

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Wadhwa, Divyanshi,  2019, « Alphabétisation des femmes : des progrès, mais toujours pas de parité », Banque mondiale, blog de donnéess, 22 p. 


[1] Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe, les extraits publiés dans Paris  Match, n° 20, 6 août 1949. In La philosophie magazine/Hors-Série, XXsiècle : Les philosophes face à l’actualité, Paris, août-septembre 2008, p. 58. 

[2] Victor Hugo, Discours de commémoration de l’abolition de l’esclavage, 18 mai 1978Voir « Discours sur l’Afrique » de 1879, actes et paroles, Laffont, collection Bouquins, tome 4, p. 1010, cité par Seillan J. m., Aux sources du roman colonial. L’Afrique à la fin du XIXsiècle, Éditions Karthala, 2006, p. 14.

[3] Victor Schœlcher, journaliste et homme politique français, est considéré comme le père de l’abolition d’esclavage en France. Voir « Victor Schœlcher (1804-1893) – Une vie, un siècle [archive] », sur senat.fr (consulté le 23 mars 2024). 

[4] Emmanuel Debono et Stéphane Nivet, « 18 mai 1879 : Victor Hugo se plante sur la colonisation », Mémoire et histoire, Licra, 18 mai 2021. 

[5] Yann Le Bihan « L’ambivalence du regard colonial porté sur les femmes d’Afrique noire », Cahiers d’études africaines, Éditions OpenEdition, 1 septembre 2006, p. 513.

[6] Ibid., p. 513.

[7] Nous relevons ici le caractère contraignant de la femme dans la société africaine traditionnelle, qui perdure aujourd’hui. Celui-ci pense que le prestige d’une femme  ou épouse se mesure au foyer. Notamment, au nombre d’enfants procrée, qu’elle donne au lignage, surtout dans le système patrilinéaire. Mais aussi à la soumission aliénante au mari, les droits à l’éducation compromis et allant uniquement dans le sens de promouvoir la domination masculine, adepte des travaux champêtres et ménagés, etc. Pa ailleurs, il faut maintenant voir la femme africaine subsaharienne comme les êtres disposant de plusieurs potentiels, et donc capables de s’affirmer. 

[8] Aradjouman Modeste Boro, « La place de la femme dans le système traditionnel africain », Institut Supérieur Privé de Philosophie, Éditions Maison Lavierie, 03 juin 2014.  

[9] Fatou Sarr, « Féminisme en Afrique occidentale ? Prise de conscience et luttes politiques et sociales », in Vents d’Est, vents d’Ouest : Mouvement de femmes et féminismes anticoloniaux, Genève, Éditions Graduate institute Publications, 2009, p. 1.

[10] Rameline Kamga, « Le leadership réside en la capacité de provoquer le changement grâce à une motivation positive », Magazine Femme, n° 40, août 2012, p. 2

[11] L’Afrique subsaharienne a connu l’esclavage entre 1500 et 1900. 

[12] Depuis la conférence de Berlin de 1884-1885, le continent africain est divisé en colonies appartenant à des pays européens. Voir Elizabeth Heath, Berlin Conference of 1884–1885 : Meeting at which the major European powers negotiated and formalized claims to territory in Africa; also called the Berlin West Africa Conference., Henry Louis Gates, Jr. and Kwame Anthony Appiah (ISBN 978-0-199-73390-3).

[13] La ségrégation est une politique de la discrimination raciale mise en place au sein d’une nation. Celle-ci consiste à séparer physiquement les personnes selon les critères raciaux. C’est aux États-Unis entre 1877 et 1964  elle a été mise en place. En effet, selon le régime socio-juridique que les États-Unis ont connu à partir de la fin de la guerre de sécession en 1865, les Noirs ont été séparés des Blancs. Martin Lutter King (1929-1968), une légende de la lutte des droits civiques, à travers les manifestations pacifiques, a mené une lutte farouche contre la ségrégation  aux États-Unis. Il est assassiné  le 4 avril 1968. Sans oublier aussi Malcom X, l’une des figures emblématiques du mouvement noir de la lutte pour les droits civiques assassiné le 21 février 1965.  

[14] En politique, l’apartheid une gouvernance qui tend à séparer les groupes sociaux ou ethniques. En Afrique du Sud, elle a permis de mettre en place la séparation des Blancs et des Noires, comme deux groupes sociaux distincts entre 1948 et 1994. Nelson Mandela en est une figure emblématique pour la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. Il a été emprisonné pendant 27 ans pour sabotage et conspiration dans le but de renverser le gouvernement. 

[15] Jacques Brasseul, « Colonisation », in Histoire économique de l’Afrique tropicale, 2016, p. 297-335.

[16] Voir Patrice Elie Dit Casaque, « Esclavage, femme, noire : la triple discrimination », Histoire, Le portail des Outre-mer (la 1ere.francetvinfo.fr), 9 mai 2020.  

[17] Patrice Elie Dit Casaque, Op. cit.

[18] Angeles Jurado, « Comment le féminisme est-il représenté en Afrique ? », Esglobal, 31 décembre 2020.  

[19] Lire à ce sujet, Catherine Coquery-Vidrovitch, Les Africaines. Histoire des femmes d’Afrique subsaharienne du XIXe au XXsiècle, Paris, Éditions La Découverte, 2013, p. 7. 

[20] Patrice Elie Dit Casaque, Op. cit.

[21] Makhtar Diop, « Les femmes en Afrique : un formidable atout dans la lutte contre la pauvreté », Nasikiliza, 29 janvier 2015.  

[22] Patrice Elie Dit Casaque, Op. cit

[23]Evelyn Reed, « De l’infériorité commemythe », in La philosophie magazine / Hors-Série, XXe siècle : Les philosophes face à l’actualité, Paris, août-septembre, p. 59.  

[24] Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexeOp. cit., 58.

[25] Ibid., p. 58.

[26] Ibid., p. 59.

[27] Ibid.

[28] Ibid.

[29] Lire à ce sujet, UNICEF, À l’occasion de la Journée internationale de l’enfant africain, Adis Ababa, Dakar, Nirobi, New-York, 16 juin 2022.

