A la recherche d’une justice internationale : l’Afrique et la CPI

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Cette « cour pénale africaine », qui est voulue comme une réponse au biais de la CPI en Afrique, souffre des mêmes manquements et restera comme celle-ci sous l’influence des intérêts politiques des États. Le Sommet de l’Union africaine à Malabo (juillet 2014) a entériné la mise en place d’une Cour africaine de justice et des droits de l’homme. La création de cette Cour termine un processus enclenché par le Protocole sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, adopté en juin 1998 à Ouagadougou et entré en vigueur en 2004. Mais elle  intervient dans le cadre d’une opposition de plus en plus vive entre certains dirigeants politiques africains, l’UA et la Cour pénale internationale (CPI).

L’idée que la CPI ne s’intéresse qu’aux Africains se retrouve dans plusieurs discours. Depuis sa mise en œuvre en 2002, la CPI a inculpé une trentaine de personnes, toutes africaines. A cet égard, elle est régulièrement accusée d’être un instrument néocolonial, ayant un biais envers l’Afrique et les leaders politiques africains. Ce sentiment aurait pu être considéré comme marginal et relevant de la partisannerie politique si l’UA et nombre de leaders politiques n’avaient tenu des propos illustrant cette perspective. En 2013,l’inculpation du président kenyan Uhuru Kenyatta et de son vice-président William Ruto pour crimes contre l’humanité à cause de leur appui financier aux violences postélectorales de 2007-2008 semble avoir ravivé les tensions latentes entre l’UA et la CPI. En effet, l’organisation panafricaine avait déjà déclaré qu’elle ne collaborerait pas avec la CPI suite à l’inculpation du président soudanais, Omar el-Bechir en 2009. Le  sommet d’Addis-Abeba d’octobre 2013 a constitué un épisode de plus dans le divorce entre les deux institutions puisque l’ordre du jour était marqué par un éventuel retrait collectif des États africains de la CPI. Même si un retrait massif n’a finalement pas eu lieu, la mise en œuvre de la nouvelle Cour de justice, qui sera compétente pour juger les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes d’agression, vient couper l’herbe sous le pied de la CPI.

Il est vrai que le poids des pays occidentaux sur le financement de l’organisation (60% du budget provient de l’Union européenne) et sur la nomination des juges peut leur donner une influence plus que raisonnable sur ses activités. C’est l’opinion du professeur ougandais Mahmood Mamdani qui considère que la CPI est trop sous influence de l’Occident et qu’on assiste à du « déjà-vu » avec la place qu’occupe le continent noir dans les travaux de ladite cour, au vu des relations historiques entre l’Europe et l’Afrique. Toutefois, cette vision négative ne résiste pas à une analyse plus poussée. Il est vrai que la CPI est défaillante sur plusieurs points. Le Conseil de sécurité de l’ONU peut lui demander de se pencher sur les activités qui peuvent être qualifiées de « crimes de guerre, contre l’humanité et d’agression » alors que trois de ses cinq membres permanents n’ont pas signé ou ratifié son traité fondateur, le Statut de Rome. Ainsi, les États-Unis, la Chine et la Russie influencent ou entravent, selon leurs intérêts politiques, l’activité de la CPI, sans pour autant la reconnaître légalement. Les récentes joutes au sein de ce Conseil a propos de l’implication de la CPI dans le conflit syrien montrent assez bien la dimension politique que l’institution a acquise en étant un instrument passif de ces États.

Mais dans le contexte africain, les critiques oublient souvent que la CPI ne s’est autosaisie que dans le cas du Kenya. L’ancien procureur, Luis Moreno Ocampo, avait décidé d’enquêter sur l’implication d’Uhuru Kenyatta et de William Ruto dans les violences postélectorales de son propre chef. Il est vrai que Kenyatta et Ruto ne sont pas les seuls hommes politiques au monde sur qui pèsent des soupçons d’incitations à des violences de masse. Dans la grande majorité des autres procès contre des citoyens africains, ce sont les États du continent qui ont eux-mêmes référé ces individus au tribunal de la Haye parce que leurs juridictions nationales sont incompétentes pour juger les crimes en question. Laurent Gbagbo a été inculpé par la CPI parce que le gouvernement ivoirien a transmis son dossier d’accusation à cette cour.  Il en est de  même pour la multitude de chefs rebelles congolais traduits dans cette instance. Sans une collaboration des États africains et de ces mêmes leaders qui vilipendent la CPI, cela n’aurait pas été possible.

