TIC et Développement Durable en Afrique

e-governmentTout au long des siècles, les innovations technologiques ont façonné les rapports entre les individus, ainsi que les interactions entre ceux-ci et leur environnement. On pense par exemple à l’imprimerie d’abord pratiquée par les Chinois (depuis le IIème siècle après JC) puis perfectionnée et démocratisée par Gutenberg. Il est dit que l’imprimerie contribua fortement à diffuser la pensée et les idées dès la Renaissance, révolutionnant par ricochet la transmission d’informations et de connaissances entre les individus. L’expansion d’internet dès le début des années 2000 a considérablement modifié nos modes de vie et ouvert la voie à de nouveaux outils et modèles de communication.  A travers ces nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), le monde est devenu un « village planétaire » : la mondialisation, disait-on ! En révolutionnant nos environnements, nos cadres de vie, nos systèmes d’apprentissage, nos déplacements, nos schémas de réflexion, bref notre quotidien, les TIC ont remanié de fond en comble nos sociétés. Au cœur des transformations de ces dernières, les innovations technologiques apportent des réponses à des problèmes sociaux, économiques et environnementaux. Constat encore plus marqué dans les pays africains : le boom des télécommunications y a créé des conditions idéales pour le développement d’application et de logiciels locaux.

 L’exemple le plus marquant est celui de la téléphonie mobile en Afrique subsaharienne. Le téléphone portable y est actuellement le 1er moyen d’accès à internet. Selon une étude publiée en 2013 par l’Association Mondiale des Opérateurs Télécom (GSMA), le nombre d’abonnés mobile dans cette région du monde a progressé de 18% par an entre 2007 et 2012[1]. En Afrique, la plupart des téléphones portables vendus sont des smartphones sous Androïd, un système d’exploitation pour lequel il est très facile de créer des applications/logiciels mobile. Ceux-ci permettent de créer des synergies entre différents secteurs et contribuent à l’innovation sociale (e-santé, e-learning, etc.), économique (mobile Banking, e-commerce…), environnementale (consommation d’électricité, gestion des déchets urbains etc.)

D’abord cantonnées à un usage privé, les TIC sont aujourd’hui plébiscitées dans la sphère formelle et institutionnalisée: elles sont appréhendées tels de véritables outils de développement, de croissance socio-économique pour des populations en quête d’émergence. Ces innovations technologiques, impactent inégalement les PIB des différentes pays africains : selon une étude du Mc Kinsey Global Institute (MGI) rendue publique en novembre 2015, internet contribue à 3,3% au PIB du Sénégal, 2,9% pour le Kenya, 2,3% pour le Maroc et 1,4% pour l’Afrique du Sud.[2]

Il n’est donc pas surprenant que les TIC soient directement mentionnées dans 4 des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) adoptés par l’ONU en septembre 2015. En tant que catalyseurs pour l’éducation, l’égalité homme-femme[3] ou moteur de la construction d'infrastructures résilientes pour une industrialisation durable[4] qui profite à tous, il est largement reconnu que les TIC jouent un rôle fondamental dans l’émergence de l’Afrique. Cet article revient sur le rôle que les TIC peuvent jouer dans l’émergence de l’Afrique ainsi que la manière dont elles participeront à la croissance inclusive sur le continent. 

 

  1. Les TIC comme catalyseurs de développement en Afrique

Tout l’intérêt des TIC en Afrique repose sur leurs usages et les services qu’elles permettent de développer : elles ne sont plus seulement utilisées comme de simples supports de communication (privée ou professionnelle)  mais plutôt comme de véritables instruments à des fins de développement socioéconomique. Le recours aux TIC dans le continent est passé d’un « usage de loisirs » à une « utilisation thérapeutique » : elles apportent des solutions aux besoins de base des populations : éducation, santé, transports, alimentation, accès à l’énergie et à l’eau potable etc.[5] Pourtant ce ne fut pas toujours le cas ; pendant très longtemps les « TIC-Sceptiques » ont vu l’émergence de ces nouveaux moyens de communication comme l’arbre qui cache la forêt ; un miroir aux alouettes qui détournait l’attention des « vrais » problèmes de l’Afrique : la famine,  la malnutrition, l’analphabétisme, l’illettrisme, les épidémies et pandémies, les guerres, les catastrophes naturelles et toute autre calamité collée à la représentation que certains se faisaient ( se font encore !) du continent. Ne dit-on pas que le temps est meilleur juge ? A ce propos, le temps a donné raison aux « TIC-Optimistes ». En effet depuis une dizaine d’années pléthores d’applications mobiles, développées par des start-up innovantes ont prouvé que les TIC ne sont pas superflues, bien au contraire qu’elles sont une des solutions pour résoudre  ces « vrais » problèmes auxquels les pays africains font face.

Pour les plus connues, elles s’appellent Obami en Afrique du Sud (plateforme-web de cours et vidéo éducatives gratuits),  Gifted Mom au Cameroun (santé de la femme enceinte et des nourrissons), M-Pesa au Kenya (paiement mobile), Jumia (e-commerce), W Afate au Togo (imprimante 3D à base de déchets électroniques),  M-Louma au Sénégal (bourse agricole en ligne). Toutes initiatives audacieuses illustrent le rôle incontournable que jouent les TIC dans la lutte contre la pauvreté, l’accès de tous à une éducation de qualité, l’accès aux soins de santé. Comme l’a souligné Alain François LOUKOU[6]  « les TIC ne constituent pas un problème totalement découplé des autres problèmes de développement. Elles sont plutôt en interaction avec eux». De plus l’usage des TIC à travers le développement d’applications mobile revêt une dimension de responsabilité intergénérationnelle, très peu mise en avant dans l’analyse de l’émergence des TIC en Afrique. En effet, en développant une application comme Gifted Mom, ou Obami, les créateurs répondent non seulement à des besoins actuels mais aussi anticipent des besoins futurs des générations suivantes : accès aux soins de santé,   accès à l’éducation etc.