[30] Ibid.

[31] Evelyn Reed, « De l’infériorité comme mythe », in La philosophie magazine / Hors-Série, XXe siècle : Les philosophes face à l’actualité, Paris, août-septembre, 2008.

[32] Valèse Mapto Kengne, Thèse de Doctorat  int:itulée : Les filles sur le chemin de l’enseignement supérieur en Afrique subsaharienne : analyse de leurs trajectoires, représentations sociales de l’école et résilience à travers leurs récits biographiques, soutenue en février 2011 à l’Université de Montréal (Canada), Faculté des sciences de l’éducation, Département d’administration et fondements de l’éducation. Voir résumé (p. iii).)

[33] Voir UNESCO, L’éducation des filles-les faits. Rapport mondial de suivi sur l’EPT. Fiche d’information, [en ligne], octobre 2013, p.2-3, disponible sur http://fr.unesco.org/gem-report/sites/ gem-report/files/girls-factsheet-fr.pdf, (consulté le 27/04/2024).

[34] Divyanshi Wadhwa,  « Alphabétisation des femmes : des progrès, mais toujours pas de parité », Banque mondiale, blog de données, 05 septembre 2019.

[35] Makhoumy fall, « Qui et où sont les analphabètes? Afrique sub-saharienne  francophone », Education for All Global Monitoring Report, UNESCO, 2066,  p. 4-7.

[36] Valèse Mapto Kengne, Thèse de Doctorat, Op. cit., p. 8.

[37] Claudine Bralet, « Les femmes, l’éducation et l’eau en Afrique, Paris, UNESCO, 2000.  

[38] Caroline Fink, « L’éducation des femmes et développement en Afrique subsaharienne », HAL open science, Economies et finances. 2011, p. 27.

[39] Ibid., p. 27.

[40] Voir Valentine Ambert, « Afrique : le rôle sous-estimé des femmes dans le développement », Youmetter, 31 août 2021.

[41] Ibid.

[42] Léa Masseguin,« Les femmes en politique : une participation inégale sur le continent en 2019 », Société, Jeuneafrique, 3 mai 2019.  

[43] Laurence Rossignol, « Les femmes en politique », in Après-demain, Paris, Éditions Fondation Seligmann, 2013, p. 25.

[44] Voir Afrique Renouveau, « La lutte des femmes pour l’égalité », disponible sur http://www.un.org/africarenewal/fr/magazine/july-2005/la-luttedes-africaines-pour-légalité, (consulté le 27/04/2024).

[45] Léa Masseguin, Op. cit.

[46] Nisrine Eba Nguema, « Etre une femme africaine aujourd’hui ».

[47] Catherine Coquery-Vidrovitch, (« Les femmes en devenir en Afrique subsaharienne », Paris, Éditions Fondation Gabriel Péri, in La Pensée, 2015, p. 58.

[48] Valèse Mapto Kengne, Thèse de DoctoratOp. cit., p. iv.

[49] Ibid.

[50] Claudine Bralet, « Les femmes, l’éducation et l’eau en Afrique » ? Op. cit.

[51] Valèse Mapto Kengne, Op. cit., p. iv.

[52] Simone de Beauvoir, Deuxième Sexe, Op. cit., p.  58.

[53] Monga (2007 : p. 188). Célestin Monga, C. (2007).  Un Bantou à Washington, un Bantou à Djibouti, Paris, Éditions  P.U.F., 2007, p. 188.

Effet de la qualité de la démocratie sur le niveau de satisfaction des citoyens en matière de services de santé et d’éducation au Sénégal

Par Boubou Junior COLY, Doctorant en Sciences économiques, Laboratoire de Recherche en Economie de Saint-Louis (LARES), UGB – Sénégal

Résumé 

L’objectif de ce travail est d’étudier l’effet de la démocratie sur la qualité de l’offre de services publics d’éducation et de santé au Sénégal en adoptant une approche microéconomique. Nous utilisons les données de l’enquête Afrobaromètre collectées auprès de 1200 citoyens adultes. Les résultats de l’analyse économétrique, effectuée à l’aide du modèle probit, montrent que la qualité de la démocratie a un effet positif et significatif sur la performance du gouvernement en matière de santé et d’éducation. La qualité de la démocratie est donc profitable aux citoyens sénégalais du point de vue de la fourniture de services de santé de base et d’éducation de qualité. Ces résultats invitent ainsi le gouvernement à améliorer le niveau de la démocratie dans le pays pour permettre aux citoyens de bénéficier des services d’éducation et de santé de qualité.  

Diplômé d’un Master en Analyse Economique et Quantitative (AEQ) de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal, Boubou Junior COLY est actuellement doctorant en économie au Laboratoire de Recherche en Economie de Saint-Louis (LARES). Ses travaux de recherche portent essentiellement sur l’évaluation des politiques publiques, la gouvernance, la démocratie, la fourniture de services publics dans les pays en développement. Par ailleurs, il a récemment obtenu une attestation de formation en Economie de l’environnement et gestion des ressources naturelles, délivrée par l’Université Senghor d’Alexandrie.  

Réformer l’enseignement technique et la formation professionnelle pour l’employabilité des jeunes en Afrique

Étreintes par le sous-emploi et le chômage des jeunes, les économies africaines devront réinventer leur système éducatif. Si le débat n’est pas nouveau, notamment en ce qui concerne le rôle de l’éducation dans la formation du capital humain, ses termes devront avancer en incluant les spécificités de la formation professionnelle. Lire plus  dans ce rapport (avec un Erratum, page 8, lire 100 M d’emplois)

Enquête sur les attentes des jeunes Africains en matière de formation

Cette enquête constitue une première tentative pour comprendre les facteurs qui déterminent
les choix de formation des jeunes Africains et ce qu’ils espèrent autour de leur formation
pour améliorer leur employabilité. Bien que les résultats fournissent des indications générales
sur les attentes des jeunes Africains, elles ne devraient pas être considérées comme des faits
stylisés. On retient tout au moins les besoins des jeunes Africains en matière de formation pourrait
trouver une réponse dans l’ETFP, dont le potentiel reste très marginalement employé en Afrique.Enquete sur les attentes des jeunes africains en matière de formation

Le paradigme de l’éducation en Afrique

Fac des lettres DakarL’éducation en Afrique souffre d’une dépendance significative du fait d’un paradigme social qui n’est pas resté figé dans le temps mais qui s’est trouvé un nouveau visage que nous nommons, la mondialisation.

