Entretien avec Lynda Aphing-kouassi Directrice Générale du Cabinet International KAIZENE

Lynda Aphing-kouassiMère d’une petite fille de 11 ans, d’origine ivoirienne, Lynda Aphing-kouassi est la  Directrice Générale du Cabinet International KAIZENE, un des cabinet de formation de renom en Afrique basé à Londres Pall Mall Piccadilly et à Abidjan Zone 4.

Diplômée de l’université de Hull, elle a commencé à travailler dans le domaine bancaire à Santander, la Société Générale, Vaultex (une filiale du groupe HSBC) en tant que responsable d’équipe, directrice des investissements puis banquière d’affaires à Londres, membre du Conseil d’Administration de l’Organisation for Talents Within (organisation non gouvernementale à Atlanta) et membre de l’Institut des Directeurs de Londres (I.O.D). Elle milite en faveur d’une Afrique innovante, capable de prendre son destin en main à travers l’entrepreneuriat et l’autonomisation des femmes. Lynda est résolument engagée à apporter sa pierre à l’édifice pour le développement de l’Afrique.

 

ADI : Pouvez-vous nous en dire plus sur les origines du cabinet KAIZENE ?

 Tout d’abord sachez que le Cabinet KAIZENE vient du mot « Kaizen » d’origine japonaise qui une très ancienne pratique de formation qui signifie détermination, le changement pour le meilleur ainsi que la continuité dans le développement et le perfectionnement.

La pratique « Kaizen » est reconnue mondialement comme une méthode compétitive aboutissant au succès, mais est également le pilier de la stratégie d’avancement que toute organisation devrait pratiquer selon nous, car elle assimile à la fois le développement personnel et celui de l’entreprise.

Ainsi créé depuis 2015, KAIZENE, Cabinet international basé à Londres et à Abidjan, est spécialisé dans le renforcement des capacités des entreprises publiques et privées, Formations Professionnelles, compétences techniques et non techniques, Coaching, Responsabilité sociétale et Conférence annuelle sur les infrastructures et BTP à savoir :

1.DÉCEMBRE 2015 : OIL MINING AND GAS – LONDRES

2.AVRIL 2016 : SECTEUR PÉTROLIER DÉFIS ET OPPORTUNITÉS – ABIDJAN

3.OCTOBRE 2016 : ELECTRIFICATION DE L’AFRIQUE – CAPE TOWN

4.DÉCEMBRE 2017 : BTP ET INFRASTRUCTURES – DAKAR

5.DÉCEMBRE 2018 : BTP ET INFRASTRUCTURES – KIGALI

La 6ème édition est prévue en Ethiopie en Octobre 2019

 

ADI : Vous avez décidé de créer votre propre entreprise. Comment en êtes-vous arrivé là ?

Apres identification de certains problèmes axés sur le capital humain j’ai eu La volonté de contribuer au développement de nos sociétés et en particulier de fournir des services à valeur ajoutée permettant de renforcer nos capacités et de renforcer l’importance du capital humain dans les entreprises et de promouvoir les talents pour le développement de notre société.

Mon objectif est également de travailler avec les entreprises pour développer leurs missions de RSE afin de créer des actions durables pour nos pays et de contribuer à l’autonomisation de la femme.

Mais surtout parce que j’avais un rêve de grande envergure auquel je croyais vraiment qui répondait a un problème de notre société et pour lequel je travaille avec acharnement et détermination.

 

 ADI : Faites-vous face à beaucoup de concurrence ? Quelle stratégie avez-vous adopté afin de relever ce défi ?

Le marché de nos jours est de plus en plus concurrentiel, nos collaborateurs représentent alors notre atout principal.

Nous mettons l’accent sur les formations ludiques qui sont à caractère personnel, nous offrons également des formations sur mesure, un coaching en développement personnel et par-dessus tout, nous n’oublions pas nous-mêmes de nous former et de nous documenter constamment pour être les meilleures versions de nous-mêmes afin de pouvoir aider les autres à travers nos formules afin d’être les meilleures versions d’eux-mêmes. Nous travaillons aussi sur des programmes axés pour les femmes et leur développement.
 ADI : Comment avez-vous financé votre début de la phase création d’entreprise ? 

J’avais quelques économies, pas un montant énorme mais je me suis néanmoins engagée et j’ai même offert des formations gratuites afin de me faire connaitre.

J’ai surtout eu la Fondatrice de l’école Grain de soleil qui a eu confiance en nous et a accepté de nous donner une chance ce qui nous a permis d’avoir un fond de roulement pour continuer et ainsi démarra notre belle expérience.

 

ADI : Qu’en est-il du marché de la formation et du coaching en Afrique ? 

L’optimisation de nos ressources humaines nécessite d’une part la convergence entre les objectifs personnels de vos employés (liberté d’expression-image- recherche de reconnaissance mesurée), et d’autre part le développement de la culture et la vision de l’entreprise. C’est ainsi que la formation prend tout son sens. De nombreuses études démontrent l’efficacité de la formation dans la croissance de l’entreprise et dans le processus de développement d’un État. Les résultats de la formation sont concrets et mesurables tant dans la productivité que dans la montée en puissance économique du pays.

Grâce à ses effets de levier sur la croissance et l’emploi, la formation professionnelle est primordiale pour les pays développés et nos pays en développement, en zones rurales et urbaines. Elle permet d’accompagner la croissance et la compétitivité des entreprises d’une part, et prévenir l’exclusion des jeunes du marché du travail d’autre part, car vecteur d’une croissance inclusive et durable.

Le coaching est très important car, sert à réécrire notre histoire, nous permet d’impacter positivement, de créer l’inspiration en l’autre et de devenir un leader ; étant ainsi une solution pertinente et efficace qui permet d’explorer les solutions possibles pour résoudre la situation actuelle d’une personne et l’aider à définir ses actions à mettre en œuvre pour atteindre ses solutions désirées. Concernant le coaching axé sur le genre précisément des femmes, le travail s’accentue davantage sur leur développement personnel, leur personnalité, l’intelligence émotionnelle et sur leur estime de soi afin de prendre leur place dans les postes directionnels et aussi de mieux s’affirmer dans la société.

 

ADI : Quelles ont été les principales difficultés auxquelles vous avez dû faire face et qui vous suivent aujourd’hui ?

L’intégration :

Il faut apprendre à mieux connaitre son environnement et l’intégrer sans complexes. La meilleure manière de l’intégrer est d’être humble et demander de l’aide quand le besoin se présente. Rester soi-même mais faire preuve de sérieux quand il s’agit du travail. Comprendre sa motivation première.

Le genre :

Le fait d’être une femme dans le passé ne facilitait pas le sérieux durant les échanges et parfois ses échanges déviaient vers le rapport social. Il a fallu une rigueur et une fermeté pour obtenir les contrats par mérite me voyant parfois obligée de refuser certains si je sentais que l’intérêt était autre que le travail. L’absence de parité également à des postes de responsabilité il est important de regarder la femme dans le milieu du travail comme son égal et surtout lui donner la crédibilité qu’elle mérite dans ses taches.

L’estime de soi :

La connaissance de moi et la confiance en moi la détermination et la motivation m’ont beaucoup aidé à surmonter ses principales difficultés parmi d’autres car ils m’ont permis d’apprendre à avoir confiance en moi, à croire en moi et à apprécier les échecs et m’en souvenir comme des expériences positives me permettant de ne rien regretter. Par-dessus tout le support de ma famille, ma fille et mon réseau féminin m’ont permis d’aller au-delà de ses difficultés et de les surmonter avec force et ténacité. Eviter de compromettre sa moralité et ses principes.

La réputation :

Nous commettons tous des erreurs et ne pouvons pas faire l’unanimité le plus important est de continuer à travailler et croire au processus. Chaque erreur est une leçon il faut savoir se relever après ses erreurs et quelque soit la durée se relever et faire preuve de force et de détermination pour ne pas laisser la place au découragement quand les critiques ne sont pas positives. Réparer du mieux que possible ses fautes et continuer l’aventure la détermination le travail bien fait et le temps nous feront toujours surmonter le négatif et répareront toujours notre réputation. Par-dessus tout faire de son mieux pour préserver sa réputation mais continuer à prendre des risques pour se développer et de diriger selon ses principes et ses valeurs. Ne jamais laisser l’opinion négative des personnes définir qui nous sommes.

Cependant, aujourd’hui j’ai pu surmonter toutes ces difficultés et je peux affirmer qu’elles n’existent plus.

 

ADI : C’est quoi pour vous la responsabilité sociétale et quel est son importance pour les entreprises ? 

 La Responsabilité sociétale pour moi c’est le développement humain et le respect de notre Environnement.

C’est l’élément prioritaire dans le développement des entreprises. Ainsi, dans toutes les actions que nous menons (nos prestations, projets et activités, etc.), nous nous assurons de leur valeur ajoutée. Il en est de même pour chacun de nos employés avec lesquels nous formons une « Unité de développement ».

Toute entreprise et tout Etat pour se développer et être productif doit se doter d’une politique de gouvernance adéquate et adopter des règles de conformité et d’éthiques qui permettent de répondre aux préoccupations sociales et environnementales de droits de l’homme et des clients et la RSE favorise le respect des droits de l’homme et contribue au développement durable et bien-être de nos sociétés en prenant en compte les attentes de toutes les parties prenantes. Une politique de RSE est nécessaire pour tous et son importance est à un très haut niveau.

ADI : Quelle est la stratégie globale de votre entreprise pour l’atteinte des ODD ? 

 A Kaizene nous insistons plus sur :

  1. L’Accès à une éducation de qualité : à travers nos formations qualifiantes, spécialisées et adaptées aux besoins des professionnels et aux jeunes que nous encourageons dans leurs initiatives d’entrepreneuriat après identification de leur aptitudes à être entrepreneurs car nous ne sommes pas tous appelés à être entrepreneurs.
  2. L’Égalité du genre : par notre engagement pour l’entrepreneuriat féminin autonomisation de la femme, la parité dans les conseils d’administration, la formation des femmes et des jeunes sur le leadership féminin, la confiance en soi et l’estime de soi, la prise de parole et la communication parmi tant d’autres.
  3. L’Innovation et les infrastructures : chaque année nous organisons des conférences ayant pour but de répondre aux défis infrastructurels de notre continent. Ces conférences visent à accroitre les investissements en faveur de l’innovation, l’énergie, des logements et des transports afin de travailler à la réduction de la pauvreté et de palier aux soucis de nos populations.
  4. Les Partenariats pour les objectifs mondiaux : l’un des objectifs de nos conférences annuelles est de favoriser la création de partenariat entre le secteur public et privé et des synergies autour des enjeux infrastructurels pour le développement du continent, des enjeux de la formation avec pour objectifs de pouvoir outiller nos populations afin de favoriser un partenariat gagnant- gagnant.

ADI : Quels conseils donneriez-vous aux étudiants et aux jeunes diplômés qui veulent se lancer dans l’entrepreneuriat ?

  • Aux femmes tout d’abord, elles doivent être conscientes que leur féminité n’est pas une faiblesse, mais une opportunité à saisir afin d’exceller dans tout milieu.
  • Rester soi-même et ne pas accepter ce qui n’est pas acceptable. Avoir une estime de soi et se documenter constamment, faire des recherches car la connaissance est notre pilier comme nous le traduit la bible. Etre Humble et ne pas laisser la société dicter qui nous devons êtres.
  • Ensuite, définir ce que représente pour chacun la réussite professionnelle (réussite financière, de réussite sociale, d’accomplissement de soi, de bonheur au travail, de conciliation travail-famille, inspirer les autres…). Cette étape est essentielle afin d’établir un plan d’action et de développement pour y arriver. Pour exceller dans quoi que ce soit, il est essentiel de miser sur ses talents.
  • Il est donc essentiel de connaitre ses forces naturelles et ses limites (sans oublier son objectif !) afin de pouvoir les utiliser, optimiser le développement de leur carrière, atteindre leurs objectifs, en misant sur les accélérateurs et la formation appropriée cela pour maîtriser notre intelligence émotionnelle et ne pas hésiter à en apporter de l’empathie et notre maîtrise du risque afin de contribuer au développement du changement.
  • L’entrepreneuriat n’est pas un moyen de devenir milliardaire à la première tentative c’est vraiment une expérience difficile, qui nécessite un travail avec acharnement et l’identification d’une solution a un problème de la société et une confiance en Dieu, en soi et en son idée. Mais une expérience magnifique.
  • Se doter d’un état d’esprit de gagnant et assumer ses échecs et accepter les critiques et rester patients.
  • Un autre point à prendre en considération est de développer son réseau de contacts car le succès, c’est aussi les relations. Pour booster votre carrière, il faut savoir s’entourer des bons contacts et réseaux d’influence auprès desquels l’on peut s’instruire, apprendre mutuellement et se développer tous ensemble. Il faut trouver son mentor cette personne assez connecte qui pourrai en tout temps et en toute chose se porter garant pour vous et garant de vos références.

Tels sont pour Lynda Aphing-kouassi d’excellents moyens de favoriser le développement de nos entrepreneurs.

 

Pour plus d’info : 

https://kaizene.org/en/home/  

 

En Côte-d’Ivoire l’histoire d’Houphouët-Boigny veut-elle se répéter ?

En un petit fracas, le Président Ouattara met en pièces la nouvelle Constitution ivoirienne et repositionne le pays vers une potentielle nouvelle période d’instabilité. Morceaux choisis : «… la nouvelle constitution m’autorise à faire deux mandats à partir de 2020… la stabilité et la paix passent avant tout, y compris avant mes principes »[1]déclare-t-il. Mais dans la réalité cette posture, outrageusement incarnée par ceux qui ne veulent pas respecter les termes fixés par les mandats constitutionnels, n’est en rien nouvelle. Mieux, elle est contre-productive et génère des tensions.

