Mobilisation des recettes fiscales dans l’UEMOA : L’obstacle de l’informel, le levier du mobile-money

La mobilisation des recettes fiscales est, pour les pays africains, une urgence face aux besoins en financement nécessaires pour l’exécution des programmes de développement. Dans un contexte marqué par la raréfaction de l’aide publique au développement et le renchérissement de la dette, elle est encore plus pressante pour les Etats de l’UEMOA dont les rentrées fiscales représentent à peine 15% de leur produit intérieur brut (PIB), soit un niveau deux fois inférieur à celui constaté dans les pays de l’OCDE.

Ce rapport revisite l’ampleur du manque à gagner fiscal au sein des pays de l’UEMOA et analyse le rôle qu’y jouent le secteur informel et la fraude fiscale. Retrouvez ici l’intégralité de l’étude.

Quels sont les risques et les enjeux de l’intégration financière en Afrique francophone ?

Depuis 1988 et la création de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières en zone UEMOA, l’Afrique francophone a tenté d’intensifier son intégration financière et de se doter d’institutions permettant de garantir le financement autonome des entreprises et des Etats de la région. Toutefois, si la BRMV représente un symbole de réussite pour l’intégration des services financiers de la zone franc, les marchés financiers de la région demeurent inefficaces[1] et peu adaptés aux besoins de financement des acteurs de l’économie locaux. Lors des réunions des ministres de la zone franc en avril dernier, les ministres ont désigné le renforcement de l’intégration financière au sein des deux sous-régions comme une priorité de leur feuille de route. L’intégration financière est un processus de renforcement des interactions entre systèmes financiers nationaux, au niveau global ou régional. Tous les indicateurs de profondeur financière montrent que celle-ci est faible dans l’UEMOA et dans la CEMAC comparée à la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne. Si l’intégration financière s’est accélérée au cours des dernières années dans la zone franc (augmentation de l’intensité des paiements entre pays, le développement rapide du marché régional des titres publics), elle reste décevante en raison notamment de l’hétérogénéité du développement financier au sein des deux zones monétaires, de l’hétérogénéité des conditions bancaires, de la fragmentation du marché interbancaire et des marchés financiers peu actifs hors dette publique. Pourtant des instruments pour favoriser l’intégration financière tels qu’une loi bancaire unique, une surveillance bancaire régionale et des bourses à vocation régionale existent.

Le présent article présentera les enjeux de l’intégration financière en Afrique notamment en matière de réduction des coûts des transactions financières et reviendra également sur les risques de contagion financière que comporte une telle intégration en cas de crise financière.

1. Enjeu de l’intégration financière en Afrique

Les gains de l’intégration financière sont élevés en Afrique. Elle permet de lever les deux contraintes majeures du développement financier que sont la faible taille des marchés et le niveau élevé des coûts de l’intermédiation financière. Par ailleurs, l’intégration financière peut aider à compléter une épargne interne insuffisante ou mal mobilisée, améliorer l’allocation des financements en faveur d’investissements productifs, contribuer à accroître l’accès aux services financiers, inciter à des politiques de stabilisation macroéconomique plus efficaces. Elle peut également améliorer l’efficience du système bancaire, par l’intensification de la concurrence et la diffusion de bonnes pratiques, y compris en matière de supervision.

L’intégration financière permet aux entreprises et aux ménages de partager le risque financier et favorise la spécialisation de la production dans les différentes régions.  Elle favorise également la diversification des portefeuilles et le partage du risque idiosyncrasique d’une région à l’autre grâce à la disponibilité d’instruments financiers supplémentaires. Une intégration financière approfondie renforce la croissance économique car les ressources financières sont libérées pour les activités économiques sous l’effet du développement financier. Elle renforce la concurrence entre les institutions financières locales et étrangères, ce qui permet d’améliorer l’efficacité des institutions financières car les ressources financières sont libérées pour les activités productives.

Toutefois, l’intégration financière peut également contribuer à une allocation sous-optimale des flux de capitaux, à une perte de la stabilité macroéconomique, à des effets de contagion et de plus forte volatilité des flux de capitaux et à la montée des risques liés à la pénétration des banques étrangères. Une intégration financière approfondie serait un outil de développement efficace pour les pays de la zone franc. Seulement la stratégie d’accélération de cette intégration financière devra prendre en compte la gestion des risques associés à celle-ci.

2. Recommandations

2.1. Renforcer l’intégration financière en Afrique

La mise en place de projets d’investissement régionaux, et le renforcement des institutions régionales, notamment de supervision est nécessaire pour ancrer durablement l’engagement politique en faveur de l’intégration. Dans ce contexte, l’intégration financière va de pair avec une amélioration du climat des affaires (qui peut contraindre le développement financier) et la mise en œuvre de politiques axées sur un meilleur accès aux services financiers. Les réglementations financières nationales doivent assurer une égalité de traitement des établissements financiers en supprimant toute barrière à l’entrée, toute discrimination dans leurs activités, et en harmonisant les conditions de la concurrence (réglementation bancaire, supervision, fiscalité). Enfin, l’amélioration des infrastructures financières est essentielle pour un abaissement rapide des coûts de transaction. Cette  optimisation concerne aussi bien les moyens de paiement, les systèmes de compensation interbancaires, la promotion des services innovants ou la gestion du risque.

Dès novembre 2013, un rapport de la Banque mondiale[2], recommandait de faciliter l’intégration financière par la mise en place de réglementations et de mécanismes de supervision bancaire transfrontaliers, de marchés de titres régionaux, du crédit commercial intra-régional et d’une intégration régionale des infrastructures financières. Enfin, la création dans chacune des deux zones de véritables marchés des changes, dans le strict cadre du système de change, permettrait une plus grande fluidité d’accès aux devises étrangères et constituerait ainsi un accompagnement utile du développement du secteur financier.

2.2. Gérer les risques associés à l’intégration financière

L’intégration financière est soumise à des risques, en particulier lors des épisodes de crises financières. Elle renforce les risques de contagion entre pays, mais aussi entre le système bancaire et États. Pour atténuer les risques d’une intégration financière, il convient de :

  • Renforcer les instruments régionaux de gestion des risques
  • Compte tenu de la forte complémentarité entre la régulation et la supervision, donner aux autorités de contrôle les moyens de faire appliquer les réglementations
  • Porter une attention particulière à la prévention et à la gestion des bulles financières et immobilières pour contenir leur ampleur
  • Adapter la régulation des marchés financiers au contexte africain pour accompagner leur émergence et réduire la procyclicité des normes prudentielles. En effet, l’efficacité de la régulation dépend de l’équilibre entre l’objectif de maîtrise des risques systémiques (renforcement des exigences prudentielles) et celui de ne pas peser sur le financement de l’économie. D’une part, le renforcement des exigences prudentielles est nécessaire, à la fois pour se rapprocher des bonnes pratiques internationales et pour s’adapter à l’évolution des systèmes financiers (banques panafricaines, banque mobile, microfinance). D’autre part, la régulation doit concilier l’objectif central de stabilité financière et celui d’une meilleure inclusion financière, notamment dans l’accès aux financements pour les petites et moyennes entreprises et l’octroi de financements longs. Elle doit également être adaptée à la capacité de supervision des autorités.

Viviane Bondoma

Bibliographie

Acalin, Julien and Cabrillac, Bruno and Dufrénot, Gilles and Jacolin, Luc and Diop, Samuel, Financial Integration and Growth Correlation in Sub-Saharan Africa (July 2015). Banque de France Working Paper No. 561

Cabrillac, Bruno, et Emmanuel Rocher. « Les perspectives des unions monétaires africaines », Revue d'économie financière, vol. 110, no. 2, 2013, pp. 99-125

Guérineau Samuel, « Les bénéfices de l’intégration monétaire et la théorie des Zones Monétaires Optimales : l’expérience de l’UEMOA et de la CEMAC », Institut de formation pour l’Afrique (IFA), Fonds Monétaire International (FMI), et la Banque de France Maurice, 8-9 mars

Guérineau Samuel, Jacolin Luc, « Réussir l’intégration financière en Afrique », Synthèse de la conférence organisée par la Banque de France et la Ferdi le 27 mai 2014


[1] https://www.afdb.org/fr/blogs/integrating-africa/post/regional-financial-integration-and-monetary-coordination-in-the-west-african-monetary-zone-and-the-east-african-community-13603/

 

[2] http://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/11/11/New-World-Bank-Group-Report-Charts-Road-Map-for-Financial-Inclusion

 

L’état de l’intégration régionale : De criantes disparités entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique Centrale

Les théories économiques classiques nous informent que l’ouverture des pays aux échanges régionaux et internationaux permet une réduction des coûts de transaction et de production. Cette tendance à s’ouvrir aux marchés ne se fait cependant pas sans heurts. Elle est en défaveur des pays les plus pauvres et marginalisés. En ce sens, l’intégration régionale peut être vue comme une tentative coordonnée de lutte contre les chocs aussi bien endogènes qu’exogènes et asymétriques.  

Sur le plan politique, les défenseurs de l’intégration régionale soutiennent que celle-ci permet de créer une dynamique d’ensemble, favorable à la cohésion, à la paix et à la sécurité de la région.

 

Dans un environnement coopératif et libre-échangiste grandissant, l’Afrique n’a pas voulu être à la traîne. C’est ainsi que dès 1963, l’OUA, ancêtre de l’UA a été créée. À la suite de cette organisation panafricaine, diverses organisations subrégionales ont été mises en place pour renforcer et dynamiser la coopération intra régionale.

Dans cette analyse, nous nous intéressons à l’intégration sur les plans politique et économique en Afrique Centrale sous le leadership de la CEEAC (et la CEMAC)[1] et en Afrique de l’Ouest en ayant comme point de repère la CEDEAO (et l’UEMOA)[2].

Afrique centrale : un espace sous-intégré

L’intégration en Afrique Centrale se heurte encore à des résistances nationales. La liberté de circulation bien qu'existant dans les textes fondateurs de la zone CEEAC n'a jamais  été véritablement mise en oeuvre. Une situation assez surprenante puisqu’au sein de la CEDEAO les efforts sont mis en œuvre pour rendre effectif cette liberté de circulation; condition importante pour un véritable décollage des économies de ces sous régions. A titre illustratif, un gabonais souhaitant se rendre au Cameroun voisin peut encore faire face à des lourdeurs procédurières et consulaires.  Le projet de mise en œuvre d’un « passeport communautaire » est restée sans suite; la faute à un manque de volonté des décideurs politiques de la sous-région.

L’initiative de création d’une compagnie aérienne de la sous-région lancée par la CEMAC a également fait faux bond, les principaux protagonistes décidant de faire marche arrière en mettant fin au projet en 2015. Il faut dire que ce fiasco a été lourd de dommages financiers. En effet,  Air Cemac qui n’a pas effectué le moindre vol avait un siège à Brazzaville ainsi qu’un personnel dirigeant et un conseil d’administration et de ce fait, cette compagnie a dû débourser des frais non-négligeables pour son fonctionnement au quotidien.

L’existence de deux marchés boursiers concurrents n’est pas non plus un facteur d’intégration régionale: il existe en effet la BVMAC siègeant à Libreville et la DSX de Douala alors même que le Gabon et le Cameroun sont tous deux membres de la CEMAC. Il va sans dire que cette situation n’est guère de nature à favoriser l’éclosion d’un marché financier résilient et prospère à l’échelle de cette sous-région. Ainsi que le note le cabinet Roger Berger dans un rapport – cité par Jeune Afrique (2016)-  portant justement sur cette question, la fusion des deux bourses permettra de «  maximiser la profondeur, la liquidité et l’attractivité́ du marché tout en minimisant les coûts opérationnels et les risques » Le rapport soutient que : « Concrètement, cela doit passer par l’harmonisation des réglementations des deux Bourses et par le rapprochement des infrastructures technologiques en vue de la création d’une plateforme commune ». Le texte de Jeune Afrique cite aussi un dirigeant d’une firme d’intermédiation qui affirme que «la convergence rapide des Bourses est un impératif pour le développement de la sous-région et permettra de créer des palliatifs aux modes de financement classiques ». [3] En effet, dans le cas de ces embryonnaires économies de la CEMAC,[4]il sied d’harmoniser les réglementations existantes et de mettre en place une bourse régionale efficace et solide. Un tel effort serait à tout le moins un pas vers la bonne direction.

Si l’intégration économique de la sous-région est loin d’être un succès, les pays de la CEMAC ont réussi la gestion de certaines crises. La CEEAC a joué un rôle prépondérant dans la gestion du dernier conflit centrafricain à travers sa médiation entre la séléka et les milices anti-baraka.. En effet, le forum centrafricain de réconciliation nationale en 2014 à Brazzaville, tenu sous la médiation du Président congolais Sassou Nguesso, les différents sommets extraordinaires et les autres rencontres formelles et informelles dans la sous-région consacrés à la crise que connaissait l’ex Oubangui-Chari sont entre autres des actions à mettre à l’actif de l’entité sous régionale. Cette dynamique proactive de la CEEAC a été d’une portée considérable dans l’issue heureuse que constituent l’accord de cessation des hostilités et l’accord de désarmement des parties prenantes au conflit signés respectivement à Brazzaville et à Bangui en 2015.[5]  Outre la Centrafrique, la CEEAC a aussi mené des médiations, aux résultats mitigés pour tenter de juguler des crises ou différends politiques au cours des dernières années, notamment à Sao-Tomé et Principe (2006) en RDC (2008), et au Tchad (2008-2009), Burundi ( 2015) entre autres.[6]

Afrique de l’Ouest : une dynamique d’intégration volontariste et progressive

Au rebours de l’Afrique Centrale, l’Ouest de l’Afrique connaît un processus d’intégration plus dynamique. La libre circulation des personnes, bien qu’imparfaite au sein de la CEDEAO, est néanmoins opérationnelle. Un citoyen sénégalais n’a pas besoin de visa pour aller au Mali et vice versa; ce sont les textes légaux qui le prévoient.

En outre, la part du commerce intra-régional en proportion des échanges totaux est plus importante en Afrique de l’Ouest qu’en Afrique Centrale. Selon un rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) publié en 2013, au niveau de la CEDEAO cette part est de 10.4% entre 1996 et 2010, 10.9% entre 2001 et 2006 et 9.4% pour la période 2007-2011 alors que pour les mêmes périodes, la part du commerce intra régional en proportion du commerce total au sein de la CEEAC est respectivement de 1.7%, 1.5% et 1.9%.[7] Toutefois, les pays de la CEDEAO devraient continuer à renforcer leurs échanges commerciaux pour booster leurs économies car ces pourcentages sont tout de même hautement négligeables en comparaison à la part du commerce régional au sein des grandes zones économiques comme l’UE, L’ALÉNA ou l’ASEAN. A ce propos, il y a nécessité de promouvoir une plus grande coopération régionale, à l’échelle même du continent. 

L’efficacité de la bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) de la zone UEMOA est aussi un bon indicateur des progrès au niveau de l’intégration en Afrique de l’Ouest. Comme le relève le rapport du cabinet Roland-Berger susmentionné, « Avec une progression de 17,77 %, le BRVM Composite s’est ainsi classé en tête des indices boursiers du continent en 2015. D’ailleurs, des assureurs et des fonds souverains de la CEMAC préfèrent investir sur la place ouest-africaine, relève Roland Berger ».[8]

Sur le plan politique et institutionnel, la CEDEAO, tout comme la CEMAC se sont dotées d’instruments juridiques et de règles communes pour réguler la coopération sous régionale. Il existe une cour de justice de la CEDEAO qui a condamné de nombreux États dans la sous-région, notamment le Togo dans l’affaire du coup d’État manqué de 2009. Il y a également l’adoption d’un protocole au sein de la CEDEAO qui interdit toute réforme importante de la loi électorale dans les six mois qui précèdent la tenue d’une élection présidentielle à défaut d’un accord consensuel.

La CEDEAO s’est aussi illustrée par son rôle de médiateur et par ses interventions militaires lors des différentes crises ouest-africaines. L’ECOMOG (Brigade de surveillance du Cessez-le-feu de la CEDEAO) aussi connu sous le nom de « casques blancs » est intervenue au Libéria mais aussi en Sierra Leone et en Guinée Bissau lors des guerres civiles qui ont secoué ces pays. Plus récemment, la CEDEAO a été sous le feu des projecteurs, du fait de sa médiation à succès en Gambie. Mais elle n’a pas toujours connu la même fortune. Ses médiations en Côte d’Ivoire lors de la crise post-électorale de 2010 ou au Mali lors de la crise qui a suivi le départ du pouvoir du président Amadou Toumani Toure en 2012 ont été pour le moins infructueuses.