Le maintien des charges contre Kenyatta et Ruto est problématique étant donné qu’ils constituent les deux plus hautes autorités étatiques du Kenya.  Où s’arrête la souveraineté nationale et où commence le droit à la justice ? Comme dans le cas de Laurent Gbagbo, les procès de ces deux hommes d’État sont fortement politisés et divisent bien souvent les citoyens de leurs pays respectifs. Ces trois personnalités sont ainsi bien différentes de celles dont la CPI avait jusqu’ici l’habitude : les premières personnes inculpées avaient rarement le même capital politique pour combattre une instance de justice internationale, plus axée sur les principes que sur le monopole de la violence, trop dépendante de la volonté des États et de leurs intérêts stratégiques pour rendre une justice véritablement impartiale.

La Cour africaine pour la justice et les droits de l’homme nouvellement créée semble répondre à ce contexte de tensions entre les chefs d’État africains et la CPI. Cette cour pénale ne devrait être opérationnelle que dans quelques années, mais le fait qu’elle ait été votée presque à l’unanimité (seul le Botswana a voté contre) est un signal assez fort envers la CPI. Le principe de subsidiarité fait de la CPI une cour de dernière instance qui ne s’occupe que des crimes pour lesquelles les justices nationales sont incompétentes. L’UA coupe ainsi l’herbe sous le pied de la CPI ; mais d’ores et déjà, on peut douter de l’engagement des États d’Afrique envers une justice continentale transparente et  vraiment juste. Une clause de ce nouveau Protocole accorde l’immunité aux chefs d’État durant leur mandat et aux « hauts fonctionnaires » en exercice. Uhuru Kenyatta, William Ruto et Omar el-Bechir ne seraient pas poursuivis par cette Cour, en dépit des sérieuses accusations de crimes contre l’humanité qui pèsent sur leurs têtes.

De plus, vu la propension des chefs d’État du continent à ne céder le pouvoir que lorsqu’on leur force la main, il est à craindre que cette clause ne soit une incitation à s’accrocher encore plus au pouvoir. Cette clause et cette cour constitueraient ainsi des obstacles à la consolidation démocratique que l’Afrique connaît depuis le début des années 1990. De plus, les États africains ne se sont pas distingués par leur engouement pour une justice africaine internationale. Le Protocole sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples a été signé en 1998, mais n’a été ratifié que par 15 pays sur les 53 membres de l’UA.

Toute cette controverse nous renvoie au débat sur la possibilité d’une vraie justice internationale. Tiraillée entre les considérations juridiques et la morale, elle dépend au final de la bonne volonté politique des États et de leur puissance pour sa mise en œuvre.  La Cour africaine de justice et des droits de l’homme sera confrontée aux mêmes problèmes et aux mêmes critiques que la CPI, à laquelle elle semble se substituer en ce qui concerne l’Afrique. Le poids politique des États et des leaders déterminera toujours leur position face à cette cour. Au final, les États africains vont reproduire les mêmes attitudes que celles qu’ils reprochaient à la CPI. Apres tout, la partialité est inhérente à tout mécanisme qui se base sur des considérations politiques et sur des intérêts nationaux.

Ousmane Aly Diallo

Votre pays est-il un état fragile ?

???????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????Le Nigeria et le Cameroun, sont-ils des états fragiles ? Que dire du Malawi ou du Kenya sur le même sujet ? Cet article se propose de revenir sur l’expression « état fragile » utilisée pour caractériser certains pays afin de  mieux appréhender les enjeux auxquels font face ces derniers.

Un concept difficile à cerner !

Le mot « fragile » est défini dans le dictionnaire de langue française comme «quelque chose qui se brise facilement, quelque chose qui est précaire ». Il est donc aisé de dire d’un œuf ou de la porcelaine qu’ils sont fragiles. Mais quand il s’agit de faire référence à ce mot pour qualifier un pays, cela devient plus complexe. En effet, si l’expression « état fragile » est utilisée pour désigner certains pays, il faut dire qu’il est aujourd’hui très difficile d’établir une liste concrète d’états fragiles. Cette complexité provient du fait qu’il est aujourd’hui difficile de définir avec exactitude l’expression « état fragile ». Pour y voir un peu plus clair sur le sujet, commençons par regarder de près ce qu’on peut considérer comme un état stable ou non fragile.

La stabilité d’un pays fait généralement référence à l’absence de conflit armée sur son sol, une situation politique calme, apaisée et inclusive. Économiquement, un état stable se caractérise par une croissance durable et inclusive. C’est aussi un état qui dispose d’institutions solides, qui pratique la bonne gouvernance, un état où les règles démocratiques sont respectées, où il existe la liberté de la presse, où les minorités sont représentées à tous les niveaux de la société. Au vu de ces critères, un état fragile peut être considéré comme un état qui ne présente pas les caractéristiques d’un état non fragile. Selon l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE), « une région ou un état fragile a une faible capacité à exercer des fonctions de base de la gouvernance, et n'a pas la capacité de développer des relations mutuellement constructives avec la société. Les régions ou États fragiles sont également plus vulnérables aux chocs internes ou externes tels que la crise économique ou les catastrophes naturelles. En revanche, les états plus résistants présentent la capacité et la légitimité pour gouverner une population et son territoire. »

Si un consensus général se dégage sur les aspects politiques, économiques et sociaux caractérisant les états fragiles, il faut souligner également que certaines variables permettent parfois de prédire le risque que court un pays de devenir un état fragile.