Sorti de Ivy League et après avoir arpenté les couloirs des grandes institutions financières, Ouattara a bâti une réputation de développeur efficace en Afrique et notamment en Côte-d’Ivoire où il a fait ses armes en politique auprès du Président Houphouëten tant que Premier Ministre. Lorsqu’il prenait les rênes de la Côte-d’Ivoire en 2010 après une longue et coûteuse crise, personne ne se doutait que la Côte-d’Ivoireconnaîtra un come-back économique. Le pays est redevenu la locomotive de UEMOA et affiche des performances économiques à faire pâlir. Après une croissance économique soutenue sur le quinquennat 2010-2015, les perspectives sont tout aussi bonnes. Selon la BAD[2], le pays connaîtrait 7,9 % de croissance en 2018 et 7,8 % en 2019, malgré une chute de 35% des cours du cacao[3]entre novembre 2016 et janvier 2017. Par ailleurs, le déficit est projeté pour être en baisse de 1 point (de 3.8% à 2.8% du PIB). L’endettement reste maîtrisé même si sa soutenabilité deviendra problématique lorsque les remboursements exigibles des euro-obligations s’entasseront entre 2024-2028. La Côte-d’Ivoireest un turbo économique qui surfe sur des investissements publics aussi structurants que dynamiques et un boom des investissements privés. Néanmoins les performances sociales et de redistribution de la croissance sont encore attendues. Et, Ouattara doit encore donner la preuve de sa bonne gouvernance en matière de sécurité et de stabilité politique. Les sautes d’humeur des mutins à Bouake et l’attaque terroriste de Grand-Bassam en 2016 rappellent fort bien que le pays est encore vulnérable sur ce plan. Ils ont tôt fait de faire sauter le verrou de la fragile stabilité avant même que Ouattara lui-même ne se prépare à assener au pays le coup de grâce avec l’idée d’un troisième voire quatrième mandat. Bien qu’il y ait une nouvelle Constitution, les compteurs des acteurs politiques et même de la population ne se remettent pas à zéro, bien au contraire, ces acteurs sont impatients.

Mieux, les germes de la crise ivoirienne n’ont pas pour autant disparus comme par enchantement. L’alliance entre le Rassemblement des Républicains (RDR) et le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) n’est pas une soupape sûre contre les interminables luttes de positionnement entre le clan Ouattara et celui de son allié circonstanciel, Bédié. Gbagbo est toujours à La Haye et ses partisans n’ont certainement pas bu jusqu’à la lie les appels au dialogue, lequel dialogue n’est pas encore synonyme de réconciliation. Le passif de la crise n’a pas encore pas épongé par les ivoiriens et malgré les interventions extérieures, la réconciliation devra être ivoirienne ou ne sera pas. Même les circonstances de l’arrivée au pouvoir de Ouattara appellent à la prudence et à plus d’investissement dans le processus de liquidation du passif couvé de la crise. Les protagonistes de la crise sont encore presque tous vivants. Pire, ils sont mécontents pour certains, impatients pour d’autres, à noter qu’être pensionnaire de la Haye ne rime pas avec inactivité politique.

Pour l’ascension au pouvoir du Président Ouattara, remontons rapidement dans le temps. Sur les cendres chaudes de la crise d’« ivoirité », en 2002 lors d’un putsch, un groupe de jeunes échoue à prendre la Présidence de la République mais se replie sur la moitié Centre et Nord du pays où il organise une administration parallèle. Les processus de paix de Marcoussis et de Ouagadougou vont coup sur coup produire des résultats mitigés jusqu’aux élections qui opposeront Ouattara et Gbagbo en 2010. Les résultats, contestés par Gbagbo, donnent Ouattara gagnant et plongent le pays dans une crise post-électorale pendant laquelle les exactions reprochées à Gbagbo sont perpétrées. Le pays parvient néanmoins à retrouver le chemin d’une certaine accalmie après l’installation du Président Ouattara qui déroule un quinquennat à succès macro-économique. Entre temps, il renouvèle son mandat et fait adopter une nouvelle Constitution en 2016. Parce qu’il arrive au pouvoir tel qu’il y est arrivé et malgré la paix mosaïquement maintenue sur le territoire, même la « légalité » de se présenter à de nouvelles élections ne garantira pas une légitimité à Ouattara.

Les acteurs de l’opposition ivoirienne trouvent de quoi alimenter leur réprobation contre le Président Ouattara. Si les partisans du Président atténuent le choc, le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) monte au créneau et à travers son Secrétaire Exécutif se fend d’un communiqué : « Ouattara ne sera pas candidat pour un troisième mandat. C’est écrit dans la Constitution qu’au plus tard, le 5 décembre 2020, le président sortant devra se soumettre à une passation des charges avec le nouveau président »[4]. Quant à Pascal Affi N’Guessan, Président d’un camp du Front Populaire Ivoirien (FPI), il s’indigne en ces termes : « comment Ouattara peut s’imaginer un troisième ou un quatrième mandat. Ce serait même une violation flagrante de la Constitution et de la volonté exprimée par les Ivoiriens. On ne peut pas dire que l’application de la loi dépend des circonstances, des situations, ou des ambitions des uns et des autres. La loi, c’est la loi. »[5]. Le camp du Président de l’Assemblée à travers la voix de Félicien Sekongo, Président du Mouvement pour la promotion des valeurs nouvelles en Côte d’Ivoire (MVCI, composé d’ex-rebelles) « invite les Ivoiriens à se concentrer sur l’essentiel, contenu uniquement dans la sauvegarde de la démocratie, l’amélioration des conditions de vie du peuple, largement endommagées et laisser monsieur Ouattara, assis seul devant la marre à s’amuser à y lancer des pavés… »[6]. Au fond l’intérêt général et la stabilité qu’évoque le Chef de l’État ivoirien sont fortement menacés et malgré toute la mesure dans ses propos, l’avis de l’ancien Président de la Cour Constitutionnelle, Francis Wodié, le révèle : « Nous en sommes encore au stade des supputations, des hypothèses. Mais le président de la République est un homme majeur, un homme responsable qui sait ou doit savoir ce qu’il doit faire, non pas seulement pour lui-même, mais d’abord pour le pays. Donc c’est à lui de voir, de juger pour n’avoir à faire que ce qui va dans le sens de l’intérêt de la Côte d’Ivoire, donc de l’intérêt général »[7].

Mais en réalité, la position de Ouattara rappelle bien celle du Président Houphouët,qui, au nom de sa Côte-d’Ivoire chérie qu’il a bâtie de sa main et de son intelligence, a voulu garder les choses en main jusqu’à ce que la mort l’en sépare en 1993. Seulement, Ouattara n’est pas Houphouët. C’est un principe de gouvernance très usité dans nos contrées : on préfère une stabilité coûteuse au respect des principes d’alternance politique. Et, dans les pays africains où les modèles politiques sont encore à l’essai, avec une tendance accrue au rétropédalage sur les avancées démocratiques, il est bien fréquent que le chef pense qu’il est indispensable, irremplaçable et que la stabilité du pays ne tient qu’à lui. Il se fait cheviller au corps une certitude que les choses tiennent parce qu’il les maintient. Dans l’absolue hypothèse que c’est le cas, il est aussi d’évidence que lorsqu’il ne les tiendra plus, qu’avec certitude les choses vont péricliter. Et tout naturellement, les exemples foisonnent pour démontrer qu’à une administration forte et longue succède une crise qui décape tout le progrès économique construit au long des années : Côte-d’Ivoire, Gabon, Lybie, Togo, etc. Face au dilemme institutions fortes ou hommes forts, nos modèles peinent à choisir les formes résilientes qui ne peuvent en rien dépendre de la finitude des hommes mais uniquement de la chaîne générationnelle qui donne aux institutions une forme d’infinitude. Peut-être qu’il n’y a même pas de dilemme et que le bon sens voudrait que l’on s’attèle à bâtir des institutions fortes quitte à les voir occasionnellement, si bonne fortune nous arrive, sous le leadership d’hommes forts. A tout le moins, quand bien même on aurait la maladresse de les confier à des hommes faibles, la force des institutions, leur fondation légale et légitime survivront au temps.

Parce que la Côte-d’Ivoire est la locomotive de l’UEMOA et joue un rôle stratégique pour toute la sous-région Ouest Africaine, les autres pays doivent s’y intéresser. Ils doivent proactivement préparer leur leadership à prévenir et notamment à éviter la contagion qui commence par les exemples complaisants. Les aventures de structuration de la CEDEAO plutôt ambitieuses sur l’intégration économique et monétaire sont des enjeux assez colossaux qui dépendent d’une Côte-d’Ivoire stable, solide, prospère et où l’histoire d’Houphouëtne se répète pas.

[1]http://www.jeuneafrique.com/565618/politique/cote-divoire-comment-le-discours-dalassane-ouattara-sur-le-3e-mandat-a-evolue/  Edition n° 2995 de Jeune Afrique

 

[2]https://www.afdb.org/fr/countries/west-africa/cote-d%E2%80%99ivoire/cote-divoire-economic-outlook/

[3]Le cacao est le principal produit d’exportation du pays

[4]http://www.jeuneafrique.com/565139/politique/cote-divoire-3e-mandat-pour-ouattara-inacceptable-et-irrealisable-selon-lopposition/

[5]http://www.jeuneafrique.com/565139/politique/cote-divoire-3e-mandat-pour-ouattara-inacceptable-et-irrealisable-selon-lopposition/

[6]http://www.jeuneafrique.com/565139/politique/cote-divoire-3e-mandat-pour-ouattara-inacceptable-et-irrealisable-selon-lopposition/

[7]http://www.jeuneafrique.com/565139/politique/cote-divoire-3e-mandat-pour-ouattara-inacceptable-et-irrealisable-selon-lopposition/

La Cote d’Ivoire : Ce géant d’Afrique aux pieds d’argile

Alors qu’elle affiche une certaine embellie économique depuis l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, matérialisée par des taux de croissance soutenus sur plusieurs années, la Côte d’Ivoire a rouvert une page de son histoire que l’on aurait pu croire close. Le pays a renoué, du 12 au 15 mai 2017, avec une situation de crise sécuritaire que le gouvernement a eu du mal à résorber. 8 400 mutins ont tenu en otage pas moins de 5 villes du pays, d’Abidjan à San Pedro, en passant par Bouaké, Man, Korhogo, Daloa  et Bondoukou. Après des négociations laborieuses, un accord dont le contenu reste encore inconnu a été trouvé et les soldats sont retournés dans leurs camps. Cette deuxième mutinerie en l’espace de 5 mois (après celle de janvier) témoigne d’un malaise profond au sein de l’armée, d’une instabilité politique chronique et remet en question les progrès économiques de ces cinq dernières années.

Un malaise profond au sein de l’armée

Les auteurs de la mutinerie proviennent essentiellement des rangs de la rébellion pro-Ouattara lors de la crise post-électorale de 2011. Celle-ci s’est arrogée une légitimité revendicatrice qui n’est écrite nulle part, du moins sur aucun texte connu, depuis sa participation victorieuse à l’opération qui a expulsé Laurent Gbagbo du pouvoir. Elle considère avoir droit à un traitement de faveur de la part de la majorité au pouvoir qu’il a aidé à s’installer en 2011. Son caractère non républicain et son manque de formation militaire classique en font un élément d’instabilité dans un corps qui est censé garantir précisément la défense et la sécurité du pays. Les soldats mutins s’en sont même pris aux populations qui manifestaient contre leur mouvement d’humeur, en exerçant des violences physiques ou tirant à balles réelles sur elles. Les affrontements ont ainsi fait pas moins de 4 morts et une vingtaine de blessés parmi les civils et certains démobilisés qui n’ont pas été réintégrés dans l’armée après l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara. Cette mutinerie révèle un profond malaise au sein d’une armée ivoirienne divisée et qui peine à se reconstituer après la guerre civile qu’a connue le pays dans les années 2000. Dans cet imbroglio, le rôle de Guillaume Soro, qui était à la tête des Forces Nouvelles d’où sont issus ces ex-rebelles, reste ambigu. L’armée se trouve donc coupée en deux, entre une frange qui a survécu aux multiples crises qui ont secoué le pays dans la décennie 2000 et une autre qui est issue de l’ex-rébellion pro-Ouattara qui a été intégrée au forceps dans ses rangs. Il y a, dès lors, un urgent besoin de formation et d’organisation dans cette armée, pour la rendre apte à assurer ses missions de défense et de protection des populations et lui inculquer les valeurs républicaines.

Une instabilité politique chronique

Au-delà du danger qu’il y a à entretenir une armée non républicaine, peu soucieuse de sa mission de défense et de protection des populations, c’est la stabilité politique même de la Côte d’Ivoire qui est en jeu. Dans un pays qui a connu une guerre civile sanglante dans la première décennie 2000, sur fond de conflits ethniques, la réconciliation nationale est restée un vœu pieux et n’a pas dépassé le cadre de la commission Dialogue-Vérité-Réconciliation et de son rapport qui est resté lettre morte. Avec un paysage politique fortement marqué par les divisions ethniques et régionales, la stabilité du pays peine à s’installer. D’immenses efforts ont été consentis pour mettre les anciens belligérants autour d’une table, mais ils sont jusque-là restés vains. La IIIe République adoptée en 2016 était censée doter le pays d’une stabilité institutionnelle et, au passage, le débarrasser du concept d’ivoirité, mais le rapport des forces sur l’échiquier politique constitue un véritable frein à cette stabilisation. L’appétit de l’actuel Président de l’Assemblée Nationale pour le fauteuil présidentiel est bien connu, dans un attelage institutionnel qui ne lui est pas forcément favorable, tandis que le Président Ouattara ne l’a ni désigné ni pré-positionné pour sa succession. La nouvelle Constitution ivoirienne confère plutôt ce rôle au Vice-Président, Daniel Kablan Duncan, qui semble ainsi avoir la préférence du Chef de l’Etat.

Ce dernier gagnerait à clarifier les positions de chacun dans son entourage et à dissiper le brouillard autour de sa succession. Ses alliés du PDCI n’ont pas tu leur ambition de diriger le pays, et la division au sein du FPI ne garantit pas une élection présidentielle apaisée en 2020. De plus, rien aujourd’hui ne le met à l’abri d’un éventuel coup d’état, après la facilité avec laquelle quelques centaines de soldats ont réussi à prendre en otage tout un pays, et ce, deux fois en l’espace de 5 mois. La purge dans la hiérarchie militaire et le remaniement ministériel intervenus après la mutinerie de janvier n’y ont rien fait, ni son indignation et son désaccord ouvert avec les méthodes de ces revendications pécuniaires. L’autorité de l’Etat a été rudement mise à l’épreuve et la peur installée. Cette attitude de défiance vis-à-vis de l’autorité étatique sape les nombreux efforts qui ont été faits par le régime d’Alassane Ouattara et ses partenaires internationaux pour reconstruire le pays.