Au niveau de la CEEAC, un Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique Centrale (COPAX) dont la mission est de prévenir les conflits et maintenir ou rétablir la paix dans la sous-région a été créé. Il y a également une brigade régionale de maintien de la paix (FOMAC).

Il importe, somme toute, que les différentes organisations régionales avancent vers une plus grande intégration communautaire pour limiter un tant soit peu l’extraversion des économies africaines. Plusieurs mesures doivent être prises en ce sens; notamment une diversification de la production, un allègement de la fiscalité, une réduction des barrières douanières et frontalières, le tout porté par une réelle volonté politique de changement.

 

                                                                                                                                                                           Thierry SANTIME

 


[1] La Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC), créée en octobre 1983.La Communauté Économique et Monétaire des Etats de l'Afrique Centrale (CEMAC) regroupe 6 pays, à savoir le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale, la République de Centrafrique et le Tchad

 

 

 

 

 

[2] La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CÉDÉAO) est une organisation intergouvernementale ouest-africaine créée le 28 mai 1975. L’Union économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) a pour objectif essentiel, l’édification, en Afrique de l’Ouest, d’un espace économique harmonisé et intégré…

 

 

 

 

 

[3] Omer Mbadi et Stéphane Ballong. Jeune Afrique. 2016 « Afrique Centrale : cinq idées pour dynamiser le marché financier ». http://www.jeuneafrique.com/mag/303852/economie/5-idees-dynamiser-marche-financier/

 

 

 

 

 

[4] Embryonnaires en termes de développement financier et industriel et dont l’extraversion tous azimuts- ou presque-confine à une subordination économique vis-à-vis des grandes puissances économiques et des marchés émergents,

 

 

 

 

 

[5] Cyril Bensimon. « À Bangui, la fin troublée du Forum de réconciliation nationale ». Le Monde Afrique. 2015.  http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/05/12/a-bangui-la-fin-troublee-du-forum-de-reconciliation-nationale_4631850_3212.html

 

 

 

 

 

[6] Madeleine Odzolo Modo, « Fiche d’information de l’organisation : CEEAC ». Réseau de recherche sur les opérations de paix de l’Université de Montréal. http://www.operationspaix.net/3-fiche-d-information-de-l-organisation-ceeac.html

 

 

 

 

 

[7] CNUCED. Rapport 2013 sur le développement économique en Afrique. « Commerce intra-africain : libérer le dynamisme du secteur privé », p.18. http://unctad.org/fr/PublicationsLibrary/aldcafrica2013_fr.pdf 

 

 

 

 

 

[8] Omer Mbadi et Stéphane Ballong. Jeune Afrique. 2016 « Afrique Centrale : cinq idées pour dynamiser le marché financier ». http://www.jeuneafrique.com/mag/303852/economie/5-idees-dynamiser-marche-financier/

 

 

 

 

 

Regards croisés sur le FCFA : que faut – il retenir ?

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Lors d’une conférence de presse faisant suite à la réunion des ministres des finances qui s’est tenue à Paris en Octobre 2015, Michel Sapin déclare à propos de la zone CFA[1] : « La France est entièrement ouverte à toutes les discussions. Tous les membres de cette zone monétaire sont libres et indépendants, ils peuvent donc demander à rediscuter les accords monétaires qui les lient avec la France. Rien n’est figé ni tabou ». Cette annonce a d’avantage amplifié la spéculation autour du F CFA soutenue depuis quelques années par la montée en force d’un panafricanisme qui se dit avisé.

            Alors que l’opinion publique s’attendait à l’ouverture du débat sur les mutations des mécanismes de fonctionnement et / ou à une éventuelle sortie des économies africaines de la zone CFA, le comité ministériel lors de sa dernière session de travail – qui s’est tenue à Yaoundé du 8 au 9 Avril dernier – semble affirmer sans ambages que la zone CFA reste un instrument approprié pour les pays membres.  

            Pour rappel, la zone CFA repose depuis plus de 50 ans sur des accords qui définissent d’une part les modalités de la coopération monétaire entre pays africains et, d’autre part sur les modalités de la coopération monétaire avec la  France –  articulés autour de la fixité du F CFA  arrimé d’abord  au franc français puis à l’euro en vertu de l’article 234 alinéa 1 du traité de Maastricht.  

            Grâce à l’originalité de son mécanisme de fonctionnement, cette « construction originale » a à plus d’un titre traversé les décennies en conservant sa convenance et son dynamisme (Noyer, 2012,5). De la sorte, elle a su résister aux évolutions du Système Monétaire International, à la décolonisation, à la globalisation, à la dévaluation, à l’avènement de l’euro qui offrait l’opportunité de mutations profondes et, récemment aux différentes crises financières internationales.

            Bien que la zone CFA relève avec brio le défi de la pérennité, les réalités socioéconomiques de la CEMAC et de l’UEMOA posent de façon permanente la question de la pertinence de la coopération monétaire avec la France et donc de la monnaie unique et des changes fixes.

  1. Avantages théoriques et critiques réelles

            Théoriquement, la monnaie unique et les changes fixes suppriment à la fois les coûts de transaction et l’incertitude liés au taux de change (Ripoll, 2000) ; accroissent la transparence des prix dans les pays suffisamment ouverts (Benassy-Quéré et Coeuré, 2010). En ce sens, ils simplifient les calculs économiques et rendent les transactions internationales moins risquées. En ce sens, ils permettent de réaliser des gains d’efficacité monétaire (Krugman et Obstfeld, 2008).  

            Avec la garantie monétaire, ces conditions sont également supposées favoriser l’afflux des IDE dans les régions Ouest et Centre Africaine. Mais, selon les statistiques financières internationales, la plus grande part des IDE de la France – principal partenaire commercial et financier de la zone CFA – en Afrique est orientée vers le Maroc.

                Néanmoins, les changes fixes restent favorables au commerce et à l’attrait des capitaux extérieurs. Durant la phase initiale de sa mise en place, l’arrimage à l’euro a permis la hausse des recettes d’exportation et des flux de capitaux de plus de 30% et 100% respectivement au Cameroun, en Côte d’ivoire et au Sénégal[2].

            Cependant, la prééminence de la défense du taux de change fixe entre le F CFA et l’euro favorise  la constitution excessive des réserves[3] de change au détriment du financement des économies (Kako Nubukpo, 2015). Aussi, pour les économies permanemment sujettes à des chocs extérieurs, la fixité du taux de change handicape lourdement le processus de l’ajustement alors que la volatilité de la parité euro-dollar – préoccupation mineure pour la BCE à cause de l’importance du commerce intra-zone euro – se répercute intégralement sur la parité du F CFA et contraint le taux de change réel. Zafar (2005) montre qu’en provoquant des appréciations réelles d’environ 8% en zone UEMOA et  7%  en zone CEMAC  entre 1999 et 2004, un euro fort – un F CFA fort – réduit  la  marge de manœuvre de la compétitivité-prix des pays membres.

            Or, la probabilité d’abandonner un régime de change fixe augmente avec l’appréciation du taux de change et le degré d’ouverture des économies. Ce d’autant plus que la perte de compétitivité est l’une des causes principales du déficit du compte courant – plus important pour les pays ayant une stratégie d’ancrage du taux de change (Ghosh et al., 1997). Ceci suggère une influence forte de la compétitivité (Berger et al., 2000) dont le maintien est important pour le développement économique des pays.

            Puisqu’elle ne permet donc pas d’atténuer la vulnérabilité aux effets externes, la zone CFA est loin de garantir et de maintenir la stabilité macroéconomique comme attendu. Tout  au contraire, le F CFA du fait de sa fixité à l’euro permet de transférer les chocs et les fluctuations sur les autres variables macroéconomiques ; Levy-Yeyati et Sturzengger  (2000)  l’associent  à  une volatilité plus élevée[4].

            De ce fait, le taux de change effectif réel, les termes de l’échange et le PIB[5] réel sont en moyenne[6], plus volatiles que dans les autres pays d’Afrique Subsaharienne[7]. En s’arrêtant temps soit peu sur la volatilité trimestrielle du PIB réel en Afrique Sub-saharienne entre 2001 et 2010, on constate que les pays de la zone CFA sont d’environ 1,5 fois plus volatiles que les autres pays d’Afrique Sub-saharienne qui n’ont pas opté pour un taux de change fixe depuis 2001. D’ailleurs, la fixité de change expliquerait environ 14%[8] de cette volatilité.

            Plus encore, grâce à ses principes de convertibilité et de libre transférabilité, la zone CFA favorise les sorties des capitaux financiers indispensables à la construction des économies et s’oppose à la formation de l’épargne intérieure au profit de l’endettement extérieur dont le remboursement contraint les populations (Agbohou, 2013).

            Telles sont les principales critiques à l’égard du F CFA. Mais, la structure même de ces économies et leur fonctionnement sont entre autres autant d’éléments qui obligent à relativiser.

            Il convient alors de souligner que le F CFA – c’est-à-dire la monnaie en elle même – n’a aucune influence sur l’activité économique. Son efficacité dépend de l’usage qu’on en fait et donc de sa gestion. C’est d’ailleurs pour cela que le choix d’un régime de change dépend essentiellement des conditions socio économiques et des nécessités des économies ; les principales nécessités étant relatives à la solidarité et à la crédibilité.

  1. Le F CFA n’est pas l’alpha et l’oméga du développement économique des pays

            Les développements récents de la théorie des zones monétaires privilégient une analyse en termes  d'économie politique et mettent l'accent sur l’importance de la crédibilité de la politique monétaire. Le F CFA confert aux pays qui l’ont adopté une crédibilité internationale du fait de son lien fort avec l’euro et, le plus grand bénéfice lié à l'appartenance à la zone est la rigueur et la discipline qui découlent des engagements institutionnels pris au niveau supranational (Alésina et Barro, 2002). Elles permettent de lutter efficacement contre l’inflation dont la maitrise est un atout dans le contexte des économies à faible niveau de revenu. A cet effet, la permanence de la zone CFA et la relative stabilité qu’elle autorise contrastent avec l'instabilité économique et politique de l'ensemble du continent africain.

            En instituant un ensemble de règles communes, la zone CFA est aussi un catalyseur de la solidarité entre pays. Cette solidarité est vue comme une condition nécessaire et suffisante de l’optimalité de la zone, en tant qu’elle constitue la finalité d’une union monétaire (Ondo Ossa, 2000). Par solidarité, il faut entendre l’aptitude d’un pays à supporter le coût de gestion d‘un autre. Elle permet aux pays en difficultés économiques et financières d’être soutenus par les pays « sains ». D’où la mise en commun des fonds dans les comptes d’opérations permet aux pays déficitaires de continuer à régler leurs achats extérieurs.

            Un exemple illustratif est relatif à la période 1985 – 1991, période au cours de laquelle tous les pays membres de la zone CFA avaient un solde commercial déficitaire à l’exception du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, du Congo et du Gabon. Plus récemment, la RCA (2004-2009) et le Tchad (199-2003) ont également connu une persistance de leur déficit commercial dont les conséquences ont pu être atténuées par le biais de cette même solidarité.

            En assurant la convertibilité illimitée des F CFA en euro, la France participe également à cette solidarité ; ce d’autant plus qu’elle accorde par son trésor national une garantie de non dépréciation de l’euro par rapport aux DTS[9] pour les 50%[10] des avoirs extérieurs que les pays africains sont tenus de déposer dans les comptes d’opérations (rémunérés) pour garantir leur valeur.

            Quant on parle de 50% des avoirs extérieurs déposés dans les comptes d’opérations, l’imagerie populaire africaine ne peut s’empêcher de dénoncer un hypothétique mécanisme de détournement de leurs ressources au profit de la France. Il est donc opportun et de judicieux de souligner que les avoirs des pays africains dans les dits comptes d’opérations sont peu signifiants pour leurs économies et pour celle de la France. En effet, entre 2011 et 2012, le solde du compte d’opération de la CEMAC au du trésor français représentaient en moyenne 0.32% de la masse monétaire de la France et 0.00652% de la masse monétaire de la CEMAC. On peut donc convenir que la mise à l’écart de ces fonds n’entrave en rien le financement des économies.

            Avec un niveau de masse monétaire plus élevé que celui de la France, on s’attendrait à ce que les actions de la politique monétaire en zone CFA se fassent véritablement ressentir dans les économies, ce d’autant plus que les différents taux directeurs sont inférieurs à 3%.

            Mais, les modifications des taux débiteurs des banques ne suivent pas systématiquement les  variations des taux directeurs et restent élevés compte tenus des risques. Ainsi, le financement des économies par le biais des banques est beaucoup plus régi par les considérations externes que par les conditions internes au système bancaire d’où le double rationnement de crédit (rationnement par les prix et par les conditionnalités d’accès au crédit) permanent dans ces économies. L’existence d'un système monétaire stable et unifié n'a malheureusement pas permis l'émergence d'un système bancaire et financier efficace dans les pays africains de la zone franc.

            Pour revenir au cas réserves extérieures des pays membres, force est de constater que leur niveau est bien inférieur à celui des autres pays africains à niveau de développement comparable. C’est dire que les pays de la zone CFA gagnent peu dans les échanges avec l’extérieur. Leur faible compétitivité prix (qu’on attribue l’arrimage à l’euro) en est la cause. Pourtant, lorsqu’on compare la moyenne[11] des taux de change effectifs réels de la CEMAC et de l’UEMOA à ceux du Nigéria et du Ghana sur la période 1999 – 2012, on constate que la différence est négligeable (l’UEMOA étant d’ailleurs en moyenne plus compétitive que le Ghana et le Nigéria).

            La conception[12] du taux de change effectif réel d’Edwards (1989), montre qu’il dépend fortement des politiques économiques et des facteurs internes (politique fiscale, productivité, niveau des dépenses publiques, etc.). C’est donc dire que d’autres facteurs relatifs à la compétitivité hors prix influencent les échanges avec l’extérieur et notamment la structure des économies.

            Pour ce qu’il en est, aussi bien pour les économies de la CEMAC que pour celles de l’UEMOA, la propension marginale à importer est plus forte que la propension marginale à exporter. Les importations sont élastiques par rapport au revenu et au taux de change effectif réel. Les élasticités-revenu et prix estimées valent respectivement 1.36 (1.26) et 3.12 (1.62) pour la CEMAC (l’UEMOA). Ainsi, une amélioration du revenu de 1% augmente les importations de 1.36% et 1.26% en CEMAC et en UEMOA respectivement tandis qu’une appréciation du taux de change effectif réel de 1% qui rend les produits étrangers moins chers augmente les importations de 3.12% et 1.62% en CEMAC et en UEMOA respectivement.

            Dans le même temps, les exportations elles sont inélastiques par rapport au taux de change effectif réel. Elles n’augmentent que faiblement (0.27% en moyenne) suite à une modification de 1% des prix  relatifs favorables aux pays de la zone CFA.  

            Ces faits sont attribués entre autres à la faible diversification des productions domestiques (concentrées sur le pétrole, le cacao, le coton, entre autres), au caractère embryonnaire des industries locales et à la forte extraversion des habitudes alimentaires qui, rendent les revenus de ces économies tributaires des fluctuations des prix internationaux des matières premières et les maintiennent fortement dépendants des biens alimentaires et manufacturés extérieurs. Ainsi, même lorsque les prix relatifs deviennent défavorables et que les importations baissent, la pression qu’exercera la demande interne sur l’offre tendra plutôt à augmenter en interne les prix à la consommation.

  1. Des reformes concrètes à mener en attendant (peut – être) un nouveau système de change

            Les défis des économies africaines de la zone CFA sont donc plus structurels que conjoncturels et un simple changement de monnaie ou de régime de change ne suffira à les relever. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les avantages de la monnaie unique et des zones monétaires n’ont jamais pu être optimisés au sein de la zone. Puisque le régime de change et les conditions économiques interagissent, la question qui demeure est celle de savoir quels changements faut-il initier pour que la zone CFA en plus d’être soutenable puisse être efficace et améliorer le niveau développement des économies?