Fragilité : une approche universelle pour traiter des sources très diverses !

Dans son rapport intitulé État de fragilité 2015, l’OCDE distingue cinq dimensions principales qui caractérisent la fragilité d’un état : la violence, la justice, les institutions, les fondements économiques, et la résilience.  Les cinq dimensions de la fragilité proposées révèlent des profils de vulnérabilité différents. En effet, d’après l’OCDE, il faut aborder la fragilité selon une approche plus universelle, qui n’enferme pas les états fragiles dans une seule et même catégorie, mais repose au contraire sur des mesures rendant compte des diverses facettes du risque et de la vulnérabilité surtout dans la période post-2015 marquée par les Objectifs de Développement Durable (ODD). Utilisant un diagramme de Ven regroupant les cinq dimensions de la fragilité évoquées plus haut, l’OCDE conclut qu’une approche universelle pour appréhender la fragilité présente de multiples avantages. Elle peut faciliter la détermination des priorités en faisant apparaître les pays qui sont vulnérables à des risques spécifiques et qui sont susceptibles de perdre des acquis du développement ; elle peut éclairer les priorités de la communauté internationale afin de réduire conjointement la fragilité ; elle peut continuer d’axer les efforts sur la réalisation de progrès dans les situations de pauvreté et de fragilité extrêmes. Une approche par groupe remédie en outre à certains des inconvénients d’une liste unique d’États fragiles. Par exemple, les pays eux-mêmes ne voient pas toujours l’intérêt d’être inscrits sur la liste. Un indicateur unique peut en outre passer à côté de risques importants qui interagissent avec la faiblesse des institutions et la fragilité, comme le changement climatique, les risques de pandémie et le crime organisé transnational.

Quel état est donc considéré comme fragile ?

Le rapport de l’OCDE sur l’état de fragilité en 2015 identifie 28 pays africains. On retrouve évidemment dans cette liste des pays comme le Mali, la République Centrafricaine, la République Démocratique du Congo, la Somalie, pays marqués par de l’instabilité politique et des conflits armés auxquels il faut ajouter une situation économique difficile. On y retrouve également des pays comme le Cameroun, la Côte d’Ivoire, l’Éthiopie, le Nigeria, le Rwanda ou encore le Togo. Le Nigéria, à cause des tensions communautaires entre le Nord et le Sud, de la violence sur son sol avec le groupe terroriste Boko Haram ainsi que des institutions minées par la corruption, le Rwanda à cause de l’exposition et de la vulnérabilité du pays aux phénomènes extrêmes liés au climat et à d’autres chocs et catastrophes d’ordre économique, social et environnemental, le Togo à cause d’un système judiciaire ne respectant pas encore les standards et des fondements économiques encore à bâtir et à consolider.

D’autres organisations multilatérales comme la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développent et la Banque Asiatique de Développement se sont également penchées sur le sujet. Ces dernières ont développé une liste harmonisée d’états fragiles qui est révisée chaque année. D’après la liste harmonisée de ces trois institutions, un pays est considéré comme fragile s’il a une moyenne des scores de l’évaluation de la politique et des institutions nationales (CPIA) des trois organisations inférieure ou égale à 3,2 et/ou s’il y a eu la présence d'une mission régionale et/ou des Nations Unies de maintien ou de consolidation de la paix au cours des trois dernières années sur son territoire. Ainsi pour le compte de l’année 2015, le Burundi, le Tchad, le Madagascar sont considérés comme des états fragiles conformément à la liste de l’OCDE. Par contre, avec le classement de la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développent et la Banque Asiatique de Développement, le Cameroun, le Nigeria, le Kenya par exemple ne figurent plus parmi les états fragiles.

Fragile ou pas, les défis restent les mêmes !