En ce sens les TIC sont bel et bien des instruments qui permettront d’atteindre les Objectifs du Développement Durable tels que définis par les Nations Unies. On peut ainsi paraphraser la définition du Développement Durable en disant que les TIC sont des technologies qui permettent de répondre aux besoins des générations actuelles et à ceux des générations futures.

 

  1. Les TIC comme instruments de croissance inclusive

Il est indéniable que les Technologies de l’Information et de la Communication contribuent à booster le développement pour le continent africain. Il est révolu le temps où on voyait les TIC comme un luxe pour l’Afrique (en proie à de lourds retards structurels et infrastructurels). Aujourd’hui grâce aux TIC de nombreux entrepreneurs africains proposent  à leurs compatriotes des solutions locales aux problèmes locaux.  Mieux, certaines initiatives visent même une portée internationale : on parle de Glocalisation développer des solutions locales qui peuvent aussi bien s’étendre bien au-delà du marché national (notamment au sein de pays partageant des difficultés identiques). C’est le cas notamment des applications de transferts d’argent par mobile dans des sociétés où très peu de particuliers disposent de compte bancaire classique, mais possèdent 2 voire 3 téléphones portables. Aujourd’hui la réflexion ne porte plus sur l’utilité avérée des TIC pour le développement de l’Afrique. La question fondamentale est désormais comment les TIC peuvent-ils contribuer efficacement à la croissance durable et inclusive des pays africains ?

Face à ces bénéfices mentionnés ci-dessus, les gouvernants, les acteurs économiques mettent à pied d’œuvre des stratégies de promotion des TIC via l’émergence de l’économie numérique. Selon The Australian Bureau of Statistics,  l'économie numérique peut être définit comme l’ensemble des activités économiques et sociales génératrices de revenus qui sont activées par des plateformes telles que les réseaux Internet, mobiles et de capteurs, y compris le commerce électronique. Cette nouvelle catégorie d’économie regroupe le secteur des TIC, les secteurs utilisateurs et les secteurs à fort contenu numérique, ces derniers ne pourraient exister sans ces technologies. Le caractère multidimensionnel des innovations technologiques en font un vecteur non négligeable de croissance, de productivité et de compétitivité dans certains divers secteurs comme l’agriculture, la finance, l’accès à l’énergie, la consommation de bien et services etc.

Mais pour que les TIC deviennent de véritables leviers de croissance (inclusive donc qui profitent à tous), les ressources nécessaires doivent être mobilisées.

  1. Le rôle des Etats

En commençant par une offre éducative et de formation en adéquation avec les besoins du marché de l’emploi. Très peu de structures éducatives proposent des enseignements à l’utilisation des TIC ; très peu d’écoles primaires, de collèges, de lycées en Afrique disposent d’ordinateurs pour l’enseignement de l’informatique. Rares sont les établissements qui proposent des cours ou ateliers d’initiation à internet. L’apprentissage se fait intégralement dans le circuit informel (auprès des amis, de la famille ou dans les cyber café).  Inutile de préciser les dérives que ce manque d’encadrement engendre (utilisation détournée des outils de communication à des fins peu éthiques).  Beaucoup d’apprenants sont des autodidactes ou au mieux ont suivi des enseignements dans des structures d’apprentissage et d’initiation aux TIC[7]. Ces formations arrivent trop tard dans l’offre de formation éducative quand elles n’en sont pas à la marge.  Le secteur de l’économie numérique est un secteur porteur dont les besoins en compétences seront très forts dans l’avenir. Pour ce faire, l’Afrique a besoin de former les futurs codeurs, ingénieurs, développeurs et ne pas s’enfermer dans un état de léthargie qui en fera un désert de compétences.

Par ailleurs du côté des administrations publiques, pendant longtemps celles-ci n’avaient pas investi la sphère digitale ; depuis quelque temps, on note une digitalisation des  structures gouvernementales (site web, compte sur les réseaux sociaux, numéro d’accès via application mobile etc.). Ceci dénote une mobilisation par le geste des pouvoirs publics qui comprennent progressivement l’intérêt des TIC dans la gestion quotidienne des services. La mise en place d’une administration dématérialisée permettrait aux Etats d’être plus performants et mieux servir les citoyens.

  1. Le rôle des entreprises

Rappelons que pour une croissance inclusive des pays Africains, les entreprisses  sur le continent ont également un  rôle primordial à jouer.

Aujourd’hui encore, l’accès à internet s’avère coûteux pour beaucoup de particuliers. L’offre tarifaire (très vaste pour que chaque consommateur trouve chaussure à son pied) reste souvent très élevée pour une consommation en permanence. Il n’est donc pas rare que certains n’aient pas accès à internet pendant plusieurs jours car leur forfait est épuisé. Il faudra alors recharger son téléphone pour avoir internet.  L’accès à internet est certes en hausse mais il est encore insuffisant pour combler la fracture numérique Nord/Sud et atténuer les disparités intrarégionales (zones rurales, péri urbaines et urbaines). Les coûts d’accès élevés sont un corollaire de la faiblesse des infrastructures et de la faible connectivité intracontinentale[8]. La réduction des tarifs des « abonnements » internet est un prérequis majeur pour que l’accès à internet en continu ne soit plus un luxe pour certains.

Pour cela, les entreprises de télécommunication en collaboration avec les Etats et les investisseurs doivent travailler à améliorer les infrastructures de télécommunications. Dans le cadre de leur Responsabilité Sociétale (RSE) ces entreprises gagneraient à déployer des réseaux de télécommunication plus performants et plus modernes : la vétusté des équipements et le faible taux d’électrification du continent sont les principaux handicaps qui affectent la qualité de service des opérateurs.