L’éducation est un droit fondamental de la personne humaine inscrit dans la déclaration universelle des droits de l’homme. Elle est un moteur de croissance économique. Les études rétrospectives sur les différentes régions du monde en développement ont clairement établi que la croissance ne peut s’installer de façon durable sans une production préalable suffisante de capital humain. Elles ont également mis en évidence l’impact positif des dépenses d’éducation sur la réduction de la pauvreté et les inégalités ; l’éducation rend les populations moins vulnérables et favorise leur participation au développement, l’exercice de la citoyenneté et la bonne gouvernance. L’éducation a, enfin, des effets positifs incontestables sur l’environnement et la gestion des ressources naturelles, la démographie, l’hygiène et l’état sanitaire. Elle est une condition du développement durable. Nous sommes ici à la croisée des droits fondamentaux et des enjeux globaux.

En abordant ici les problèmes de l’éducation en Afrique, nous n’avons pas la prétention de définir ce que devrait être « la bonne » politique pour l’Afrique : elle est de la responsabilité de ses gouvernants. Nous essayons de faire ressortir son importance sur les grands enjeux mondiaux.

En Afrique, l’éducation est considérée comme la clé qui permet d’établir une bonne conduite au sein de la société et le respect de la hiérarchie. L’éducation avait un caractère collectif prononcé, une globalité au niveau des agents. Tout le tissu social sert de cadre d’action. L’éducation est globale et intégrée à la vie. L’éducation traditionnelle se fait partout et en toutes occasions, dans le contexte habituel du travail et des loisirs.

Depuis le triomphe du capitalisme et la faveur du développement prodigieux des moyens d’information et de communication, le monde vit une mondialisation néolibérale aux conséquences dramatiques pour l’Afrique. Le faible niveau de développement de l’Afrique d’une part, la dynamique et les règles de fonctionnement de la mondialisation d’autres part, condamnent 750 millions d’africaines et d’africains à l’arriération la plus abjecte avec la paupérisation massive et continue, avec l’analphabétisme, avec des endémies et épidémies de maladies ; avec l’explosion de diverses formes de violence dont des guerres civiles fratricides.

L’Afrique a été violée à partir du 17è siècle quand les Occidentaux ont commencé à visiter les côtes africaines. Sur le plan économique, il y a au sein des groupes sociaux, des échanges qui se limitent à la communication des biens et des marchandises. Une économie de subsistance qui se réalise sans problème au sein des groupes sociaux, se basant sur les échanges matrimoniaux et les obligations de parenté. Du politique, le chef, dans l’Afrique traditionnelle, a une autorité charismatique lui permettant d’imposer le respect et l’écoute dans la vie communautaire. L’éducation dans l’Afrique traditionnelle est assurée par la famille, le clan et le lignage ; une éducation qui n’est pas détachée de la société. Avec la colonisation, le continent se voit imposer la civilisation occidentale avec tous les problèmes au niveau de la société africaine. Et le constat fait par presque tous les historiens et sociologues qui étudient les sociétés africaines est amer : l’importation des modèles étrangers sur le continent depuis sa rencontre avec l’Europe, ont entraîné un grand séisme sur les plans politique, économique et social. Cette situation a fait que, les élites africaines soient accusées de l’opprobre et du déshonneur qui frappent l’identité africaine. Aussi, après les ravages du colonialisme, la mondialisation enfonce le clou car se charge de déconstruit et reconstruit les États africains selon des modalités qui favorisent la libre circulation des capitaux, des marchandises et de la technologie. Exemple de la domination culturelle des Français dans leurs ex-colonies par la dégénérescence des langues locales marquées par le français ; celles-ci ont perdu leur originalité avec déformation des patronymes africains et interférences linguistiques. Et dans le quotidien africain, se développent de nouvelles relations sociales. Par complexe devant la civilisation occidentale, les Africains perdent leur « authenticité » par mimétisme. Les adolescents découvrent une autre image de la sexualité à travers l’audiovisuel et la littérature pornographique. Avec le choc des cultures (occidentale et africaine), les jeunes paient un lourd tribut dans l’aliénation culturelle. Ils délaissent le vêtement traditionnel et s’habillent comme le Blanc. Complexé par l’image du Blanc, le Noir africain se blanchit la peau, ignorant les conséquences néfastes de cette pratique. À cela, il faut ajouter l’impact négatif de la musique moderne africaine dans la société. Considérée comme vecteur des valeurs morales pour conscientiser le peuple, elle est bradée par des musiciens qui valorisent le sexe et l’argent.

Il est vrai, que l’Afrique est inondée par l’écrit, l’image, et le son, de produits culturels en provenance de l’Occident qui dispose de puissants canaux de diffusion de ces produits pour atteindre les villages et hameaux les plus reculés dans la brousse africaine. Si l’on y ajoute les gammes du multimédia et de l’Internet, on mesure à sa juste valeur l’ampleur destructrice de l’invasion culturelle du continent qui semble démuni pour y faire face. On aurait eu peu à réduire si ces produits culturels avaient des contenus plus enrichissants et valorisants au lieu de toujours mettre en relief les bas instincts de l’homme. Or, force est de reconnaître que chaque production culturelle véhicule évidemment une vision du monde, des valeurs, des croyances et des comportements qui sont susceptibles de conditionner puissamment et de changer les attitudes « du consommateur ». Il est en effet, prouvé dans l’histoire que toutes les dominations politiques durables, tout comme les résistances conséquentes à la domination ont été d’abord bâties sur le socle culturel.