La remise en question des progrès économiques

Devant cette situation politique incertaine, le terrain économique – « tiré par l’agriculture, les services et l’industrie, ainsi que par la hausse de la demande intérieure et un essor des investissements » selon la Banque mondiale – risque de devenir plus fragile. Durant ces cinq dernières années, la Côte d’Ivoire a affiché des taux de croissance record, tournant autour de 8%, grâce à une politique d’investissements publics et de relance budgétaire accompagnée par les institutions financières internationales. La reprise économique était encourageante, de nouvelles entreprises se sont créées, des banques étrangères se sont installées et des institutions comme la BAD et la BRVM y ont installé leur siège. Pendant les quelques jours qu’a duré la mutinerie, la plupart des commerçants, magasins, grandes entreprises et banques des villes concernées ont fermé boutique tandis que les institutions internationales et représentations étrangères enjoignaient leurs personnels de rester chez eux et que les écoles demeuraient fermées. Cette situation porte préjudice à la reprise économique parce qu’elle décourage les investisseurs, déjà confrontés aux procédures administratives, au coût de la main-d’œuvre et au paiement élevé d'impôts. Les porteurs de capitaux hésiteront certainement à mettre leur argent dans une poudrière qui peut prendre feu à n’importe quel moment, sur la simple volonté d’hommes en armes qui réclament des primes de guerre, et ce, dans un contexte de montée du terrorisme dans toute l’Afrique de l’Ouest.  Il faut rappeler que les mutins avaient déjà obtenu 5 millions de F CFA chacun après leur premier mouvement d’humeur en janvier, et réclament pas moins de 7 millions F CFA chacun cette fois-ci. La somme globale que devra décaisser l’Etat, s’il accède effectivement aux revendications des mutins, tournerait autour de 60 milliards de F CFA, soit 1% du budget annuel. Que se passerait-il si d’autres corps, comme les enseignants et les médecins, s’adonnaient aux mêmes types de caprices et prenaient en otage tout le pays en cessant leurs activités ou demandaient les mêmes montants ? Le manque à gagner pour l’économie serait énorme, dans un contexte de ralentissement de la croissance et de chute des cours du cacao, filière qui emploie un tiers de la main-d’œuvre ivoirienne.

Cette mutinerie est très inquiétante pour un pays comme la Côte d’Ivoire, qui revient de loin : une décennie de guerre civile à forte coloration ethnique. Elle met à mal une partie de l’armée avec le pouvoir politique et la population pour des revendications de bas étage, à l’heure où les priorités devraient être ailleurs, sachant que les concessions financières faites aux mutins porteront un sérieux coup à l’investissement. La reprise économique amorcée par le régime d’Alassane Ouattara sera durablement remise en question par ces quelques jours de revendications, qui témoignent à la fois d’un malaise profond au sein de l’armée et d’une instabilité politique chronique, à un moment où les forces de défense et de sécurité devraient plus se préoccuper de leur contribution à la lutte contre le terrorisme dans le Sahel. Les mesures prises après le soulèvement de janvier n’ont pas montré leur efficacité et rien ne met la Côte d’Ivoire à l’abri d’un nouvel épisode de violences ou d’un coup d’état.

                                                                                                                          Mouhamadou Moustapha Mbengue

Seule la lutte libère !

tsSur la terre d’Eburnie, le peuple gronde, mais reste faible, inactif et subit l’émergence à marche forcée. De loin il regarde les exilés politiques mourir, de loin il compte le nombre de jours de prison de nombreux anonymes. Face à cette situation, le peuple d’Eburnie pense avoir trouvé la voie : pour l’Ivoirien, la révolution sera numérique.

De profonds germes de contestation

Un pouvoir politique ne craint pas un peuple qui ne sait plus se battre pour ses droits. Au contraire, les mesures gouvernementales plus injustes les unes que les autres s’égrainent dans le silence désarmant d’un peuple qui semble avoir perdu son courage. Sur les marchés, les prix des denrées alimentaires sont au plus haut, les étudiants attendent toujours de pouvoir suivre leur formation dans des conditions décentes ; et même lorsqu’ils grondent pour le respect de leurs droits fondamentaux, ils sont victimes d’arrestations. La hausse des prix de l’électricité ne cesse de peser sur le budget des ménages. Le déguerpissement de nombreuses familles de leurs logements insalubres sans alternative crée de la frustration chez une population aux abois. Erigé en norme, le tribalisme refait surface et les scandales de corruption émergent (notamment dans la filière de l’anacarde).

Dans ce climat rempli de ressentiments, le pouvoir, qui se voulait différent de l’ancien régime, est loin d’être exemplaire. Sur le front politique, la réconciliation reste un mirage, les proches de l’ancien président sont toujours détenus dans les geôles sans jugement et sans avoir ne serait-ce que la chance de bénéficier des services d’un avocat. Dans les pays voisins, les exilés politiques continuent de mourir dans une profonde insouciance.

Face à ce tableau sombre, et malgré des indicateurs macroéconomiques qui affichent un niveau record depuis 10 ans, la première économie d’Afrique francophone (9% de croissance annuel moyen sur la période 2012-2015) est loin d’offrir à sa population l’émergence tant souhaitée.

Dans ce contexte, les Ivoiriens se réfugient sur internet, qui est devenu le mur de leurs lamentations, mais aussi le symbole de leur faiblesse.  Les pétitions se suivent, les hashtags se succèdent, les statuts de contestation se multiplient, les vidéos s’enchaînent…En vain.

Une contestation en manque de leadership

La  démission des élites ne se discute plus. Trop frileuses, elles ont choisi leur camp, celui de l’immobilisme. Elles refusent tout positionnement critique, tout effort de réflexion qui peut sembler désormais dangereux. Elles refusent d’assumer sa place et de mener son combat. Les réseaux sociaux leur servent à montrer qu’elles profitent de l’émergence bien réelle selon elles, n’en déplaise à toutes ces familles qui n’arrivent toujours pas à vivre décemment.

Le terrain de la contestation ayant été laissé vacant par les élites, celles-ci sont remplacées sur  internet par des porte-paroles qui de part la faiblesse de leur argumentaire ne font qu’entériner le nivellement par le bas de notre société. On est loin de cette Côte d’ivoire des années 70 ou la contestation était portée par  Zadi Zaourou ou encore le professeur Memel-Fotê.

S’organiser pour résister

Le peuple burkinabé a montré l’exemple en Afrique en se soulevant le 31 Octobre 2014 contre la violation de ses libertés fondamentales. Depuis longtemps la colère grondait, le peuple se lamentait et les signes avant coureur d’une révolte étaient visibles. Les vicissitudes de la vie ne parvenaient pas à éteindre la sourde révolte qui se préparait. Les soubresauts de l’affaire Norbert Zongo, les émeutes de la faim, les mutineries étaient les prémices d’une probable révolution. Porté par une société civile active et organisée au sein du collectif « Balai citoyen », le peuple burkinabé se préparait à entrer dans l’histoire par la grande porte.

Loin de l’inaction des fameux réseaux sociaux et de leur simulacre de révolution, c’est dans la rue que ce peuple va aller chercher et arracher le départ du maitre de Kossyam. Ce pouvoir qu’on croyait immuable, inébranlable a vertigineusement chuté. A l’instar du Balai Citoyen au Burkina Faso, la société civile ivoirienne doit s’organiser et faire émerger un réel contre-pouvoir pour empêcher que des décisions injustes soient prises en son nom, et à son insu.

Agir debout !

La société civile doit comprendre que face à la démission de ses représentants, elle doit prendre ses responsabilités en s’impliquant concrètement sur le terrain par l’emploi de tous les moyens pacifiques afin de faire entendre sa voix. Revendiquer, s’informer, manifester, boycotter, s’organiser, marcher, proposer, débattre.

Les réseaux sociaux doivent être utilisés de manière efficace, ils doivent servir de caisse de résonance aux revendications, ils doivent aider à mutualiser les forces et ne doivent en aucun cas remplacer la contestation frontale. Un hashtag aussi viral soit-il ne fera jamais fléchir un gouvernement.

Face à un pouvoir qui frôle parfois l’autoritarisme, le risque est grand, et les sacrifices à faire importants. Refuser de se confronter à un pouvoir, refuser de se lever, c’est accepter de subir demain les conséquences de notre léthargie. « L’esclave (le peuple) qui n’assume pas sa révolte ne mérite pas qu’on s’apitoie sur son sort, seule la lutte libère ». 

Joël-Armel Nandjui

 

Un contrat social pour financer l’émergence en Côte d’Ivoire

civLes personnes fortunées empruntent pour financer leurs investissements car les banques leur font confiance. Ceux qui ont moins de moyen, et qui ont donc davantage besoin de prêts, n'y ont pourtant pas accès et font souvent appel à la solidarité familiale ou communautaire pour leurs investissements. La même logique peut être faite à l’échelle des pays. Ceux à revenu élevé empruntent, tandis que les pays africains à revenu faible n'ont qu'un accès limité aux marchés de capitaux.

Au cours de ces dernières années, seul un quart des pays subsahariens ont pu accéder aux émissions obligataires internationales, les autres n’ayant d’unique choix que de solliciter l'aide internationale. Si les flux d'investissements direct étrangers, qui comptent pour près de 3 % du PIB de l’Afrique subsaharienne, ne sont pas négligeables, ils sont majoritairement dirigés vers l'extraction de ressources naturelles où 80 % à 90 % de ces montants ressortent presque immédiatement pour financer les importations nécessaires aux projets. Comment un pays comme la Côte d'Ivoire peut-il sortir de cette impasse ?

La réussite des pays émergents montre la voie à suivre. Si l'aide internationale peut financer l'impulsion initiale, les pays en quête d'émergence doivent avant tout compter sur eux-mêmes. Cela signifie qu'ils doivent mobiliser leurs propres ressources pour financer leur développement. Et c'est peut-être aussi là une définition de l'émergence.

Pour la Côte d'Ivoire, une telle option devrait se traduire par une augmentation de l’épargne domestique pour que celle-ci puisse financer les besoins du pays. Située à environ 20 % du PIB en Côte d’Ivoire, elle est pourtant au-dessus de la moyenne africaine et de celle des pays à bas revenu, mais reste éloigné du niveau des pays émergents d'Asie, où elle dépasse 30 %.

Le véritable problème de la Côte d'Ivoire en matière de financement domestique se situe sur un autre plan,  à deux niveaux. D'abord, l'État ne démontre pas de capacité à générer une épargne publique suffisante. La pression fiscale du pays s’établit à 16 % du PIB, soit en deçà des objectifs des décideurs politiques ivoiriens et de la région UEMOA (20 %), pourtant inférieurs aux taux observés au Maroc ou en Afrique du Sud (25 %).  Les autorités ivoiriennes ne mobilisent en outre que 25 % des recettes potentielles de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui pourraient être perçues sur l’ensemble des transactions internes du pays. À titre de comparaison, un pays émergent comme l'Ile Maurice affiche un taux de recouvrement équivalent à 75 % de son potentiel de TVA.

Le deuxième problème est lié à l'épargne privée. Le défi n'est pas tant d'augmenter son montant mais d'améliorer son affectation. Aujourd'hui, seuls 15 % des épargnants ivoiriens placent leurs économies dans le système financier local, un taux deux fois inférieur à la moyenne africaine. Ce choix ne permet pas de profiter du formidable effet de levier que pourrait générer le multiplicateur de crédit sur l'ensemble de l'économie. Par voie de conséquence, les montants de crédits octroyés par le système financier ivoirien s’élèvent à 30 % du PIB, alors que ceux-ci atteignent plus de 100 % dans des pays comme le Maroc, l'Afrique du Sud et l'Ile Maurice. Ce taux est par ailleurs inférieur aux montants recensés au Ghana, Sénégal et au Togo.

Imaginons que la Côte d'Ivoire puisse agir à la fois sur la mobilisation de son épargne publique et la capacité de crédit de son système financier. Imaginons encore que le recouvrement des impôts atteigne 20 % du PIB et que le taux de crédits augmente jusqu'à 80 % du PIB. Au taux de change actuel et en utilisant le revenu du pays en 2015, ces sources de financement s’établiraient à 40 milliards de dollars ou une hausse de 21 milliards de dollars par rapport aux montants déclarés fin 2015.

Les montants ainsi générés par les sources domestiques permettraient de compléter les engagements financiers extérieurs d’environ 25 milliards de dollars. Compte-tenu des annonces sur la période 2016-20 tenues par le Groupe Consultatif en mai dernier à Paris l'ensemble des financements intérieurs et extérieurs serait amplement suffisant pour couvrir les investissements identifiés par le Plan national de développement sur la période 2016-20, et pour ouvrir la voie vers l'émergence.

La question qui demeure est la suivante : comment parvenir à accroître la mobilisation et l'utilisation de l'épargne domestique tant du côté du secteur public que privé ?  La réponse est éminemment complexe  mais une chose est sûre : elle devra inclure un contrat social à travers lequel les différents acteurs se feront mutuellement confiance et qui possèdera des règles claires et transparentes qui chercheront à optimiser le bien-être collectif du pays et non pas les intérêts pécuniaires de certains groupes particuliers. Les contribuables devront pouvoir compter sur la bonne utilisation de leurs paiements par les pouvoirs publics. De même, les épargnants devront avoir confiance en leurs banques, lesquelles devront en retour avoir suffisamment d’assurances quant à l’effectivité du remboursement de leurs prêts.

Pour en savoir plus, consultez le dernier rapport sur la situation économique en Côte d'Ivoire.

Cet article est issu des Blogs publiés par la Banque Mondiale et soumis par JACQUES MORISSET.