Le manque de capitaux dans le secteur des télécommunications peut  être résolu par la mise en place de garanties à savoir un climat des affaires plus sain et responsable. Conjointement avec les  Etats,  les entreprises doivent lutter conte la corruption et les pratiques déloyales. C’est ainsi que les pays africains sauront attirer de nouveaux investisseurs, pour palier le faible renouvellement des équipements et l’obsolescence des infrastructures. Les difficultés issues de la vétusté des équipements résultent aussi des défaillances dans la maintenance des infrastructures. Les insuffisances constatées s’expliquent également par l‘absence de ressources humaines hautement qualifiées. Toujours dans le cadre de leur RSE, les entreprises peuvent favoriser le renforcement  de compétences, de capacités en nouant des partenariats avec des centres de formations, afin que ceux-ci forment les apprenants aux métiers dont ont réellement besoin les entreprises. Une fois de plus l’éducation et l’offre de formation se trouvent au cœur de l’impact des TIC sur le développement des pays africains.

Mentionnons avant de clore cet article un élément peu traité dans la réflexion sur les TIC en Afrique : la gestion des déchets électriques et électroniques (DEE). Dans un contexte où la communication entre 2 opérateurs concurrents coûte excessivement chers, les consommateurs ont pris l’habitude d’avoir plusieurs téléphones (un pour chaque opérateur) ou un téléphone à 2 ou 3 puces. A cela s’ajoutent les tablettes et ordinateurs (portable ou fixe). Si on considère que chaque individu change de téléphone portable tous les 18-24 mois, tout cela représente une tonne de déchets non ou mal recyclés. Un certain nombre de précaution (par exemple porter des équipements de protection) sont à prendre dans le traitement de ces déchets.  En effet tous ces appareils sont composés d’éléments toxiques pour la santé des personnes et l’environnement s’ils ne sont pas correctement recyclés. En l’absence de réglementations, le marché du recyclage et de la revalorisation des DEE est principalement informel donc sujet à de graves manquement dans le respect des mesures de sécurité.  Dans le cadre de la RSE, les entreprises de télécommunication seront appelées à trouver des solutions à la gestion des « e-déchets ». Ces derniers, s’ils sont négligés entraineraient de graves dommages de santé aux recycleurs (cancers, problèmes respiratoires), et d’importants dommages environnementaux (pollution des nappes phréatiques et des sols à proximité des centres sauvages de tri et recyclage)[9].

 

Les TIC sont effectivement des instruments au service du développement durable de l’Afrique mais en poussant la réflexion plus loin, on peut affirmer qu’avec un certain nombre de prérequis remplis, les TIC peuvent être des catalyseurs de la croissance soutenable et inclusive des pays africains. Nous avons énuméré quelques points d’amélioration à l’égard des Etats et des entreprises en tant que principaux acteurs du développement du continent ; sans toutefois nier l’importance de la société civile dans cette marche vers l’émergence. Les TIC sont aujourd’hui un maillon fort de l’économie de beaucoup de pays africains dont la contribution d’internet pourrait atteindre 5 à 6% du PIB des pays africains d’ici 2025. Ce qui montre que le secteur est hautement dynamique. À cela, il faut ajouter un secteur informel dont les données par essence « informelles » échappent à toutes statistiques officielles.  Le secteur informel génère des  milliers (voire des millions) de petits emplois et des revenus substantiels aux personnes de tous âges et de tous sexes qui l’exercent partout où les réseaux sont disponibles.

Pour confirmer ces faits, il serait nécessaire que soient mis en place de solides indicateurs d’appréciation de l’impact réel des TIC sur le développement des sociétés africaines. Pour cela deux pistes : d’une part quantifier la part de l’économie numérique aux PIB des pays africains (à travers par exemple le nombre d’emplois décents et pérennes crées dans les secteurs liés aux TIC.). On parle d’approche comptable car elles s’expriment uniquement en termes financiers ou création d’emplois. D’autre part quantifier le manque à gagner des pays africains en cas de « privation » des TIC ; on évaluerait ainsi les conséquences organisationnelles sur les entreprises, les particuliers, les administrations de  la non utilisation des TIC.

 

Rafaela ESSAMBA


[3] 5.b  Renforcer l’utilisation des technologies clefs, en particulier l’informatique et les communications, pour promouvoir l’autonomisation des femmes

[4] 9.c  Accroître nettement l’accès aux technologies de l’information et de la communication et faire en sorte que tous les habitants des pays les moins avancés aient accès à Internet à un coût abordable d’ici à 2020

[5] Besoins qu’on peut assimiler aux 2 premières bases de la pyramide de Maslow à savoir les besoins physiologiques et ceux de sécurité/protection

[6] Alain François Loukou, « Les TIC au service du développement en Afrique : simple slogan, illusion ou réalité ? »

[7] Signe d’un fort engouement pour l’économie numérique et les TIC, des espaces d’innovation digitale (hub, pépinières, espace de co-travail, incubateurs..) voient de plus en plus le jour en Afrique.

[8] La plupart des pays africains utilisent la largeur de bande passante internationale pour un partage de données au  niveau local ; opération extrêmement chère.

Innovative Africa for a better tomorrow

shutterstock_162828188Despite a decade of strong growth, Sub-Saharan Africa still faces a number of social and economic challenges. These range from access to education, off-the-grid electricity, clean water, job creation and public infrastructure. While there is no silver bullet, one word is inspiring millions – innovation.
 
Of course, innovation doesn’t just happen, it takes government will. In short, the region needs to reform its economic structures to make enterprise easier. The international community also has its part to play as do foreign governments and global bodies – one piece of the jigsaw is a fair deal on climate change.
 
The COP21 conference in Paris last year laid bare the dual threats to African economic growth in relation to global warming. The first is that by asking African countries to greatly reduce their carbon output, we are asking the region to compromise economic development.
 