Dans sa dynamique actuelle, la mondialisation broie le corps et l’âme de l’Afrique. Cette situation n’est pas une fatalité. Elle résulte entre autres, du retard considérable que l’Afrique accuse en matière d’éducation. Dans un sursaut d’orgueil voire de survie, l’Afrique doit se forger une nouvelle mentalité : l’afro responsabilité, pour une Afrique plus forte par une attitude de valorisation

L’Afrique doit mobiliser davantage de financements pour développer de façon harmonieuse son système éducatif. Introduire davantage les langues nationales dans le système éducatif. Faire de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche un levier d’émergence économique.

L’Afrique peut se ressaisir pour se repositionner favorablement dans la mondialisation. Des alternatives existent pour cela, il ne manque pour le moment que l’expression forte de la volonté politique des Etats et de la prise de conscience des peuples africains de leur responsabilité dans le combat pour une mondialisation de la justice, du progrès social dans le respect des identités de chaque société.

Wilfried Koikson

SOURCES :

  1. Essé Amouzou, L’impact de la culture occidentale sur les cultures africaines, L’Harmattan, Paris, 2009, 190p.
  2. Anthony Stephanie, Civilisation (niveau débutant), CLE International. Deslandres, Paris: (2003)
  3. Simeon Olayiwola, Initiation à la culture et civilisation Françaises et
    Francophones. Agoro publicity company. (2005) (2ème édition)
  4. Source photo Serigne Diagne 

Gaspillage des cerveaux au delà de la fuite des cerveaux

fuite_cerveauxBeaucoup de pays Africains investissent dans la formation de leurs élites (en offrant des bourses) sans pourtant obtenir les retours sur investissements escomptés, car rares sont les diplômés africains bénéficiaires  de ces bourses des États qui retournent effectivement exercer dans leur pays d'origine ; la plupart préférant travailler dans leur pays hôte ou ailleurs dans le monde. Ce qu'on appelle communément la "fuite des cerveaux" ou « exode des cerveaux ». On note par exemple qu’entre 1990 et 2000, la migration des diplômés de l'enseignement supérieur a augmenté de 123 % en Afrique de l'Ouest contre 53 % pour les non-qualifiés. Abdeslam Marfouk, chercheur à l'université de Louvain estime que plus de dix pays africains ont plus de 40 % de leur main-d'œuvre hautement qualifiée hors de leur pays : 67 % au Cap-Vert, 63 % en Gambie, 53 % en Sierra Leone, etc. et que près d'un chercheur africain sur deux réside en Europe.[i]

L’effet pervers de cette fuite de cerveau est le « brain waste » ou « gaspillage de cerveaux ». Il s’agit des compétences qui sont sous-appréciées et sous-utilisées. Cela est fréquent dans tous les pays, mais les immigrés dans les pays développés sont les plus touchés. Selon Joëlle Paquet (2010)[ii], s’il est vrai que les travailleurs immigrés qualifiés peuvent  théoriquement améliorer leurs revenus et leur bien-être dans leur pays d’accueil ; cette augmentation est cependant limitée par les problèmes d’intégration auxquels font face certains immigrants. Caglar Ozden, économiste à la Banque Mondiale, constate qu’aux Etats-Unis, les migrants qualifiés ne parviennent pas souvent à trouver des emplois correspondant à leur niveau d’instruction.[iii]

 

«Brain Waste » absolu et « Brain Waste » relatif

En général, à niveau d’instruction égal, les immigrants dans les pays développés occupent des emplois moins compétitifs que les « autochtones ». Cependant, il faut distinguer le «Brain Waste » absolu et le « Brain Waste » relatif. Le «Brain Waste » absolu correspond aux travailleurs qualifiés exerçant le métier d’ouvrier ou d’autres métiers non qualifiés. Selon Souhila Benali, 6% des immigrés algériens « qualifiés » exercent le métier d’ouvrier en France. Le « Brain Waste » relatif, c’est la situation qui équivaut à la déqualification des diplômés, en les affectant à des postes de niveaux inférieurs à leurs qualifications. Un nombre important non mesurable d’immigrés serait dans ce cas.[iv]

 

Pourquoi les immigrants sont affectés par le gaspillage des cerveaux ?

Beaucoup de pays comme le Canada exigent une compétence élevée afin d’obtenir une immigration. Le programme de travailleurs qualifiés se base sur un système de points. Le candidat à l’immigration doit satisfaire une certaine compétence basée sur les diplômes, les expériences de travail, les spécialités qui procurent des points. Cependant, le pays d’accueil ne dispose pas toujours ou pas assez des métiers correspondant aux compétences des immigrés. En outre, les diplômes et les qualifications professionnelles de nombreux migrants ne sont pas reconnus. Joëlle Paquet (2010)[v] explique le gaspillage des cerveaux par le fait que les diplômes et les qualifications professionnelles de nombreux migrants ne sont pas reconnus, en particulier lorsque ceux-ci proviennent de pays en développement. Certains immigrants sont obligés de refaire une formation dans le pays d’accueil afin d’espérer un métier correspondant à leurs compétences.

La langue constitue, dans bien de cas, un facteur entrainant ce gaspillage des cerveaux. Selon Maurice Schiff, économiste à la Banque mondiale, il ressort des données relatives aux États-Unis que les migrants scolarisés venant de l’Inde ou du Royaume-Uni ont plus de chances de trouver des emplois correspondant à leur niveau de compétence aux États-Unis. « L’une des principales raisons qui expliquent cette situation est la langue. Les diplômés d’université de l’Inde et du Royaume-Uni s’expriment en anglais, ce qui leur confère bien entendu un grand avantage lorsqu’ils arrivent aux États-Unis », précise Maurice Shiff.[vi]

Aussi, faut-il signaler que certains emplois qualifiés sont réservés exclusivement aux  citoyens : ces emplois excluent les immigrants non citoyens et pour d’autres emplois, la priorité est accordée aux citoyens. Il est admis qu’il y’a une grande concurrence pour l’obtention des travaux qualifiés. Cette grande concurrence conjuguée avec la non priorité dans les emplois peut entraîner un gaspillage des cerveaux des immigrants dans les pays développés.