Si le consensus n’est pas définitif sur la classification des états fragiles, beaucoup de pays restent marquer par l’instabilité politique et les conflits armés, la mauvaise gouvernance, les tensions communautaires et font maintenant face au risque climatique. Le chômage, les inégalités , la pauvreté, l’exclusion sont autant de sources de fragilité dans un pays .La fragilité est aujourd’hui une question importante pour la communauté internationale, raison pour laquelle celle-ci en a fait un des objectifs de développement durable à travers son objectif 16, qui est de « Promouvoir des sociétés pacifiques et inclusives pour le développement durable, l'accès à la justice pour tous et bâtir des institutions efficaces, responsables et inclusives à tous les niveaux », en vue de relever ce défi. Si une vingtaine d’états fragiles dont la Guinée-Bissau, le Libéria, le Togo, ont effectué des progrès en atteignant une ou plusieurs cibles des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), les États fragiles sont restés tout de même à la traîne dans l’atteinte des OMD pour l'ensemble des 8 objectifs. En moyenne, les États fragiles ont affiché un retard de 18% par rapport aux états non fragiles en ce qui concerne le nombre de pays ayant atteint chacune des cibles des OMD.  Par conséquent, les états fragiles doivent s’atteler à relever les défis de la sécurité et de la stabilité politique, de la bonne gouvernance, de l’inclusion, de la résilience et construire des institutions fortes. Dans le même temps, les états stables ou non fragiles doivent, quant à eux, continuer de maintenir le cap de la bonne gouvernance, de la sécurité, de l’inclusion et de la résilience.

Le procès Habré ne doit pas être la justice des vainqueurs

JPG_AffairePetroTim060115Le procès qui s’est ouvert le 20 juillet 2015 à Dakar contre l’ancien Président tchadien Hissène Habré, représente un moment clé dans l’histoire judiciaire du continent africain. Les Chambres africaines extraordinaires, créées dans le cadre d’un mandat de l’Union africaine à l’Etat sénégalais, ont ouvert une page inédite du droit pénal international, et vont livrer un verdict qui, quel qu’il soit, fera date dans la justice mondiale en matière de droits humains. Hissène Habré est jugé pour crimes contre l’humanité, torture, et crimes de guerres commis au Tchad entre 1982 et 1990, après de longues années de lutte des victimes, familles et ONG.

Cependant, le triomphe que représente en soi la tenue de ce procès ne doit pas occulter la nécessité de faire la part de responsabilité que d’autres ont eue dans la commission de ces crimes. En effet, il serait dommage de faire porter à Habré seul la responsabilité de tous ces crimes. Les Chambres africaines extraordinaires doivent saisir l’occasion pour rendre justice entière. Pour la première fois, un ancien chef d’État africain est jugé dans un pays africain pour des crimes qui relèvent de la justice internationale par des juges africains. Cette possibilité offerte par le principe de la compétence universelle prévue par la Convention de New York sur la Torture, doit permettre de juger tous les responsables des forfaits commis.

La première raison est qu’Hissène Habré n’a certainement pas agi seul dans ces forfaits, et qu’en matière pénale les peines ne doivent pas être partagées, a fortiori en matière de droits humains et de torture. Habré est devenu président en juin 1982 à la suite d’une longue période d’instabilité ouverte par la chute du régime de François Tombalbaye (1960-75), avec l’aide de puissances étrangères comme la France et les Etats-Unis, et gouverné avec leur soutien. Certes, son pouvoir dictatorial a fait environ 40 000 victimes sur des bases ethnico-politiques, notamment lors de l’Opération « Septembre noir » en 1984 au sud du pays. C’est exactement pourquoi il faut faire juger ceux qui y ont pris part, sachant que certains d’entre eux occupent de hautes fonctions au Tchad et ailleurs en Afrique. L’actuel Président tchadien Idriss Déby, qui était chef des Forces armées nationales de 1983 à 1985, a organisé un procès contre ceux qui étaient soupçonnés d’y avoir participé. Cet empressement montre une volonté de faire taire des voix gênantes et de protéger certains.

La deuxième raison est que la justice africaine doit garder son indépendance et sa souveraineté : la responsabilité des Etats-Unis et de la France, qui ont aidé le Tchad d’Habré dans son conflit contre la Libye de Mouammar Kadhafi, doit clairement être établie dans le cadre de ce procès. Habré a voulu libérer le Nord du Tchad, si convoité par le guide libyen. Les victimes qui ont porté l’affaire devant un tribunal belge, et obtenu du Sénégal qu’il juge Habré après l’injonction de la Cour internationale de justice de « juger ou extrader », doivent fournir les mêmes efforts pour réclamer la mise en lumière du rôle des puissances étrangères dans les actes commis par son régime, pour respecter le principe d’égalité devant la justice. L’opération Épervier déclenchée par les forces françaises au début de 1986 en réponse à l’invasion de troupes libyennes, ainsi que l’aide américaine ont été cruciales dans le maintien d’Habré au pouvoir. C’est pourquoi il faut situer toutes les responsabilités, même à l’étranger.