Que veulent dire les réélections d’Alpha Condé et d’Alassane Ouattara ?

alpha_conde_et_alassane_ouattara1Si, de Bouteflika à Robert Mugabe, on ne fait pas fi depuis quelques années du débat sur l’âge des chefs d’Etat africains, les jeunes de Guinée et de Côte d’Ivoire, pourtant soucieux de leur avenir, ont voté pour des personnalités représentant sensiblement le passé. Ces victoires de septuagénaires rompus à la bataille politique sont emblématiques d’une difficulté récurrente au sein des oppositions africaines.

Pourquoi les jeunesses guinéenne et ivoirienne ont-elles accordées leur confiance aux anciens Condé et Ouattara ? Ils ne sont sans doute pas nombreux, ceux qui, parmi eux se souviennent de l’Alpha Condé, opposant teigneux et bouillant, familier des geôles de Lassana Conté. Tout comme rares sont ceux qui trépignent encore au souvenir de l’appel au secours du « vieux » Houphouët Boigny au brillant technocrate Alassane Ouattara pour sauver la Côte d’Ivoire de la crise économique, en 1990.

A Conakry comme à Abidjan, le « Un coup Ko » a rendu groggy une opposition aussi dispersée que disparate, aussi désorganisée qu’incohérente

En Afrique, les oppositions n’ont souvent que pour seule ambition de remplacer le président sortant. On cherche le consensus contre un homme, oubliant l’édification d’une véritable alternative politique et d’un projet de société crédible.

Alors que, contrairement à ce que semble penser une partie de l’élite politique, les électeurs ne sont guères des aventuriers incapables de choix de raison face à l’impérieuse question du destin de leur pays. Nos opinions publiques ont foncièrement mûri et les électeurs sont dans l’attente d’une meilleure gouvernance, qui prennent en considération leurs préoccupations, notamment les plus élémentaires et impactent positivement leurs conditions de vie.

Malgré la plume de Thierno Monénembo qui reproche à l’opposition guinéenne d’être « trop légaliste, trop démocrate », la réélection de Condé tout comme celle de Ouattara suivent une logique claire : ils ont, mieux que la « jeune garde » de l’opposition, réussi à donner espoir à travers des réalisations et à forger l’assurance de lendemains meilleurs. Tiendront-ils parole ?

Et devant une cinglante défaite, leurs oppositions ont, soit refusé de combattre, soit invoqué, une énième fois, la fraude devenue un point Godwin, déjà vu !

Du défi de transformer les promesses en actes

Le défi de cette classe politique finissante est de préparer le passage du témoin à une nouvelle génération, et de ne pas s’inscrire dans une tentative, qui sera vaine, de s’agripper au pouvoir. Un vent de renouveau souffle en Afrique et le continent se place lentement mais sûrement au cœur des problématiques mondiales. Le point noir de la carte du monde, jadis océan de misère, compte dorénavant comme une opportunité économique.

Mais je demeure convaincu que cette belle promesse africaine restera vaine si nous n’arrivons pas à construire des modèles démocratiques solides et à la hauteur des défis qui nous interpellent.

C’est là le grand défi de notre génération de « smarts » (l’expression est du caustique ancien premier ministre du Québec, Jacques Parizeau) : au delà du gazouillis des réseaux sociaux et des objets connectés, il devient en effet urgent de transformer enfin cette énergie et cet élan en un engagement concret pour la démocratie et le progrès social.

L’Afrique a besoin que sa nouvelle élite quitte sa zone de confort technocratique pour s’engager à prendre le pouvoir, et à gouverner. Car la révolution transformatrice, celle qui charriera une Afrique nouvelle, ne sera pas twettée. Elle est à fabriquer et imposer. Il faut que la jeunesse intègre cette réalité.

Hamidou Anne

VALLESSE, une success-story ivoirienne

Le Fonds Afrique Développement (FADEV | www.fadev.fr), un fonds d’investissement solidaire à destination des PME africaines, compte diffuser des portraits de chefs d’entreprise africains avec lesquels il collabore. Valoriser et faire connaître leur réussite est autant un signe de fierté qu’un message d’encouragement à tous les futurs entrepreneurs du continent ! Aujourd’hui, nous retraçons le parcours de la maison d’édition ivoirienne VALLESSE, que le FADEV et son partenaire technique en Côte d’Ivoire, le CCDE, soutiennent et accompagnent depuis 2014.

 

Valesse

 

 

 

 

 

 

L’histoire de VALLESSE est encore intimement liée au parcours de sa dirigeante, Madame Diomandé. Entrée en 1999 au CEDA (Centre d’Édition et de Diffusion Africaine), première maison d’édition en Côte d’Ivoire, elle passe successivement au service éditorial, au service commercial et distribution (dont communication) puis à la Direction Générale en tant qu’Assistante du Directeur Général Adjoint, chargée de la fabrication jusqu’en février 2005.

Licenciée pour motif économique en février 2005, Madame Diomandé poursuit son aventure dans l’édition en devenant assistante de direction à l’imprimerie Nour pendant 9 mois, avant de ressentir profondément le besoin d’une maison d’édition produisant des ouvrages de meilleure qualité, tant dans le fond que dans la forme.

Ce sentiment s’accompagne d'une vocation pour l’entrepreneuriat qui se concrétisa en 2006 par la création de la société VALLESSE Sarl dont l’objet est l’Edition d’ouvrages de qualité, avec un goût prononcé pour la littérature éducative. En parallèle et afin de compenser les fluctuations de commandes inhérentes au métier d’éditeur, VALLESSE proposait initialement l’Impression et la Prestations de services divers, activités abandonnées avec l’essor des commandes d’édition.

L’aventure a d’abord débuté avec un premier associé détenant 30% du capital. Madame Diomandé  recrute d’anciens membres expérimentés du Centre d’Édition et de Diffusion Africaine (secrétaire d’édition et personnel administratif) pour former son équipe. Ensemble l’équipe s’est mise à la recherche de manuscrits qui, une fois édités pouvaient être soumis à agrément du Ministère de l’Education pour être utilisés comme ouvrages de littérature scolaire conseillés, assurant une commande large des instituts d’enseignements nationaux.

Dans le but de déceler de nouveau talents et de contribuer à la promotion de la lecture et à l’écriture VALLESSE lance dès janvier 2007 un concours littéraire dénommé «  les Manuscrits d’OR » récompensé par l’édition en un ouvrage collectif des manuscrits primés. Soutenu par Côte d’Ivoire Telecom, le concours a pu être organisé 3 années durant avant que les subventions ne cessent.Valesse 2

En 2007, le Chiffre d’Affaires atteint ainsi  101 347 932 FCFA. Et c’est en 2008, avec le premier ouvrage agréé par le Ministère de l’Education Nationale, que l’Edition connait une véritable percée. En parallèle, la cessation d’activité de son distributeur attitré Distrilibre, conduit VALLESSE à la décision d’internaliser cette fonction. L’équipe est alors renforcée par un délégué pédagogique (pour l’adoption effective des ouvrages dans les classes) et une assistante commerciale (qui s’occupe des librairies et de la facturation).

2009 marque un tournant dans la stratégie et dimension de VALLESSE. De nouveaux titres de littérature générale rejoignent les collections dont certains ont été réalisé à compte d’auteurs ou compte à demie. 3 titres figurent désormais au programme des lycées et collège (ouvrages conseillés) et un au programme Parascolaire (réalisé en formant une équipe de pédagogue). Au fur et à mesure l’activité du volet impression et prestations de services décroît pour que l’équipe se consacre entièrement à l’édition.

Les statuts sont ensuite modifiés en trois points :

– Augmentation de capital qui passe de 1 000 000 de FCFA à 3 000 000 FCFA,

– Rachat des parts de l’associé historique qui souhaitait désormais s’orienter vers d’autres projets d’investissements,

– Changement de l’objet social qui est désormais « éditions, distribution, diffusion et représentation ».

Aujourd’hui, VALLESSE figure parmi les éditeurs de référence en Côte d’Ivoire. La Maison d’Edition possède l’expertise et la maitrise de toute la chaîne d’activité. Elle continue de se perfectionner à travers différents séminaires et rencontres professionnelles et de croître grâce à l’apport de mécanismes financiers tels que le Fonds Afrique Développement, entré au capital en 2014, qui apporte un appui technique et financier pour développer les activités (financement de nouvelles collections, participation à des événements internationaux…).

Les résultats et nouveaux défis suivent :

– Lancement de la collection YENIAN

– Attribution de nouveaux manuels scolaires  par le Ministère de l’Education Nationale (le premier manuel « Education Musicale 6ème » a été édité pour la rentrée scolaire 2015-2016)

– Sortie du livre "le charme rompu", 1er titre de la collection « Nouvelle »

– Agrément de deux (02) nouveaux titres pour la rentrée scolaire 2015-2016 (L’Héritier de Mboula pour la classe de 4ème et Yavan et la montre merveilleuse pour  la classe de CM2)

– Nomination de Madame Diomandé Fidèle au poste de trésorière d’AFRILIVRES, association d'éditeurs africains francophones

 

Martin FLEURY
 

Vous souhaitez en savoir encore plus ?

Page facebook : https://www.facebook.com/pages/Vallesse-Editions/548867148501839

Profil sur la plateforme FADEV : http://www.fadev.fr/projet/1-vallesse-edition-jeunesse-litterature-africaine

Ouvrages disponibles sur Afrilivres : http://www.afrilivres.net/fiche_editeur.php?e=10101

Pourquoi la Côte d’Ivoire attire tant les investisseurs ?

En 2013, les flux d’IDE en direction de la Côte d’Ivoire ont plus que triplé par rapport à 2012, atteignant 621 millions d’euros (CEPICI). En 2014 et 2015, cette donnée devrait être encore plus importante. En outre le pays bénéficie de conditions allégées sur les marchés financiers (régional et international). Ses émissions de longue maturité (supérieur à 3 ans) sont sursouscrites à des taux relativement faibles par rapport à ses pairs de la région (6% en moyenne sur les émissions effectuées depuis 2013). Pour ses premières incursions sur le marché international, le pays a obtenu des taux relativement bas (5,625% pour la première portant sur 750 millions de dollars et 6,625% sur la seconde portant sur 1 milliard de dollars) là où les autres pays obtiennent des niveaux de rémunérations atteignant 10%.

Les partenaires bilatéraux mais aussi les institutions multilatérales se bousculent pour proposer des financements à la Côte d’Ivoire. Ainsi le pays a bénéficié en 2012 d’un C2D (contrat de désendettement et de développement) de la France et l’aide internationale qui a atteint son plus bas niveau durant la crise (100 millions de dollars) s’accélère, se situant à près d’un milliard de dollars en moyenne sur les 3 dernières années. La Chine ne compte pas être en marge. D’autres pays d’Asie tel que l’Inde et Singapour sont prêts à investir dans le pays. Les libanais, déjà fortement présents dans l’économie ivoirienne, tiennent à renforcer leur emprise. Les autres pays africains s’empressent d’acquérir des actifs en Côte d’Ivoire. Selon CEPICI, une bonne partie des investissements reçus par le pays en 2013 proviendraient de la sous-région ouest africaine. Les récentes visites du roi du Maroc à Abidjan portaient un cachet économique. Par ailleurs, toutes les multinationales qui souhaiteraient s’implanter en Afrique de l’ouest veulent désormais passer par la Côte d’Ivoire[1].

De toute évidence, la Côte d’Ivoire a le vent en poulpe (au-delà de l’affection qu’on peut porter au pays) que même les élections présidentielles d’octobre, qui inquiètent à raison des antécédents socio-politiques du pays ne semblent pas remettre en cause.

Qu’est ce qui explique cette attractivité de la Côte d’Ivoire et permettra-t-il d’améliorer les conditions de vie des populations ?

Une situation socio-politique tendue, mais sans danger. La Côte d’Ivoire a connu une période sombre dans son histoire et il serait difficile d’en faire pire. Avec les élections de 2011, le pays semble avoir tourné la page et cette situation tend à réconforter les investisseurs. Si le risque de heurtes n’est pas écarté après les élections à venir et que les défis sur le plan sécuritaire demeurent énormes, source d’instabilité ; il n’affecterait presque pas ou peu l’activité économique. Les tensions entre les différents partis ne se sont certes pas encore totalement dissipées et l’actualité des procès après les élections de 2011 est encore présente. Mais tout porte à croire que les populations sont plus aujourd’hui portées par leur avenir et la restauration de l’image « pays de paix » que leurs désaccords politiques. Selon des observateurs de France 24 à Abidjan, ces tensions qui se sont cristallisées avec une bagarre récente entre un « pro-Gbagbo » et un « pro-Ouattara » n’a fait que les choux gras de la presse et ne suffirait pas à inciter les populations à de la violence. Néanmoins, elle témoigne encore de la fragilité de cette stabilité politique, contenue aujourd’hui par le système en place, et qui pourrait à termes s’amplifier et plonger le pays dans une nouvelle crise.

Le réveil du géant, porté par une vision bien pilotée. La Côte d’Ivoire est la locomotive de la zone UEMOA, l’un des géants de l’Afrique de l’ouest en général, derrière le Nigéria, le Ghana et à côté du Libéria et de la Sierra Léone. La restauration de la situation socio-politique et la nécessité de reconstruire le pays, qui se sont traduites par un investissement public massif (10% en moyenne par an entre 2013 et 2015), a permis d’accélérer la croissance qui a atteint un taux de croissance de 8% en 2013 et 2014: la Côte d’Ivoire rattrape le retard qu’elle a accusé sur elle-même. Selon les prévisions du FMI, le pays devrait afficher un taux de croissance moyen de 6 à 7% entre 2015 et 2020. En outre, le taux de croissance de la population (2,6% par an selon les résultats du dernier recensement) est relativement faible vis-à-vis des perspectives de croissance ; ce qui se traduirait par une hausse (théorique) du pouvoir d’achat des populations : le PIB par tête passerait ainsi de 1403 USD en 2013 (2945 USD PPA) à presque 2000  USD (4500 USD PPA) en 2020.  En outre, le pays dispose d’énormes potentialités dans presque tous les secteurs (de l’agriculture aux services) que les autorités ambitionnent de valoriser avec la mise en œuvre du plan Côte d’Ivoire Emergent.