 

Que faire avant de s’engager pour une immigration ?

Il faut cependant noter que le gaspillage des cerveaux n’est pas seulement l’apanage des immigrants dans les pays développés. Le gaspillage des cerveaux existe même dans les pays en développement, les pays d’origine des immigrants et serait l’une des causes de l’immigration et qui décourage le retour de certains immigrants vers leur pays d’origine. L’une des causes majeures du gaspillage des cerveaux des immigrants est le manque d’informations. Beaucoup de travailleurs qualifiés s’engagent dans le processus d’immigration sans réellement connaître l’environnement du point de chute. Il est du devoir de tout candidat qualifié à l’immigration de bien observer l’environnement du point d’accueil avant de s’engager.

Les candidats à l’immigration doivent se renseigner des possibilités d’emplois qualifiés dans les pays d’accueil potentiels. Ils pourront se renseigner auprès de plusieurs immigrants déjà installés pour diversifier les sources de renseignement. Il est conseillé également aux candidats qualifiés à l’immigration, une fois engagés, de prendre une disponibilité de service si possible au lieu d’une démission afin de ne pas fermer la porte pour un retour potentiel. Ainsi, une fois installé dans le pays d’accueil,  à la fin du délai de la disponibilité de service, le candidat pourra arbitrer entre sa situation actuelle et sa situation précédente afin d’éviter le gaspillage des cerveaux.

 

Que doivent faire les pays pour empêcher des gaspillages de cerveaux de leurs émigrants ?

Pour éviter les gaspillages de cerveaux, les États africains doivent procurer des bourses conditionnelles, mais aussi combattre les gaspillages des cerveaux dans leur propre pays. Ces bourses conditionnelles doivent être effectives et accessibles à tout le monde. Ainsi, les États doivent non seulement garantir des emplois pour les diplômés, mais aussi créer une situation favorable pour le retour des diplômés. En même temps qu'on investit dans le capital humain, il faudra investir aussi en capital physique pouvant favoriser l’accueil des diplômés. Aussi, pour faciliter le retour des migrants et leur insertion dans leur société d’origine, les États doivent tout faire pour garantir un emploi aux migrants diplômés après leur retour à l’instar de certains pays asiatiques et latino-américains.

 

 

Ali Yedan

 


[ii] PAQUET, Joëlle. Favoriser le développement économique des pays d’origine des immigrants : une responsabilité partagée. Québec, Laboratoire d’étude sur les politiques publiques et la mondialisation, ENAP, 2010, 16 p. (Rapport évolutif. Analyse des impacts de la mondialisation sur l’économie au Québec; Rapport 8)

 

[v] PAQUET, Joëlle. Favoriser le développement économique des pays d’origine des immigrants : une responsabilité partagée. Québec, Laboratoire d’étude sur les politiques publiques et la mondialisation, ENAP, 2010, 16 p. (Rapport évolutif. Analyse des impacts de la mondialisation sur l’économie au Québec; Rapport 8)

 

Une nouvelle génération de cinéastes francophones pour prendre la parole? 

Pape_SeckAlors que l'Afrique des idées continue sa réflexion sur le cinéma africain, ses initiatives nouvelles, ses réussites et ses lacunes, il nous semble pertinent de donner la parole à de nouveaux jeunes cinéastes Africains. Lauréat de plusieurs prix internationaux pour son court métrage  Sagar, le sénégalais Pape Seck fait partie de cette nouvelle génération et il répond à nos questions.

Bonjour Pape Seck, vous êtes un jeuneréalisateur sénégalais, formé à l’école du cinéma de Marrakech, start-uper et vous appartenez à un nouveau courant du cinéma africain francophone. Mais le mieux serait que vous vous présentiez vous-même, n’est-ce pas?

Pape Seck :

Bonjour et merci beaucoup de la belle opportunité que vous m’offrez à, travers cette vitrine, de pouvoir échanger avec vous et avec nos chers amis internautes.

Je m'appelle Pape Abdoulaye SECK, jeune réalisateur sénégalais, comme vous dites, diplômé de l’Ecole Supérieure des Arts Visuels de Marrakech (Esav Marrakech). Je suis également « start-uper », fondateur de Doli’Motion Film et co-fondateur de Nabisso, un projet en innovation numérique.

Pour ce qui est du nouveau courant du cinéma africain francophone, je fais effectivement parti de ces jeunes qui essaient de bien orienter le boom de l’audiovisuel et du cinéma en Afrique, facilité par le numérique.

Vous avez réalisé un premier film qui a été primé dans certains festivals. Pouvez-vous nous parler de ce film, du sujet et des moyens avec lesquels vous avez pu le réaliser?

Pape Seck :

En effet j’ai écrit et réalisé le court métrage « Sagar », dans le cadre de mon travail de fin d’étude à l’Esav Marrakech en 2014. Le film a connu sa première consécration au FESPACO 2015, en remportant le prix du meilleur film fiction des écoles.

 

« Sagar » est un drame intime tourné dans les limites de la folie. L'échec chronique à l'enfantement rend une jeune mère mentalement dérangée au point de se fabriquer un bébé en tissu qu'elle essaie de protéger contre tout et tout le monde, sous le regard impuissant de son mari, partagé entre son amour pour sa femme et sa dignité d'homme qui importe à sa mère.

 

Sagar est très connu comme nom dans la société sénégalaise. Mais il signifie avant tout "chiffon". Et les deux significations ont chacune une histoire dans le film.

 

A la base, le nom Sagar est issu de nos us et coutume "Ceedo" et s'alligne dans la même catégorie que les noms "Kenbougoul" (personne n’en veut), "Yadikone", "Yakha Mbootu", etc. Ces noms servaient, suite à des rituelles, de sauver la vie de l'enfant en gestation, dont la mère peinait à avoir d'enfant, ou à les avoir vivant. Et c'est dans ce premier sens que film trouve son inspiration dans ce titre de "Sagar". Par ailleurs, le protagoniste du film utilise une pagne tissé qui métaphorise le "Sagar" (chiffon), en guise de bébé. Et donc j'ai beaucoup travaillé dans les ambigüités dans ce film. 