Moreover, climate change is, and will continue to impact Africa disproportionately through flooding, drought and starvation.  It is the ultimate injustice that African development should be threatened in this way. Francois Holland said at COP21 that the world owes “…an ecological debt…” to Africa. Such vocal support was much needed and it just that the final COP21 deal states that developing countries are entitled to international support in the development of new technologies. If the international community meets these obligations, African innovators will stand a much greater chance of building sustainable businesses.
 
Young Africans overwhelmingly prefer to work for themselves than for an existing company. They are tech-savvy with high mobile phone penetration and the continent has a growing middle-class that is hungry for high-end products and services. COP21 also provided Africa with an opportunity to showcase home-grown technologies that provide new ways to bring clean water and energy to the poorest rural communities. Energy and water support one of the region’s most important industries – agriculture. It employs millions.
 
Organizations such as Gorta-Self Help Africa are supporting rural farming communities across sub-Saharan Africa, helping them to find new ways of yielding crops. These include developing drought tolerant crop varieties and ‘climate smart’ technologies that help to keep moisture in the soil. Home-grown innovations such as these reduce reliance on purchasing foreign technologies, they create jobs and help to create supply chains that are the building blocks of a diverse small and medium enterprises (SME) sector. The COP21 deal also mandates that developed countries pool capital in order to provide poorer nations with at least $100 billion per year by 2020.
 
It is within this context of international support that young innovators can realise their potential – and it is not confined to agriculture or the environment. Mobile money solutions have helped millions of unbanked Africans enter the banking system by enabling the transfer of funds or shopping through a simple mobile phone. In the healthcare sector, new technologies are being created that have a high social impact in the prevention and treatment of disease. Professor Lesley Erica Scott won the Innovation Prize for Africa’s ‘Special Prize for Innovation’ with the development of the Smartspot TBCheck – a device that is designed to assess whether or not machines used to diagnose TB function properly. This is a technology that will greatly aid accurate diagnosis and help to curb the TB epidemic in Africa.
 
The challenge for such innovators is often limited access to capital. A region of disparate economies and financial systems means that Sub-Saharan Africa does not have the capital markets needed to support entrepreneurs. However, some countries, such as Angola, are pushing ahead with economic reforms that include public-private partnerships. Angola has also launched a unique state-backed venture capital fund, FACRA, which acts as a conduit between growing Angolan businesses and foreign investors. Through FACRA, businesses and investors from developed countries have an opportunity to meet financially viable, growing Angolan enterprises – providing foreign firms with investment opportunities whilst creating a new pathway for Angolan entrepreneurs to reach the capital they need to grow.
 
As we look ahead to a year of economic uncertainty – where low oil prices and a slump in commodities are the new normal – Sub-Saharan African nations and the international community must push ahead and do everything possible to support African innovators. Capital markets must mature, banks must be liberalised, governments must find new ways of enabling innovation and the global community must continue to do its fair share.
 
Africa has what it takes to create a tomorrow that helps it to meet its climate change obligations and innovators that will go on to build robust, diverse economies. Economic growth and environmental responsibility are not mutually exclusive and in order to support economic growth, the world must unite so that African entrepreneurs can develop financially viable businesses that provide African solutions to African challenges.

 

This article was published for the first time by TEODORO DE JESUS XAVIER POULSON on the website of the World Bank.

 

 

                                                                                                                                                                                                                                                                                   Rubrique Analyse Economique

Is Public-Private Partnership adapted to the needs of developping countries?

It is very important for African countries to fill in the technological gap with the rest of the world. Hence, development financing has become a major challenge in the continent’s quest for growth. This was indeed the theme of the conference on Africa’s development . The challenge has become even more apparent since the World Bank published a report on infrastructure entitled “Africa's Infrastructure: A Time for Transformation”.  In response to this lack of financing, many African countries have adopted projects involving public-private partnerships (PPPs) [1]. This infatuation with PPPs is justifiable according to the World Bank’s estimations on the infrastructure-financing deficit in Africa [2]. However, in consideration of the origins of this type of financing, it is proven that the specific contexts of certain African countries do not necessarily allow the effective implementation of PPPs.

In order to finance their infrastructure, countries traditionally issue treasury bonds, bilateral loans (between countries) or multilateral loans (from development banks) [3]. Until the beginning of the 2000s, these sources were used to finance public infrastructure projects, which were usually built and managed by governments. In this process, the State calls upon private companies for the construction of these infrastructures and bears all costs. For instance, in the case of a road construction project, the State would usually launch a tender offer to select a construction firm. Then, the Ministry of Infrastructures would take care of the maintenance and the use of the road [4].

However, this so called “Public Partnership” procedure raises two issues. On one hand, it does not encourage the construction company to produce a quality infrastructure, despite the control of a project manager. Therefore, the viability of these infrastructures is often lower than expected, which results in higher costs for the State. On the other hand, the fact that public services are non-profit entities does not either encourage the State to maintain or improve the quality of the service provided.

Public concessions have been envisaged as a solution to this issue. In this case, the State finances and constructs the infrastructure and then delegates its management to a private company. This is the case today in many areas that require public infrastructures financing such as ports, weighting stations and tolls, and the exports of certain agricultural commodities. However, these concessions do raise certain issues, especially with the transfer of risks created by demands or the costs for the State to the private operator [5].

 

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PPPs have been developed in order to share these risks. This risk- sharing strategy is essentially a warranty clause, which provides compensation from the government to private operators when the cash flow projections are affected by unpredictable business risks. Those risks could be related to a lower demand, or unexpected higher productions costs [6]. The factors could essentially discourage foreign investors to finance these projects as they have a very limited knowledge of the economic climate in these countries.

At the same time, the State is not completely aware of the risks associated with investments in infrastructure projects either. Typically, passenger traffics of an airport or a railway are difficult to predict, especially in a context where the market is poorly developed, and technological advancements may provide short-term alternative choices to consumers. The risk is even higher when contracts are signed within international regulatory frameworks beyond the control of governments and in environment where corruption and bad governance could skew the awarding and the execution of the contracts.