            Les recommandations vont prioritairement dans le sens de l’amélioration de l’environnement des affaires, de la promotion et de l’accélération de l’intégration économique (intra et inter sous régions) et de la convergence, de la coordination des politiques économiques (programmation monétaire et  programmation budgétaire pour l’élaboration d’un Policy Mix adéquat), et de la diversification des structures productives.

                Le choix du régime de change approprié quant à lui exige au-delà d’une telle analyse de comparer dans le temps le bénéfice net de la fixité de change du F CFA par rapport à l’euro relativement à celui qui résulterait des régimes de change alternatifs dans un scénario de simulation.

 

Bibliographie:

AGBOHOU, N. (2012): « Le fonctionnement du F CFA, l’arme monétaire de la France contre l’Afrique », Word Press Infos.

BEAC (1973): Convention du compte d’opération.

BCEAO (1973): Convention du compte d’opération.

BEAC (2013): Rapport Spécial sur le Contrôle du Compte d’opération.

Edwards, S. (1989): ‘Exchange rate misalignment in Developing Countries’. Baltimore: John Hopkins University Press.

Ghosh, A. R., Gulde, A. M., Ostry, J. and Wolf, H. (1997): « Does the Nominal Exchange Rate Regime Matter? », NBER Working Paper, n° 5874.

 


[1] Coopération  financière  en  Afrique  Centrale  et  communauté  Financière  Africaine  en  Afrique  de  l’Ouest.  La zone franc CFA compte la France et quatorze pays d’Afrique Sub-saharienne regroupés en deux sous régions (la CEMAC :  Cameroun,  Gabon,  Tchad,  Congo,  RCA,  Guinée  Equatoriale  ;  l’UEMOA :  Sénégal,  Cote  d’ivoire, Bénin,  Burkina,  Mali,  Niger,  Togo,  Guinée  Bissau)  représentées  dans  les  accords  de  coopération  par  leurs Banques Centrales respectives (BEAC et BCEAO).

 

 

[2] Calculs de l’auteur

 

 

[3] Les avoirs extérieurs nets s’élèvent au 31 décembre 2014 à 5 208 milliards de francs CFA (7,9 milliards d’euros) pour la BCEAO, soit un taux de couverture de l’émission monétaire de 84,3 %. Pour la zone de la CEMAC, les avoirs extérieurs nets s’élèvent à la même période à 8 387 milliards de francs CFA (12,4 milliards d’euros) pour la BEAC, soit un taux de couverture de l’émission monétaire de 89,8 % via le mécanisme dit « du compte d’opérations » (Kako Nubukpo, 2015).

 

 

 

 

[4] L’Argentine et l’Uruguay en avaient été durablement frappés à la fin des années 1990.

 

 

[5] Dont les fluctuations sont liées aux fluctuations de l’emploi et du chômage (Saludjian, *).

 

 

[6] Cameroun, Gabon, RCA, Guinée Equatoriale, Togo, Cote d’ivoire, Sénégal à cause de la disponibilité des données.

 

 

[7] Nigéria, Ghana, Afrique du Sud, Burundi, Gambie, Malawi, Ouganda, Zambie.

 

 

[8] Coefficient de détermination obtenu de la régression par les MCO de la volatilité du PIB réel sur le type de régime de change.

 

 

 

[9] Droits de triages spéciaux

 

 

[10] Ce taux a évolué au cours du temps. Il était de 100% à l’origine jusqu’en 2005 où la quotité a été définit à 65%, de 60% jusqu’en Juin 2008, 55% jusqu’en Juin 2009 et de 50% depuis Juillet 2009.

 

 

[11] En logarithme, 4.60 pour la CEMAC, 4.57 pour l’UEMOA, 4.59 pour le Ghana et 4.58 pour le Nigéria.

 

 

[12] Selon laquelle le taux de change réel dépend des fondamentaux des économies.

 

 

Loss of competitiveness in the Waemu: do not blame just the CFA

waemuTwo very different monetary zones, yet linked through currency

There are three “Franc zones” stemming from colonization and sharing one (though not interchangeable) currency, the CFA Franc: the WAEMU (West African Economic and Monetary Union), the CEMAC (Economic and Monetary Community of Central Africa, or EMCCA) and the Union of the Comoros. This currency has evolved in a fixed parity regime with the French Franc from 1959 (1981 for the Comoros) to 1999 before being pegged to the Euro.

This fixed parity aimed at ensuring macroeconomic stability, reducing risks of exchange rate crises, importing policy credibility and promoting intra-zone trade. It was deemed adequate given that the Eurozone is the main trading partner. Nevertheless, both monetary areas are not only suboptimal with regard to Mundell’s criteria, but are also very different from one another, as the Eurozone consists of industrialized countries and the CFA Franc is used in low-income economies. This potentially induces incompatibility of monetary policies, and therefore an inadequate policy stance in the Franc zone. The inflation target in the eurozone is 2 percent, acceptable for a group of industrialized economies, but less desirable for the Franc zone whose target of 3 percent is costly in terms of growth. Studies have clearly shown that inflation levels of developing countries between 7% and 11% stimulate production, against 2% to 3% in developed economies. However, the main goal of the three Franc zone central banks is to fight inflation with tools adapted to an inflation of monetary causes in a zone where real factors dominate: climate hazards impacting countries still very reliant on agriculture, an increase in energy prices (notably oil) and inflation imported from the Eurozone. Despite these factors, they maintain the 3% target while trying to support local economic activity.

The immediate explanation of currency overvaluation

A common challenge to all monetary zones is convergence among its economies. In the Eurozone, this convergence is still a slow on-going process—marked by diverging competitiveness, labor market trends, and external balances.[i] Within the Franc zone, a few groups of countries emerge. CEMAC economies experience trade surpluses thanks to oil exports. This similarity of production structures allows for a convergence of CEMAC members’ external trade, measured by the standard deviation of their current accounts weighted by their real GDP.[ii] In the WAEMU, Côte d’Ivoire (the largest economy) displays significant trade surpluses while other countries experience deficits, such as Senegal, often considered another WAEMU economic power.

Critics estimate that the strong level of the Euro against the US dollar is responsible for an overvalued CFA Franc that penalizes the zone’s export competitiveness. The question is whether this loss of competitiveness is simply due to the CFA Franc level, or whether other factors can be identified.

Economies with little diversification and very exposed to international competition

WAEMU global competitiveness, measured by the real effective exchange rate, has deteriorated over the 2002 – 2011 period by about 5 percent according to the BCEAO. In 2012, it improved with a decrease of 3% of the real effective exchange rate and inflation lower than its partners’. WAEMU countries are mainly commodity exporters. Between 2000 and 2004, oil, cotton, cacao, gold and precious metals represented 50% of exports and rose to 60% in the 2005 – 2011 period. In 2012, these countries recorded increasing export rates, due to the dynamism of extractive industries, with the exception of Senegal and Guinea-Bissau that lost respectively 0.2% and 1.4% in 2012 compared to 2011. The zone as a whole gained 2.1% over the period 2002 – 2011 and an additional 1.1% in 2012. On the other hand, the penetration rate for foreign enterprises progressed by 1.2% between 2001 and 2011, and an additional 3.8% from 2011 to 2012, which translates into a decrease of domestic companies’ market share, and thus a net loss of competitiveness. At the level of individual countries, foreign penetration rates increased by 11.3% in Burkina Faso between 2001 – 2011, 14.7% in Niger and 8.7% in Togo.[iii] In addition, imports are generally finished equipment and consumption products with a strong added value. Individual countries’ deficits suggest that imports outweigh competitiveness gains.

High costs of factors of production and an unfavorable business climate

Over the period 2001 – 2011, the steady increase in world oil prices strongly disadvantaged local producers. This caused a generalized price increase in oil products within the WAEMU and therefore a cumulated growth of energy prices of 33.4% in Côte d’Ivoire and 91.5% in Senegal over the same period, the weakest prices being in Benin. Different price levels among countries are chiefly due to differing tax levels. Electricity and transportation costs have equally risen. Fuel oil, used as intermediate consumption in thermal electricity production, leading to an increase of electricity rates of an approximate average of 100 FCFA.

Labor and financing costs also rose substantially. While remaining stable in Côte d’Ivoire and Senegal, minimum interprofessional wages went up by 26.5% in Benin, 50% in Niger and even 103.5% in Togo. Higher costs of factors of production have strongly deteriorated local companies’ competitiveness.

The unfavorable business climate to these higher costs. The World Bank’s 2014 Doing Business ranking, based upon the ease of doing business in a country, issues a severe judgment for the WAEMU and the Franc zone generally. First among these countries, Burkina Faso is ranked 154th, just before Mali (155th) and Togo (157th). Côte d’Ivoire, the regional export champion, is only 167th, Senegal 178th and the Central African Republic and Chad come last, respectively 188th and 189th.

What policies for the future? Budgetary rigor, economic diversification and… federalism ?

Competitiveness could be restored with budgetary restraint measures aiming at minimizing situations of twin deficits in the long run. This may be difficult to conciliate with economic development imperatives, and may come at a cost for public as well as private investment, in countries that have paid the costs of structural adjustments in the past. More reforms at the regional level will be needed to ensure convergence among economies. As mentioned before and alike the Eurozone, the WAEMU is far from being an optimal currency area due to its exposure to idiosyncratic shocks and low mobility of capital and labour. The BCEAO has admittedly decided to reduce banking transaction costs in the whole zone, but federalism is certainly not underway. The WAEMU has undertaken a number of initiatives in favour of greater market integration in labour, agricultural and manufactured goods, energy and oil products, but in the end decisions are still taken at the national level, thus perpetuating an intra-zone segmentation that limits the competitiveness of local companies and delays convergence among countries. But dismantling trade barriers, especially non-tariff ones, would improve efficiency of investments as well as circulation of talents, knowledge and goods. This integration, coupled with efforts in broadening the tax base (an IMF recommendation for the EU also applicable to the WAEMU), could provide local political and economic institutions with greater means to finally stimulate the emergence of a real common industrial setting and diversify their economies in order to improve resilience to idiosyncratic shocks. This seems all the more desirable as the openness of local economies weakens local enterprises, very exposed to international competition, yet still lacking the capacities to produce needed equipment goods. Finally, even if the fixed pegging to the Euro remains an important factor of stability and credibility given the weaknesses of African economies and their persistently strong ties with the Eurozone, the question of abandoning this monetary regime may be raised more seriously in the nearby future, especially in view of increasing trade relations with Asia, and China in particular.

Koffi Zougbede and Victor Valido Vilela


[i] (OCDE, estimations Coe-Rexecode, D. Ordonez, 2013)

[ii] Lessoua, Albert & Sokic, Alexandre, “Union monétaire et compétitivité comparée : les cas de la zone euro et de la zone CFA”, Bulletin de l’Observatoire des politiques économiques en Europe, 2012

[iii] Rapport sur la compétitivité des économies de l’UEMOA en 2001-2011 et 2012

La définition d’un nouveau pacte de convergence en zone UEMOA : Quels enjeux pour les pays membres ?

siege-bceaoLa baisse de la production et la dégradation des conditions de vie des populations induitent par la baisse des cours internationaux des matières premières, principales sources des recettes d’exportations, durant les années 1980, ont conduit à la coordination des politiques économiques en Afrique de l’ouest à travers la naissance de l’UEMOA en 1994[1].

En 1999, un acte additionnel au traité de l’UEMOA, portant sur la convergence des États membres a été adopté. Il s’agit du Pacte de Convergence, de Stabilité, de Croissance et de Solidarité (PCSC).

Les reports de l’horizon de convergence du PCSC témoignent des difficultés d’atteinte des cibles visées. En effet, l’échéance de réalisation des différents critères définis dans le PCSC a été fixée d’abord au 31/12/2002, ensuite en 2005, puis en 2008 et enfin en 2013. À l’heure du bilan, près de quinze ans après l’adoption du pacte de convergence, la non-satisfaction des résultats a conduit à la révision du PCSC et à la définition d’un nouveau pacte en 2015 par l’Acte additionnel N°01/2015/CCEG/UEMOA.

Quelles sont donc les difficultés de la convergence des pays membres en zone UEMOA ? Pourquoi cette quête de convergence ? Quels sont les enjeux du nouveau pacte de convergence ?

Cet article se propose de fournir quelques éléments de réponse à ces interrogations en expliquant dans une première partie la nécessité de la convergence des pays membres en zone monétaire, en dressant dans un second temps un bilan du PCSC (version 1999) et en discutant les enjeux des nouveaux critères.

1. Nécessité de la convergence des pays membres en zone monétaire

Les études empiriques résument les célèbres critères d’une zone monétaire optimale en la convergence des cycles économiques des pays. En union monétaire, les gouvernements nationaux avec des degrés de stabilisation des cycles économiques différents disposent principalement de la politique budgétaire comme outil de politique économique ; la politique monétaire et celle du taux de change étant confiées à une autorité supranationale.  Une telle configuration engendre plusieurs difficultés :

a. Difficultés de gestion des chocs idiosyncratiques[2] 

Si les économies de chaque pays membre de la zone se trouvent sur la même phase du cycle (expansion ou récession) au même moment, la politique monétaire de stabilisation conjoncturelle sera efficace et bénéfique à tous les États membres. Une hétérogénéité des cycles économiques suppose l’existence de chocs idiosyncratiques qui influencent significativement l’activité économique des pays concernés de manière à la faire basculer vers une autre phase d’évolution. La politique monétaire étant unique ne pourra donc pas y répondre efficacement.

b. Problèmes de free-riding des politiques budgétaires

En absence de coordination des politiques budgétaires (donc absence de convergence des cycles économiques) et en présence d’incohérence temporelle de la politique monétaire, chaque gouvernement aura tendance à adopter une stratégie de politique budgétaire unilatérale ignorant les externalités de sa politique sur les autres pays membres. À terme, l’ensemble des politiques unilatérales sera nuisible à l’union.

Dans la zone monétaire, chaque gouvernement finance ses dépenses grâce à l’endettement inétrieur nominal. La banque centrale décide du niveau du taux d’inflation communautaire en faisant un arbitrage entre les avantages et les inconvénients de l’inflation. Une forte inflation peut avoir des avantages car cela réduit la valeur réelle de la dette nominale et par suite réduit la tentation des gouvernements à augmenter les impôts et taxes pour rembourser la dette. Une forte inflation peut bien entendu avoir des conséquences négatives (même en économie fermée) car cela constitue notamment un frein pour les politiques de protection sociale ce qui réduit le niveau de la croissance économique. Dans ce cas de figure (économie fermée), en présence d’une grande inflation, les avantages augmentent plus que les inconvénients. De ce fait, plus le niveau de la dette avant la mise en place de l’union est élevé, plus l’autorité monétaire aura tendance à fixer le taux d’inflation cible à un niveau relativement élevé.

Sous l’hypothèse de politiques budgétaires non coordonnées, pour décider du niveau de ses dépenses, chaque gouvernement effectue un arbitrage entre les avantages et les inconvénients y compris les coûts d’une forte inflation sur la production de chaque pays en ignorant les effets de l’inflation sur la production des autres pays membres. De ce fait, par rapport à une zone monétaire où les politiques budgétaires sont coordonnées, chaque pays membre contracte une dette importante, ce qui conduit la banque centrale à générer une forte inflation et l’on aboutit par suite à un niveau faible de production dans la zone.

La quête d’une convergence des pays membres en zone monétaire est donc pleinement concevable. Quelle est la situation de cette convergence en zone UEMOA ?

2. Bilan du PCSC (1999-2013)

Le Pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité entre les pays membres de l’UEMOA, adopté le 08/12/1999 était composé de quatre critères de premier rang[3] dont le non respect entraîne la formulation explicite de directives par le conseil demandant au pays membre concerné, d’élaborer et de mettre en œuvre un programme de mesures rectificatives et de quatre critères de second rang[4]. Ces derniers sont traités comme des repères structurels indicatifs qui font l’objet d’un suivi rigoureux à cause du rôle déterminant qu’ils jouent dans la réalisation de l’objecif de viabilité interne et externe des économies. Leur non respect ne fait cependant pas l’objet de recommandations explicites pour la mise en œuvre d’un programme de mesures rectificatives.