 

J’ai essayé d'explorer la question de l'attachement dans cette histoire. C’est l’attachement du protagoniste principal à l’inexistant (le faux bébé). Mais c’est également l’attachement du mari à sa femme et celui de la belle mère, à la dignité de son fils et celle de sa famille. J’ai fait recourt à la folie pour arriver à cerner cette question d'attachement au néant.

 

Le film a été tourné en 3 jours sur Marrakech, alors que l’histoire dans le film se déroule au Sénégal. Nous avons été, dés le départ, limité par plein de paramètres dont les décors extérieurs et les possibilités en terme de casting et autres. Mais à quelque chose malheur est bon. 

 

Les contraintes nous ont poussés, mon équipe et moi, à beaucoup réfléchir, creuser et échanger avec dextérité pour réussir le challenge du film que nous nous étions lancé.

 

Pourquoi faire des films quand vous savez que les canaux de distribution classique du cinéma ont échoué, que les salles de cinéma ont fermé depuis des années et que la plupart des films francophones ne sont vus que par des festivaliers à Ouagadougou ou en Occident?

Pape Seck :

Votre question me donne envie de vous en poser une : Pourquoi écrire des livres quand les gens ne lisent quasiment plus ?

 

Je pense que nous faisons un métier qui n’est pas forcément conditionné par le marché. Je ne vais pas vous mentir en vous disant que je ne cherche pas à vivre de mon “art”, mais ce n’est pas ce qui me motive. Je pense que, tout comme les productions littéraires, quand on fait un film, on laisse un héritage à la postérité. Et donc pour répondre à la question du “pourquoi faire des film…” c’est tout simplement parce que nous avons un regard sur notre temps que nous cristallisons à travers nos histoires, nos films, qui sont des témoins très puissants de notre époque.

 

Aujourd'hui, fréquenter les salles de cinéma n'est plus inscrit dans nos habitudes d'Africain à cause de la disparition de ces derniers dans nos pays. Mais nous sommes très télé et internet, surtout notre génération. Donc je pense que le problème est encore gérable. Il est important que les politiques suivent et que des conventions soient signées avec toutes les chaines de télévisions qui ont le potentiel de se positionner en  numéro 1 des partenaires et distributeurs du cinéma de nos pays.

 

En dehors de ça, avec des amis basés sur Paris, Djeydi Djigo, son frère Alpha et Jérome Arouna, nous travaillons sur un concept d'application et de plateforme web pour la diffusion exclusive du cinéma africain, à l'image de netflix… Affaire à suivre.

 

Juste pour dire que nous avons encore un grand potentiel pour proposer de meilleurs canaux de distribution et de diffusion plus efficaces et mieux adaptés à notre époque.

On constate, mais peut-être me démentirez-vous, que le cinéma d’Afrique francophone est une institution assistée par les fonds européens et que cela se ressent dans le contenu et certaines thématiques des films. Qu’en pensez-vous et comment vous situez-vous par rapport à cette réalité?

Pape Seck :

Personnellement, je suis conscient de la difficulté de faire un film de qualité, avec toute la logistique, les coûts et les compétences que cela implique. Donc, c’est très aisément que l’on comprenne que les cinémas d’Afrique francophone soient ainsi assistés par les fonds européens et autres – à préciser qu’ils y trouvent également leur intérêt vu que, souvent dans les conventions signées, leurs techniciens sont engagés dans les projets.

 

Mais cela reste un grand problème dans la mesure où, la liberté d’expression idéologique et artistique du réalisateur est menacée par des obligations de révision et réaménagement de certains aspects de ses propos sur des questions politiques, économiques et/ou sociales. D’où la nécessité de trouver les moyens de s’autonomiser. La question du financement du cinéma est très politique. Mais encore, faut-il qu’en Afrique, nos dirigeants comprennent les enjeux et la puissance de ce média. JEAN-MICHEL FRODON disait dans son livre « La projection Nationale – Cinéma et nation » : " Pas de nation sans cinéma. Pas de cinéma sans nation. Il existe une affinité de nature entre cinéma et nation, qui repose sur un mécanisme commun, qui les constitue l’un et l’autre : la projection. C’est en se projetant, en offrant une image reconnaissable et désirable, que s’institue la nation comme « forme » supérieure à l’existence d’un territoire et d’un Etat. » Donc avec le cinéma, il nous est possible de forger les individus ou le type d’individu que nous aimerions avoir pour nos sociétés. En cela, le valeureux Thomas Sankara disait, « un peuple qui t’impose son cinéma, éduque tes enfants, que tu le veuilles ou non. » Il avait bien compris.

 

Cette année, dans le cadre du fond pour la promotion du cinéma et de la production, le Sénégal a fait le pas en investissant un milliard de nos francs dans la production cinématographique. Il est important que cette dynamique se multiplie un peu partout en Afrique francophone, ne serait-ce que pour lancer le mouvement. Car, je reste convaincu que, si la machine de nos productions se met en marche, avec un marcher africain de notre industrie cinématographique bien maitrisé, plus rien ne nous arrêtera.

 

Toujours à propos du cinéma du continent africain, Nollywood se développe et de plus en plus avec des films ambitieux, tout en ayant un véritable contact populaire au Nigeria  et une exportation vers l’extérieur de leur cinématographie. Quels ponts existent-ils entre les jeunes réalisateurs et techniciens francophones et l’industrie du cinéma nigérian? Est-ce que les barrières nationales sont si étanches que cela?

Pape Seck :

À ce jour, je n’ai pas eu écho de collaboration de grande ampleur entre Nollywood et les cinémas d’Afrique francophone en terme de production. Mais j’ai espoir que nous arrivions à cela avec cette belle et nouvelle dynamique de partage et d’échange qui s’est instaurée au sein de la jeune génération de cinéastes africains.

 

Aujourd’hui, avec le numérique et les facilité de communication, nous discutons de plus en plus entre jeunes cinéastes et un véritable horizon de coopération se dessine entre nous, au delà des barrières nationales.