L’investissement public, concentré notamment dans les infrastructures (électricité, transport, etc.) transforme le pays et permet d’y réaliser des affaires de façon durable. Plusieurs réformes entreprises par les autorités entretiennent ce renouveau : la mise en place d’un nouveau code d’investissement et de nouveaux instruments d’encadrement du secteur privé, notamment un cadre de dialogue secteur public – secteur privé, un guichet unique pour les formalités de création d’entreprises, un tribunal de commerce ainsi qu’une plateforme d’échanges pour centraliser les appuis des partenaires au développement à l’environnement des affaires. La solvabilité apparente des consommateurs, l’ouverture du pays sur le marché régional constituent autant de facteurs qui contribuent à renforcer l’attractivité du pays pour les investissements privés.

Une concurrence régionale inexistante. La Côte d’Ivoire bénéficie en outre de la situation défavorable de ses voisins. Hormis le Ghana et le Nigéria et dans une moindre mesure la Sierra Léone et le Libéria avec leur ressources minières, les autres pays de la région sont minés par des difficultés qui entachent leur attractivité auprès des investisseurs. Avec un Sénégal naturellement sous doté et qui souffre de problèmes énergétiques et d’infrastructures ; une situation sécuritaire instable dans le sahel (Mali, Burkina et Niger) ; le Togo et le Bénin qui sont devenu des plateformes commerciales pour le Nigeria et offrent (malgré leur potentiel) peu d’opportunités d’affaires avec des infrastructures défaillantes et un cadre institutionnel faible et non sécurisant, la Côte d’Ivoire se présente de loin comme le seul pays de la sous-région capable d’accueillir les investissements étrangers, et ce d’autant plus qu’elle ouvre la voie aux autres pays (Mali, Niger, Burkina). La boucle ferroviaire, qui sera prochaine réalisée par Bolloré, vient davantage conforter cette position de la Côte d’Ivoire.

Malgré cet engouement que suscite le pays, sa situation sociale n’a que très peu évoluée. « Les routes ne se mangent pas » disent les abidjanais. Cependant, ces routes les « feront manger » à termes (en 2020), à en croire le plan Côte d’Ivoire Emergent. En effet, la croissance actuelle est essentiellement portée par ces projets d’infrastructures et l’exportation mais ce sont ces infrastructures qui constitueront le socle de l’émergence du pays. Elles permettront aux entreprises de profiter des potentialités du pays, de s’orienter vers de la transformation, donc d’employer, de participer à la redistribution de la richesse et de réduire la dépendance du pays aux produits importés … du moins théoriquement. Si une sortie de crise n’est pas toujours synonyme de relève économique (cas du Libéria et de la Sierra Léone), le pari semble aujourd’hui relevé pour la Côte d’Ivoire et la pérennité de ses performances dépendra des choix de politique économique des autorités, notamment en matière de capital humain. Si pour l’heure, la politique de l’Etat en matière d’infrastructures est bien définie et visible, celle portant sur le renforcement du capital humain reste à préciser.  

Loin de stigmatiser l’embellie économie et les transformations en cours en Côte d’Ivoire, il convient de signaler que l’attractivité du pays demeure fragile et pourrait être remise en cause par tout choc exogène, notamment sur le plan politique. Il urge donc de renforcer les mécanismes visant à sa pérennisation et à son appropriation par les acteurs économiques internes : inclusion financière, renforcement du capital humain, environnement des affaires sécurisant, fiscalité simple et renforcement des institutions.

Foly Ananou


[1] Consulter la page Côte d’Ivoire de Jeune Afrique

Trois dimanches, cinq élections: un octobre africain

JPG_Elections180614Trois dimanches chargés attendent les passionnés de politique africaine en octobre prochain. Trois jours pour pas moins de cinq élections présidentielles sur le continent, complétées de surcroît par des législatives dans certains cas. Le Burkina Faso et la Guinée ouvrent le bal le 11 octobre. Une présidentielle est ensuite annoncée en Centrafrique le 18. Les électeurs ivoiriens et tanzaniens se présenteront eux dans les bureaux de vote la semaine suivante, le 25 octobre. Cinq scrutins, qui chacun à leur manière ont une saveur particulière.

C’était déjà un jour d’octobre, il y a près d’un an, que les Burkinabè se soulevaient pour chasser du pouvoir Blaise Compaoré et ses velléités de présidence à vie. En quatre jours, le peuple du Faso inscrivait ainsi son nom tout en haut d’une page d’histoire, peut-être en train de s’écrire sur le reste du continent. Celle où un chef d’État ne gagne pas automatiquement le droit de se porter candidat à sa propre succession, et où le multipartisme ne ressemble plus à une façade où prospèrent les entreprises politiques personnelles des uns et des autres.

C’est donc peu dire que la présidentielle burkinabè est très attendue après une transition d’un an. Son bon déroulement sonnerait comme un message d’espoir pour ceux qui au Rwanda, au Congo-Brazzaville ou en RDC, s’opposent à la reconduction de leur président pour un troisième mandat, ou pour les Burundais qui ne veulent pas se résoudre à accepter la réélection controversée de Pierre Nkurunziza. A l’inverse, un scrutin raté, même à moitié, ferait le jeu de tous ces dirigeants qui se présentent comme les incontournables garants de la stabilité et la paix. Et il y a déjà comme un mauvais signal, à moins de deux mois du vote. Le choix des autorités de transition d’invalider les candidatures aux législatives d’anciens cadres du régime Compaoré, au nom de la constitution, ressemble à un premier accroc sur les voies de la réconciliation.

En Guinée, après des mois de désaccord, le pouvoir et l’opposition ont enfin trouvé un compromis sur les dossiers aussi sensibles que la composition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) – qui devrait bientôt accueillir deux nouveaux représentants de l’opposition – l’organisation des élections locales, ou le réexamen du fichier électoral. Prudence, affirment malgré tout certains responsables politiques, qui redoutent des délais trop courts pour permettre aux autorités de respecter leurs engagements.

Quoi qu’il en soit, le 11 octobre, comme lors de la présidentielle “historique” de 2010, le duel au sommet devrait opposer Cellou Dalein Diallo et son UFDG, à Alpha Condé, qui depuis a passé cinq ans à la présidence. La crainte, ce sont de nouveaux épisodes de violences, comme ceux qui surviennent régulièrement en Guinée quand il s’agit d’élections, à l’image des incidents meurtriers d’avril et mai dernier lors des manifestations de l’opposition. L’autre inquiétude c’est encore un raidissement sur des bases ethniques avec d’un côté les Peuls rassemblés derrière Cellou Dalein Diallo et de l’autre les Malinké avec Alpha Condé. Pour cette présidentielle, Cellou Dalein Diallo a scellé une alliance électorale opportuniste mais ambiguë avec l’ancien chef de la junte Moussa Dadis Camara, qui pourrait lui apporter des voix de sa région d’origine, la Guinée forestière. Un geste surprenant quand on sait que des partisans de l’UFDG faisaient partie des victimes des massacres du 28 septembre 2009, pour lesquels Moussa Dadis Camara a été inculpé il y a quelques semaines.

Une présidentielle le 18 octobre en RCA ?

Le premier tour de présidentielle centrafricaine pourra-t-il avoir lieu la semaine suivante ? Certains observateurs ou des responsables politiques comme le candidat déclaré Crépin Mboli Goumba n’y croient guère. Après deux ans et demi de crise, la Centrafrique reste un Etat “failli” où la plupart des services publics sont à terre. Y organiser des élections dans de bonnes conditions relève du défi, et le mot est faible. D’autant que de nouveaux affrontements entre chrétiens et musulmans ont eu lieu ces derniers jours à Bambari, dans le centre du pays, faisant au moins une quinzaine de morts. Il faudra ramener le calme, aller au bout d’un recensement électoral difficile, trouver les fonds nécessaires au scrutin, établir le fichier électoral et comment faire voter les réfugiés qui ont fui le pays pendant les violences. Soit près de 500 000 personnes dont un peu moins de la moitié d’électeurs potentiels. La communauté internationale s’accroche pourtant à ce calendrier électoral comme à une bouée de sauvetage et son respect est la mission numéro 1 assignée aux autorités de transition. En attendant les candidats se bousculent, dont l’ancien président François Bozizé, des ex-premiers ministres comme Martin Ziguélé, Nicolas Tiangaye ou Anicet Dologuélé… pour un scrutin censé permettre de tourner la page.

La Côte d’Ivoire a quant à elle retrouvé sa tranquillité et son allant économique. Fort de ces résultats, Alassane Ouattara rêve de se faire réélire dans un fauteuil. Une présidentielle apaisée et crédible le 25 octobre servira en tout cas à tenter d’oublier le traumatisme du scrutin précédent et des quelque 3 250 personnes qui ont perdu la vie pendant la crise post-électorale et les affrontements fratricides entre pro-Gbagbo et pro-Ouattara. La société civile ivoirienne vient d’ailleurs de rendre publique une charte qu’elle souhaite faire signer à tous les candidats pour qu’ils s’engagent à une élection sans violence. La quasi-totalité des figures de la vie politique ivoirienne devraient la parapher parce qu’à peu de chose près, ils sont tous sur la ligne de départ : Ouattara bien sûr, mais aussi Pascal Affi Nguessan, Charles Konan Banny, Kouadio Konan Bertin (KKB) pour ne citer qu’eux… Des rivaux qui se présentent donc divisés face à un chef de l’État qui se sent fort.

Le modèle tanzanien

Enfin la Tanzanie aura elle aussi droit à une présidentielle le 25 octobre. Une élection inédite entre d’un côté le ministre des Travaux Publics John Magufuli, vainqueur surprise de la primaire au sein du parti au pouvoir, et de l’autre côté l’ancien premier ministre Edward Lowassa. Défait pendant la primaire, Edward Lowassa a réussi une jolie manœuvre puisqu’il a tout simplement changé de camp pour devenir le chef de file de l’opposition, dont il sera le candidat unique. A l’approche du scrutin, on retiendra surtout le passage de relais du chef de l’État Jakaya Kikwete, qui conformément à la constitution, ne brigue pas un troisième mandat. La Tanzanie fait figure de modèle puisqu’aucun président n’y a tenté un quelconque tripatouillage électoral pour s’accrocher au pouvoir.

Cinq présidentielles donc après lesquelles courront les journalistes et les observateurs, happés par les soubresauts de l’actualité et son temps forcément trop court. Aura-t-on le recul nécessaire pour voir que 2014, 2015 et 2016 pourraient bien ressembler à un tournant de la politique africaine, comme le furent les années 1990 et les grandes conférences souveraines, préludes à la démocratisation.

Il y a déjà eu une révolution au Burkina Faso, une alternance paisible au Nigéria. Il y a maintenant une série d’élections qui se profilent et peuvent chacune incarner un symbole fort pour leur peuple et les dirigeants de la région. L’ouverture au multipartisme des années 1990 s'est malheureusement conclue par un grand espoir déçu. Qu’en sera-t-il cette fois-ci ?

Adrien de Calan

Cécile Fakhoury – Galeriste à Abidjan

La galerie Cécile Fakhoury est un îlot en bordure du tumultueux boulevard Latrille. Une enceinte pourvue d’un cube de béton, pavée de verdure et plantée d’étranges sculptures en bois. Un tour de l’exposition en cours et nous filons dans une pièce aérienne et épurée, à l’image de la maitresse des lieux. Cécile Fakhoury nous écoute, nous sommes un peu intimidés … Qu’est-ce que l’art contemporain ?

IMG_5850-copieL’histoire a débuté il y a bien longtemps. Fille d’un galeriste, collectionneur d’art moderne, la voie était toute tracée. Quoique. Après des études parisiennes, la française débarque à Abidjan et décide d’ouvrir une galerie, sa galerie ; nous sommes en septembre 2012. Les débuts sont difficiles, stigmates de la crise obligent. La machine est lancée, pivotant entre les deux pôles des marchés local et international. Les ventes varient mais l’aspiration reste la même : développer le marché local, tout en s’inscrivant dans l’écosystème international de l’art contemporain. La galeriste, qui bat le pavé des foires mondiales – « le nerf de la guerre » – affirme son plaisir à vendre à Abidjan. Cette satisfaction se lit dans les histoires des artistes présentés. Nombre d’entre eux ont un passé nomade, ils sont partis et revenus au pays, à l’instar de Jems Robert Koko Bi ou de François-Xavier Gbré. Les œuvres du premier sont massives, assaillantes, convoquant le sur-place. Il vit en Allemagne. Le second, qui vit et travaille en Côte d’Ivoire, somme le spectateur de lire l’événement dans le vide. Ses photographies témoignent d’une histoire du silence où l’homme, absent sur l’image, est au cœur. Des histoires invisibles pourtant criantes et inexorables.  Des artistes bel et bien présents, de « bons témoins » de leur époque.

Quand Cécile Fakhoury parle, le « nous » abonde. Les artistes présentés dans la galerie deviennent un groupe emporté par un élan, une vocation. « Le projet de ma vie », nous glisse la galeriste : titillée sur ses talents entrepreneuriaux, Cécile Fakhoury nous parle de sa volonté de placer ses artistes dans de bons musées, de construire et de sortir avec eux du pays … pour mieux y revenir. Rencontrés au fil des cercles d’initiés, d’ici et d’ailleurs, les artistes de la galerie Fakhoury ont des profils divers et jouent avec des palettes variées (photographie, sculpture, peinture, etc.). Leur « dénominateur commun » est de raconter notre vie d’aujourd’hui. Cet ancrage ultra actuel, en opposition à l’art moderne, est le suc de l’art contemporain pour la galeriste et la caractéristique de ses artistes. 

La vocation va de pair avec une démarche résolument pragmatique. La galerie devient une « structure économique », un « espace commercial » : la question n’est pas posée, sans ambages l’art est synonyme de marché pour Cécile Fakhoury. Si elle ne se retrouve pas dans le qualificatif d’entrepreneur – trop proactif pour elle – la galeriste évoque son cube en « son projet », « sa réalité quotidienne », nourri de son attrait artistique depuis l’enfance. 