Le tableau ci-dessous présente la situation des pays dans le respect de ces critères à fin 2013.

crit
Source : Commission de l UEMOA (Surveillance multilaterale, juin 2014)

Pour ce qui concerne les critères de 1er rang, d’importants efforts ont été réalisés par les pays membres. En 2013, les trois derniers critères de 1er rang ont été tous respectés par l’ensemble des pays membres ; le critère sur la dette publique l’était dès 2012. Cependant, le premier critère de convergence considéré comme un critère clé car il permet une appréciation globale de la gestion du budget de l’État n’a été respecté que par le Bénin en 2013. L’on peut constater également une détérioration de la performance sur ce critère entre 2011 et 2013. Par ailleurs, aucun critère de second rang n’a été respecté par l’ensemble des pays membres.

Ces difficultés de convergence sont principalement dues à l’hétérogénéité des caractéristiques économiques des pays membres (Coexistence de pays sahéliens d’une part et de pays forestiers et côtiers d’autre part). En effet, l’agriculture et le commerce constituant les principales activités de l’union et compte tenu de l’importance des chocs, l’union se retrouve composée de pays importateurs (sahéliens pour la plupart) et de grands exportateurs. Ainsi, les variations de la valeur de la monnaie communautaire auront des effets différents pour les pays d’une même union. Par exemple, la dépréciation récente de l’euro qui implique également celle du franc CFA contribue à favoriser les exportations vers les pays (hors zone euro) mais renchérit dans le même temps les importations (des pays hors zone euro). La prise en compte de cette configuration dans la définition des critères de convergence est donc compréhensible, d’où la définition du nouveau pacte.

3. Les enjeux des nouveaux critères de convergence

Le nouveau pacte de convergence (version 2015) des États membres de l’UEMOA comprend cinq critères de convergence (3 critères de 1er rang et 2 critères de 2ème rang) qui devraient être atteints à l’horizon 2019 :

a. Le ratio du solde budgétaire global, dons compris, rapporté au PIB nominal doit être supérieur ou égal à -3% en 2019

Il permet une évaluation de la position budgétaire d’un pays. Cependant, ce critère à caractère comptable ne permet pas de percevoir les effets de la politique budgétaire notamment sur l’activité économique. Un autre indicateur comme le solde structurel courant hors investissements publics permettrait d’avoir une vision plus économique. En effet, l’application de la règle d’or des finances publiques signifie que ce solde structurel courant doit être équilibré. Ainsi donc, un pays ne peut s’endetter que pour investir. On pourrait ainsi percevoir directement les effets de la dette sur l’investissement et donc sur le PIB et la croissance économique.

b. Le taux d’inflation annuel moyen doit être au maximum de 3% ;

Ce critère reconduit semble être respecté par la plupart des pays membres. Cependant, il faut nuancer ce résultat car les déterminants de l’inflation en zone UEMOA sont majoritairement du ressort des chocs exogènes et de l’inflation importée. L’analyse des caractéristiques des principales activités économiques permet de le comprendre. En ce qui concerne l’agriculture, les chocs climatiques ne sont pas rares et affectent souvent les récoltes saisonnières. Une mauvaise campagne agricole entraînera la hausse des prix des produits agricoles notamment alimentaires. Quant au commerce des matières premières, les pays de la zone UEMOA étant des price taker, ils subissent les variations des cours internationaux des matières premières. En outre, l’importance des importations assure l’influence non négligeable de l’inflation importée sur le niveau de l’inflation globale. En outre, ce seuil semble bas pour des économies en quête de croissance soutenue comme le suggère certaines études. En effet, une forte croissance économique est source de tensions inflationnistes mais permet une absorption du chômage et une réduction de la pauvreté à terme. Ces derniers résultats sont prioritaires (par rapport un faible taux d’inflation) pour les économies de l’UEMOA d’autant plus que les déterminants de l’inflation ne sont pas contrôlables.

c. Le ratio de l’encours de la dette intérieure et extérieure rapporté au PIB nominal ne doit pas excéder 70% en 2019.

Le respect de ce seuil reconduit doit être également relativisé par la prise en compte des allègements de dette au titre des initiatives PPTE. Le seuil de 70% ne semble pas consensuel du fait des effets non linéaires de la dette sur l’activité. Si la dette permet de financer l’activité économique, l’importance des intérêts d’une part, et le fait que certains gouvernements s’endettent pour effectuer des dépenses de fonctionnement d’autre part, un fort endettement peut se révéler contre-productif.

d. Le ratio de la masse salariale sur les recettes fiscales ne doit pas excéder 35% en 2019

Ce seuil non atteint en 2013 a été tout de même reconduit. L’importance des dépenses d’éducation et de santé, notamment dans les recrutements de la fonction publique ne facilite pas l’atteinte de ce seuil. Une question fondamentale se pose pour la révision ou l’atteinte de ce seuil. Il s’agit de savoir si ces dépenses de recrutement des agents de santé et d’éducation pour les économies de l’UEMOA doivent être considérées comme des dépenses de fonctionnement ou comme des investissements en capital humain. En effet, il s’avère qu’un important financement en matière de santé et d’éducation est nécessaire dans la zone, d’où les interrogations sur la pertinence de ce critère.

e. Le taux de pression fiscale doit être supérieur ou égal à 20%.

Le seuil de ce critère a été revu à la hausse. Une meilleure lecture de ce nouveau seuil ambitieux suppose une dissociation des recettes fiscales hors exploitation pétrolière et minière afin de se concentrer sur les recettes non liées à l’exploitation des ressources naturelles faisant l’objet d’un effort de mobilisation fiscale plus important. En effet, les difficultés de collecte d’impôts et taxes proviennent des autres secteurs où prévalent les activités à caractère informel.

La non-réalisation de l’ensemble des objectifs de convergence définis dans le PCSC (1999) a conduit à la naissance d’un nouveau pacte. Au-delà des imperfections de certains critères de ce nouveau pacte, il serait judicieux d’appliquer un principe de gradualisme au nouvel horizon de convergence afin d’éviter les multiples reports constatés avec l’ancien pacte. Les échéances intermédiaires permettraient aux différents gouvernements de réadapter leurs politiques en temps opportun. Toutes choses qui contribueraient à une amélioration des résultats de convergence à terme (2019).

Daniel Ouedraogo


[1] L’UEMOA  est née le 10 janvier 1994 et est composée du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, du Sénégal, du Togo et de la Guinée Bissau qui a rejoint l’union en 1997.

[2] Les chocs idiosyncratiques désignent les chocs qui affectent un pays membre de l’union. Il s’agit par exemple d’une mauvaise pluviométrie (choc temporaire) dans un pays A ou d’une guerre civile dans un pays B (choc permanent).

[3] solde budgétaire de base rapporté au PIB nominal devrait être supérieur ou égal à 0 (critère 1) ; taux d’inflation annuel moyen devrait être maintenu à 3% au maximum (critère 2) ; encours de la dette publique totale (intérieure et extérieure) rapporté au PIB nominal ne devrait pas excéder 70% (critère 3) ; non-accumulation d’arriérés de paiement sur la gestion de la période courante (critère 4).

[4] ratio de la masse salariale sur les recettes fiscales ne devrait pas excéder 35% (critère 5) ; investissements publics financés sur ressources internes rapportés aux recettes fiscales devrait atteindre au moins 20% (critère 6); ratio du déficit extérieur courant hors dons par rapport au PIB nominal ne devrait pas excéder 5% l’an (critère 7); taux de pression fiscale (Recettes fiscales / PIB nominal) devrait être supérieur ou égal à 17% l’an (critère 8).

Coût du crédit en UEMOA : une explication par la transmission monétaire

1000179_blogspot-quels-futurs-pour-la-politique-monetaire-et-la-croissance-economique-94771-1Les entreprises des pays membres de l’UEMOA sont majoritairement des PME, PMI ayant très peu accès aux marchés financiers pour le financement de leurs activités économiques[1]. De ce fait, une alternative de financement pour ces entreprises est le recours au crédit bancaire. Pourtant on constate une importance structurelle des conditions d’accès au crédit et notamment des taux d’intérêts élevés. Le taux d'intérêt directeur de la BCEAO qui représente le taux auquel les banques se refinancent auprès de la banque centrale est passé de 4,5% en 2005 à 3,5% en 2013, tandis que le taux d'intérêt débiteur moyen des banques de l'UEMOA qui est le loyer du crédit bancaire pour les ménages et les entreprises est lui passé de 7,5% à 7,56% sur la même période. Globalement, les baisses du taux directeur n'ifluencerait pas les taux débiteur au sein de l'UEMOA. A la suite de Ouattara (29 mai 2015), cet article explique les raisons de l’importance du coût du crédit bancaire en zone UEMOA. Pour ce faire, la transmission monétaire c’est-à-dire les mécanismes par lesquels les décisions de politique monétaire agissent sur le niveau de l’activité économique et les prix et ses obstacles sont particulièrement explorés. Quelques  propositions sont effectuées en vue d'une amélioration de la situation.

L’analyse des évolutions des deux taux d’intérêts procure des résultats surprenants. Une bonne transmission monétaire suppose que les deux taux doivent évoluer dans le même sens. Si le taux auquel les banques se refinancent baisse, on devrait observer aussi une baisse du taux auquel elles prêtent aux agents économiques. Ce dernier taux de prêt appelé taux débiteur est fixé sur la base du taux de refinancement, des anticipations d’inflation de la banque et de sa marge bénéficiaire attendue. Pourtant, entre 2006 et 2007, alors que le taux directeur est passé de 4.5% à 4.75% ; le taux débiteur s'est accru de 7.8% à 7.62% sur la même période. De même entre 2008 et 2009, une baisse du taux directeur de 6.75% à 6.25% était suivie du taux débiteur 7.87% à 8.27%. Les années 2007-2008 ont été marquées par une crise amorcée aux Etats-Unis. Tous les pays du monde, y compris ceux de la zone UEMOA ont été touchés par cette crise. L’élément déclencheur de la crise était les pertes en capital des banques dues au défaut de leurs emprunteurs. La conséquence immédiate a été la rareté du crédit et la hausse du taux débiteur. Toutefois, en réponse à cette crise les banques centrales ont toutes adoptées des politiques visant à injecter massivement de la liquidité dans l’économie via les banques. C’est, entre autres, la raison pour laquelle l’on peut constater une baisse du taux directeur de la BCEAO à partir de 2009. En dépit de cette baisse tendancielle du taux de refinancement, l’on observe tout de même une évolution curieuse du taux débiteur entre 2009 et 2011. En réalité, en marge des effets de cette crise mondiale, la transmission monétaire a des spécificités en zone UEMOA que nous abordons à présent à travers les principaux canaux de la transmission monétaire.

Une politique monétaire expansionniste, soit l’ensemble des mesures prises par les autorités monétaires (injection de liquidité, baisse des taux d’intérêt, effets d’annonce, …) a pour objectif de relancer l'activité économique, en facilitant l’accès au capital. Ceci peut intervenir à travers plusieurs mécanismes :

  • le canal du taux d’intérêt : ces mesures peuvent entrainer une baisse des taux d’intérêts réels, et par voie de conséquence favoriser l’investissement et donc la production. Ce canal connaît des dysfonctionnements en sein de l’UEMOA du fait de la structure de financement des économies de cette zone.  En effet, selon des rapports de la Commission de l’UEMOA et de la Banque de France, le financement marchand et l’apport extérieur constituent les sources majoritaires des principales activités économiques que sont le commerce et l’agriculture du fait de l’importance du secteur. Le rôle primordial que devrait jouer le financement intermédié n’est donc pas assuré. C’est l’une des raisons pour lesquelles ces économies sont très vulnérables aux chocs exogènes qui contribuent à réduire le volume de financement principal (marchand et extérieur). En effet, une crise financière internationale peut entraîner la réduction du financement extérieur. De même, une mauvaise pluviométrie, par exemple, réduira le volume de financement marchand dans le secteur agricole. 

  • le canal du crédit bancaire : la politique monétaire expansionniste permet d’une part aux banques commerciales d’avoir accès à la liquidité plus facilement. D’autre part, les banques commerciales améliorent les conditions de rémunération des dépôts afin de pouvoir faire face à la croissance des demandes de prêt. Toutes choses conduisant à une hausse de l’offre de liquidité des banques, facilitant ainsi le financement des prêts et par ricochet la hausse de l’investissement et celle de la production. Ce canal prouve que la politique monétaire influence principalement les PME PMI qui dépendent davantage des prêts bancaires. L’importance du secteur informel conduit à une hausse des asymétries d’informations entre les banques commerciales et les détenteurs de projets. Cette situation entraîne une rigidité inouïe des conditions de crédit, en particulier, en matière d’exigence de collatéraux.

  • le canal du bilan : la politique monétaire expansionniste conduit à une hausse des cours des actions du fait de la hausse de la demande car les agents disposent plus facilement de crédit d’investissement. La rationalité de ces agents les conduira à acheter les actions des entreprises les plus performantes, toutes choses conduisant à la réduction des asymétries d’information entre les banques et les entreprises et par suite à la hausse des prêts, des investissements et de la production. Cela renforce la situation nette des entreprises. L’augmentation de la trésorerie des entreprises à la suite d’une politique monétaire expansionniste peut être freinée du fait même de la composition du portefeuille de titres financiers de celles-ci (à prédominance d’actifs étrangers). Le rendement de ces actifs est donc ancré sur des économies étrangères. Ainsi même si les activités des entreprises domestiques sont rentables et qu’à la suite d’une crise financière l’on assiste à une dépréciation de la devise de financement de ces entreprises domestiques, cela entraînera une baisse du niveau de la trésorerie et des investissements ceteris paribus. Une politique monétaire expansionniste aura une influence marginale sur l’activité économique dans la mesure où les titres détenus en monnaie nationale par les entreprises domestiques restent faibles.

Au sein de l’UEMOA, la situation est telle que les actions de la Banque centrale ne pourrait lever les contraintes d’accès au financement bancaire pour les PME/PMI. En marge des efforts effectués par les autorités monétaires, d’autres actions sont à mener afin de permettre aux PME et PMI de la région d’avoir accès à leur principale source de financement. Ceci nécessitera une implication de chaque acteur :

  • Les Etats : pour réduire l’asymétrie d’information entre les banques et autres établissements de crédit et les détenteurs de projet, il faut promouvoir le développement des agences d’information sur le crédit. Pour réduire les risques, il faut améliorer le climat des affaires et le cadre juridique pour faciliter la réalisation des garanties bancaires. La création ou le renforcement des fonds de garantie pour alléger le coût du crédit, avec des conditions particulièrement favorables pour les agents économiques vulnérables (PME, PMI, entreprises individuelles, …) est aussi primordial. En outre, il faudra mettre en place des structures d’encadrement et d’accompagnement des PME, PMI.
  • Les banques : elles doivent indexer l’évolution de leur taux débiteur sur les taux du marché monétaire. Pour renforcer leur crédibilité et attirer plus de clients, elles doivent œuvrer à améliorer la transparence de leurs activités, en particulier en ce qui les conditions de crédit mais aussi promouvoir l’accroissement de l’épargne en créant des comptes d’investissement ciblés par activité pour les agents qui veulent participer à des opérations de financement par le biais de la banque.
  • Les opérateurs économiques : ils doivent développer des projets innovants avec des perspectives de remboursement clairement définies et œuvrer à une gestion efficiente des crédits reçues et à la transparence de leurs activités.

L’importance du coût du crédit bancaire a conduit plusieurs entreprises (PME, PMI, entreprises individuelles) à se détourner des sources de financement traditionnel (bancaire, marchés). Cela contribue fortement à réduire l’efficacité de la politique monétaire. Cette situation mérite l’attention particulière de tous les acteurs (BCEAO, gouvernements, banques, agents économiques) pour une meilleure coordination des politiques économiques. En effet, l’inefficacité d’une politique monétaire centralisée est source de plusieurs difficultés, notamment la hausse de la tentation de free-riding via les politiques budgétaires nationales dont les conséquences peuvent conduire à l’éclatement de l’union monétaire.

                                                                                                                       Daniel Ouedraogo


[1] Banque de France. 2009.

 

 

 

 

 

Pour une baisse du coût du crédit au sein de l’UEMOA

fonds-souverainsDe nombreux observateurs soutiennent que les banques de la sous-région ouest-africaine affichent une situation de surliquidité structurelle. Pourtant, l’offre de crédits au sein de l’espace UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine)  reste l’une des plus chères au monde. Au deuxième trimestre de l’année 2014, le taux débiteur moyen, hors taxes et charges, pratiqué par les banques de l’UEMOA était de 7,16%. Même si ce taux a connu une légère baisse par rapport aux deux dernières années, il reste encore au-dessus des taux pratiqués dans certaines zones monétaires des pays émergents et développés. Dans le rapport annuel sur la zone franc produit par la Banque de France en 2012, le taux d’intérêt débiteur moyen hors taxes et charges de l’UEMOA était de 8%, contre 6,3% et 3,8% respectivement au Maroc et en France; soit des différentiels  de taux de 1,7  et 4,2  points.