Si ce procès ne permet pas de faire la lumière sur toutes les responsabilités dans ces crimes, le Sénégal et l’Afrique vont perpétuer l’image d’une justice internationale partiale –  celle des vainqueurs. Une justice qui sert à faire des exemples, mais pas toute la lumière. Tous ceux qui sont passés à La Haye, Africains ou pas, restent des bouc-émissaires de violences collectives qu’une poignée d’individus n’ont pas pu commettre seuls entre eux. Les Chambres africaines extraordinaires ont l’immense occasion de démontrer que la justice internationale peut être équitable, et ne doit pas simplement être une justice symbolique, ni celle des seuls vainqueurs.

Mouhamadou Moustapha Mbengue

Génocide rwandais: 20 ans après, la paix à tout prix (2eme partie)

Terangaweb_Gacaca Rwanda « Une loi ne pourra jamais obliger un homme à m’aimer mais il est important qu’elle lui interdise de me lyncher » Martin Luther King

Un génocide n’est pas un crime comme un autre. Alors que les autres formes de conflits répondent à des intérêts politico-économiques, le génocide est un plan concerté en vue d’éliminer les membres d’un groupe donné. Le génocide tend à « purifier » le groupe social en ôtant les éléments considérés indignes d’en faire partie : les juifs en Allemagne, les Noirs en Afrique du Sudles Tutsi au Rwanda…  D’autres pays ont eu la difficile tâche de réconcilier un peuple déchiré par un conflit. En Afrique du Sud il y a eu les Commissions Vérité Réconciliation, au Soudan on a choisi la solution radicale de la sécession, en Côte d’Ivoire on croise les doigts pour que dure une paix vacillante.

Le Rwanda passe pour le bon élève de la région des Grands Lacs (à juste titre) puisqu’il a réussi sa « résurrection » dans bon nombre de domaines (Le Rwanda, une Nation phénix (1ère partie) – L'Afrique des idées et Le Rwanda, une Nation phénix (2ème partie) – L'Afrique des idées) Le pays est dirigé de main de fer par Paul Kagame qui a su lui insuffler le nouveau souffle de développement qu’il lui fallait après 1994. Qu’en est-il socialement ? Le génocide a matérialisé de façon radicale une division qui couvait depuis bien longtemps dans la société rwandaise. La réconciliation entre les membres d’une société n’est pas de l’ordre du politique, elle est pourtant indispensable entre des gens qui de toute façon sont condamnés à vivre ensemble. Le pardon ne peut donc être une consigne collective mais l’Etat a pour devoir de s’assurer que partout, tous les membres de la société se sentent appartenir au groupe, il impose sinon le pardon, en tout cas un terme officiel.

Cette idée sous-tend le droit pénal de tous les pays qui ont aboli la peine de mort : punir le coupable à la fois pour arrêter le cycle de violence et empêcher tout acte de vengeance et s’assurer de la future réinsertion du condamné. Le droit de punir (de venger…) appartient donc à l’Etat. L’acte génocidaire concerne forcément toutes les couches de la société puisque très souvent il se concrétise parce que « quelques-uns l’ont voulu. D’autres l’ont fait. Tous l’ont laissé faire » (Tacite). Si l’acte concerne toute la nation, le travail de réconciliation encore plus. Il s’agit de ne pas laisser subsister un fond d’animosité d’un côté ou de l’autre, animosité qui pourrait servir de base au déclenchement de nouveaux conflits sur les restes encore fumants du précédent.

Les gacaca ont essuyé la critique de ne pas être des juridictions professionnelles et donc de ne répondre à aucun des critères qui définissent une juridiction : impartialité, indépendance, procès équitable…mais comment pouvait-il en être autrement ?

D’une part, au lendemain du génocide il était urgent de juger les centaines de milliers de personnes détenues, les professionnels de la Justice étaient soit au nombre des victimes, soit parmi les accusés…ou ils avaient quitté le pays. Dire donc que le travail des gacaca a manqué de rigueur juridique serait reprocher au Rwanda de ne pas avoir appliqué une solution ordinaire à une situation qui n’avait rien d’ordinaire. A situation exceptionnelle, solution exceptionnelle.

D’autre part, ces juridictions, parce qu’elles sont populaires ont contribué à mettre ensemble, à confronter des personnes qui n’auraient jamais eu cette forme de justice participative dans un cadre juridictionnel classique. Il serait bien sûr naïf de penser qu’à la fin du procès, victime et bourreau repartaient en bons amis. D’ailleurs les voix des victimes se lèvent pour dénoncer une justice qu’elles estiment expéditives et biaisées (comment croire et accepter les remords de l’accusé qui « échange » l’aveu contre une réduction de peine ?) mais au lendemain d’un tel drame, les solutions n’étaient pas nombreuses. Sauf à séparer le pays en deux avec d’un côté les Tutsi et de l’autre les Hutu la seule autre solution aurait été celle de la vengeance systématisée qui aurait sans doute conduit à un autre drame avec les mêmes acteurs dans des rôles différents : les Tutsi en bourreaux et les Hutu en victimes. La solution retenue n’était pas forcément la meilleure, objectivement, mais la mieux adaptée au vu des éléments.