 

Par ailleurs, de manière plus large en terme de collaboration entre réalisateurs africains, la dynamique a été lancée depuis l'époque de Sembène. Il est à noter qu'à cette époque, les réalisateurs de  cinéma africain n'étaient pas aussi nombreux qu’aujourd’hui… Sembéne a d'ailleurs manifesté l'importance de ces rapports de collaboration dans son dernier film "Moladé" qu'il a tourné au Burkina Faso et dans lequel ont travaillé des sénégalais, des ivoiriens, des burkinabés. En tant que jeune héritier de ce grand homme, et ayant bien saisi ce dernier message fort de sens, dans sa dernière réalisation, je me suis naturellement inscrit dans cette même dynamique. Et c'est avec une très grande joie que je me suis rendu compte que la plus part des jeunes réalisateurs africains sont dans cette même logique.

Nollywood a mis en place des plateformes de streaming qui permettent d’étendre son aura et d’impacter un public de la diaspora. Un modèle économique intéressant. Comment vous situez-vous, en tant que francophone dans ce contexte?

Pape Seck :

Lors de la précédente édition du sommet de la francophonie à Liège (Belgique), nous présentions, avec mes 3 collaborateurs que j’ai cités en début de cet entretien, notre application et plateforme web Nabisso, spécialement dédié à la diffusion en streaming et VOD de films africains. Nous y travaillions depuis déjà 2 ans et nous en sommes en phase de finalisation pour son opérationnalité qui est pour bientôt. 

De manière générale, pouvez-vous nous parler de l’impact de la révolution numérique sur le cinéma africain en termes de création, de diffusion, de renouvellement du public et de marketing?

Pape Seck :

Le numérique donne un grand souffle à la production cinématographique africaine. Je pense que si nos cinémas (d'Afrique) tendent de plus en plus vers une certaine indépendance, c'est grâce au numérique. Il nous a facilité l'accès par rapport à beaucoup de chose, non pas simplement dans le domaine du cinéma. Aujourd'hui, toutes les grosses logistiques dont on avait besoin pour faire un film, nous sont dispensées grâce au numérique.

 

Ceci dit, j'aime souvent tirer la sonnette d'alarme sur la question de la qualité et de la profondeur dans notre travail. Il ne faut pas que nous nous laissions nous rendre paresseux par autant de facilité. Aussi avancée que sera la technologie, sophistiquées, les machines, ils ne feront jamais tout à notre place. La réflexion, c'est nous qui la menons. Donc l'exigence de qualité et de profondeur nous incombe.

 

Nous assistons à une floraison de séries africaines bien diffusé dans les chaines de télés et sur internet, dont l’audience après du publique africain est très appréciable. Qu’importe la qualité de ces séries. Ce qui suscite beaucoup d’espoir en ce qui concerne le future de cinéma africain, auprès de son publique. Et c’est assez réconfortant je trouve.

Dans Sagar,  traitez vous l'incapacité à faire le deuil d'une mère ou la stérilité dans un couple ? Pourquoi avoir voulu traiter l'un de ces deux sujets ?

Pape Seck :

« Sagar » traite bien de la stérilité dans une société où l’enfant est capital pour la survie d’un ménage. C’est une valeur qui assure une certaine stabilité dans le couple. Mais en même temps, il n’est pas donné à tout le monde d’en avoir. Et je voyais autour de moi la souffrance de ces personnes, ces femmes qui peinaient à donner de la progéniture à leurs belles familles et qui au final étaient plus des coupables que des victimes. Nous n’avons pas trop cette culture d’essayer de nous mettre à la place de ces gens pour comprendre leur souffrance au lieu de les juger avec autant de gratuité.

 

Sur cette question du jugement, il me fallait impérativement ne pas tomber dedans dans ma manière de caractériser mes personnages. Il me fallait donner à chacun d’eux des motivations qui nous font comprendre qu’au final, nous sommes tous des humains et que, ce qui cause tous nos problèmes réside peut-être dans notre incompréhension des uns et des autres.

Dans cette histoire, j’ai également essayé d’explorer la notion de l’attachement, mais surtout, à l’attachement au néant. Le mari

s’attache à sa femme malgré sa folie, la belle mère s’attache à la dignité de sa famille et le personnage principal en question s’attache à ce néant, ce bébé inexistant que j’ai essayé de faire vivre avec le son, pour raconter l’histoire que se raconte ce personnage dans sa bulle. Et donc avec  la folie, je suis arrivé à cerner cette question d’attachement au néant.

Merci pour votre disponibilité.

Pape Seck :

C’est moi qui vous remercie pour votre amabilité et pour l’intérêt que vous portez à mon travail et à ma modeste personne. 

Propos recueillis par Lareus Gangoueus pour l'Afrique des idées

 

 

Impact de l’épidémie Ebola sur le quotidien des Abidjanais

 

HISTORIQUE

La maladie à virus Ebola (autrefois appelée fièvre hémorragique à virus Ebola) est une maladie grave, pouvant entrainer la mort certaine chez l’homme. Le virus Ebola, responsable de la maladie, est apparu pour la première fois en 1976 à Yambuku, dans l'actuelle République Démocratique du Congo. Cette localité étant située près de la rivière Ebola, celle-ci a donné son nom à la maladie.

Le virus se transmet à partir d’animaux sauvages et se propage ensuite dans les populations par transmissions interhumaines. Les premiers cas d’Ebola ont été notifiés dans la zone d’Afrique de l’ouest en mars 2014, d’abord en Guinée, puis s’est propagé rapidement en Sierra Leone et au Liberia.

Aucun traitement homologué n’a pour l’instant démontré sa capacité à neutraliser le virus. Vu la propagation très rapide du virus, nous pouvons affirmer que la menace Ebola a quelque peu changé les habitudes quotidiennes des Ivoiriens. La Côte d’Ivoire, pays frontalier de la Guinée et du Liberia, se devait de mettre en place un dispositif cohérent de veille afin d’empêcher l’entrée de la maladie sur son territoire.