PPPs were initially used in countries like France and Great Britain, which have a fairly developed market, and a robust regulatory framework. Both of these factors minimize the occurrence of risks that could impede on the profitability of these PPPs. Moreover, another very important factor is the bargaining power between the parties concerned in the execution of PPP contracts. In the countries called into partnerships, the bargaining power is more balanced than it would be in developing countries, where the returns for the companies involved in the PPP contracts often exceed half of their GDP.

One solution to these problems would be to set up technical regional agencies in charge of reviewing and signing these contracts. This approach has the merit of relying on a wider network of markets, which gives it a bargaining power. In addition to that, it would attract expertise in the analysis and negotiation of PPP contracts while responding to the need of the states involved.

Translated by Harold AGBLONON

References
[1] Here are two articles written by Simel and Foly analysing PPPs in financing infrastructures
[2] According to World Bank report « Africa's Infrastructure : A time for transformation », the funds for infrastructures in Africa has been estimated to a total of 93 billion USD.
[3] We can also mention the funds transfered from African diaspora, which exceeds the development aid (concessional funds loaned at preferential rate by developed countries)
[4] The maintenance of roads is more and more delegated to private companies which collect the rights of way from the road users.
[5] This procedure is different from privatisation because the private operator does not own the infrastructure.
[6] The MIGA Agency of the World Bank generally deals with the non commercial risks.

Le partenariat public-privé est-il adapté aux pays en développement ?

arton44Etant donné les technologies qu’elle doit incorporer pour rattraper son retard sur les autres régions du Monde, le financement du développement est devenu un enjeu majeur en Afrique. C’était d’ailleurs le thème de la conférence sur le développement de l’Afrique. L’enjeu est encore plus crucial dans le domaine des infrastructures depuis la publication du rapport de la Banque Mondiale intitulé « Infrastructures Africaines : une transformation impérative ». Pour répondre à ce besoin de financement, davantage de pays africains ont recours aux projets de partenariats public-privé (PPP).[1] Cet engouement n’est pas sans fondement si l’on en croit les estimations de la Banque Mondiale sur le déficit de financement des infrastructures en Afrique.[2] Cependant, si l’on considère les origines de ce type de financement, il s’avère que le contexte spécifique de certains Etats Africains ne se prête pas nécessairement à la mise en œuvre effective des PPP.

Pour financer les infrastructures de développement, les Etats ont traditionnellement recours aux émissions de bons du trésor, aux prêts bilatéraux (entre pays) ou multilatéraux (octroyés par les Banques de Développement).[3] Jusqu’au début des années 2000, ces moyens de financement étaient utilisés pour financer des infrastructures publiques construites et gérées par l’Etat. Dans ce processus, l’Etat fait appel à des entreprises privées pour la construction des infrastructures et prend lui-même en charge la prestation du service. Dans le cas de la construction d’une route par exemple, l’Etat lance un appel d’offre pour sélectionner une entreprise de BTP, chargée de la construction. Ensuite, il s’assure de l’entretien et de l’usage de la route par les usagers à travers le ministère en charge des infrastructures.[4]

Toutefois, cette procédure, dite de marché public, pose deux problèmes. D’une part elle n’incite pas le constructeur à produire une infrastructure de qualité, même si le maître d’œuvre est chargé de garantir la qualité de l’ouvrage. Dès lors, la durée de vie des infrastructures à la fin de leur construction est souvent plus faible que leur durée de vie potentielle, ce qui engendre des coûts de financement plus élevés à l’Etat. D’autre part, le fait que les services publics ne soient pas à but lucratifs n’incitent pas non plus l’Etat à entretenir voire améliorer la qualité des services fournis.

Pour résoudre ces problèmes, les concessions publiques ont été envisagées. Dans ce cas, l’Etat finance et construit l’infrastructure, mais délègue sa gestion à une entreprise privée. C’est notamment le cas aujourd’hui de certaines activités portuaires, des postes de pesage et de péage ou même de l’exportation de certaines matières premières agricoles.[5] Toutefois, les concessions ne sont pas non plus indemnes de tout problème. En particulier, elles transfèrent intégralement le risque lié à la demande ou au coût de l’Etat vers l’opérateur privé.

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C’est donc pour mieux partager le risque que les PPP ont été développés. Au cœur de ce partage du risque se trouve les clauses de garantie qui comme leur nom l’indique, prévoient des compensations de l’Etat aux opérateurs privés lorsque les prévisions de cash flow sont affectées par des risques commerciaux imprévisibles. Ces risques peuvent être liés à une demande plus faible que prévue, ou à des coûts de production plus élevés que prévus.[6] Ce sont des facteurs qui peuvent à priori décourager les investisseurs étrangers dans la mesure où ceux-ci ont une maîtrise imparfaite de l’environnement économique des pays.

En même temps, l’Etat non plus ne maîtrise pas les risques commerciaux liés aux investissements dans les infrastructures. Typiquement, la prévision du trafic de passagers dans un aéroport ou sur un chemin de fer est difficile à prévoir surtout dans un contexte où le marché est très peu développé et où des évolutions technologiques peuvent apporter à court termes des choix alternatifs aux consommateurs. Par conséquent, les Etats qui s’engagent actuellement dans la signature de ces contrats de PPP risquent de se retrouver à payer des compensations pour des services qui ne sont mêmes pas rendus. Ce risque est d’autant plus élevé que les contrats sont signés dans des cadres réglementaires internationaux qui échappent au contrôle des Etats et dans un contexte où la corruption et la mauvaise gouvernance peuvent introduire des biais dans l’attribution et l’exécution des marchés.

Si l’on regarde de plus près, les PPP ont été initialement utilisés dans des pays comme la France et la Grande Bretagne qui disposent d’un marché assez développé et d’un cadre réglementaire fiable. Ces deux facteurs minimisent l’occurrence des risques liés à la rentabilité des projets de PPP. Par ailleurs, un autre facteur très important concerne le pouvoir de négociation entre les parties prenantes aux contrats PPP. Dans les pays suscités, ce pouvoir est plus équilibré que dans les pays en développement où le chiffre d’affaire des entreprises impliquées dans la signature des contrats de PPP dépasse souvent la moitié de leur PIB.