Affirmant sans détour que l’aspect financier est inexorable, Cécile Fakhoury partage une vision enthousiaste sur le marché de l’art contemporain africain. 15_JRKB_nomansland_Expo_vues_GCF_6De nombreux facteurs participent à son développement, avec l’essor de multiples foires internationales (Art Dubaï, 1 :54 et Freeze London à Londres, biennales, etc.). L’attrait et la motivation pour l’art, perdus pendant les crises, reviennent petit à petit. A Abidjan, cette curiosité renouvelée participe à la multiplication des propositions et à l’ouverture de nouveaux lieux, tels que la fondation Donwahi. Avec cette dernière, voisine de la galerie Fakhoury, les liens sont vifs pour « créer un pôle » dans la ville. S’engager à développer un marché local contribue à nourrir un marché international, l’un n’allant pas sans l’autre pour la galeriste. Cette stimulation bat en brèche l’idée d’une concurrence néfaste : la rareté des acteurs sur le marché l’en prévenant. Cécile Fakhoury concède rêver de voir pousser une galerie en face de la sienne, « un marché ne se fait pas tout seul ». Sa vision d’une meilleure dynamique grâce à un tissu plus dense de galeries détonne dans le discours commun.

Quant à savoir qui sont les acheteurs, le discours se répète. A l’instar de l’art traditionnel, l’art contemporain africain reste malheureusement peu connu des autochtones. La foule et la gloire des expositions au Quai Branly ne trouvent guère d’équivalents sous nos tropiques. Les étrangers demeurent les premiers acquéreurs des œuvres produites sur le continent noir. D’où l’enthousiasme et la fierté quand des locaux se font collectionneurs. Portrait robot de ces derniers : des jeunes entre 30 et 40 ans ayant fait leurs études hors d’Afrique. Cette tendance est à entretenir, d’où les efforts de sensibilisation déployés par la galerie. Avec son équipe, la communication inclut des actions de visibilité sur les réseaux sociaux, sur le site internet et des évènements ponctuels. Les plus jeunes, au cœur de l’envie de la galeriste de faire connaître cet art, sont loin d’être oubliés. Le cube blanc se transforme de temps à autres en cour de récréation, une fois le scepticisme général des parents abidjanais surmonté…

Pauline Deschryver

Source photo Galerie Cécile Fakhoury /

Site de la galerie http://cecilefakhoury.com/

Côte d’Ivoire : réconciliation acquise ou à construire ?

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La Côte d’Ivoire a connu une longue et difficile période de divisions sociales exacerbées par  des conditions économiques peu favorables, et par des hommes politiques animés par de sinistres intentions. Ces divisions ont conduit à des démonstrations inouïes de violence entre les différents groupes qui la composent. Or, avant ces circonstances dévastatrices, ces derniers n’entraient pas des relations aussi bellicistes. La crise post électorale de 2010-2011, ayant conduit à plus de 3000 morts en moins de cinq mois, a été le paroxysme de ces violences inter-ethniques à forts relents politiques.

Retour sur quinze années ponctuées de malentendus et de guerres fratricides alors qu’un scrutin déterminant pointe à l’horizon.

La prochaine élection présidentielle en Côte d’Ivoire est prévue au mois d’octobre de cette année. Force est de se demander si, d’une part, les populations, avec les différentes mesures prises par l’Etat pour tenter d’apaiser leurs peines, de compenser les pertes subies, de leur faire tourner la page sur les horreurs vécues et de remettre au goût du jour le « vivre ensemble » dans la paix, et d’autre part, l’Etat, représenté par ses instances et dirigeants, ont mesuré l’impact de ces incitations à la haine. S’ils ont pris la pleine mesure de leurs conséquences socio-économiques. S’ils les prennent en compte dans leurs différents calculs politiques afin de ne plus faire sombrer les peuples dans ce genre d’errements meurtriers.

Contexte

Comme beaucoup de pays africains, la Côte d’Ivoire est composée de plusieurs groupes sociaux. Il s’agit d’une soixantaine d’ethnies regroupées dans quatre grands groupes, allant au-delà des frontières ivoiriennes, partageant des codes sociaux plus ou moins différents mais vivant sur un même territoire dont les limites ont été dessinées depuis la conférence de Berlin de 1884. À l’indépendance du pays, en 1960, son premier président, Félix Houphouët Boigny, avait, d’une certaine manière, intégré cet état des choses dans sa stratégie de gouvernance en positionnant des « fils » et des « cadres des régions » qui pourraient être considérés, en réalité, comme représentants des différentes ethnies du pays.

Ce système de gouvernance n’était pas admis par tous comme le montrent les tentatives de scission qui se sont manifestées dès les premières années d’indépendance du pays, au royaume du Sanwi situé dans Sud-est du pays. Tentatives énergiquement refrénées par le nouveau président : les « évènements du Guébié »,  qui s’étaient déclenchés dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire en 1970, auraient conduit à la mort de 4 000 personnes au minimum.

En plus de ses groupes ethniques, la Côte d’Ivoire a été très tôt enrichie d’une forte population étrangère. Les résultats du recensement général de la population et de l’habitat de 1975 indiquent que la population non-ivoirienne représente 22% de la population totale. Ce taux atteint 28% en 1988 avec une majorité de Burkinabè, Maliens et Guinéens – plus de 80% des étrangers – d’après le recensement effectué cette année-là. Malgré leur contribution à la croissance démographique et au développement économique du pays, ces populations étrangères culturellement proches des Ivoiriens du Nord sont rapidement mises en cause pour le déséquilibre économique et l’insécurité accrue dans le pays. En effet, la Côte d’Ivoire connaît dans les années 1980 ses premiers Plans d’Ajustement Structurel, destinés à redresser son économie qui avait subi les effets de la crise des années 1970.

A ces considérations économiques et sociales, s’ajoute la dimension politique lorsqu’à la mort du président Houphouët-Boigny, sous le président par intérim Henri Konan Bédié, le code électoral est modifié avec la précision que nul ne peut être élu président de la République s'il « n'est Ivoirien de naissance, né de père et mère eux-mêmes Ivoiriens de naissance ». Cette disposition légale empêche le candidat Alassane Ouattara de se présenter à l’élection présidentielle. Son père étant d’origine burkinabè, il est accusé d’être de nationalité « douteuse ».

Conséquemment, les conflits entre les communautés, attisés par ces différents facteurs, se déclarent et se multiplient dans le pays. Le coup d’Etat de 1999 permet au Général Robert Gueï de prendre le pouvoir. Sous sa présidence une nouvelle constitution est adoptée, en 2000, avec notamment l’article 35 reprenant la loi introduite précédemment sous Henri Konan Bédié, avec un débat sur certains de ses termes jugés « confligènes ». Laurent Gbagbo accède au pouvoir à l’issue de la présidentielle d’octobre 2000, marquées par des heurts après le refus du Général Robert Gueï de reconnaître les résultats et des batailles meurtrières entre les militants du président élu et ceux d’Alassane Ouattara. Durant son règne, les populations du Nord constituant environ 40% de la population du pays et soutenant majoritairement le candidat Alassane Ouattara écarté, sont exclues des postes de responsabilité jusqu’en 2007, année où Guillaume Soro, chef de la rébellion qui avait éclaté en 2002 après la tentative de coup d’État durant la même année, est nommé Premier ministre. L’élection présidentielle prévue en 2005 a finalement lieu en 2010 à la suite de plusieurs accords, impliquant la communauté internationale et par lesquels la candidature d’Alassane Ouattara est acceptée.

Une guerre civile est de nouveau déclenchée à la fin de l’élection présidentielle du fait d’un désaccord sur les résultats du scrutin, entre le président sortant soutenu par le Conseil Constitutionnel et Alassane Ouattara soutenu par la communauté internationale. Les affrontements tournent, une nouvelle fois, à des exactions et violences inter-ethniques qui prennent officiellement fin en mai 2011.

Accords, mesures de réconciliation et réunification

Pendant toutes les années de conflits, différentes mesures et accords ont été mis en place pour favoriser l’unité du peuple. Ces actions visent en premier lieu la cessation des affrontements mais aussi la mise en place d’un climat plus propice à la paix et au développement économique.

En 2001, un Forum de réconciliation nationale est organisé par le Président Gbagbo pour examiner les questions sources de conflit à savoir la nationalité, la propriété des terres et les conditions d’emploi dans les forces de sécurité. Tous les partis politiques étaient conviés à ce forum dont les recommandations finales ne seront pas finalement toutes appliquées. Après l’éclatement de la guerre civile en 2002, des négociations sont entamées entre un groupe de contact créé au niveau de la CEDEAO et la Côte d’Ivoire. Elles conduiront à un cessez-le-feu signé par le président Gbagbo et les rebelles qui exigeaient son départ. Par la suite, des pourparlers sont entamés au Togo pour renforcer ce retour vers la paix. Des accords seront finalement signés par tous les partis politiques en 2003 à Linas-Marcoussis, en France, avec notamment comme disposition la création d’un gouvernement de réconciliation nationale. Ils ne seront jamais appliqués complètement. Malgré d’autres cessez-le-feu et accords signés par la suite, le pays reste secoué par des affrontements meurtriers.

C’est en 2012, qu’un processus de désarmement, de démobilisation, de réinsertion, de réintégration socio-économique des ex-combattants (DDRR) est réellement entrepris. Ce programme permet de contribuer à la sécurité et à la stabilité du pays dans un contexte d'après-guerre et de favoriser ainsi la reconstruction et le développement. L’article Côte d'Ivoire: Paix, sécurité, émergence explique de manière plus détaillée les missions, objectifs et résultats de l’agence (ADDR) créée dans le cadre de ce programme.

Une Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR) a été créée en 2011 pour situer les responsabilités, entendre les victimes, auteurs et témoins des crises politico-militaires qui ont déstabilisé la Côte d’Ivoire depuis 1999. Critiquée pour ses résultats peu visibles, ses activités se sont officiellement achevées en décembre 2014 avec un rapport comportant des recommandations comme la libération de prisonniers, le dégel des avoirs ou la réparation des préjudices subis. En mars 2015, une nouvelle Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes (Conariv) a été créée pour parachever le travail du CDVR. Elle dispose d’un Fonds d’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire et d’un organe chargé de l’indemnisation et de cohésion sociale, à savoir le Programme National de Cohésion Sociale (PNCS).

Enfin, le système judiciaire du pays considéré comme étant de nouveau fonctionnel, des procès ont été enclenchés contre les différents acteurs ayant pris part à la dernière crise. C’est dans ce cadre que Simone Gbagbo, ex-Première dame de Côte d’Ivoire a été jugée et condamnée à 20 ans de prison en mars 2015. Cependant, des organismes de défense des droits de l’homme comme l’ONG Human Rights Watch mettent en garde le président contre une politique de justice partiale qui ferait obstacle à une véritable réconciliation.

Des débats soulevés sur l’éligibilité d’Alassane Ouattara dans le cadre de la prochaine élection ont vite été écartés. L’article 35, toujours en cause, devrait être modifié après ce scrutin par voie référendaire. Il semblerait alors que la machine soit véritablement en marche vers l’émergence dans l’unité que vise le président Ouattara pour 2020.

Toutefois, sa réponse : « il s’agit d’un simple rattrapage », en janvier 2012, lors de sa visite en France, à une remarque d’un journaliste de l’Express sur la nomination de nordistes aux postes clés, questionne cette dynamique d’unité et de réconciliation. Il faudrait qu’en tant que chef de l’Etat, Alassane Ouattara ne tombe pas dans un clientélisme ethnique qui plongerait à nouveau le pays dans le chaos : le plus lourd tribut serait encore payé par les populations.

Oulématou Camara

Sénégalaise, Oulématou s’intéresse aux questions politiques, économiques et culturelles du monde et particulièrement de l’Afrique. Titulaire d’un diplôme en Supply Chain Management, domaine dans lequel elle exerce, elle a rejoint l’Afrique des idées car elle souhaite contribuer à ces réflexions qui sont, selon elle, la première étape vers la mise en œuvre d’actions de développement constructives.

 

Gouvernance démocratique en Côte d’Ivoire : mythe ou réalité ?

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La Cote d’Ivoire a connu la décennie passée plusieurs crises dont la plus meurtrière fut la crise post-électorale de décembre 2010. Pendant cette période trouble de notre histoire, les clivages et les dissensions au sein des communautés se sont aggravés et le tissu social s’est profondément détérioré.

Face à cette situation, les nouvelles autorités ont entrepris plusieurs reformes tant structurelles qu’institutionnelles, dont les objectifs étaient de parvenir à accroitre l’efficacité et la légitimité des politiques de gestion publiques aux yeux des citoyens et aussi de renforcer l’État de droit en aidant les institutions à devenir inclusives et responsables.

I° Au plan économique

La gouvernance démocratique suppose ici le fait que l’État doit jouer un rôle central mais non exclusif dans la gestion du bien public en rassurant et en impliquant les populations aux projets de développement. Ce mode de gestion vise à rassurer les populations locales et les partenaires institutionnels (bailleurs de fonds, investisseurs, opérateurs économiques). A ce titre, plusieurs actions ont été menées :

  • La mise en place de Tribunaux de commerce pour assainir l’environnement des affaires.
  • La création d’un cadre institutionnel de bonne gouvernance par la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance (HABG), créée en septembre 2013. Elle a pour missions  principales de mener une croisade pour la normalisation de la vie publique en inculquant des valeurs telles que l’éthique dans la gestion des ressources humaines, financières, matérielles et le tout reposant sur des principes de transparence, de responsabilité et de participation collective.
  • Plusieurs reformes ont été engagées au niveau du Centre de promotion des investissements (CEPICI), de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) et du patronat ivoirien afin d’assainir l’environnement des affaires et le rendre plus attractif.

II° Au plan social

La gouvernance démocratique procède de la conviction que le dialogue social et le consensus sont très efficaces et peuvent garantir l’efficacité des politiques publiques. La stratégie du gouvernement était de rapprocher l’Etat de ses administrés et les citoyens entre eux, en facilitant les plateformes de réflexion  telles que les  coalitions de femmes, les regroupements de jeunes, la société civile.