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Evolution des taux debiteurs moyens (hors taxes et charges) des banques de l UEMOA. Source : BCEAO – Rapport annuel de la Commussion Bancaire

En prenant en compte les taxes et charges rattachées à l’obtention d’un prêt, le coût total du crédit supporté par un emprunteur de l’espace UEMOA varie en moyenne entre 10% et 15% selon les pays. Face à ces taux exorbitants qui défient toute rationalité, de nombreux demandeurs potentiels de crédits renoncent à recourir aux banques ; ce qui contribue à baisser la consommation et l’investissement, pénalisant ainsi la relance de l’économie. Pour comprendre le rationnel qui pousse les banques à proposer des taux élevés, il convient d’en rappeler les déterminants. Le taux d’intérêt représente le prix du temps (durée du prêt) et du risque (de non remboursement) que la banque prend en octroyant un crédit. La valeur du temps étant théoriquement la même dans toutes les régions du monde, la seule variable explicative des différentiels de taux reste le « risque », qui est une notion renfermant plusieurs facteurs  (politique, économique, psychologique etc.). Ainsi, le coût exorbitant du crédit dans l’UEMOA peut s’expliquer par différents facteurs dont nous présentons ci-dessous ceux qui nous semblent les plus significatifs :

  • l’instabilité socio-politique et économique : Toutes les institutions financières du monde intègrent systématiquement le risque pays dans la valorisation des coûts des crédits qu’elles octroient à leurs clients. Ainsi, le marché du crédit de l’UEMOA subit depuis plusieurs années, le double effet de l’instabilité socio-politique et la fragilité de l’économie de la région. Le retour relatif de la stabilité politique (avec la fin de la crise en Côte d’Ivoire et la défaite des terroristes au nord du Mali) ainsi que le regain de vitalité économique dans la région ne sont pas suffisants pour rassurer les institutions financières. Il faudra plusieurs décennies consécutives de stabilité politique et de croissance économique pour changer la perception du risque.
  • le taux directeur de la BanqueCentrale: Le taux directeur est le taux auquel les banques empruntent auprès de la BCEAO. Plus ce taux est élevé, plus les taux accordés aux clients finaux à l’autre bout de la chaine l’est. Pendant longtemps, les taux directeurs étaient restés élevés au sein de l’UEMOA. Mais au cours des dernières années, la BCEAO a envoyé des signaux forts au marché. Entre 2009 et 2015, le taux de guichet de prêt marginal de la BCEAO est passé de 4,75% à 3,50%. Toutefois, les canaux de transmission entre taux directeurs et taux débiteurs dans la zone étant faibles, la baisse des coûts financiers pour les emprunteurs reste très limitée suite à un changement de politique de la BCEAO.
  • un déficit  d’informations fiables entrainant une mauvaise appréciation du risque : Dans les pays de l’espace UEMOA, les banques disposent de très peu de leviers pour évaluer le profil de risque de leurs clients (localisation géographique, solvabilité financière, situation sociale etc.). La centrale de bilan de la BCEAO, qui est sensé fournir une banque de données significatives aux institutions financières leur permettant d’apprécier de manière objective la situation des clients, connait des disfonctionnements structurels. Ainsi, l’absence de visibilité sur le profil de risque des emprunteurs potentiels conduit d’une part à une réticence des banques à prêter et d’autre part à une hausse des coûts des prêts octroyés. Pour remédier à cette situation, la BCEAO a entrepris de déployer des Bureaux d’Information sur le Crédit, qui sont des structures qui collectent et compilent des informations sur les antécédents de crédit ou de paiement d'un emprunteur. Ceci devrait permettre d’atténuer l’asymétrie d’information et rassurer ainsi les banques qui pourraient revoir leurs taux à la baisse.
  • une défaillance juridique et institutionnelle : le niveau élevé du coût du crédit peut également s’expliquer par la difficulté qu’ont les régulateurs du secteur bancaire à imposer leur autorité aux banques de la région. Le Conseil des Ministres de l’UEMOA a vaguement fixé le taux d’usure (niveau maximum de taux praticable) à 15%  sans qu’il n’y ait de mécanisme précis de contrôle des conditions de fixation des taux appliqués par les banques. Ainsi, les banques disposent d’une large marge de manœuvre pour maximiser leur gain. L’important écart de 6,5% à 11,5% entre les taux auxquels les banques empruntent auprès de la BCEAO (3,5%)  et les taux qu’elles appliquent à leurs clients ( entre 10% et 15%) , est ainsi déterminé dans des conditions opaques. D’ailleurs, la difficulté qu’a la BCEAO à  faire respecter la mesure de gratuité de 19 services bancaires listés dans un communiqué publié en juillet 2014 (http://www.bceao.int/Communique-de-presse-2985.html) démontre l’urgente nécessité de renforcer le cadre institutionnel pour un meilleur contrôle des pratiques des banques.

Le coût élevé des taux au sein de l’UEMOA n’est pas une fatalité. Les autorités de régulation disposent de leviers pratiques qu’ils devraient actionner de manière efficace pour réduire à court terme, le coût du crédit :

  • Renforcer le cadre règlementaire: Le mécanisme de calcul des taxes et charges liées à l’octroi d’un prêt doit être encadré par une législation précise. Il s’agit de fixer des barèmes formels (de taxes et charges) de sorte à réduire la marge de manœuvre des banques dans la détermination des taux. Dans cette même logique, à l’instar de la récente loi sur la gratuité des services bancaires, les autorités devraient commanditer une étude sur la structure des charges liées à l’octroi des crédits, afin d’envisager la suppression de certaines d’entre elles qui ne se justifieraient pas.
  • Le contrôle des activités des banques : Le véritable défi des autorités bancaires est moins la définition d’un cadre réglementaire que le suivi de sa mise en œuvre effective. La non répercutions des baisses des taux directeurs sur les taux débiteurs des banques en est une parfaite illustration. Ainsi, la BCEAO devrait moderniser et renforcer ses missions de contrôle. En l’occurrence, en plus des missions périodiques de contrôle sur pièces basées sur le reporting des banques, il faudrait conduire des audits inopinés afin de mieux évaluer les pratiques des banques au quotidien. Au regard de l’opacité qui entoure les activités de certaines banques, il est important que la BCEAO renforce son personnel par des professionnels aguerris spécialisés dans la conduite de missions de cette nature. Il peut également être envisagé de recourir de manière ponctuelle aux services d’un cabinet spécialisé afin de traiter certaines problématiques qui peuvent s’avérer complexes.
  • Développer la concurrence dans le secteur : promouvoir des solutions alternatives de financement (finance islamique -prêt à taux zéro-, marchés boursiers, fonds d’investissements etc.) afin d’intensifier la concurrence pour faire baisser les taux. Par ailleurs, Il convient également d’améliorer le climat des affaires et de développer des solutions de garanties institutionnelles au bénéfice des emprunteurs  pour réduire le «  risque perçu » par les banques.
  • Réduire l’asymétrie d’information en rendant disponibles des informations détaillées et fiables sur la situation financière des agents économiques, notamment les ménages et les PME. A cet égard, la BCEAO doit accélérer le déploiement du projet des bureaux d’information sur le crédit.

Il apparaît aujourd’hui que le coût considérable du financement bancaire au sein de l’UEMOA, tient davantage à la faiblesse institutionnelle de la BCEAO à faire appliquer les règles qui régissent la pratique de l’activité bancaire, qu’aux arguments classiques comme l’inexistence d’informations sur les demandeurs de crédits ou l’instabilité économique et socio-politique. Une situation qui se traduit par une quasi-inefficacité de la politique de la BCEAO, même pour des mesures visant directement le marché financier. S’il convient d’améliorer l’environnement des affaires et de fournir un accompagnement aux demandeurs de crédit (ce que les Etats tentent de faire, avec des outils variés, selon les pays) ; il est impératif que la BCEAO renforce son mécanisme de supervision afin que les canaux de transmission de sa politique, notamment ceux visant le secteur bancaire, puissent entrainer à la baisse le coût du crédit dans la région afin de faciliter l’accès aux financements, nécessaires à la relance de la consommation et de l’investissement qui sont les moteurs de l’économie.

Lagassane Ouattara

Afrique de l’Ouest : une année manquée ?

croissance_nicolasL’Afrique de l’Ouest va-t-elle manquer le coche de l’année en cours et ne pas profiter au mieux des opportunités qui lui étaient offertes pour être en 2014 un des champions de la croissance subsaharienne ?

Certains des atouts annoncés ont bien été concrétisés. Les investissements en infrastructures se sont effectivement accélérés et quelques projets phares sont lancés comme la Boucle Ferroviaire qui devrait concerner 5 pays de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Le secteur minier est resté très actif et quelques nouveaux gisements ont été identifiés. Le fonctionnement de l’UEMOA demeure une référence en Afrique Subsaharienne et permet de progresser sur divers grands chantiers comme celui de la fiscalité. La Côte d’Ivoire a repris son rôle de moteur économique de la zone, avec un taux de croissance supérieur à 10% en 2013 comme en 2014, et attire des investisseurs étrangers en nombre croissant.

Pourtant, alors que la fin d’année approche, le sentiment d’ensemble est la déception.  

L’occasion offerte d’une concentration de l’attention sur les grands sujets économiques, grâce à l’absence d’élections majeures en 2014 et à la fin des crises ivoirienne et malienne, a été rarement mise à profit. Au Mali, les faibles progrès dans les négociations avec les touarègues et une sécurité encore fragile ont bloqué une bonne part des projets de relance dans la partie Nord du pays tandis que les insuffisances constatées dans la gouvernance freinent le soutien des grands partenaires financiers. Les investissements publics comme privés s’effectuent donc au ralenti et le taux de croissance de 6,5% annoncé pour 2014 semble difficile à justifier. Au Niger, les actions menées dans le cadre d’un ambitieux Plan de Développement à moyen terme ont vu leurs effets pénalisés par de vives tensions politiques et par les grandes faiblesses persistantes de l’administration. Au Burkina Faso, les bonnes performances des années précédentes risquent d’être amoindries en 2014 par les problèmes énergétiques rencontrés et par l’impact négatif sur les investissements des contestations déjà engagées à propos des élections présidentielles de novembre 2015. Au Sénégal, les résultats obtenus par la nouvelle équipe ne sont pas jusqu’ici à la hauteur des attentes. Dans le voisinage de l’UEMOA, deux  pays qui semblaient être des piliers de la croissance régionale font face à de sérieux handicaps : le Ghana en raison de la forte chute de valeur de sa monnaie ; le Nigeria par suite de la montée en puissance du terrorisme dans le Nord du pays.   

Deux principales raisons peuvent être avancées pour ce contretemps généralisé. La région s’est d’abord heurtée à deux handicaps exogènes. Les risques instillés par les groupes terroristes n’ont pas disparu malgré la défaite de ceux-ci au Mali : la menace s’est faite moins directe mais reste toujours pesante dans toute la bande sahélienne et y gêne les investissements, des entreprises comme de l’Etat. Les dégâts causés par le virus Ebola depuis début 2014 se sont rapidement amplifiés et propagés : l’épidémie frappe maintenant officiellement quatre pays, y compris le géant nigérian, mais l’étendue réelle de la contagion est mal connue et les moyens de la stopper non encore identifiés, ce qui provoque parfois une panique contreproductive. A côté de ces éléments externes, le retard croissant pris dans les transformations structurelles constitue sans doute l’élément déterminant des performances décevantes. Les financements requis sont en effet désormais plus facilement mobilisables grâce au renouveau de la confiance envers toute l’Afrique subsaharienne et la diversification continue des bailleurs de fonds. Les priorités stratégiques d’investissements font partout l’objet d’un large agrément, ce qui facilite leur mise en œuvre. En revanche, faute de volonté politique, les réformes les plus difficiles mais aussi les plus décisives sont reportées ou menées à pas trop lents : transformation en profondeur de l’administration afin d’accroitre son efficacité et son honnêteté ; lutte contre la corruption sous toutes ses formes; appui effectif à l’initiative privée tournée vers les activités productives ; modernisation et renforcement de l’agriculture, maîtrise des inégalités et amélioration du caractère inclusif de la croissance. En Afrique francophone plus qu’ailleurs, ces mutations sont indispensables pour détruire les blocages à une croissance économique plus vive et mobiliser au profit de cet objectif toutes les énergies disponibles. L’Etat est en effet dans cette région un acteur économique encore trop important. Il lui faut absolument concentrer ses efforts sur la création d’un environnement mieux adapté au développement, laisser plus de champ libre au secteur privé en exigeant de lui en contrepartie qualité des projets et respect des règles fixées, et veiller à une nette amélioration de la répartition des fruits de la croissance.

L’année 2015 ne sera guère propice à des avancées majeures en ces domaines difficiles. En Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, qui semblent être les pays plus enclins à ce type de réformes, l’attention sera très vite focalisée sur les élections de fin d’année, ce qui devrait ralentir le traitement des sujets les plus difficiles. Ailleurs, il restera d’abord nécessaire de passer en la matière des paroles aux actes. Pour cela, les Autorités doivent être convaincues du caractère vital de ces transformations pour leurs pays. Pour les en convaincre, deux influences extérieures pourraient être déterminantes. Après avoir soutenu très justement la mise à niveau des infrastructures, les partenaires financiers devraient renforcer leur appui financier et technique à ces mutations et en faire une nouvelle priorité. C’est en effet une condition nécessaire pour atteindre l’accélération de la croissance que certains, comme la Banque Africaine de Développement (BAD) appellent maintenant de leurs vœux. Il  faudra cependant de la part de ces institutions un grand effort de réflexion stratégique et de meilleure écoute des contraintes locales pour que leur message soit entendu. L’autre acteur essentiel devrait être l’UEMOA : sa solidité, son fonctionnement sans heurts lui donnent une responsabilité décisive en la matière. Il sera toujours plus facile aux Etats de mettre en œuvre des actions délicates  décidées en commun que de les imposer seuls face à des oppositions ou des lobbys peu soucieux de l’intérêt général. L’Union pourrait donc utilement renforcer son rôle aussi bien dans la promotion de grands investissements structurants que dans celle de réformes institutionnelles ou environnementales.

Le pari est difficile mais il est fondamental. En plus des menaces actuelles déjà évoquées, l’Afrique de l’Ouest doit affronter, peut-être encore plus que d’autres parties de l’Afrique subsaharienne, trois challenges essentiels. A court terme, celui des emplois à offrir en masse à une jeunesse exigeante, mais à laquelle sont données des formations souvent mal adaptées et des opportunités de travail en nombre insuffisant. A moyen terme, une explosion démographique encore non maîtrisée et exceptionnellement rapide. Selon les estimations du « Population Reference Bureau » et faute d’infléchissement des tendances présentes, la population des 8 pays de l’Union devrait être multipliée par 2,5 en 35 ans et dépasser les 250 millions de personnes en 2050, après avoir franchi un seuil de 140 millions d’habitants dans 10 ans. Il est facile d’imaginer l’immensité des actions à accomplir pour apporter à ceux-ci un niveau de vie et de progrès social acceptables. A plus long terme enfin, des modifications climatiques notables, dont les effets sont jusqu’ici très peu pris en compte.

L’urgence devait donc être le maître mot. Le temps politique n’est cependant pas le même que le temps économique… jusqu’à ce que les faits reprennent le dessus sur les promesses.

Les pays de l’UEMOA profitent-ils de leur monnaie commune ?

uemoaL'optimalité d'une zone monétaire fait référence au champ géographique le plus favorable sous laquelle une monnaie peut être utilisée. Les théories traitant de l'optimalité d'une zone monétaire aboutissent à une analyse en terme de coûts/bénéfices. Ils conduisent ainsi à l'arbitrage entre l'outil qu'est l'ajustement macroéconomique se réalisant par la variation des taux de change et les bénéfices qui peuvent être tirés d'un état de régime de change fixe de fait entre les Etats membres d'une union monétaire. Une telle analyse appliquée à l'UEMOA permet-elle de conclure que L'UEMOA est une " Zone Monétaire Optimale " ?