Une approche pour remédier à ces problèmes consisterait à mettre en place des organismes techniques régionaux chargés de l’examen et de la signature des contrats de PPP. Cette approche a le mérite de s’appuyer sur un marché plus vaste, ce qui lui confère un pouvoir de négociation plus élevé. En plus, elle permettra d’attirer les experts en analyse et négociation de contrats de PPP au service des Etats.

Georges Vivien HOUNGBONON


[1] Deux articles dont celui de Simel et de Foly analysent déjà en quoi les PPP peuvent être une option intéressante pour le financement des infrastructures.

[2] Le rapport “Infrastructures Africaines: Une transformation impérative” estime à 93 milliards de dollars US, le montant annuel des besoins de financement d’infrastructures en Afrique.

[3] On peut mentionner aussi les transferts d’argent des émigrés Africains dont le montant dépasse aujourd’hui l’aide au développement, i.e. les prêts concessionnels octroyés à des taux préférentiels par des pays développés.

[4] L’entretien des routes est de plus en plus confié à des prestataires privé qui se charge de collecter des droits de passage chez les usagers et d’assurer l’entretien des routes.

[5] Cette procédure se distingue bien de la privatisation, dans la mesure où l’opérateur privé n’est pas propriétaire de l’infrastructure.

[6] L’agence MIGA de la Banque Mondiale s’occupe généralement des risqué non commerciaux.

Comment financer les infrastructures ?

arton44De nombreuses études suggèrent que les infrastructures jouent un rôle important dans la croissance économique, et par voie de conséquence dans la lutte contre la pauvreté[1]. Les gouvernements investissent dès lors de façon intensive dans les infrastructures. Une stratégie qui suscite assez souvent des critiques de la part de la société civile qui estime que les routes et autres infrastructures « ne se mangent pas » et que ces fonds, qui constituent par ailleurs une pression financière sur les Etats, sont à investir dans des secteurs productifs. Si les investissements en infrastructures contribuent au bien-être social – réduction du coût du transport avec la disponibilité des moyens de transport – et jouent en faveur de la croissance d’après la thèse des grands travaux de Keynes, il convient de déterminer les moyens optimaux pour les financer. En effet, les pays ont des canaux divers pour financer les nouvelles infrastructures : fiscalité, réduction de certaines dépenses courant ou en capital, emprunts – externe ou interne, etc. En se basant sur l’expérience de certains pays à profil différent d’Asie (Philippines, Chine et Pakistan)[2], John Cockburn et ses coauteurs étudient l’impact de ces investissements ainsi que celui de leur mode de financement (la fiscalité et les ressources externes) sur la croissance et la pauvreté.

Cette étude suggère, excepté le cas de la Chine, que des investissements publics en infrastructures financés par emprunt extérieur permettent de booster l’activité économique et de réduire la pauvreté. L’ampleur de l’impact (selon le choix même du mode de financement) dépend toutefois des spécifiés économiques du pays. Une économie émergente, comme celle de la Chine, avec une forte présence de capitaux privés bénéficie davantage de toute politique visant à renforcer le patrimoine en infrastructures et peut se permettre de financer ces nouveaux investissements en infrastructures par le biais de la fiscalité.

Globalement, il ressort de leurs travaux que le secteur privé est le principal canal de transmission de la politique d’investissement public en infrastructure. En effet, en l’absence d’une fiscalité forte, l’amélioration de l’état des infrastructures attire les investisseurs. L’abondance de capitaux privés renforce la productivité et la compétitivité de l’économie, et ce au niveau de tous les secteurs : la production augmente alors significativement et toute l’économie bénéficie d’une augmentation du revenu national. Cette performance de l’économie se traduit par une hausse de la consommation locale qui favorise l’industrie locale (financée par le secteur privé), impliquant de facto des opportunités d’emplois, et autres opportunités d’affaires (notamment dans les activités commerciales), qui résulteraient en une augmentation des revenus des individus de sorte de les faire sortir de leur situation de pauvreté.

De toute évidence, le financement des investissements avec des fonds internes sur base de fiscalité – qui est de loin l’un des moyens les moins risqués et pérenne de financer le développement[3] – est encore contraignant dans les pays sous développés et plus particulièrement en Afrique. Si le recours au financement extérieur serait pour l’instant le meilleur moyen pour financer les investissements en infrastructures ; il devient impérieux aux gouvernements de choisir judicieusement la forme de financement la plus adaptée aux besoins du pays. En effet, dans l'article précédent, il a été montré que le recours systématique aux emprunts sur les marchés financiers internationaux ne seraient pas sans danger pour les économies africaines. Cette situation met à jour le débat concernant l’importance du développement des marchés financiers africains.

Aussi, des moyens de financement alternatifs existent, auxquels peuvent avoir recours les nations africaines. D’une part, l’ouverture du continent à d’autres partenaires constituent une opportunité qu’il convient toutefois de considérer avec précautions. D'autre part, le recours au partenariat public-privé, qui permet aux pays d’obtenir à la fois l’assistance financière mais aussi technique sur les projets d’infrastructures, est aussi une option à considérer. Par ailleurs, les autorités devront aussi s’assurer de mettre en place un cadre réglementaire pour attirer les capitaux privés. Si l’état des infrastructures est essentiel dans l’implantation d’une entreprise, un cadre réglementaire défavorable limitera la présence du secteur privé, qui est le principal facteur valorisant des infrastructures.

Le déficit en infrastructures, qui obère encore les performances économiques de nombreux pays du continent africain, nécessite une réponse adéquate à travers une politique intégrant un mode financement centré sur la mobilisation de ressources financières extérieures et assurant l’implication du secteur privé. A défaut, ces investissements ne serviraient qu’à embellir les villes africaines et à accentuer la paupérisation des populations.