Le génocide n’a que vingt ans, il est encore trop tôt pour faire un bilan de l’Histoire et juger les avancées en matière de paix sociale qui mettront sûrement encore beaucoup d’années à se concrétiserMais le Rwanda a entamé un processus qui devrait à très long terme, s’il est suivi, effacer des divisions qui n’ont pas lieu d’être. Cela pourrait passer (comme au Nigeria) par un partage subtil du pouvoir entre Hutu et Tutsi, l’égal accès des uns et des autres aux structures étatiques, à l’éducation, à l’emploi…bref concrétiser ce que la Constitution a théorisé : tous les Rwandais sont égaux.

La réconciliation est aussi et surtout une question de mémoire. Mémoire collective, mémoire individuelle. Peut-être la seconde sera-t-elle moins vive dans deux, trois générations et que le temps aura non pas gommé mais estompé les blessures. En attendant, les rescapés, hébétés, se réintègrent bon an mal an à cette société qui abrite encore leurs bourreaux et tous les jours supportent stoïquement la vue de ceux-ci, désormais libres. Parce que « Amarira y’umugabo atemba ajya mu unda »[1]

Tity Agbahey

Retrouvez la première partie ici.


[1] Proverbe en langue kinyarwanda: « les pleurs d’un homme coulent dans son ventre ».

 

Génocide rwandais: 20 ans après, la paix à tout prix (1ère partie)

rwanda-genocide-memorial-tour« Je ne crois pas ceux qui disent qu'on a touché le pire de l'atrocité pour la dernière fois. Quand il y a eu un génocide, il peut y en avoir un autre, n'importe quand à l'avenir, n'importe où, au Rwanda ou ailleurs; si la cause est toujours là et qu'on ne la connaît pas ».
Un rescapé (Jean Hatzfeld, Dans le Nu de la vie).

Entre avril et juillet 1994 le Rwanda, pays d’Afrique centrale, connaît ce qui reste le génocide le plus meurtrier de l’Histoire du point de vue du nombre de victimes par rapport à la durée des exactions : près de 800.000 victimes (Tutsi et Hutu modérés) en trois mois, selon l’ONU.  A quelques mois du vingtième anniversaire de ce génocide, où en est le Rwanda ?

Il n’est pas aisé de dater exactement l’origine de la division entre « ethnies » Hutu et Tutsi au Rwanda. Le terme même d’ethnie est impropre dans ce pays où aussi bien les Hutu que les Tutsi parlent la même langue, le kinyarwanda, et partagent globalement les mêmes coutumes et croyances. Dans les années trente, le colonisateur belge entérine officiellement la différenciation en créant des cartes d’identité « ethniques » et en confiant à l’ethnie tutsi l’autorité de régir le pays sous la tutelle de l’administration coloniale. A ces Tutsi, le colonisateur donne accès aux études et à la gouvernance, délaissant les deux autres ethnies que sont les Hutu et les Twa.

A l’indépendance le gouffre créé par le colonisateur est dur à combler, d'autant plus que les Belges ont soudainement renversé leurs alliances à la fin des années 1950, délaissant les Tutsi et laissant libre cours à la "révolution Hutu", qui s'accompagne des premiers pogroms. Dès le début des années 1960, les Tutsi sont de plus en plus souvent les cibles de massacres les poussant à chercher exil en Ouganda, au Burundi et dans l'ex-Zaïre (l'actuelle République démocratique du Congo). Ces exilés (surtout ceux partis en Ouganda) vont nourrir le désir de revenir au pays et de reprendre le pouvoir par la force, et dans ce but, créent à la fin des années 1980 un mouvement armé, le Front patriotique rwandais (FPR). Aux tentatives de reprise de pouvoir par ces exilés, le gouvernement Hutu répondra systématiquement par les massacres des Tutsi restés au Rwanda. Le 6 avril 1994 le président rwandais (Hutu) Juvénal Habyarimana meurt, lorsque son avion, qui s'apprêtait à atterrir à Kigali, est abattu par un missile. Les Hutus attribuent l’assassinat aux Tutsi du FPR.