D’après la théorie économique, plusieurs facteurs peuvent conduire à l'adoption d’une monnaie commune entre des pays partenaires. Ils vont de la mobilité des facteurs de production entre les pays (mobilité des travailleurs et du capital) et/ou de l’existence d’une politique budgétaire commune à ces pays (Mundel, 1963 [1]), à la diversification de leurs économies (Kenen, 1969 [3]) en passant par leur ouverture commerciale (McKinnon, 1963 [3]).

La mobilité des facteurs de production entre les pays voulant prendre part à une union monétaire permet à ces pays de s’ajuster aux variations de taux de change lors de chocs [4]. Aussi, si la part de la production des biens destinés à l’exportation est forte par rapport à l’ensemble de la production d’un pays, les variations du taux de change influent fortement sur le niveau général des prix dudit pays. La quête de stabilité peut alors passer par l’adhésion à un ensemble monétaire plus vaste. Par ailleurs, la diversification d’une économie lui permet de mieux résister aux chocs. L’intensité du choc est en quelque sorte diluée dans l’ensemble du tissu économique. En complément, il convient de préciser que la perte de souveraineté nationale sur la politique monétaire est dommageable à partir du moment où le choc subi est asymétrique [4]. Dans le cas contraire, une réponse de politique monétaire communautaire aux chocs est souhaitable.  Ainsi, des pays homogènes dans leur structure économique politique, auront donc un coût d'adhésion à l'union monétaire plus faible que des pays structurellement hétérogènes du fait de la moindre existence entre eux de chocs asymétriques.

Dans son processus d’intégration, la réglementation en vigueur au sein de l’UEMOA garantit la mobilité des biens et des personnes. En pratique, cette mobilité n’est pas encore effective dans la mesure où des contraintes tarifaires et non tarifaires existent encore (coût du transport, tracasserie douanière, etc.)[1]. Jusqu'à une date récente, la Côte d’Ivoire réclamait aux ressortissants de l’UEMOA la détention d’un permis de séjour. Autre exemple, au Sénégal que l'on soit ressortissant de l’UEMOA ou pas, la détention d’une carte consulaire a plus de valeur qu’un passeport ou une carte d’identité pour circuler librement. Concernant la mobilité du travail, les préférences pour des compétences nationales au détriment des compétences régionales (sauf dans les emplois des institutions dotées d'attributions régionales) sont autant de facteurs qui entravent la libre circulation des personnes dans l’UEMOA. Si dans les textes, la BCEAO garantit également le libre transfert des capitaux à l'intérieur de l'UEMOA, la mobilité des capitaux entre les Etats membres de l’UEMOA reste encore assez limitée. Très peu de sociétés osent s’implanter dans d’autres pays de la sous-région en raison d’un secteur bancaire qui offre peu de crédits aux entreprises pour financer l’investissement durable. Les quelques mouvements de capitaux observés concernent notamment les souscriptions aux émissions de titres publics ou les prises de participation dans des entreprises à travers la BRVM. 

Les transferts budgétaires sont également un élément de réponse aux chocs au service de l'efficacité d'une zone monétaire. Depuis 1996, le Prélèvement Communautaire de Solidarité (PCS) est la première source du budget communautaire de L'UEMOA.  Il a par exemple financé des transferts compensatoires en faveur des pays impactés négativement suite à l'entrée en vigueur du TEC (Tarif Extérieur Commun) UEMOA en 2000 ou encore financé la lutte contre la chèreté de la vie dans l'UEMOA. Mais ces transferts sont loin d'équivaloir en proportion de PIB communautaire, les transferts budgétaires observés en Zone Euro relatifs à la Politique Agricole Commune ou aux fonds de cohésion.

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Source : Calculs et graphique realise a partir des donnees WDI de la Banque Mondiale.

Concernant l'ouverture commerciale des pays de l'UEMOA, on observe une grande diversité de situations qui évolue peu entre 1994 et 2011. Certains pays comme le Togo et la Côte d'Ivoire sont ouverts, tandis que d'autres comme le Burkina Faso le sont deux à trois fois moins.

Par ailleurs, les économies de l'UEMOA présentent des différences structurelles. Au delà des différences de tailles des économies et des niveaux de vie au sein de la zone (le PIB de la Côte d'Ivoire représente à lui seul plus de 30% du PIB de l'Union et le PIB par tête en Côte d'Ivoire est trois fois celui du Niger ou de la Guinée-Bissau). On observe une hétérogénéité structurelle au moyen de la composition des PIB par secteur. Ainsi, le secteur primaire pèse presque deux fois plus dans l'économie ivoirienne que dans l'économie sénégalaise alors que le secteur secondaire est deux fois plus important dans l'économie malienne que dans l'économie béninoise. Le secteur tertiaire est, en proportion du PIB, deux fois moins développé en Guinée Bissau qu'au Burkina Faso. La survenance de chocs asymétriques est donc un risque que l'on ne peut écarter dans cette union.

L'analyse de l'UEMOA à travers les critères de Mundell, Mc Kinon et Kenen apporte une réponse sans appel concernant l'optimalité de la zone monétaire en UEMOA. D'un point de vue économique, les pays de cette union semblent ne pas avoir intérêt à partager une même monnaie. Il n'est d'une part pas possible d'affirmer l'effectivité de la mobilité des facteurs au sein de l'UEMOA. D'autre part, la diversification du tissu économique est faible et la constitution de l'union n'a pas apporté de réponses à la vulnérabilité de la zone aux chocs qui toucheraient certaines productions. Toutefois, il faut rappeler que la constitution de cette union monétaire assez particulière et propre à son histoire ne s’est pas appuyée sur des fondements économiques, auquel il faudrait que les pays de cette union reviennent afin de profiter pleinement des bénéfices d’un état de régime fixe. Les pays ont d’ailleurs du mal à respecter les critères de convergence définis dans ce sens, renforçant la position selon laquelle ces pays n’ont pas le profil économique requis pour s’intégrer dans une même zone monétaire. Si seule l’ouverture croissante depuis deux décennies des économies de l'UEMOA plaide en faveur de l'optimalité de la zone monétaire, il faudrait accentuer les efforts de diversification du tissu économique des pays de l'UEMOA, assurer l'application effective des textes sur la mobilité des facteurs, le tout financé par la constitution d'un budget commun plus conséquent.

Franck VIROLEAU

Sources : 

[1] Mundell, Robert A. (1963). Capital mobility and stabilization policy under fixed and flexible exchange rates. Canadian Journal of Economic and Political Science 29 (4): 475–485.

[2] McKinnon, Ronald I. (1963) , Optimum Currency Areas, The American Economic Review.

[3] Kenen P. (1969). The theory of optimum currency areas: an ecletic view , dans R. Mundell, A. Swoboda, Monetary Problems of the international economy, Chigaco University Press.

[4]. Ces chocs asymétriques ou idiosyncratiques se définissent comme les événements qui affectent différemment les pays membres de la zone monétaire. Une illustration parlante est donnée dans la note [1] de l'article de Georges Vivien (http://terangaweb.com/union-monetaire-vers-des-criteres-de-convergence-economique-et-sociale/).


Peut-on parler de convergence au sein de l’UEMOA au cours des dernières décennies ?

Dans une union monétaire, il est très important que les pays membres tendent à avoir des performances économiques similaires ; on parle alors de convergence. Autrement, il y a risque d’implosion de l’union. Des études économiques réalisées dans le cadre de l’union monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) montrent qu’il n’est pas possible de parler de convergence au sein de l’UEMOA. Ces résultats ont des implications pour la conception des prochaines unions monétaires en Afrique. Notez que le contenu de cet article requiert des connaissances théoriques préalables sur la convergence économique.

tournoi-uemoa-civ-togo-0007Les pays de l'actuelle UEMOA connaissent à la création de l'union des situations hétérogènes quant à leur croissance par habitant. La théorie du rattrapage de Solow voudrait que ces disparités tendent à s'estomper. Y a-t-il une validation empirique de cette théorie en UEMOA au cours de ces dernières décennies qui plaiderait concomitamment et implicitement en faveur du design actuel du pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité ? La théorie économique[1] stipule  que dans les conditions réunies par l’UEMOA (union économique et monétaire), les pays les plus en retard en terme de PIB par tête devraient connaître une croissance plus élevée que les pays les " plus avancés " (loi des productivités marginales décroissantes des facteurs), ce qui permettrait de tendre vers une homogénéisation des niveaux de vie. Or, sur la dernière décennie, à l’exception de la Côte d’Ivoire, dont les performances économiques ont été altérées par une crise socio-politique, les pays semblent se stabiliser sur une croissance lente et visiblement peu différenciée quand bien même ils présentent des niveaux de PIB par tête très hétérogènes. Cette situation invite à s'interroger sur l’existence même d’un processus de convergence des économies de l’UEMOA.

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Source :Calcul de l’auteur a partir des donnees du WDI (BM)

Généralement, la théorie définit trois types de convergence (Galor, 1996[2]) :

  – la convergence absolue selon laquelle, à long terme, les PIB par tête convergent vers le PIB le plus performant de la zone économique et cela indépendamment des conditions d'origine des pays

  – la convergence conditionnelle selon laquelle, à long terme, les pays qui présentent des similarités structurelles voient leur PIB par tête converger vers le PIB par tête le plus performant de la zone économique et cela indépendamment des conditions d'origine des pays. En d'autres termes, dans cette acception de la convergence, la convergence structurelle est un préalable à la convergence réelle

  – la convergence de club selon laquelle les pays qui présentent des similarités structurelles voient leur PIB par tête converger vers le PIB par tête le plus performant de la zone économique à condition que ces pays aient initialement des conditions suffisamment identiques pour se situer dans la même perspective d'état stationnaire.

Des études menées sur le sujet ont permis d’identifier et de caractériser la convergence au sein de l’UEMOA. La volatilité du PIB par tête est étudiée dans le but de déterminer si la différence entre les  indicateurs économiques des pays de la zone économique étudiée se dissipe. Il s'agit donc, dans un premier temps, d'étudier à quel point la croissance des pays s'éloigne d'une croissance moyenne au sein de l'UEMOA.

Abdoul Aziz Wane (2004)[3] qui étudie la croissance dans l'UEMOA entre 1965 et 2002 ne trouve pas d'évidence de convergence du revenu par tête au sein de l'UEMOA sur la période étudiée.

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Si l'on recentre le propos sur une période d'intérêt plus réduite allant de 1994 à 2002, il est possible de relever une timide amélioration de la convergence puisque sur cette sous-période, les écarts entre les PIB par tête des pays de l’UEMOA sont moins prononcés. Pour l'auteur qui se concentre sur l'évolution entre 1965 et 2002, le degré de convergence en 37 ans ne fait que de remonter à son niveau initial de 1965.

Abdoul Aziz Wane construit et utilise ensuite plusieurs modèles économétriques pour arriver aux résultats clefs qu'en UEMOA, il y a eu à la fois une convergence absolue et conditionnelle sur le long terme, à un rythme lent sur la période 1965-2002 Ces résultats font également ressortir le rôle prédominant du capital humain à court terme et surtout à long terme dans la croissance du PIB. L'investissement est ensuite le deuxième critère le plus influent sur la croissance du PIB par tête, devant la croissance de la force de travail  et cela, autant sur le court que sur le long terme.

En 2012, Nacisse Palissy Chassem[4] teste également la convergence dans l'UEMOA en distinguant entre 1970 et 2005 des sous-périodes de convergence et de non convergence. Il définit également une convergence réelle mesurée par la convergence des PIB réels de l'Union et une convergence structurelle mesurée par la convergence de la Productivité Globale des Facteurs (PGF) côté offre et la Formation Brute de Capital (FBC) par tête du côté de la demande.

L'objectif de sa recherche est non seulement de conclure sur la présence ou l'absence de convergence mais également de déterminer si la convergence structurelle est une condition suffisante à la convergence réelle.

Le chercheur aboutit aux résultats suivants pour la convergence structurelle :

  – de 1976 à 1993, on observe par le côté de la demande (FBC) une convergence structurelle ; 

  – de 1970 à 1975 et de 1994 à 2005, on observe une divergence ; 

  – par le côté de l'offre (PGF), on observe une convergence structurelle de 1976 à 1991 ; 

  – de 1970 à 1975 et de 1992 à 2005, on observe une divergence.

En sortant la côte d'Ivoire de l'étude du fait de la crise socio-politique qui perturbe les tendances économiques, Nacisse Palissy Chassem démontre une convergence réelle entre 1970 et 1991 et une divergence réelle entre 1992 et 2005 et prouvent que la convergence structurelle a été une condition nécessaire à la convergence réelle entre 1975 et 1991 et qu'elle a été une condition suffisante de 1992 à 2005.

Au regard des études de Abdoul Aziz Wane et de Nacisse Palissy Chassem, on retient qu'il n'y a pas de rattrapage systématique des pays les " plus avancés " de l’Union par les moins avancés entre 1965 et 2005. Néanmoins, il faut noter une légère amélioration des performances économiques relatives de ces derniers, mais cette amélioration est si faible que la démonstration de son existence est très sensible à la méthode utilisée. Les éventuels bénéfices apportés en terme de convergence par la création de l'UMOA en 1962 et de l'UEMOA en 1994 sont donc insuffisants pour permettre aux pays les plus défavorisés de rattraper les pays les plus riches de l'Union. Or cette convergence est à rechercher puisqu'elle permet l'intégration économique par un renforcement de la cohérence économique et par la réduction du nombre et de la profondeur des chocs asymétriques. Les études mentionnées montrent que les facteurs positifs pour la convergence dans l'espace UEMOA seraient  le capital humain, l'investissement, la force de travail et la convergence dans l'Union de la productivité globale des facteurs. La convergence réelle étant conditionnée (de manière nécessaire ou suffisante) par la convergence structurelle, il apparait comme souhaitable d'opérer un re-design des critères de convergence nominal du pacte de convergence qui soit en faveur du développement du capital humain et de  l’investissement.

Franck Viroleau


[1] L'idée qui suit a été développée par le néokeynésien et prix Nobel Solow dans son célèbre modèle aux fondements indéniablement néoclassiques. Cf. Solow, Robert (1956). "A Contribution to the Theory of Economic Growth", Quarterly Journal of Economics, 70, 65-94.

 

 

 

[2] Galor, O. D. (1996). Convergence? Inferences from theoretical models. Economic Journal, 106, 1056-1069.

 

 

 

[3] Wane, Abdoul Aziz (2004). Growth and convergence in WAEMU countries, IMF, working paper WP/04/198.

 

 

 

[4] Palissy Chassem, Nacisse (2012). S'intégrer pour s'enrichir: Y a-t-il convergence réelle et structurelle des pays de L’UEMOA ? , pp 73-94, Ottawa: Springer.

 

 

 

Le respect du pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité de l’UEMOA

uemoaLe 8 décembre 1999, les Etats membres de l'UEMOA adoptent un pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité entre les Etats membres de l'Union. La volonté de l'Union de poser des règles d'une utilité certaine, avec des objectifs nominaux précis trouve-t-elle un écho dans le comportement des Etats membres au cours de ces dernières années ?

Rôle du pacte

La création d'une union économique est une entreprise délicate et la fixation de règles s'impose pour tenter d'atteindre un optimum communautaire. L'enjeu est double. D'une part, la fixation de règles permet d'éviter les comportements de resquilleurs[1]. Si l'on considère la monnaie unique comme un bien commun, on pourrait qualifier de passager clandestin celui ou ceux des Etats membres qui profite(nt) des bénéfices apportés par la monnaie sans se soucier du coût de la viabilité de la zone monétaire à savoir principalement la maîtrise budgétaire. Ainsi un Etat-membre pourrait laisser filler son déficit et bénéficier par exemple de taux de financement intéressants qui tiennent compte de son appartenance à l'Union. D'autre part, ces critères à respecter poussent à uniformiser les stratégies de politiques économiques, et jouent ainsi un rôle dans l'homogénéisation des comportements politiques qui favorise la convergence. Ainsi, l'harmonisation des politiques économiques passe par le respect de critères de convergence nominaux du cadre institutionnel.

La surveillance multilatérale du respect des critères du pacte garantit alors la pérennité de l'UEMOA et sa crédibilité régionale et internationale.

Le contenu du pacte

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 La surveillance multilatérale est exercée sur deux groupes de critères : les critères de premier rang et les critères de second rang.