Foly Ananou

Référence : 

John Cockburn et al. (2013). Infrastructure and Economic Growth in Asia. PEP, Springer Open. 


[1] De fait, on considère depuis l’avènement des OMD que la meilleure façon de lutter contre la pauvreté c’est d’être économiquement performant (croissance), supposant que les populations les plus pauvres participent et bénéficient de cette croissance.

[2] Cette approche permettra de distinguer les effets qui sont propres aux pays selon leur profil et d’identifier les effets d’ensemble

[3] consulter l’article de Georges sur le financement du développement

Des infrastructures « made in China » en Afrique: une contribution au développement?

arton44Le secteur ferroviaire a été l’un des premiers secteurs des investissements chinois en Afrique. Dans les années 1970, la construction de la ligne ferroviaire entre la Tanzanie et la Zambie (TANZAM) symbolisait la première étape de la contribution  de la Chine à l’aide au développement en Afrique. Dans sa politique d’urbanisation et de modernisation de ses villes, d’abord côtières et aujourd’hui intérieures, la Chine investit massivement dans les infrastructures. La volonté des gouvernements africains de favoriser le développement des infrastructures coïncidant avec la présence croissante d’entreprises chinoises va très vite promouvoir l’implication de celles-ci dans les projets de développement d’infrastructures en Afrique.

Des grands chantiers dans le domaine du transport (routier, ferroviaire et portuaire), des télécommunications et de l’hydroélectricité par exemple ont été attribués à des entreprises chinoises. Mais est-ce que les infrastructures « made in China » en Afrique, contribuent au développement ?

Comment la Chine a-t-elle réussi à simposer dans le secteur des infrastructures en Afrique ?

Le secteur de la construction occupe une place importante dans l’économie chinoise. La Chine depuis son ouverture s’est investie dans la construction d’infrastructures adéquates et modernes pour promouvoir sa croissance économique.

Afin de développer son réseau ferroviaire et assurer une mobilité rapide à sa population sur un vaste territoire, la société chinoise des chemins de fer a modernisé le réseau de transport ferroviaire en Chine. De nouvelles lignes ferroviaires ont été développées et des trains à grande vitesse ont été construits afin de réduire les longues heures de voyage entre les villes éloignées. En ce qui concerne le réseau routier, de vastes autoroutes et ponts ont été construits à travers le pays. Toutes ces réalisations ont contribué à la modernisation de la Chine. En 2008 avec l’organisation des Jeux Olympiques de Beijing, il y avait plus de chantiers en construction dans la seule ville de Pékin que dans toute l’Europe.

Ces chantiers infrastructurels de grandes envergures engagés par la Chine ont permis aux entreprises chinoises, qui ont largement contribué à leur réalisation, d’acquérir une expertise locale et de cibler aujourd’hui les marchés étrangers.

Ainsi l’avantage compétitif des entreprises chinoises à gagner les appels d’offre grâce à l’appui politique et financier des institutions chinoises d’Etat contribue à la présence galopante de la Chine dans le secteur des infrastructures en Afrique. Des prêts concessionnels et préférentiels octroyés à travers des accords entre la Chine et les différents pays africains sont consentis pour financer divers projets (ports, barrages, lignes ferroviaires, etc.).

Des financements de la banque chinoise d’exports et imports (EXIMBANK) et de la banque chinoise de développement ont également permis aux entreprises chinoises de travaux publics et de génie civil d’acquérir des projets au Gabon, en Mauritanie et plus récemment en Afrique du Sud. La crise financière de 2008 qui continue de secouer les pays développés a aussi contribué à cette forte présence des entreprises chinoises en Afrique. En effet, cette crise a réduit la capacité des institutions financières et entreprises occidentales à financer de grands projets de construction ; ce qui, d’une certaine manière, a contribué à la présence des entreprises chinoises dans le secteur de la construction d’infrastructures en Afrique. A cela s’ajoute la sous-traitance entre les grandes multinationales et les Petites et Moyennes Entreprises (PME) chinoises de construction qui elle a elle aussi facilité la présence d’entreprises privées chinoises de construction sur le continent.

Le manque d’infrastructures adéquates susceptibles de tirer la croissance en Afrique a été un frein aux investissements africains et étrangers. Pour palier ce manque, les Etats africains ont décidé de faire du développement des infrastructures une priorité. Ce besoin a été un des leitmotivs de la présence chinoise dans la construction d’infrastructures en Afrique. Ainsi, les entreprises chinoises sont présentes dans différents secteurs d’investissement: énergie, télécommunications, hydraulique; etc. 

LIDE chinois et développement dinfrastructures en Afrique 

Dans sa politique de coopération économique avec les pays en voie de développement, la Chine envisage de sécuriser des ressources tout en contribuant à la construction d’infrastructures. Par exemple, « l’Angola model », qui consiste à échanger des ressources parfois à de bas prix pour des projets de construction d’infrastructures, est une politique d’investissement de la Chine spécifique aux pays riches en ressources et parfois même là où le système politique est controversé.

L’expansion des investissements chinois à l’étranger permet à la Chine non seulement d’acquérir de nouvelles technologies, de nouveaux marchés mais aussi à ses entreprises de mettre en pratique et de tester leur expertise. Elle permet aussi à de nombreuses entreprises de construction d’accéder à un grand nombre de marchés étrangers, créer des emplois pour les ouvriers chinois et acquérir une réputation internationale dans le domaine de la construction.