C’est l’élément déclencheur d’un génocide qui couvait depuis bien longtemps. Le lendemain marque le début officiel des massacres. Organisés en milices, les Hutu tueront près d’un million de Tutsi et de Hutu modérés, en trois mois. Le 4 juillet 1994 le Front patriotique rwandais entre dans la capitale Kigali après une difficile guerre civile contre l'armée rwandaise (FAR) et les milices génocidaires, les "Interahamwe". Alors que les génocidaires et des dizaines de milliers de Hutu fuient en masse vers l'est du Zaïre, le FPR prend le pouvoir et forme un gouvernement d’unité nationale avec symboliquement, un Hutu, le Pasteur Bizimungu, en tant que chef d’Etat. Paul Kagame, issu de cette génération de Tutsi ayant connu l’exil en Ouganda est élu Président en 2000 avec le FPR et lance un processus de justice et de réconciliation pour emmener les Rwandais à vivre de nouveau ensemble. L’unité et la réconciliation au Rwanda deviennent de véritables objectifs politiques : une Commission nationale pour l’unité et la réconciliation est créée en 1999, la mention de l’ethnie disparaît des cartes d’identité et la nouvelle Constitution prend la peine de préciser que tous les Rwandais ont des droits égaux. 

Les travaux de la Commission reposent sur différentes approches dont l’éducation à la paix, l’Ingando, qui a pour but d’éclairer l'histoire du Rwanda, de comprendre les origines des divisions parmi la population, d'encourager le patriotisme et de combattre l'idéologie génocidaire.

Il n’y a cependant pas de réconciliation ni de paix possible sans justice. Ainsi, sous l’égide de l’ONU, le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) est institué pour juger les auteurs de génocide et d’autres violations du Droit international humanitaire au Rwanda entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. Le TPIR a aussi pour ambition de « contribuer au processus de réconciliation nationale au Rwanda et au maintien de la paix dans la région ».  Pour l’heure, 65 personnes ont fait l’objet d’un jugement définitif, 10 affaires sont pendantes devant le Tribunal et un accusé est en attente de procès.

A côté du TPIR une autre « juridiction » est chargée de juger les centaines de milliers de personnes mises en cause dans l’exécution de ce génocide : les gacaca (prononcer gatchatcha), les juridictions populaires. Traditionnellement réservés aux contentieux civils, les gacaca ont un système basé sur la recherche de l’aveu et du pardon. C’est une loi de 1996 sur l'organisation et la poursuite de crimes de génocide ou crimes contre l'humanité  qui répartit la compétence entre le TPIR  et les gacaca. Au premier la charge de poursuivre les planificateurs, les organisateurs et les leaders du génocide, ceux qui ont agi en position d'autorité, les meurtriers de grand renom ainsi que ceux qui sont coupables de tortures sexuelles ou de viols (compétence partagée avec les juridictions régulières rwandaises), aux gacaca la poursuite et le jugement des auteurs, coauteurs ou complices d'homicide volontaire ou d'atteintes contre des personnes ayant entraîné la mort et de ceux qui avaient l'intention de tuer et ont infligé des blessures ou ont commis d'autres violences graves qui n'ont pas entraîné la mort et ceux qui ont commis des atteintes graves sans intention de causer la mort des victimes. Concrètement, les cerveaux des opérations au TPIR et les bras armés devant les gacaca. Les procès de ces juridictions populaires réunissent accusés et familles de victimes, les débats sont publics et quiconque a avoué ses crimes bénéficient d’une réduction voire d’une exemption de peine. Quand il y a une peine, elle est très souvent symbolique : les accusés sont trop nombreux et les prisons sont surpeuplées.

Les gacaca sont officiellement arrivés au terme de leur mandat le 18 juin 2012, deux millions de personnes ayant été jugées. Alors que les conséquences de ce génocide se sont étendues au-delà des frontières rwandaises (voir l'article de L'Afrique des idées: Rwanda – RDC: les dessous d’une guerre larvée) il est légitime de se demander si la très applaudie politique de réconciliation a tenu ses promesses. 

Tity Agbahey

Lire la deuxième partie de cet article.

La justice « comme si » de la CPI

Gbagbo HayeLe 28 février dernier s’est achevée, à la Haye, l'audience de confirmation des charges retenues par le bureau du procureur de la Cour Pénale Internationale contre l’ancien président Ivoirien Laurent Gbagbo. Ce fut une assez lamentable et honteuse procédure.

J’ai écrit ici, et je maintiens qu’il est dans l’ordre des choses que Laurent Gbagbo et les autorités officielles du pays durant les dix ans qu’il passa à sa tête aient à s’expliquer et à répondre des crimes qui leur sont imputés. C’est bien le minimum.

Bon gré, mal gré ils dirigeaient au moins une partie de la Côte d’Ivoire quand bon nombre de violences ont été commises. Il serait insupportable que justice ne soit pas rendue. Mais de quelle justice parle-t-on exactement ? Pour quiconque a suivi l’audience de la semaine dernière, en fait pour quiconque a suivi l’attitude de la CPI depuis l’arrestation de Laurent Gbagbo en avril 2011, il est impossible d’y retrouver l’idéal de justice contenu dans le traité de Rome.