Le non-respect d'un critère de premier rang par un Etat entraîne la formulation de recommandations du Conseil des ministres de l'UEMOA en direction de cet Etat et l'obligation pour cet Etat de préparer en concertation avec la commission de l'UEMOA un plan de rectification dans un délai de trente jours. Pour le cas précis du critère budgétaire qui autorise seulement l'équilibre ou le surplus, des sanctions peuvent être appliquées à l'encontre de l'Etat membre transgressant la règle. Une dérogation est prévue en cas de circonstances exceptionnelles se traduisant par une chute du PIB réel de 3% ou par une baisse des recettes budgétaires de 10% par rapport à la moyenne des 3 dernières années. Le ratio d'endettement sur PIB nominal à ne pas dépasser (70%) s'entend de la somme de la dette extérieure et de la dette intérieure rapportée au PIB. Le taux d'inflation à ne pas dépasser au seuil de 3% est issu d'un compromis entre la sauvegarde de la solidité de la monnaie et le financement de l'économie. Le critère de non accumulation d'arriérés permet d'accroître la fluidité de la circulation de la monnaie et de restaurer la confiance dans les transactions commerciales.

Le non-respect des critères de second rang n'entraine pas de sanction ni même de formulation de recommandation par les organes de direction de l'UEMOA. Cependant, leur respect joue un rôle important dans la stabilité macroéconomique de l'Union.

Nous remarquons l'importance donnée dans ce pacte à la surveillance de la politique budgétaire des Etats-membres dans ce contexte de politique monétaire commune. En effet, sur huit critères, sept concernent les finances publiques dont le critère-clef est le solde budgétaire. A défaut de l'avoir sous contrôle, l'Union garde le Policy-mix de politique monétaire/budgétaire sous surveillance.

Nous avons expliqué ci-avant en quoi la fixation de critères de convergence nominaux était utile à l'Union. Toutefois, il ne suffit pas de fixer des critères et de surveiller leur respect. Encore faut-il que les pays membres les respectent dans les faits.

Le respect des critères du pacte

Ces critères ont-ils été respectés au cours de ces dernières années ?

Afin de répondre à cette question nous nous intéressons aux tableaux de "Position indicative des Etats par rapport aux critères de surveillance multilatérale" répertoriés dans les rapports de la zone franc de la Banque de France sur plusieurs années. Ils se focalisent sur le respect des critères de premier rang par les différents pays membres.

uemoa_viroleauL'analyse de ces documents nous permet d'affirmer que entre 2004 et 2011 (ci-contre les cas de 2010 et 2011), on perçoit un effort des Etats à respecter les critères du pacte (aucun pays n'est dans le non respect de tous les critères sur plusieurs années) mais quand bien même nous focalisons l'attention sur les critères de premier rang, c'est-à-dire ceux qui ont été reconnus comme revêtant le plus d'importance, un respect total et durable des critères par les Etats membres n'est pas observé.

Un retour historique est ici approprié et nous permet de préciser qu'en 1999, à la signature du pacte, un délai d'adaptation des Etats membres aux critères de convergence nominaux alors édictés avait été prévu. Ce délai courrait initialement jusqu'au 31 décembre 2002. Les Etats membres n'étant pas parvenus à respecter les critères en 2002, le délai d'adaptation a été repoussé au 31 décembre 2005. En 2005, les mêmes causes produisant les mêmes effets, l'échéance fût repoussée au 31 décembre 2008 puis, de nouveau pour les mêmes raisons, au 31 décembre 2013.

En 2006, les critères ont été assouplis en ce sens qu'il est admis que le respect du pacte s'entendait par le respect des critères de premier rang par une masse critique d'Etats membres. Cette notion de masse critique n'est précisée qu'en 2007 par le règlement N°10/2007/CM/UEMOA comme étant à comprendre par un ensemble d'Etats membres au nombre minimum de quatre et dont la somme des PIB est au moins égale à 65% du PIB de l'UEMOA.

Les critères du pacte ont été conçus dans le but de créer un environnement de convergence. L'examen du respect de ces critères nous amène à qualifier de très modéré le respect du pacte par l'ensemble des Etats membres.

L'objectif de cet article était de faire un simple état des lieux du respect du pacte par les pays membres de l'UEMOA. Ces constats peuvent servir de point de départ à une étude plus large qui consisterait à déterminer le coût macroéconomique pour la sous-région de ce non-respect des critères du pacte. Ceci afin de prendre conscience du poids des décisions économiques affectant ces critères et d'influencer dans l'idéal les décideurs politiques.

Franck VIROLEAU


[1]  Sur la notion de resquilleur, cf. Olson, M. (1971). The logic of collective action: public goods and the theory of groups. Rev. ed. New York: Schocken Books.

 

 

 

 

Le secteur financier de l’UEMOA serait-il en retard par rapport au reste de l’Afrique subsaharienne?

Considérée comme l’une des zones les plus dynamiques d’Afrique, bien que n’exploitant pas de pétrole, l’UEMOA accuse cependant un retard assez important par rapport aux autres zones d’Afrique subsaharienne sur le plan financier. Le cadre macroéconomique, la règlementation, la disponibilité d’information sur les prêteurs et d’infrastructures sont autant de facteurs qui induiraient ce retard. Ceci appelle à des réformes, pour soutenir le secteur et optimiser ses retombés pour cette zone qui va rythmer l’Afrique sur les années à venir, selon la BAD.


une_uemoaLe rôle important du développement financier pour la croissance est bien connu. Selon une étude de Khan et Senhadji (2000), les pays ayant développé leur secteur financier tendent à croître plus rapidement. En effet, le développement du secteur financier favorise l’accès au crédit, permettant ainsi de soutenir l’entreprenariat et la mobilité du facteur travail, vital à la création de richesses.

En Afrique sub-saharienne, le secteur financier présente des situations assez différentes suivant les pays ou groupes régionaux. L’UEMOA, qui est considéré comme l’une des zones d’Afrique qui va rythmer la dynamique du continent sur les prochaines années[1], constitue l’une des zones où le secteur financier a du mal à émerger, bien qu’étant une union monétaire. Le taux de bancarisation au sein de l’UEMOA peine à passer le cap des 20% (objectif de la BCEAO depuis 2010)[2]. Le crédit octroyé au secteur privé (en % du PIB)[3] est à peine passé de 13% en 2000 à 20% en 2011, alors que le taux moyen dans les autres pays non exportateurs de pétrole d’Afrique subsaharienne a quasiment doublé entre 2000 et 2011, passant de 22% a 41%. Des études ont prouvé que les banques dans l’UEMOA sont très réticentes à offrir des crédits malgré un niveau faible d’inflation et la surliquidité du système[4]. Ces mêmes études pointent du doigt le manque d’informations sur la solvabilité de leurs clients comme la principale raison.

Il faudrait donc tenter de renforcer le secteur financier dans l’UEMOA, tout au moins le placer au niveau des autres pays du continent, pour tenter d’intérioriser et de rendre durable cette dynamique de l’UEMOA, qui est jusque là porter par les ventes d’or et d’autres produits miniers. Pour ce faire, il sera nécessaire d’identifier les facteurs qui induisent ce retard de l’UEMOA par rapport au reste de l’Afrique sub-saharienne. A cet effet, il a été considéré un pool de 8 pays non exportateurs de pétrole et dont les populations ont bénéficié d’un revenu moyen croissant assez soutenu (entre 3 et 6%) par an sur les 10 dernières années[5].

Quels facteurs expliquent le retard de l’UEMOA sur les autres pays d’Afrique subsaharienne ?

Kunt (2006) a identifié un certain nombre de facteur pouvant expliquer les différences de performance du secteur financier entre deux pays : d’une part des facteurs non influençables par les politiques et d’autre part ceux qui sont influencés par les politiques économiques.. Cette deuxième catégorie concerne toutes réformes visant à réguler ou à promouvoir le secteur financier ou à maitriser l’inflation ; alors que la première est relative aux facteurs tel que le niveau de développement (mesuré par le revenu moyen par habitant), la taille de la population. Une étude a trouvé que le faible développement du secteur financier de l’UEMOA serait en lien avec la faiblesse de son cadre réglementaire[6]. Sur les bases de ces différents résultats et des facteurs, qui selon Kunt, peuvent expliquer les différences de développement du secteur financier entre pays, il sera déterminé ce qui explique la différence entre l’UEMOA et le reste de l’Afrique subsaharienne. Pour ce faire, il faudra évaluer l’impact sur le crédit au secteur privé de la législation et l’institutionnel, du cadre macroéconomique et des infrastructures (essentiellement l’accès à l’internet) et les prix.

table_uemoaSuivant les critères retenus, les pays de l’UEMOA semblent être de loin les moins performants de l’Afrique subsaharienne. Et selon les simulations[7], certaines de ces différences sont bien à l’origine des écarts observés entres le niveau de développement du secteur financier de cette union monétaire et le reste de l’Afrique subsaharienne.

Le principal constat est que le secteur financier de l’UEMOA est effectivement le plus faible en ASS. L’influence du cadre macroéconomique sur le développement financier : alors que le niveau de revenu a un impact positif sur le développement financier, l’inflation semble plutôt y constituer une entrave. Aussi tous les facteurs relatifs à l’environnement réglementaire ou politique et à la disponibilité d’infrastructures ont un impact sur le développement du secteur financier. Seule la disponibilité de l’information sur les prêteurs ne semble pas suffire pour renforcer le secteur financier. Pris ensemble (cas f), la stabilité politique ne revêt plus d’importance. Ainsi, le cadre macroéconomique, la règlementation, la disponibilité d’information sur les prêteurs et d’infrastructures sont autant de facteurs qui induisent le retard sur le plan financier de l’UEMOA par rapport au reste de l’Afrique subsaharienne.

Améliorer le cadre réglementaire et accélérer les réformes en cours

La nécessité d’améliorer le secteur financier au sein de l’UEMOA est déjà une réalité que sa Banque Centrale (la BCEAO) a à cœur et qui l’ont amené récemment à adopter avec l’appui de la Société Financière Internationale un cadre de financement visant à installer dans les pays membres de bureau d’information sur le crédit. Par ailleurs, un ensemble de projets qui visent à augmenter la connectivité au sein de la zone et à promouvoir l’utilisation des TIC (notamment internet) au sein des pays membres est en cours. Alors que les autres pays de l’Afrique subsaharienne surfent sur la vague du mobile-banking, ceux de l’UEMOA peinent encore à décoller. Ainsi tout laisse penser que l’aboutissement de ces projets, visant à doter l’Union de mécanismes d’information sur le crédit et à assurer la disponibilité de l’internet tout au moins, offrira au secteur financier  de cette zone des opportunités nouvelles et innovantes pour son développement.

En sus de ces projets, il est nécessaire de repenser le cadre réglementant l’exercice d’une activité bancaire ou financier au sein de l’UEMOA – en adoptant une position plus ouverte et moins centrée sur la politique monétaire et de contrôle de l’inflation –, qui pourrait d’une part favoriser la concurrence entre les banques et garantir l’ouverture aux différents agents économiques.

Somme toute, l’UEMOA accuse un retard assez important par rapport aux autres pays d’Afrique subsaharienne sur le plan financier, en raison de sa règlementation bancaire et du manque de dispositif permettant aux banques de s’informer sur les risques relatives aux différents agents, notamment les entrepreneurs. Ce qui crée un manque à gagner pour cette union monétaire, qui a su poser les bases de l’intégration en assurant le mouvement des personnes et des capitaux, et qui bénéficie aujourd’hui d’une dynamique de croissance assez soutenue. Si des efforts sont en cours pour renforcer l’émergence du secteur financier de l’UEMOA, il n’en demeure pas moins qu’il faille encore entreprendre des réformes pour améliorer le cadre réglementaire de l’activité financière mais aussi pour consolider les acquis des différents projets mis en place pour assurer la réalisation de cet objectif.

 

Foly S. ANANOU

 

 

 

 

 


[1] African Economic Report. 2013

 

 

 

 

[2] Rapport 2012 de la Commission Bancaire de l’UEMOA

 

 

 

 

[3] Mesure par excellence du développement financier

 

 

 

 

[4] Demetriades et Fielding (2011). "Why Do African Banks Lend so Little?" Discussion Papers in Economics 11/19, Department of Economics, University of Leicester.

 

 

 

 

[5] Botswana, Cap Vert, Ethiopie, Maurice, Mozambique, Rwanda, Tanzanie et Uganda

 

 

 

 

[6] Ghura, Kpodar et Singh (2009). "Financial Deepening in the CFA Franc Zone:The Role of Institutions," IMF Working Papers 09/113, International Monetary Fund.

 

 

 

 

[7] Estimation avec la méthode des moindres carrés généralisés sur données de Panel. Les résultats des estimations sont disponibles sur demande.

 

 

 

 

Le bilan de l’UEMOA

 

Pays membres de l'UEMOA.
 
Le 10 janvier 1994 à Dakar, les Chefs d’Etat et de Gouvernement des pays de l’Afrique de l’Ouest ayant en commun l’usage du franc CFA (Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Mali, Niger, Sénégal et Togo, auxquels viendra s’ajouter la Guinée-Bissau à partir de 1997) signaient un traité de portée historique : l’instauration de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), prolongement de l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA). Le lendemain, le franc CFA était dévalué, prenant totalement de court des consommateurs qui virent les prix passer du simple au double du jour au lendemain. Un choc terrible, politiquement mal géré (bien qu’économiquement nécessaire) et dont la mémoire populaire a gardé des traces vivaces. Entachée de ce « pêché originel », l’UEMOA n’aurait pu commencer sous de plus mauvais auspices. Sur ce point, nul doute que la concomitance des deux événements aura joué en défaveur de la jeune institution ouest-africaine. Le caractère malencontreux du timing initial ne saurait cependant faire oublier la pertinence évidente de la création de l’UEMOA. Bien plus encore que le bien-fondé du projet, son caractère de nécessité. 
 
Une union indispensable
 
Ce besoin d’union économique et monétaire à l’échelle ouest-africaine repose sur un constat simple : jusqu’en 1994, il n’existe qu’une union monétaire (UMOA) regroupant les pays de la zone ayant pour devise le franc CFA, dont la gestion est pilotée par la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Mais la dimension uniquement monétaire de l’union limite de facto les ambitions et le champ de compétence de l’UMOA.  Surtout, elle néglige l’importance cruciale d’une intégration économique élargie et effective au sein de la zone. Un préalable indispensable à une dynamique durable de croissance et à une convergence économique structurelle des pays membres de l’Union à long terme. A la différence par exemple de l’Union européenne qui a opté pour une approche gradualiste visant dans un premier temps à assurer une intégration économique avancée avant de mettre en place une union monétaire (avec l’euro), l’instauration d’une union monétaire ouest-africaine a d’abord acté un fait historique (l’existence d’une monnaie commune, le franc CFA pour les anciennes colonies françaises) avant de consolider ce socle commun par une approche globale d’intégration économique : l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).   Le traité instituant l’UEMOA en 1994 complète ainsi celui de l’UMOA (qui date de 1962) et fait de la BCEAO et de la BOAD (Banque ouest-africaine de développement) des institutions spécialisées autonomes.
 
Avec près de deux décennies de recul et une approche nuancée des évolutions économiques  qui ont depuis pris place, l’heure du bilan est désormais venue. Confronter de façon objective et balancée les réalisations de l’UEMOA à l’aune des intentions initiales affichées : un exercice que se propose ce présent article. Tant pour mesurer le chemin accompli que pour percevoir les insuffisances et blocages rencontrés.
 
Un bilan en demi-teinte
 
Evoquant son mandat de près de 8 ans à la tête de la Commission de l’UEMOA au cours d’une conférence de presse tenue à Bamako en juin 2011, Soumaïla Cissé (remplacé depuis par le sénégalais Cheikh Adjibou Soumaré. Voir ici son interview-bilan) remarquait en guise de préambule que « l’UEMOA revenait de loin », faisant directement allusion au contexte économique tendu consécutif à la dévaluation du franc CFA au moment de la création de l’union en 1994. Il fallait trouver dans cette situation délicate les mécanismes les plus appropriés (système de compensations financières notamment pour les pays touchés par cette dévaluation)  pour faire face à la nouvelle donne. Passé ce premier cap difficile, restait à mettre en place les différents nouveaux organes de l’UEMOA : la Cour de Justice, la Cour des Comptes, le Comite interparlementaire (amené à devenir le parlement de l’Union), la Chambre consulaire régionale (lieu privilégié de dialogue entre l’UEMOA et les operateurs économiques privés). Enfin, jeter les bases d’une intégration économique effective. Dix huit ans plus tard, l’UEMOA peut à bon droit se targuer d’un certain nombre de réalisations.  Même si il reste encore nombre de chantiers en suspens.