Dans plusieurs pays d’Afrique – Angola, Zambie, Nigeria, RDC, Djibouti et Tanzanie – la Chine s’investit dans la construction ou la réhabilitation de routes ou voies ferrées. Le besoin accru de produire de l’électricité et de faciliter l’accès à l’eau a incité des pays  africains tels que le Ghana, le Soudan ou encore le Botswana à axer leur priorité sur la construction de barrages hydroélectriques qui intéresse les entreprises chinoises. A partir des années 2000, les entreprises chinoises ont été présentes dans la rénovation et la construction de voies ferrées en Afrique comme en Angola et au Nigeria où la rénovation de lignes ferroviaires (respectivement Benguela et Lagos-Kano) a été entreprise par la China Civil Engineering Company (CCEC). En 2009, les entreprises chinoises s’étaient investies dans 18 projets de construction au Botswana.

La Chine respecte-t-elle les normes et priorités de construction en Afrique? 

La présence galopante de la Chine dans le secteur du développement des infrastructures en Afrique suscite des questions liées aux normes et au développement durable par rapport notamment à la qualité de ses propres réseaux routiers et ferroviaires. 

Le problème immobilier qui secoue particulièrement les grandes villes chinoises s’ajoute aux défis auxquels le gouvernement chinois fait face pour éviter une crise immobilière qui pourrait toucher des millions de Chinois qui ont de bas salaires et qui voudront acquérir des logements. Cependant, de nombreux scandales liés à la corruption, à une mauvaise gestion et aux accidents (effondrements de ponts, collisions et déraillements de trains) sont apparus dans ces secteurs en Chine. Ainsi, des questions relatives à la qualité des infrastructures conduisent à réfléchir sur le savoir-faire des entreprises chinoises. 

L’ancien ministre chinois des chemins de fer a été déjà jugé coupable pour corruption et autres malversations financières qui ont mis certains projets d’Etat au ralenti. Des accidents sur les routes et les voies ferrées chinoises ont attiré l’attention des Chinois et de la communauté internationale sur l’exigence de normes et sur la qualité des projets de construction en Chine. Bien que le gouvernement chinois ait entrepris des réformes dans l’amélioration de la qualité et dans le système d’appels d’offres public de nombreux problèmes subsistent.

En effet, la courte durée de construction des chantiers chinois, les normes de construction non conventionnelles, la détérioration rapide des infrastructures après livraison et la corruption ont été déjà mentionnées à travers l’implication de la Chine dans des projets de construction à l’étranger.

La construction de barrages hydroélectriques qui doit générer de l’électricité et faciliter l’accès à l’eau dans plusieurs pays africains, tels que le Soudan, le Botswana et le Ghana a pollué des fleuves et conduit au déplacement de populations qui ont perdu leurs activités économiques.

De telles menaces encourues ont poussé certains pays à être plus exigeants en termes de contrôle des normes de qualité. En 2009, les entreprises chinoises s’étaient investies dans 18 projets de construction au Botswana. Mais récemment, le président du Botswana a déclaré que des systèmes de contrôles stricts devaient être mis en place pour évaluer de plus près l’implication des entreprises chinoises dans le secteur de la construction au Botswana. Des entreprises chinoises ont vu leurs projets suspendus afin d’évaluer si les règles et normes de construction en vigueur au Botswana sont respectées.

Un des projets de développement des infrastructures chinois en Afrique qui a récemment attiré l’attention de l’opinion publique est la construction d’une toute nouvelle ville à Luanda en Angola. Nova Cidade de Kilamba a été entièrement construite par l’entreprise chinoise d’Etat China International Trust and Investment Corporation (CITIC). Ce projet  s’est inspiré des nombreux projets immobiliers de la CITIC, en Chine, qui a développé de nouvelles cités avec tout un confort incluant système de transport, écoles, boutiques, cliniques, salles de sports, restaurants, etc.; autour aussi bien dans les grandes villes côtières que dans les provinces de l’intérieur. Mais ces villes chinoises qui restent encore inhabitées sont des « villes fantômes ». En effet compte tenu du prix élevé du loyer et de la grande majorité des Angolais vivant dans la pauvreté, la « ville fantôme » de l’Angola n’a pas attiré suffisamment de clients pour occuper ses 750 buildings de huit étages, chacun équipés de 12 écoles et de plus de 100 boutiques. Dans un pays comme l’Angola qui manque d’infrastructures de base et dont la capitale est surpeuplée, un tel investissement de luxe n’est pas une priorité! Il ne répond pas aux besoins de la grande majorité des Angolais qui ne bénéficient pas des revenus générés par les importantes ressources minières dont regorge le pays. Il est dit que l’Angola aurait échangé des ressources pour la construction de cette « ville fantôme ». Cet exemple devrait pousser les autorités africaines, particulièrement celles des pays riches en ressources naturelles, à savoir que le modèle d’échanges « ressources contre infrastructures » n’est pas à long terme durable.

Certes, les investissements chinois en Afrique constituent une opportunité et contribuent à diversifier le partenariat économique des pays africains mais ne sont pas une garantie pour le développement du continent. Une attention particulière des pays africains par rapport à l’engagement de la Chine en Afrique doit être portée sur l’exportation des problèmes d’environnement et de développement durable de la Chine en Afrique. La priorité doit être axée sur les besoins en infrastructures qui satisfont les populations dans les différents pays d’Afrique pour une relation à long-terme basée sur le développement durable entre la Chine et l’Afrique. Et pour ce faire, l’engagement des gouvernements africains à travers leurs ministères et agences compétents est nécessaire pour l’exécution des règles. La présence de la Chine dans le secteur de la construction d’infrastructures en Afrique devrait contribuer à la création d’emplois pour l’expertise locale dans les différents pays africains et au transfert de technologies et de connaissances. Bien que le manque d’infrastructures dans plusieurs secteurs pousse les gouvernements africains à favoriser des investissements étrangers de la part des bailleurs traditionnels et des économies émergentes, le modèle d’échange « ressources contre développement d’infrastructures » n’est pas durable et nécessite des critiques constructives. Le développement des infrastructures contribue au développement mais cela doit se faire sans heurts pour les populations.

Article écrit par Daouda Cissé et publié initialement sur le site du CICAD