  • La mise en place du Conseil économique et social (CES), dont le but est de légiférer afin de créer un cadre de réflexion qui permettra au gouvernement de dérouler son programme de développement économique et social en faveur des populations.
  • Prôner l’égalité des sexes entre hommes et femmes. En matière de genre, l’Etat a initié le toilettage des textes discriminatoires envers les femmes et l’adoption de lois visant leur promotion. Comme illustration, le concours de la gendarmerie, qui depuis les années 1960, était jusque-là réservé uniquement aux hommes, a été ouvert cette année aux femmes. Des promotions ont également été décidées dans l’armée avec le passage de la première femme au grade de Générale  de brigade, Kouamé Akissi.

III° Au plan politique

La gouvernance démocratique encourage les réseaux, les associations et l’inclusion. Elle recommande un dialogue social auquel les citoyens doivent jouer un rôle actif dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques. Conscientes de l’apport que peut jouer tous les citoyens du pays, les autorités ont initié la création d’un Ministère d’Etat chargé du dialogue politique.

  • La reprise du dialogue politique : le gouvernement et l’opposition ont repris le 29 janvier 2015 le dialogue politique qui avait été interrompu depuis le mois de mai dernier.
  • Le dégel des avoirs : la justice ivoirienne a annoncé avoir procédé au dégel des comptes bancaires de 43 personnalités de l’opposition. Ces comptes avaient été gelés suite à la crise post-électorale de 2010.
  • La libération de prisonniers de la crise post-électorale : en début d’année, la justice a procédé à la libération provisoire de plus de 130 prisonniers de la crise post-électorale.
  • Grâce présidentielle : 3000 détenus de droit commun bénéficieront bientôt de grâce collective et de réduction de peine. Des décrets ont été adoptés dans ce sens début février 2015.

Toutes ces actions du gouvernement sont des gestes qui participent à la décrispation du climat politique.

RECOMMANDATIONS

Plusieurs partenaires, notamment le PNUD et le NDI ont décidé d’accompagner les initiatives concourant à la création d’un environnement favorable à la bonne gouvernance. Pour que la gouvernance démocratique soit une réalité en Côte d’Ivoire, il faut :

  • Régler le problème du financement des partis politiques : ce financement qui est obligatoire par l’État n’est jusque-là pas effectif, alors que les élections présidentielles sont prévues pour octobre 2015.
  • Libéraliser l’accès aux medias : l’opposition estime qu’elle n’a pas accès aux médias d’État.
  • Instaurer l’éthique dans la gestion des ressources humaines : certaines nominations dans l’administration sont souvent faites de façons fantaisistes et partisanes, ce qui est contraire à la logique de bonne gouvernance.
  • Veiller à instaurer plus de transparence dans les processus d’attribution des marches publiques.
  • Lutter contre toutes les formes de racket qui gangrènent l’économie de notre pays.

BILAN

La gouvernance démocratique n’est pas un simple concept, mais une volonté réelle de bâtir un Etat de droit, de justice et de sécurité. Elle implique la promotion de la transparence dans la gestion des affaires publiques.

C’est à juste titre que les institutions de Brettons Wood (FMI-Banque Mondiale) ont ajouté la rubrique « bonne gouvernance » à la liste de leurs critères de prêts. Ce qui signifie que la gouvernance démocratique ou la démocratie participative est un critère incontournable dans le processus de développement d’une Nation.

Impact de l’épidémie Ebola sur le quotidien des Abidjanais

 

HISTORIQUE

La maladie à virus Ebola (autrefois appelée fièvre hémorragique à virus Ebola) est une maladie grave, pouvant entrainer la mort certaine chez l’homme. Le virus Ebola, responsable de la maladie, est apparu pour la première fois en 1976 à Yambuku, dans l'actuelle République Démocratique du Congo. Cette localité étant située près de la rivière Ebola, celle-ci a donné son nom à la maladie.

Le virus se transmet à partir d’animaux sauvages et se propage ensuite dans les populations par transmissions interhumaines. Les premiers cas d’Ebola ont été notifiés dans la zone d’Afrique de l’ouest en mars 2014, d’abord en Guinée, puis s’est propagé rapidement en Sierra Leone et au Liberia.

Aucun traitement homologué n’a pour l’instant démontré sa capacité à neutraliser le virus. Vu la propagation très rapide du virus, nous pouvons affirmer que la menace Ebola a quelque peu changé les habitudes quotidiennes des Ivoiriens. La Côte d’Ivoire, pays frontalier de la Guinée et du Liberia, se devait de mettre en place un dispositif cohérent de veille afin d’empêcher l’entrée de la maladie sur son territoire.

QUELQUES MESURES PRISES PAR LES AUTORITES

Afin de lutter efficacement contre la menace Ebola, le gouvernement ivoirien a pris des mesures préventives et répressives, et ce, dans l’intérêt des populations.

La sensibilisation

Sensibilisation des populations sur la maladie à virus Ebola par le Ministère de la Santé

Des émissions de sensibilisation sur Ebola en langues locales sont diffusées  dans toutes les radios de proximité à travers le pays. Il s’agit d’émissions de santé qui vont être produites et diffusées au profit des populations sur la thématique de la lutte contre Ebola. Ces programmes sur le lavage des mains et les pratiques culturelles et religieuses ont été produits et diffusés aux populations de l’intérieur du pays, au terme de formations initiées par CFI (Canal France International) et RFI (Radio France Internationale).

D’autres modules de formation sont également dispensés sur les symptomes  de la maladie, les modes de transmissions et de contamination, etc.

 

Des ateliers sont également proposés aux populations rurales, et visent à contribuer à atténuer les résistances culturelles et favoriser une meilleure compréhension et une acceptation des mesures de prévention. Depuis l’apparition de la maladie dans notre zone ouest-africaine, les spots publicitaires, communiqués réguliers, messages radiophoniques, caravanes et campagnes de sensibilisation ne manquent pas. Les artistes musiciens ont même produit un clip vidéo intitulé « Stop Ebola ». Les revenus de la vente de cette œuvre musicale seront reversés à des fondations pour la lutte contre la maladie. Le footballeur International Didier Drogba s’est lui aussi engagé à associer son image à la lutte contre Ebola. Plusieurs autres ont suivi, notamment Yaya Toure, Gervinho, etc.

Mesures sanitaires

Surveillance renforcée dans les aéroports: des équipes médicales ont été déployées sur le site de l’aéroport afin de contrôler tous les voyageurs à destination d’Abidjan. Ces équipes sont dotées d’équipements modernes pouvant identifier et diagnostiquer toute personne à forte température et présentant les signes de la maladie.

Le Ministère de la santé recommande aux populations de se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon, d’éviter de faire des accolades, car la maladie se propage  à partir des fluides corporels (sueur, sang, salive). Toute chasse, tout transport de viande de brousse sont strictement interdits jusqu’à nouvel ordre (Chimpanzés, singes, chauve-souris, agouti, porc-épic). Sont également proscrits les faits de ramasser et de  manipuler les animaux morts. Un numéro vert gratuit (143) a été créé par le Ministère de la Santé afin de signaler très rapidement tout cas suspect.

 

Mesures répressives

 

Dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, deux chasseurs ont été mis aux arrêts. Ces individus ont outrepassé la mesure gouvernementale d’interdiction de la chasse. Ils ont été arrêtés et la gazelle, en leur possession, a été incinérée. A la frontière ivoiro-libérienne, plusieurs embarcations ont été bloquées. Le Préfet a indiqué que malgré les mesures d’interdiction, des personnes continuent de rallier illégalement les deux pays en passant clandestinement par le fleuve Cavally au moyen d’embarcations de fortune.

 

LES  COMPORTEMENTS NATURELS DES ABIDJANAIS

 

Au début de l’apparition de la fièvre Ebola dans les pays limitrophes de la Côte d’Ivoire que sont la Guinée et le Liberia, une véritable psychose s’est emparée de tous les Abidjanais, chacun voulant éviter d’être contaminé.

 

Les mesures préventives prises par le Gouvernement, à savoir l’interdiction de se serrer les mains, de faire des accolades, de manger dans les lieux publics a augmenté les craintes des populations face à une maladie qui jusque-là n’a pas de remède. Au départ, la situation fut effrayante, mais depuis quelques temps, elle s’est nettement améliorée, et les populations ont recommencé à se serrer les mains et se faire des accolades, car selon elles, c’est Dieu seul qui protège contre la maladie.

 

LES RAPPORTS AVEC LES LIBERIENS VIVANT A ABIDJAN

 

Bien que le Liberia soit un des pays les plus affectés par la fièvre Ebola, cela n’a pas véritablement eu d’incidences négatives sur la cohabitation entre Ivoiriens et Libériens à Abidjan. Le problème qui se pose est celui des Libériens vivant au Liberia et désireux de se rendre en Côte d’Ivoire. Sur cette question, le gouvernement a été formel. Aucune personne vivant au Liberia ne doit franchir la frontière ivoirienne. Cette mesure est purement d’ordre sanitaire et vise à circonscrire l’épidémie afin de mieux la combattre. Elle a été très bien comprise par les populations et n’est pas de nature à perturber les relations diplomatiques entre les deux Etats.

BILAN

L’épidémie de fièvre Ebola sévit actuellement dans quelques pays de notre sous-région ouest-africaine, dont deux de ces pays partagent des frontières communes avec la Cote d’Ivoire. La maladie a déjà fait environ 8459 morts, sur plus de 21329 cas enregistrés, selon le dernier bilan de l’OMS. Même si jusque-là aucun cas n’a été déclaré en Côte d’Ivoire, le pays se doit d’être en veille en maintenant les mésures preventives deja mises en place.

PERSPECTIVES

Selon l’OMS, les nouveaux cas de la maladie à virus Ebola dans les trois pays d’Afrique de l’ouest sont en réelle baisse. Cela est un signe d’optimisme et une lueur d’espoir pour l’avenir. L’Envoyé spécial des Nations Unies sur Ebola, Dr David Nabarro s’est déclaré confiant sur la lutte contre l’épidémie en Afrique de l’Ouest. Les Nations Unies sont heureuses et fières de la maníère dont la Côte d’Ivoire gère la menace Ebola. Ceci est très encourageant pour tous les acteurs qui ont décidé de faire barrage à la propagation de cette maladie.

Moussa Koné

SOURCES

www.sante.gouv.ci

www.prevention-ebola.gouv

www.aip.ci (Agence Ivoirienne de Presse)

www.who.int (site de l’OMS)

Xinhua

NB : les images sont tirées du site www.abidjan.net

Côte d’Ivoire: Paix, sécurité et émergence

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Après les crises successives qu’a connu la Côte d’Ivoire lors de la décennie écoulée, les nouvelles autorités ont dès leur prise de fonction, affiché clairement leur ambition de favoriser une croissance économique à fort impact sur le développement humain.

Ainsi, les autorités Ivoiriennes, conscientes de l’importance de la stabilité économique et la paix sociale dans tout processus de développement, ont décidé de mettre un point d’honneur sur la gouvernance démocratique et la répartition équitable des richesses afin d’impliquer et de stimuler toutes les couches sociales à atteindre l’objectif commun qui est l’émergence économique de la Cote d’Ivoire à l’horizon 2020.

La population ivoirienne, qui est à majorité jeune, est confrontée au problème d’insertion dans le marché du travail et cette question de l’emploi demeure actuellement la priorité des ménages et des politiques publiques. C’est ainsi que la Cote d’ivoire a décidé d’adopter un nouveau modèle de développement pour accélérer sa marche vers l’émergence.

Cette stratégie dénommée PND (Plan National de Développement), constitue le référentiel de toute la politique économique et sociale sur le moyen et le long terme, et est aussi le cadre de coordination, de planification, de programmation et de suivi des interventions Nationales et Internationales. A travers sa mise en œuvre, le gouvernement entend rechercher l’efficacité et l’efficience (performance) dans les interventions publiques.

L’émergence qui vise une amélioration des conditions de vie des populations ne pourrait être atteinte sans le renforcement de la sécurité, de la stabilité, de la gouvernance, de la démobilisation et la réintégration des ex-combattants, et de la consolidation de l’Etat de droit afin de créer les meilleures conditions d’une paix sociale durable et de favoriser le plein épanouissement des potentialités individuelles.

Contexte

 

Selon l’ONG anti-corruption Transparency International, l’indice de perception de la corruption en Côte d’Ivoire est évalué à 2,2 sur une échelle allant de 0 à 10. En 2010, la Cote d’Ivoire était classée 146e sur 174 pays.

La corruption et autres rackets sur les routes ivoiriennes sont la plupart du temps le fait d’ex-combattants incontrôlés et livrés à eux-mêmes. Elle entraine des coûts de transaction élevés, difficiles à mesurer, en raison du caractère clandestin de ces transactions. La corruption réduit le montant des investissements et ralentit la croissance économique du pays. La dégradation du climat socio-politique conjuguée à la détérioration de l’environnement économique a contribué à l’effritement de la cohésion sociale.

Ces différentes crises (coup d’État de décembre 1999, tentative de coup d’Etat de septembre 2002, crise post-électorale de décembre 2010) ont favorisé la circulation des armes légères et de petits calibres dans le pays, accentuant du même coup l’insécurité.

Le regroupement de certains jeunes en milices ou GAD (Groupes d’auto-défense), pendant la crise post-électorale de 2010, a favorisé la prolifération d’armes dans tout le pays. Certaines personnes, ayant gardé ces armes par devers elles, les utilisent régulièrement pour des braquages.

La prolifération des armes et la présence d’ex-combattants souvent armés sont une menace pour la stabilité sociale, mais aussi pour l’économie de la Côte d’Ivoire.

Quelques faits

 

Au début du mois de décembre 2014, quelques soldats du camp militaire d’Akouédo (Abidjan), avaient perturbé la circulation pendant plusieurs heures en érigeant des barricades sur les grandes artères. Ceux-ci réclamaient en effet le paiement d’arriérés de salaires et des primes de logement. Cette situation avait également touché plusieurs autres grandes villes de l’intérieur du pays, à savoir (Bouaké : Centre), (Korhogo : Nord), (Daloa : Centre-Ouest).

Ce problème d’humeur des militaires fut réglé au plus haut niveau par le président de la République qui a instruit le gouvernement d’apurer cette dette.

Quelques jours plus tard, un autre mouvement d’humeur de quelques dizaines d’ex-combattants ayant pris part à la bataille pour le contrôle de la ville d’Abidjan en avril 2010. Ces ex-combattants exigeaient non pas des primes, mais leur intégration et leur prise en compte dans les effectifs militaires de la nouvelle armée.