 
Siége de l’UEMOA à Ouagadougou (Burkina-Faso)
 
Les principaux organes (Commission, Cour de justice, Cour des Comptes, Comité interparlementaire, Chambre consulaire) et institutions autonomes (BCEAO et BOAD) de l’UEMOA fonctionnent de façon satisfaisante et la plupart des observateurs s’accorde à reconnaitre la relative efficacité des politiques et mesures mises en œuvre.  L’UEMOA dispose en outre d’un budget de fonctionnement convenable, gage d’une certaine marge de manœuvre.  Ses ressources pour 2011 s’élevaient ainsi à 140 milliards de francs CFA (environ 280 millions de $), moyens budgétaires équivalents à ceux de l’Union africaine (UA) et à comparer avec les 67 milliards de francs CFA (environ 130 millions de $) de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). L’UEMOA a cependant les défauts de sa jeunesse : son potentiel d’actions n’est pas encore pleinement exploité et sa communication institutionnelle est perfectible. La Cour de Justice traite ainsi peu d’affaires (malgré les avantages évidents d’avoir un juge en dernier ressort capable d’arbitrer les conflits à l’échelle de toute la zone UEMOA) et les travaux de la Cour des Comptes tout autant que du Comité interparlementaire restent relativement confidentiels.
 
La coordination des politiques sectorielles nationales a fortement progressé et est devenue une réalité dans nombre de projets à vocation régionale, qui se présentent sous la forme de programmes d’investissements portant sur les infrastructures, les télécoms, l’exploitation énergétique…Ainsi, sur la période 2006-2010, leprogramme économique de l’UEMOA a financé 63 projets d’intégration régionale pour un montant total de près de 3.000 milliards de francs CFA (environ 6 milliards de $). Et le prochain plan sur 2011-2015 promet d’être en hausse sensible, tant en raison de la reprise économique que du grand retour de la Côte d'Ivoire sur la scène économiques ouest-africaine après plus de dix ans de blocage interne. Nul ne contestera cependant que les besoins en la matière sont immenses et que les efforts communautaire de l’UEMOA, combinés aux programmes individuels de chaque pays, ne comblent pour l’heure que très partiellement les attentes des populations.
 
Entré en vigueur le 1er janvier 2000, le tarif extérieur commun (TEC) a pour sa part permis une meilleure protection de la production communautaire et un accroissement incontestable des échanges commerciaux au sein de la zone UEMOA, même si la part du commerce intra-communautaire reste faible (environ 15 %). De ce point de vue, il y a bel et bien eu un renforcement de la compétitivité des pays membres à l’intérieur de l’UEMOA, ces derniers étant partiellement protégés de la concurrence étrangère grâce au tarif extérieur commun. En revanche, sur les marchés internationaux, on ne peut encore parler d’une progression significative de la compétitivité ; les données empiriques ne validant pas en l’état actuel des choses une amélioration significative de celle-ci. Le TEC constitue en tous les cas les prémices inédites d’une politique commerciale extérieure commune qui permet à l’UEMOA de disposer d’une compétence quasi-exclusive dans la conclusion d’accords internationaux et de défendre ainsi au mieux les intérêts de l’ensemble de la zone.
 
Enfin, axe majeur de l’ambition de l’UMEOA, le marché commun basé sur la libre circulation des personnes, biens et capitaux est quant à lui un succès partiel. Certes, l’UEMOA a pris l’ensemble des dispositions permettant aux ressortissants d’un Etat membre de bénéficier sur le territoire de l’Union de la liberté de circulation, de résidence et de droit d’établissement. Le principe est globalement appliqué et la circulation est de facto plus fluide qu’avant la création de l’UEMOA. Mais dans la pratique, tracasseries administratives et barrières en tous genres sont encore fréquentes aux frontières. Tant pour les personnes que pour les marchandises. La situation est comparativement bien meilleure pour les flux de capitaux. La mise en place de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) à partir de 1996, a de plus permis de disposer d’un marche financier structuré (actions et obligations) au sein de la zone. 
 
Une union qui reste à affermir
 
Près de 20 ans après sa création, l’UEMOA a incontestablement fait du chemin. La liberté de circulation des personnes, des biens et des capitaux, en dépit de quelques contrariétés, est dans l’ensemble effective. Les institutions communautaires fonctionnent convenablement. Les cadres juridiques, fiscaux, commerciaux et douaniers ont été harmonisés. Et la coopération communautaire, sur bien des aspects essentiels (commerce, programmes d’investissements sectoriels), est une réalité. Sans parler de ce qui semble depuis fort longtemps une évidence dans la zone UEMOA, mais qui reste pour beaucoup encore un rêve inaccessible sous d’autres latitudes : l’usage d’une monnaie commune.  Comparée à d’autres expériences sous-régionales africaines (CEDEAO, UMA, CEMAC, SADC), l’UEMOA  tire assurément son épingle du jeu. Dans le cas en l’espèce de l’Afrique de l’Ouest, et malgré sa relative jeunesse, l’UEMOA a ainsi mis en œuvre avec plus ou moins de succès sur le plan économique ce que la CEDEAO se propose de réaliser depuis près de 40 ans (entre autres missions). Un parallèle cruel pour la grande organisation intergouvernementale basée à Abuja (Nigeria). Aussi, de l’avis de la plupart des observateurs, l’UEMOA constitue l’une des intégrations régionales les plus avancées et prometteuses du continent (le cas de la communauté d’Afrique de l’Est est aussi instructif).
Tableau comparatif des organisations regionales africaines
Tableau comparatif des organisations régionales africaines
 
Reste in fine la question essentielle : jusqu'à quel point la mise en place de l’UEMOA a-t-elle permis d’enclencher un cercle vertueux de croissance et d’intégration, objectif ultime de l’Union ? Sur la période allant de 1980 à 1994, les membres de l’UMOA (remplacée depuis par l’UEMOA) ont enregistré une croissance économique annuelle de 2.4 %. Les pays adhérents à l’UEMOA ont pour leur part vu celle-ci être portée à 4.3 % en moyenne annuelle sur la période 1994-2008 (lire aussi à ce sujet un précédent article sur la question). Un quasi-doublement, mais qui doit cependant être restitué dans un contexte plus large. Cette croissance tendanciellement supérieure peut aussi être constatée sur le reste du continent, en dehors de la zone UEMOA, et s’explique principalement par une modification des termes de l’échange en faveur de l’Afrique (hausse prolongée du cours des matières premières, principales ressources des pays africains, à partir du début des années 2000). En revanche, une plus grande stabilité macro-économique est vérifiée dans la durée au sein de l’Union. Des résultats qui laissent à penser que si l’Union économique et monétaire ouest-africaine n’accélère intrinsèquement pas sensiblement la croissance, elle constitue à tout le moins un filet stabilisateur qui lisse partiellement les aléas de la conjoncture.
 
En revanche, il existe toujours de profondes disparités économiques structurelles entre pays pour parler d’une réelle convergence au sein de la zone. Certains pays tels que la Côte d'Ivoire ou le Sénégal sont ainsi sensiblement plus favorisées que d’autres sans accès à la mer, à l’image du Burkina Faso ou du Niger. Une asymétrie qui perdurera probablement pendant encore longtemps.
 
Les vents conjoncturels actuels semblent pourtant s’annoncer favorables à l’UMEOA. Après le creux de la récession de 2008-2009, la croissance a repris de plus belle. Il est vrai que celle-ci est toujours portée par les mêmes bons fondamentaux (cours des matières premières bien orientés, accroissement de la consommation et des investissements, environnement macro-économique stable) que ceux précédant la crise. Une situation favorable qui pousse la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) à  tabler sur une croissance d’au moins 5.3 % cette année dans l’ensemble de la zone. Encore plus optimiste, une étude de la banque Ecobank va même jusqu'à pronostiquer une croissance moyenne annuelle de 7.8 % au cours des trois prochaines années pour la zone UMEOA.
 
Une quasi-euphorie qui malgré les incertitudes actuelles pesant sur le Mali et la Guinée-Bissau, s’expliquent avant tout par un facteur décisif : le retour au premier plan de la Côte d'Ivoire sur la scène ouest-africaine. Après plus d’une décennie de crise interne, la relance de la locomotive ivoirienne (plus de 30 % du PIB de la zone) promet d’entrainer dans son sillage l’ensemble du train de l’UEMOA. Une reprise forte et durable de l’éléphant ivoirien qui doit encore être confirmée, mais dont la réalisation permettrait de consolider encore un peu plus les réalisations déjà accomplies par l’UEMOA. 
 
                                                                                                                                                         Jacques Leroueil

Vers une dévaluation du Franc CFA ?

Au regard de l’évolution de l’euro par rapport au dollar américain, il est possible que les pays de la zone franc subissent une perte de compétitivité-prix. Ainsi, une dévaluation du franc CFA est envisageable. Cependant, les indicateurs économiques actuels de la zone franc ne révèlent pas la nécessité d’une telle dévaluation. Au contraire, ils suggèrent une dégradation de la situation économique suite à une dévaluation.

Jusqu’à présent, d’importantes discussions normatives ont eu lieu sur le fonctionnement de la monnaie commune au pays d’Afrique francophone, le franc CFA. Il repose sur quatre piliers dont la parité fixe avec le franc Français et par conséquent avec l’euro, la libre convertibilité, la centralisation des réserves au Trésor Français et enfin  la libre circulation des capitaux. Dans un contexte où l’euro s’apprécie par rapport au dollar américain, il y a des craintes sur une probable perte de compétitivité-prix des pays de la zone Franc. Compte tenu des conséquences d’une telle politique de change, il importe de replacer les faits dans le cadre de la théorie économique afin de mieux comprendre l’opportunité d’une dévaluation du franc CFA.

La dévaluation intervient dans un contexte de parité fixe. Cependant, pour mieux comprendre les conditions qui président à son occurrence, il faut se placer dans le cas d’un régime de change complètement flexible. La monnaie peut alors fluctuer au gré de l’évolution de la balance courante[1] et de la balance des capitaux[2]. Ces fluctuations sont économiquement justifiées car elles permettent à la monnaie de s’ajuster aux échanges afin de maintenir une neutralité avec les échanges intérieurs. Ainsi, une augmentation du flux nets des capitaux, des biens, des services ou des transferts va se traduire par une appréciation de la monnaie. Dans le cas inverse, on assiste à une dépréciation de la monnaie.

La mise en place d’une parité fixe suppose alors que ces mécanismes de marché sont entièrement contrôlés par la banque centrale qui peut intervenir par le biais des outils de la politique monétaire pour reproduire le type de mécanisme auquel on aurait assisté en change flexible. Ainsi, une dévaluation est nécessaire si les flux nets sont en constante diminution pour annihiler l’effet d’une perte de la compétitivité-prix ; et de la faiblesse de la rentabilité des investissements étrangers.

Dans la zone Franc, la situation diffère selon les deux groupements régionaux, l’UEMOA[3] et l’UMAC[4], de même qu’au sein de chacune de ces unions monétaires. D’abord, la plupart des pays des deux zones ont une balance courante déficitaire à l’exception de la Côte d’Ivoire dans l’UEMOA et de la Guinée-Equatoriale dans l’UMAC. Sans ces deux pays, on constate qu’en moyenne, la balance courante est plus déficitaire et instable dans la zone UMAC que dans la zone UEMOA, comme le montre le graphique ci-contre. On note une tendance légèrement décroissante dans l’UEMOA ; tandis qu’elle est globalement croissante dans l’UMAC à l’exception des années 2009 et 2010. La situation dans les deux pays extrêmes est bien différente. Ils enregistrent contrairement à leur zone d’appartenance une balance courante presque excédentaire et en forte croissance notamment en Guinée Equatoriale. Il en résulte que la balance courante dans les deux zones ne suit pas une tendance à la baisse pouvant justifier la mise en œuvre d’une dévaluation.

Par ailleurs, la situation économique qui prévaut actuellement n’est pas similaire à celle qui prévalait avant la dévaluation de 1994. La différence vient notamment de la situation dans les deux pays aux situations extrêmes. En fait, la Côte d’Ivoire et la Guinée Equatoriale avaient toutes deux des balances courantes déficitaires avant la dévaluation de 1994. Cela pouvait servir de justification à une dévaluation puisque le solde des échanges extérieurs était globalement déficitaire dans les deux zones, de même qu’au Comores. Aujourd'hui, ces deux pays ont une balance excédentaire.

Quant à la balance des capitaux, les données du FMI montrent une légère croissance des IDE dans la zone Franc. Ainsi, la situation de la balance des capitaux ne peut pas non plus justifier une dévaluation du CFA même si l'hypothèse selon laquelle la croissance des IDE aurait été plus forte en l’absence d’une certaine surévaluation du CFA est plausible.

Bien que la situation des indicateurs économiques ne soit pas favorable à une quelconque dévaluation, l'on peut essayer de mesurer l’enjeu d’une telle politique. Dans le court-terme, on devrait s’attendre à une dégradation significative de la balance courante comme ce fût le cas dans l’UMAC après la dévaluation de 1994. Cette dégradation est notamment due au renchérissement du prix des importations ; l’augmentation du volume des exportations n’intervient que dans le long-terme. Dès lors, on estime que la balance courante retrouvera son niveau structurel dans plus de 10 – 15 ans.

L’augmentation du prix des importations dans le court-terme affecte de manière permanente les prix à la consommation. En effet, le renchérissement des prix à l’importation est reporté sur les prix de vente. Sachant que la plupart des produits de consommation, et même de première nécessité, est importée, une forte inflation est à craindre. On assistera certainement à l’effondrement du pouvoir d’achat des ménages et par conséquent à davantage de pauvreté. Les conséquences politiques d’une telle situation peuvent être désastreuses notamment à cause de la fragilité des gouvernements actuels.

Par ailleurs, une dévaluation va alourdir le poids de la dette extérieure pour les pays de la zone franc, qui consacrent en moyenne 15%[5] de leurs recettes d’exportation au service de la dette. Dans la mesure où le volume des exportations ne change pas dans le court-terme et que la valeur des exportations est moindre, la part des exportations dédiée au paiement du service de la dette sera encore plus importante. Il en est de même pour le principal de la dette qui verra sa valeur en monnaie locale augmenter.

Malgré les inconvénients liés à une dévaluation du CFA, il existe un gain dans le long terme sur le volume des exportations. Puisque celles-ci deviennent moins chères, leur demande augmente et se traduit par une augmentation des exportations, sous l’hypothèse que les capacités de production et la demande existent. Autrement, dans le cas où l’offre est limitée, ce qui est souvent le cas, les prix seront réajustés vers la hausse pour refléter leur niveau avant la dévaluation; ce qui limite l’augmentation attendue du volume. Il en résulte donc que dans le meilleur des cas, une dévaluation du CFA aura un effet neutre sur la balance courante dans le long-terme.

La seule composante sur laquelle une dévaluation du CFA peut avoir des effets positifs est le transfert des migrants ; notamment celui des résidents de la zone euro. Ces derniers vont bénéficier d’une augmentation significative de la valeur en CFA de leurs épargnes et pourront donc envoyer davantage de fonds vers leur pays d’origine. Cependant, l’augmentation du coût de la vie dans la zone franc risque d’éroder ce gain.

En définitive, il ressort d’une part que les indicateurs économiques actuels dans les pays de la zone franc ne justifient pas une dévaluation de la monnaie unique. D’autre part, si elle intervenait, une dévaluation du FCFA aurait de sérieuses conséquences tant économiques que politiques pour les pays de la zone. En vertu de ces deux conclusions, une dévaluation du FCFA ne peut provenir que de raisons indépendantes de la situation économique des pays de la zone franc.

Georges Vivien Houngbonon


[1] Solde des échanges de biens, de services et des transferts.

[2] Solde des flux de capitaux (investissements direct étrangers et placements spéculatifs)

[3] Union Monétaire Ouest Africaine

[4] Union Monétaire d’Afrique Centrale

[5] Perspectives Economiques de l’Afrique : http://www.africaneconomicoutlook.org/en/data-statistics/