Le propre bureau du procureur de la CPI impute un peu moins d’un millier de meurtres, agressions sexuelles et autres violations des droits de l’homme au « camp Gbagbo »… sur les plus de 3000 supposément commis durant la crise post-électorale de 2010-2011. Le propre bureau du procureur de la CPI demande la condamnation de Laurent Gbagbo en tant que « co-auteur indirect » de ces crimes.

Ainsi, le premier procès de la "crise ivoirienne" conduit par la CPI concerne le "co-auteur indirect" supposé, d’un peu moins d’un tiers des crimes commis durant un cinquième des dix années de conflits en Côte d’Ivoire… 

Le langage corporel des magistrats de la Haye, la semaine dernière était pénible à décrypter. Eux-mêmes savent, cela se voit, cela se sent, qu’en poursuivant sur cette voie la CPI s’instaure comme auxiliaire du pouvoir d’Alassane Ouattara et agit, consciemment ou non, comme caution morale de la liberté accordée à Foffié Kouakou et aux autres « commandants de zone » de la rébellion dirigée par Soro Guillaume. Et surtout comme voile aux violences qui aujourd'hui encore se produisent dans le pays.

Aujourd’hui, on l’oublie un peu, Guillaume Soro est président de l’Assemblée Nationale – et compte sur la protection d’Alassane Ouattara, pour le jour où la CPI penserait vouloir commencer à s’intéresser à son cas. Et les commandants de zone ont tous nommés « commandants de légions », officiers supérieurs de la nouvelle armée « réunifiée », responsables des principales garnisons militaires du pays, par Alassane Ouattara. Les crimes commis par ces hommes et/ou sous leurs ordres dans le centre, le Nord et surtout l’ouest de la Côte d’Ivoire, au cours de la dernière décennie défient même les limites pourtant lâches dans ce domaine, en Afrique occidentale.

Le problème, contrairement à ce qui est affirmé depuis le début par les partisans de Laurent Gbagbo, n’est pas le « deux poids, deux mesures » de la CPI, ni même la « justice des vainqueurs » conduite par le pouvoir d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire. Le vrai problème c’est que l’idée même de justice, dans le cadre de la crise ivoirienne, est désormais un non-sens. Quel qu’il soit le verdict de la CPI sera teinté et souillé. Il rappelle également l’incroyable impuissance de la Cour Pénale Internationale.

Fatou Bensouda, procureure de la CPI, n’a probablement jamais été plus honnête que lorsqu’elle déclare à Jeune Afrique : « notre rôle est de nous assurer que leurs principaux auteurs seront poursuivis, mais nous ne pouvons engager des poursuites contre tous. » En revanche, elle ne peut pas être sérieuse lorsqu’elle ajoute : « L'action de la CPI permettra de faire éclater la vérité pour faciliter la réconciliation. (…) Mais, rassurez-vous, aucune partie prenante à la crise ne sera épargnée. »

Bien sûr que les crimes commis par les soutiens d’Alassane Ouattara resteront impunis tant qu’il aura besoin de leur appui pour se maintenir au pouvoir. Faut-il le rappeler? La CPI ne dispose d'aucun pouvoir de police et ne peut intervenir qu'à la demande des Etats. Et bien évidemment, le procès de Laurent Gbagbo à la Haye qui aurait pu – s’il avait eu un sens, s’il s’était déroulé en même temps que celui d'un des responsables du camp d'en face – Soro Guillaume, qui sait? à défaut d’avoir Alassane Ouattara lui-même à la barre des accusés – aider à repartir les responsabilités et commémorer la mémoire de toutes les victimes, s’oriente vers une pitrerie préchrétienne où un bouc émissaire doit porter seul les péchés du peuple.

Comme s’il y avait un peuple (quiconque croit encore aux chimères d'une "réconciliation" n'a qu'à faire un tour sur n'importe lequel des forums "Facebook" qui s'organisent spontanément sur le site www.abidjan.net pour perdre toute illusion.)

Comme si aujourd’hui encore, à l’instant même où j’écris ces lignes, les sbires du régime proches du régime de Ouattara ne sillonnaient pas les camps de réfugiés, à la recherche de « sympathisants » de Gbagbo.

J’écrivais qu’il fallait souhaiter longue vie à Guillaume Soro, dans l’espoir qu’un jour ou l’autre, une alternance politique en Côte d’Ivoire lui fasse perdre la protection dont il bénéficie, et qu’il puisse répondre – lui et la racaille qui l’entoure – du coup d’état manqué de septembre 2002 et de la barbarie qui s’en suivit.

J’avais tort, la vieille maxime « justice delayed is justice denied » s’applique aussi à l’Afrique. Au moins autant que le Traité de Rome.  

 

Joël Té-Léssia

PS : Il va sans dire que cette chronique n'engage que moi, et ne prétend nullement représenter la position "officielle" de Terangaweb et de ses membres.