Tous ces différents mouvements d’humeur, venant d’ex-combattants ne sont pas de nature à rassurer les bailleurs de fonds et si l’on n’y prend garde, risquent de saper les efforts colossaux du gouvernement visant à améliorer le climat des affaires et le bien-être des Ivoiriens.

Il est donc indispensable d’aider à l’amélioration des conditions de vie des populations. Pour cela, il est crucial d’offrir aux ex-combattants des emplois et des perspectives d’avenir, si nous voulons atteindre l’émergence à l’horizon 2020.

Leur réintégration dans le tissu économique et social permettra à terme de prévenir toute nouvelle menace dans un environnement politique, économique et social encore fragile, avec de nouvelles élections présidentielles prévues en octobre 2015. La réinsertion des ex-combattants est une condition indispensable qui leur permettra d’améliorer leur situation économique et sociale et de faciliter aussi leur réadaptation d’après-guerre pour une participation effective au processus devant nous permettre d’atteindre l’émergence en 2020.

C’est dans cette optique que le gouvernement ivoirien, soucieux du danger que représentent tous les ex-combattants, a décidé de créer l’ADDR (Autorité pour le désarmement, la démobilisation, la réinsertion et la réintégration des ex-combattants). Le processus DDR s’analyse donc sur le plan politique, économique, social et culturel.

Missions et objectifs de l'ADDR

 

Créée en août  2012, l’Autorité pour le désarmement, la démobilisation, la réinsertion, la réintégration socio-économique des ex-combattants (ADDR) est placée sous l’autorité du CNS (Conseil National de Sécurité), présidé par le Président de la République.

Les missions de l’ADDR sont entre autres :

  • Contribuer à la restauration de la sécurité, à la consolidation de la paix, à la réconciliation et au développement de la Côte d’Ivoire.
  • Réduire le risque de violence armée et assurer la sécurité de toutes les populations par le désarmement, la démobilisation et la réinsertion de tous les ex-combattants.
  • Emmener tous les ex-combattants à rompre définitivement avec le maniement des armes par leur prise en compte dans les projets de développement.
  • Faciliter le retour durable et définitif des ex-combattants a la vie civile.
  • Transformer les ex-combattants en des opérateurs économiques et surtout en des artisans de l’émergence de la Côte d’Ivoire.

Récapitulatif des résultats au 30/11/2014

Effectifs de planification

 

Statut

Réinsertion

Réintégration

TOTAL

 

 

45 525

En attente de formation qualifiante

En attente de réintégration

Réintégration achevée

74 068

 

3713

12 342

29 470

Problèmes

 

L’ADDR, dans la réalisation de sa mission est confrontée à quelques problèmes d’ordres techniques et structurels. Les problèmes que nous avons identifiés sont les suivants :

  • La complaisance observée dans l’accompagnement et la réintégration des ex-combattants, car selon nos informations, certaines personnes, n’ayant pas été ex-combattants bénéficient d’appuis financiers de l’ADDR afin de réaliser leurs projets.
  • Certains ex-combattants sont abandonnés et livrés à eux-mêmes.
  • La lenteur et la lourdeur du processus de DDR.
  • Le manque d’infrastructures d’accueil et d’équipements.

Solutions et recommandations

 

Pour résoudre ces problèmes, le gouvernement et les autorités de l’ADDR doivent :

  • Faire preuve de beaucoup de rigueur et de transparence dans la sélection et l’accompagnement des ex-combattants.
  • Augmenter les structures d’accueil liées au DDR
  • Augmenter l’enveloppe budgétaire allouée à l’ADDR
  • Multiplier les accords de partenariats entre l’ADDR et des entreprises locales afin d’offrir des stages pratiques et faciliter la réintégration des ex-combattants, comme ce fut le cas le 30 décembre 2014, avec la signature d’un protocole de partenariat entre l’ADDR et l’entreprise de promotion immobilière Kimec. Par cet accord, le Directeur Général de Kimec s’est engagé à offrir un stage pratique a 50 ex-combattants formés par l’ADDR au métier du génie civil. Il a annoncé dans son intervention que ce stage débouchera sur l’embauche des bénéficiaires dans son entreprise.

Les autres entreprises de bâtiment et génie civil doivent suivre cet exemple afin d’épauler l’ADDR dans la réintégration d’ex-combattants.

Synthèse

 

La Côte d’Ivoire, ayant été en proie de façon récurrente ces dernières années à des crises politiques dont la dernière s’est muée en conflit armé, a besoin, pour renouer avec la stabilité économique et sociale, d’un véritable programme cohérent et rigoureux de DDR (Désarmement, Démobilisation et Réinsertion) de tous les ex-combattants.

La réintégration quant à elle vise à  de pérenniser l’activité ou l’emploi de l’ex-combattant afin de lui garantir un revenu durable. Par leur implication dans l’activité économique, les ex-combattants deviendront des opérateurs économiques et des acteurs de développement de la Côte d’Ivoire, sinon, l’émergence tant prônée par le gouvernement Ivoirien ne sera qu’un leurre.

Moussa Koné

Moussa Koné, de nationalité ivoirienne, est titulaire d’une Licence en Sciences économiques de l’Université Felix Houphouët Boigny d’Abidjan et d’un Master en Sciences de Gestion (Option Ressources Humaines) du CESAG de Dakar. Il est actuellement Assistant RH stagiaire dans une institution bancaire de la place. 

 

Pour une couverture médicale efficace en Côte d’Ivoire

CMU

Les systèmes de protection sociale lorsqu'ils fonctionnent bien, ont le double avantage d'assurer une redistribution optimale des ressources et d’inciter la population à augmenter sa propension à consommer pour relancer l'économie. En effet, lorsque le système de protection sociale d'un pays est défaillant, les ménages ont tendance à épargner à titre privé pour prévenir les risques sociaux. Ce qui conduit à une faiblesse de la demande interne et donc à une forte dépendance de l'économie à des chocs externes.

Consciente de cette réalité, la Côte d’Ivoire s’est engagée au cours des dernières années à développer un système de protection sociale fiable. Ainsi, après les difficultés de mise en oeuvre du projet d’Assurance Maladie Universelle (AMU) par le précdent gouvernement, le nouveau gouvernement ivoirien a développé le concept de Couverture Maladie Universelle (CMU) pour promouvoir un système de protection sociale ; la lettre « A » du projet précédant étant remplacé par le « C ». Suite à l’adoption par l’Assemblée Nationale en mars 2014 du projet de loi instituant la CMU, le gouvernement ivoirien a sélectionné en octobre 2014, une société chargée d’enrôler les assurés. L’opération d’enrôlement devrait débuter le 29 décembre 2014.

Cette étape cruciale démontre que le pays a atteint un point de non retour dans le processus de déploiement d’un système de couverture maladie. Toutefois, l’instauration de ce « pacte social » suscite autant d’espoirs que de doutes. En effet la réussite de ce projet passera par la capacité du pays à relever les trois grands défis suivants : la qualité des prestations médicales, une structure de financement optimale et une gestion rigoureuse et efficace.

1. Le défi de l’amélioration de la qualité des prestations médicales

Les ivoiriens ont encore en mémoire la tragique épisode de la jeune mannequin Awa Fadiga décédée en mars 2014 au CHU de Cocody (Abidjan) où elle avait été évacuée d’urgence suite àune agression. Cette mort que ses proches mettent à tord ou à raison au passif du personnel médical accusé de négligence, avait mis en ébullition la société civile, obligeant le gouvernement ivoirien à présenter ses condoléances à la famille éplorée et à limoger le Premier Responsable de la structure concernée. Tout récemment, c’est au tour du célèbre rappeur ivoirien Stézo d’enfoncer le clou en attribuant le décès de son ami et challenger de longue date Almighty survenu en novembre 2014, à la piètre qualité du service du CHU de Treichville (Abidjan) où ce dernier s’était rendu pour recevoir des soins suite à une simple crise de paludisme.

Ces difficultés auxquelles font faceles établissements sanitaires, en matière de prise en charge des patients, constituentle premier défi auquel devrontfaire face les autorités ivoiriennes pour réussir le projet de la CMU. En effet, la pérennité du système repose avant tout sur la satisfaction des affiliés. Ainsi, le gouvernement devra renforcer sa politique en matière de santé, notamment :

  • Renforcer le personnel médical : Selon l’OMS, la Côte d’Ivoire affiche un ratio de personnels de santé (médecins, d'infirmiers et Sages-Femmes) par habitants de moins de 7/10 000 alors que la norme mondiale est de 25/10 000. L’Etat devra donc recruter en nombre suffisant, des agents de santé qualifiés dotés du sens de probité qui s’attachent à respecter le serment d’Hippocrate qu’ils ont prêté.

  • Equiper les hôpitaux en matériels de pointe: Le développement technologique de ces dernières années a permis de mettre à la disposition du secteur de la santé, des équipements sophistiqués de tout genre permettant de faciliter le travail des professionnels de la santé. Le pays devra donc renforcer son matériel médicalafin d’offrir des services de qualité aux patients.

  • Multiplier le nombre d’établissement de santé: l’accès aux structures de santé demeure toujours difficile pour les populations, notamment en zone rurale. Certaines populations continuent de parcourir plusieurs kilomètres pour recevoir les premiers soins dans un établissement de santé digne du nom. Il est dès lors impératif, afin d’assurer le succès de ce projet, de doter le pays d’infrastructures suffisantes, et plus proches des populations,

Ces actions qui nécessitent des investissements colossaux appellent à des moyens novateurs pour assurer leur financement, une question déjà abordée dans un article de Nelly Agbokou[1].

2. Le défi du financement optimal de la caisse de la CMU

Nul doute que le défi du financement de la future caisse de solidarité, demeure un enjeu crucial pour le succès de ce projet. Dans un contexte où le budget de l’Etat est limité, le gouvernement devra faire preuve d’une grande imagination pour trouver les fonds nécessaires à l’alimentation de la caisse de la CMU. Différentes options sont envisagés. Le système de la CMU tel que conçu par le gouvernement, propose deux régimes : un régime contributif et un régime non contributif.Le premier (contributif) propose aux populations, une offre de soins contre une contribution forfaitaire mensuelle de 1000 FCFA par assuré. Ceci soulève deux problématiques majeures. Les populations pourraient avoir bien de mal pour s’acquitter de ce montant. En effet, le taux de pauvreté[2] avoisine 49% en Côte d’Ivoire : près de la moitié de la population gagnerait en moyenne moins de quinze mille francs CFA (15 000 FCFA) par mois. Ainsi, consacrer 1000 F, soit 6,5% de leur revenu mensuel au financement d’une quelconque assurance santé, serait un trop grand sacrifice pour eux. Aussi, l’administration pourrait bien avoir du mal à recouvrer les cotisations. Dans un contexte où le taux de bancarisation est très faible (12%), la solution d’un prélèvement automatique sur comptes bancaires ne ferait pas sens. Il faudrait alors mettre en place un système de recouvrement innovant et efficace pour collecter les fonds dans les délais auprès des assurés.

En ce qui concerne le régime non contributif qui s’adresse aux personnes en situation d’indigence, l’Etat s’engage à injecter dans les caisses de la CMU une somme forfaitaire annuelle qui pourrait aller jusqu’à 50 Mds FCFA. Ceci souligne la nécessité pour l’Etat de centraliser les nombreux fonds existants et éparpillés sous diverses formes (Programme Présidentiel d’Urgence (PPU), Fonds d’entretien routier, Fonds d’Investissement en Milieu Rural (FIMR) etc.) en créant un fonds unique tel que discuté dans un article précédent[3], pour en assurer une gestion optimale et en tirer les ressources nécessaires pour financer de tels projets en plus d’investir dans des PME.

Par ailleurs, il peut également être envisagé de prélever une somme sur le bénéfice des entreprises privées qui réalisent de supers-profits au titre de leur contribution à la solidarité nationale. Toutefois, il convient de bien ficeler cette politique pour éviter de tomber dans le cercle vicieux que l’économiste Arthur Laffer caricature en disant « trop d’impôts tue l’impôt »

3. Le défi d’une gestion rigoureuse et efficace de la CMU

Pour qu’un système de protection sociale soit viable, il est indispensable d’assurer la bonne gestion des réserves issues des cotisations des assurés afin d’éviter les crises de liquidité. La plupart des caisses de prévoyance sociale qui fonctionnent correctement procèdent à des investissements dans des actifs rentables afin de dégager des surplus. Ceci permet d’assurer à la fois le paiement des droits des affiliés à temps et de disposer d’une marge pour la gestion des dépenses de fonctionnement courant.

Cependant, dans nombre de pays africains, l’Etat a en général une forte ingérence dans la gestion des caisses de protection sociale et a souvent tendance à utiliser ces ressources pour financer des dépenses publiques qui n’ont aucun lien avec les problématiques de protection sociale. Par ailleurs, certaines institutions de sécurité sociale procèdent à de mauvais choix d’investissement en achetant des actifs peu rentables. Ces opérations contre-productives conduisent à une destruction des ressources collectées ; ce qui conduit à de fréquentes crises de liquidité.

Cette politique de gestion approximative liée à une mauvaise gouvernance entraine naturellement des désagréments liés au retard ou au non paiement des droits ; ce qui contribue à fragiliser la confiance entre les assurés et les institutions de prévoyance sociale.

En vue de bâtir une institution de protection sociale crédible, capable d’inciter la population à souscrire aux prestations qui leurs sont proposées, l’Etat de Côte d’Ivoire devra veiller à mettre en place un écosystème de bonne gouvernance en désignant des dirigeants compétents et intègres à la tête de la caisse de la CMU.

En définitive, la Côte d’Ivoire qui aspire à l’émergence, comme nombre de pays africains, devrait s’assurer que les trois préalables sus mentionnés c'est-à-dire l’amélioration de la qualité des services de santé, la mise en place d’une structure de financement optimale et la bonne gouvernance, sont assurés afin de réussir à développer avec succès sa politique de couverture maladie universelle.

Lagassane Ouattara


[2]le pourcentage de la population qui gagne moins d’un dollar (environ 500 FCFA) par jour