QUELQUES MESURES PRISES PAR LES AUTORITES

Afin de lutter efficacement contre la menace Ebola, le gouvernement ivoirien a pris des mesures préventives et répressives, et ce, dans l’intérêt des populations.

La sensibilisation

Sensibilisation des populations sur la maladie à virus Ebola par le Ministère de la Santé

Des émissions de sensibilisation sur Ebola en langues locales sont diffusées  dans toutes les radios de proximité à travers le pays. Il s’agit d’émissions de santé qui vont être produites et diffusées au profit des populations sur la thématique de la lutte contre Ebola. Ces programmes sur le lavage des mains et les pratiques culturelles et religieuses ont été produits et diffusés aux populations de l’intérieur du pays, au terme de formations initiées par CFI (Canal France International) et RFI (Radio France Internationale).

D’autres modules de formation sont également dispensés sur les symptomes  de la maladie, les modes de transmissions et de contamination, etc.

 

Des ateliers sont également proposés aux populations rurales, et visent à contribuer à atténuer les résistances culturelles et favoriser une meilleure compréhension et une acceptation des mesures de prévention. Depuis l’apparition de la maladie dans notre zone ouest-africaine, les spots publicitaires, communiqués réguliers, messages radiophoniques, caravanes et campagnes de sensibilisation ne manquent pas. Les artistes musiciens ont même produit un clip vidéo intitulé « Stop Ebola ». Les revenus de la vente de cette œuvre musicale seront reversés à des fondations pour la lutte contre la maladie. Le footballeur International Didier Drogba s’est lui aussi engagé à associer son image à la lutte contre Ebola. Plusieurs autres ont suivi, notamment Yaya Toure, Gervinho, etc.

Mesures sanitaires

Surveillance renforcée dans les aéroports: des équipes médicales ont été déployées sur le site de l’aéroport afin de contrôler tous les voyageurs à destination d’Abidjan. Ces équipes sont dotées d’équipements modernes pouvant identifier et diagnostiquer toute personne à forte température et présentant les signes de la maladie.

Le Ministère de la santé recommande aux populations de se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon, d’éviter de faire des accolades, car la maladie se propage  à partir des fluides corporels (sueur, sang, salive). Toute chasse, tout transport de viande de brousse sont strictement interdits jusqu’à nouvel ordre (Chimpanzés, singes, chauve-souris, agouti, porc-épic). Sont également proscrits les faits de ramasser et de  manipuler les animaux morts. Un numéro vert gratuit (143) a été créé par le Ministère de la Santé afin de signaler très rapidement tout cas suspect.

 

Mesures répressives

 

Dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, deux chasseurs ont été mis aux arrêts. Ces individus ont outrepassé la mesure gouvernementale d’interdiction de la chasse. Ils ont été arrêtés et la gazelle, en leur possession, a été incinérée. A la frontière ivoiro-libérienne, plusieurs embarcations ont été bloquées. Le Préfet a indiqué que malgré les mesures d’interdiction, des personnes continuent de rallier illégalement les deux pays en passant clandestinement par le fleuve Cavally au moyen d’embarcations de fortune.

 

LES  COMPORTEMENTS NATURELS DES ABIDJANAIS

 

Au début de l’apparition de la fièvre Ebola dans les pays limitrophes de la Côte d’Ivoire que sont la Guinée et le Liberia, une véritable psychose s’est emparée de tous les Abidjanais, chacun voulant éviter d’être contaminé.

 

Les mesures préventives prises par le Gouvernement, à savoir l’interdiction de se serrer les mains, de faire des accolades, de manger dans les lieux publics a augmenté les craintes des populations face à une maladie qui jusque-là n’a pas de remède. Au départ, la situation fut effrayante, mais depuis quelques temps, elle s’est nettement améliorée, et les populations ont recommencé à se serrer les mains et se faire des accolades, car selon elles, c’est Dieu seul qui protège contre la maladie.

 

LES RAPPORTS AVEC LES LIBERIENS VIVANT A ABIDJAN

 

Bien que le Liberia soit un des pays les plus affectés par la fièvre Ebola, cela n’a pas véritablement eu d’incidences négatives sur la cohabitation entre Ivoiriens et Libériens à Abidjan. Le problème qui se pose est celui des Libériens vivant au Liberia et désireux de se rendre en Côte d’Ivoire. Sur cette question, le gouvernement a été formel. Aucune personne vivant au Liberia ne doit franchir la frontière ivoirienne. Cette mesure est purement d’ordre sanitaire et vise à circonscrire l’épidémie afin de mieux la combattre. Elle a été très bien comprise par les populations et n’est pas de nature à perturber les relations diplomatiques entre les deux Etats.

BILAN

L’épidémie de fièvre Ebola sévit actuellement dans quelques pays de notre sous-région ouest-africaine, dont deux de ces pays partagent des frontières communes avec la Cote d’Ivoire. La maladie a déjà fait environ 8459 morts, sur plus de 21329 cas enregistrés, selon le dernier bilan de l’OMS. Même si jusque-là aucun cas n’a été déclaré en Côte d’Ivoire, le pays se doit d’être en veille en maintenant les mésures preventives deja mises en place.

PERSPECTIVES

Selon l’OMS, les nouveaux cas de la maladie à virus Ebola dans les trois pays d’Afrique de l’ouest sont en réelle baisse. Cela est un signe d’optimisme et une lueur d’espoir pour l’avenir. L’Envoyé spécial des Nations Unies sur Ebola, Dr David Nabarro s’est déclaré confiant sur la lutte contre l’épidémie en Afrique de l’Ouest. Les Nations Unies sont heureuses et fières de la maníère dont la Côte d’Ivoire gère la menace Ebola. Ceci est très encourageant pour tous les acteurs qui ont décidé de faire barrage à la propagation de cette maladie.

Moussa Koné

SOURCES

www.sante.gouv.ci

www.prevention-ebola.gouv

www.aip.ci (Agence Ivoirienne de Presse)

www.who.int (site de l’OMS)

Xinhua

NB : les images sont tirées du site www.abidjan.net